Le Consensus de Washington : Construction et Reconstruction d

Université de Lyon
Université lumière Lyon 2
Institut d'Études Politiques de Lyon
Le Consensus de Washington :
Construction et Reconstruction d'une
Légitimité
BRUYAS Benjamin
Mémoire de Séminaire
Science, Pouvoir et Société
2009 - 2010
Sous la direction de : Daniel Dufourt
Membres du jury : Daniel Dufourt Jacques Michel
Table des matières
Remerciements . . 4
Introduction . . 5
Quel Consensus pour Quelle Légitimité ? . . 9
Le Consensus Néolibéral : une construction médiatique ? . . 10
La montée en puissance des théories néolibérales . . 11
Friedman et les média : chronique d'un marketing scientifique réussi . . 12
Un Consensus scientifique difficile à atteindre . . 15
Les dix points de Williamson . . 15
Consensus ou Convergence ? . . 19
Que change le Consensus ? . . 21
Avant le Consensus : les Plans d'Ajustement des années 80 . . 21
Les années 90 : le FMI s'approprie le Consensus . . 23
Le cas de l'Argentine, ou l'échec de l'expérimentation . . 26
De 1991 à 1994 : un succès à nuancer . . 26
Les ingrédients du « Miracle Economique » . . 27
Le revers de la médaille . . 30
De 1994 à 1998 : de la crise « Tequila » à une reprise incomplète . . 32
Une crise sans remise en question de fond . . 33
Le retour des politiques sociales et les limites du système . . 34
De 1998 à 2002, ou de la crise systémique à l'abandon du modèle . . 37
Un Consensus appliqué contre vents et marées . . 38
De l'aide à l'abandon du Fonds . . 40
Après le Consensus, de la contestation au choix . . 43
Quand la crise devient théorique . . 43
Le Consensus : la crise de la simplification . . 44
Les institutions : la crise de l'arrogance . . 46
La fin du Consensus à Washington . . 49
Les réponses divergentes des institutions . . 50
La réponse de Williamson : un « Fondamentalisme des Institutions » ? . . 52
Les années 2000 : le FMI en quête de légitimité . . 56
Une adaptation très timide . . 56
Un monde sans Consensus, un monde sans Washington ? . . 59
Conclusion . . 63
Bibliographie . . 66
Revues . . 66
Ouvrages . . 67
Rapports et articles Internet . . 68
Index des abréviations . . 70
Annexes . . 71
Le Consensus de Washington : Construction et Reconstruction d'une Légitimité
4 BRUYAS Benjamin_2010
Remerciements
Je remercie tout d'abord les professeurs qui m'ont aidé à réaliser ce mémoire, Mr Dufourt et Mr
Michel, pour leurs précieux conseils et pour toutes les références qu'ils m'ont fourni.
Je remercie Mr Charbonnier, pour les contacts qu'il m'a fourni en Argentine.
Je remercie également mes proches, qui ont supporté mon humeur fluctuant au gré de la
progression de mon mémoire et n'ont cessé de m'encourager.
Enfin je remercie mes professeurs de Sciences Economiques et Sociales du lycée Claude
Lebois à Saint-Chamond, en particulier Mrs Chalayer et Goudard, qui m'ont appris à aimer les
sciences économiques. Je remercie Baruch Spinoza, dont « L'Ethique » m'a appris à raisonner et
à aimer la raison. Et je remercie une amie à la fois proche et lointaine, qui m'a appris à aimer la
passion.
Introduction
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Introduction
« Les idées, justes ou fausses, des philosophes de l'économie et de la politique ont plus
d'importance qu'on ne le pense en général. A vrai dire le monde est presque exclusivement
mené par elles. Les hommes d'action qui se croient parfaitement affranchis des influences
doctrinales sont d'ordinaire les esclaves de quelque économiste passé. » Cette phrase,
écrite par John Maynard Keynes dans son célèbre ouvrage, la « Théorie générale de
l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie » ( 1936 ), exprime l'immense importance des
productions du champ scientifique, et en particulier du champ des sciences économiques,
dans la détermination des politiques mises en œuvre par les gouvernements. En effet,
l'importance des enjeux de ces politiques fait qu'elles ont besoin, pour être acceptées
largement, de justifications théoriques solides, de façon à ce que les hommes politiques qui
les défendent puissent les présenter non comme un choix partisan, mais comme le fruit du
pur et simple bon sens, ne prêtant pas le flanc à la critique ou à la contestation.
Ce besoin de légitimité scientifique des politiques économiques a rencontré un écho
important chez certains économistes, en particulier les théoriciens de l'économie dite
néolibérale ou monétariste1, tels que Friedrich Von Hayek ou Milton Friedman pour ne citer
que les plus connus. Ceux ci, s'appuyant beaucoup sur des modèles mathématiques pour
justifier leurs hypothèses, ont en effet porté une volonté de scientifisation des sciences
économiques, cherchant à acquérir une légitimité scientifique équivalente à celle des
sciences dites « dures », par exemple les mathématiques ou la biologie, dans lesquelles
les règles établies sont considérées comme des règles de la nature, intangibles et
incontestables. De telles règles, si elles pouvaient être établies sans l'ombre d'un doute dans
le champ de l'économie, permettraient d'indiquer de manière parfaitement « scientifique »,
et donc incontestable, les politiques économiques à mener, et toute personne s'opposant à
ces dernières ne pourrait le faire que par méconnaissance ou incompréhension de la vérité
scientifiquement établie.
Avant d'étudier cette légitimité scientifique, il s'agit de la définir. Nous entendrons ici par
« légitimité scientifique » un concept proche de celui d'autorité scientifique défini par Pierre
Bourdieu dans « la spécificité du champ scientifique » ( Bourdieu, 1975, extraits disponibles
en annexe ) auquel nous ajouterons une notion extérieure au champ scientifique : celui de
la légitimité politique, c'est-à-dire de la perception positive émise par le champ politique à
propos d'une théorie, qui doit en principe faire écho à l'autorité scientifique de cette dernière.
Si celle-ci dispose d'une autorité absolue, ou tout au moins très large, et est reconnue dans
l'immense majorité du champ scientifique comme incontestable, comme par exemple la
théorie de l'évolution, soutenue par la très grande majorité des scientifiques de la planète,
alors sa légitimité politique doit, a priori, être elle aussi absolue.
De manière générale, les économistes admettent cependant que les théories
économiques ne sauraient permettre la formation de règles absolues, en raison de la grande
1 Nous considérons ici les termes « néolibéral » et « monétariste » comme équivalent en terme de base théorique, correspondant
à une volonté de diminution du rôle de l'Etat dans l'économie au profit des marchés, qui seraient selon ces écoles de pensée plus
efficaces en termes de gestion. Nous introduisons toutefois une nuance entre ces deux termes, la théorie néolibérale représentant
plutôt une simplification, ou une vulgarisation, de la théorie monétariste dans un but politique. En d'autres termes, le néolibéralisme
est le monétarisme adapté au grand public et aux média de masse.
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