
4
Toutefois, la Chine est confrontée à des défis sociaux et politiques tout aussi
immenses. Après être restée fermée aussi longtemps, elle doit s’ouvrir rapidement.
Après avoir sacrifié presque toute sa part historique du PIB mondial -atteignant un
niveau proche du néant à la fin de la Révolution culturelle- elle a besoin d'une
croissance rapide et durable. Pour que ce processus donne des résultats, la
croissance de la Chine doit cependant être supportable sur les plans social et
environnemental. La Chine a fait beaucoup pour réduire la pauvreté, mais elle doit
faire face à de nouveaux problèmes d'inégalités interrégionales. Ses industries
publiques et son système financier doivent être restructurés et réformés, avec les
répercussions inévitables sur l’emploi que cela implique. Son système de santé doit
être renforcé. Enfin, naturellement, les défis liés à l'environnement auxquels elle est
confrontée sont redoutables.
En ce qui concerne la politique extérieure, la mondialisation crée une liste prioritaire
de défis politiques qui ne pourront être affrontés que collectivement. Nous
partageons le même environnement et les mêmes ressources naturelles. Nous
devons faire face aux mêmes maladies et aux mêmes menaces à la sécurité
internationale.
En outre, les choix de politique intérieure d'acteurs de la dimension de la Chine ou
de l'Union européenne ne peuvent être décidés et mis en oeuvre isolément. Je
reconnais que cette affirmation bat en brèche des années d'orthodoxie chinoise sur
le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures, mais, en réalité, la
mondialisation a pour effet que les dimensions externe et intérieure ne font plus
qu'une. Nous devons tous, pays développés, émergents et en développement,
trouver une réponse appropriée à ces questions et nous devons veiller à ce que les
institutions globales renforcées et réformées -des Nations unies à l'Organisation
mondiale du commerce- nous aident.
Je ne dis pas tout ceci pour faire la leçon à la Chine, mais pour souligner que
l'engagement commun à l’ouverture des marchés auquel je souhaite voir l'Union
européenne souscrire en compagnie des dirigeants chinois dépend d'une
reconnaissance partagée des défis politiques auxquels nous sommes confrontés.
La mondialisation est dans une large mesure un phénomène économique, mais
notre vie politique et notre orientation politique détermineront si nous aboutissons à
une prospérité globale durable ou si nous débouchons sur un échec abrupt et
catastrophique, comme ce fut le cas de la dernière vague de mondialisation en
1914.
En conséquence, l'approche nuancée qui est la mienne -opposée aussi bien à la
solution du laisser-faire qu'aux modèles étatiques centralisés- souhaite l'émergence
d'une Chine prospère et connaissant le succès, en tant que membre engagé du
système international des échanges et partenaire à tous les niveaux dans la gestion
de l'impact de la mondialisation, en tant que marché nouveau et en pleine
expansion pour les investissements et exportations communautaires et en tant que
source de nouveaux produits pour les entreprises et consommateurs européens.
La mondialisation transforme notre monde
Comme je l’ai dit, le phénomène de la mondialisation n’est pas nouveau. Ce qui la
différencie aujourd’hui est le rythme et l’intensité sans précédent de l’évolution.
Notre monde est «nivelé» par des communications plus rapides et moins
coûteuses, des chaînes d’approvisionnement globales et une nouvelle dynamique
concurrentielle caractérisée par le fait que chaque partie de l'économie globale se
trouve de facto en concurrence avec chaque autre partie.