INTRODUCTION
Selon Mark, Henry, et Julnes (2000), l’évaluation de la
formation dans l’entreprise vise principalement quatre
buts : démontrer la pertinence et la valeur de la formation;
améliorer la qualité des programmes et de l’organisation
de la formation; vérifier la conformité des programmes
aux diverses attentes, normes ou standards; et dévelop-
per ou tester des connaissances nouvelles. C’est donc
dire qu’une entreprise qui évalue sa formation devrait
être plus en mesure d’en constater et contrôler les résul-
tats et d’améliorer de manière soutenue ses pratiques.
Il convient ici de bien distinguer entre « évaluer » et « me-
surer ». L’évaluation consiste essentiellement à porter un
jugement sur la valeur de l’objet à évaluer. Ce jugement
peut s’appuyer sur des constats, des impressions ou des
mesures. Il est donc possible d’évaluer sans mesurer,
ce que nous faisons couramment. Par exemple, nous
n’avons pas besoin de prendre des mesures d’espace,
de volume ou autres pour évaluer si une chambre d’hôtel
nous convient. Par ailleurs, la mesure est essentielle-
ment associée à l’attribution de valeurs numériques et
peut s’avérer parfois nécessaire à une bonne évaluation.
Ainsi, il est certainement plus sage de s’appuyer sur des
mesures de superficie lorsque vient le temps d’évaluer la
valeur d’un terrain. Cette recension des écrits couvre un
ensemble de pratiques d’évaluation qui peuvent ou non
s’appuyer sur des mesures.
On peut regrouper les pratiques d’évaluation de la for-
mation en deux catégories principales : les pratiques for-
melles et informelles. Les pratiques formelles d’évaluation
de la formation peuvent se définir comme étant toutes
les pratiques structurées et explicites visant à établir un
jugement sur la valeur d’un processus ou produit de la
formation. Par exemple, l’utilisation d’un questionnaire
en vue d’évaluer la satisfaction des participants à une
activité, même si elle est occasionnelle, constitue une
pratique formelle d’évaluation de la formation. Il en est de
même de l’observation systématique du comportement
d’un employé en poste de travail à l’aide d’une grille.
Les pratiques informelles d’évaluation de la formation
regroupent plutôt les pratiques spontanées, non structu-
rées, implicites ou explicites, visant elles aussi à établir
un jugement sur la valeur d’un processus ou produit de
la formation. Par exemple, le jugement spontané, sans
aucun support technique et non consigné d’un compa-
gnon sur la performance de son apprenti constitue une
pratique d’évaluation informelle. Il en est de même des
propos recueillis dans le corridor par un responsable
sur la qualité d’une activité de formation qui se termine.
Jusqu’à maintenant, la littérature scientifique s’est surtout
centrée sur les pratiques formelles d’évaluation de la for-
mation. Néanmoins, notre recension des pratiques a per-
mis de constater non seulement l’existence mais aussi
l’importance des pratiques informelles qui dans bien des
cas précèdent et suppléent à des pratiques formelles qui
seraient trop complexes à mettre en place.
Comme le soulignent Kraiger, Ford, et Salas (1993),
l’expression « évaluation de la formation » est elle-même
porteuse d’ambiguïté. L’évaluation de la formation peut
en effet référer à l’évaluation du processus de formation
(« training efficiency » ou efficience de la formation), à
comment la formation a été conçue et donnée. Elle peut
aussi référer à l’évaluation des résultats de la formation
(« training effectiveness » ou efficacité de la formation),
ce que les participants ont appris, ses effets sur leurs
comportements et sur l’entreprise. Ces deux sens sont
ici couverts.
Après un bref survol des raisons pouvant inciter ou non à
évaluer la formation (section 1), ce document présente le
modèle de Kirkpatrick (1959) encore fort présent dans le
monde de la formation dans l’entreprise, les principales
critiques qui lui sont adressées et des alternatives qui
y sont proposées (section 2). La section 3 fait état des
pratiques d’évaluation des entreprises américaines et
québécoises. Subséquemment, la littérature scientifique
est présentée selon cinq principaux niveaux ou critères
d’évaluation, à savoir la satisfaction, les apprentissages,
les comportements, les résultats sur l’entreprise et le
rendement financier. Enfin, la conclusion porte sur les dé-
veloppements possibles de l’évaluation de la formation.