Initiatives Cote d`Ivoire - Rapport synthetique diner avec Madani Tall

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Initiatives Cote d’Ivoire
La réflexion au service du développement
Reconstruction post-crise de la Cote d’Ivoire : vision de la banque mondiale
et choix de développement
Invité : M. Madani Tall, Directeur des opérations de la Banque mondiale pour la Cote d’Ivoire
Hôtel Tiama (Abidjan), 12 avril 2012
Note indicative
Think tank créé au cours du premier trimestre 2012 par une dizaine de jeunes cadres dirigeants ivoiriens, Initiatives
Cote d’Ivoire entend s’inscrire, de manière durable, dans le débat public en étant une force de propositions
apolitique qui, va contribuer de manière efficiente a la reconstruction économique de la Cote d’Ivoire ainsi qu’a la
reforme de la société ivoirienne.
Eu égard a l’importance des défis divers et multiformes à relever par le pays pour s’inscrire dans une dynamique
vertueuse de croissance durable, Initiatives Cote d’Ivoire élève au rang de devoir citoyen, son choix de faire
connaitre, chaque fois que de besoin, sa perspective sur les questions et problématiques en relation avec le
développement de la Cote d’Ivoire. Il retient comme approche d’organiser, chaque mois, un débat autour d’une
problématique économique, sociale ou politique donnée, avec pour objectif principal d’en avoir une meilleur
compréhension afin de formuler des positions et faire des propositions de solutions.
Dans cette logique, pour son tout premier débat, tenu le 12 avril 2012, Initiatives Cote d’Ivoire a eu pour invite, M.
Madani Tall, Directeur des opérations de la Banque mondiale en Cote d’Ivoire. Les échanges ont porté globalement
sur la « reconstruction post-crise de la Cote d’Ivoire : vision de la Banque mondiale et choix de développement ».
La présente note synthétise les grandes idées développées. Elle les enrichies de note de lecture de manière a élargir
la perspective et le champ de réflexion du think tank dans la formulation de ses propositions.
Avril 2012
Défis
Restaurer le leadership de
la Cote d’Ivoire
Endiguer le chômage des jeunes
Encourager l’initiative privée par le
financement des PME/PMI
Améliorer la gouvernance publique
( au sens large)
Tableau synoptiques des grandes idées développées (Résumé)
Idées directrices
Enjeux
- Il s’agit d’un défi à relever collectivement Restaurer la qualité de vie des
- La Cote d’Ivoire est le salut de toute la
populations et favoriser une projection en
sous-région
avant du pays en s’appuyant sur ses
- Savoir accompagner le développement
atouts économiques, sociaux, humains et
de manière à arrêter la saignée.
naturels.
- De contrainte sociale actuellement, le
problème du chômage des jeunes peu
Créer un environnement incitatif et
devenir rapidement une contrainte
stimulant la création de richesses et
sécuritaire et déstabilisatrice forte ;
d’emplois pour absorber le potentiel de
- L’Etat voudrait, qu’il ne pourrait créer les productivité constitué par les jeunes.
emplois nécessaires pour satisfaire la
demande de travail des jeunes.
- incertitude sur le front de la création
d’emplois et de richesses du fait du sous
Asseoir les bases objectives et solides
financement de l’économie et des
d’une croissance forte et durable sans
PME/PMI ;
laquelle la Cote d’Ivoire ne pourrait
- Le pays ne peut pas prétendre à un
réaliser son ambition légitime de devenir
certain degré de développement si une
un pays émergent.
solution pertinente et efficace n’est pas
apportée au problème du sous
financement de l’économie.
- Les politiques auxquelles la Banque
mondiale apporte son appui sont
Créer les conditions de contrepouvoir
l’émanation des Etats eux-mêmes,
objectif en mettant en place un système
-Le rôle de l’Etat est donc déterminant car de suivi/évaluation (check and balances).
il est responsable de la politique qu’il
conduit,
- Il revient aux citoyens de créer les
circonstances menant les autorités a
rendre compte de leur gestion.
Observations
Si l’initiative PPTE est un des leviers
important sur lesquels jouer, il n’est pas
suffisant. Il faut créer les conditions
générales d’une capitalisation des
capacités productives du pays.
Les jeunes représentent 36% de la
population ivoirienne. Sans occupations
professionnelles réelles, la jeunesse
constitue une bombe a retardement.
L’entrepreneuriat est un puissant moteur
de la croissance. Le processus de
création de richesses et d’emplois qui en
découle facilite la transformation
structurelle et la modernisation industrielle
des économies.
Le développement de la Cote d’Ivoire va
se faire par les Ivoiriens et les systèmes
de gouvernance qu’ils mettent en place.
La Banque mondiale, comme les autres
bailleurs de fonds, ont un rôle
d’accompagnement.
I- Introduction
1. La longue crise dans laquelle s’est retrouvée plongée la Cote d’Ivoire depuis plusieurs années est
aujourd’hui derrière elle. Malgré la subsistance, sous diverses formes, des séquelles de cette longue
période de stagnation, le pays est globalement dans une dynamique positive actuellement.
2. Sortant de crise, les efforts à faire pour le remettre sur les rails d’une croissance forte, régulière et durable
sont importants. Il est par conséquent heureux que de jeunes cadres dirigeants ivoiriens aux expertises
avérées choisissent d’assurer leur part de l’effort collectif et global nécessaire, sous la forme de réflexions
assorties de propositions constructives et pertinentes, comme c’est le cas d’Initiatives Cote d’Ivoire.
II- Défi a relever : Restaurer le leadership sous-régional de la Cote d’Ivoire
3. Le défi à relever collectivement est donc celui de la restauration du leadership sous-régional de la Cote
d’Ivoire. Car, « la Cote d’Ivoire est le salut de l’ensemble de la sous-région ». La question, à cet effet, est
donc de savoir « comment accompagner le développement pour qu’il permette d’arrêter la
dégradation de la situation générale ? »
Encadre II.1 La philosophie du PPTE, rétablir la solvabilité des bénéficiaires
L’initiative en faveur des Pays pauvres très endettes (PPTE) a été lance en 1996 pour « régler définitivement les situations
d’endettement non soutenables ». Notamment celles de la Cote d’Ivoire et de l’Argentine. Estimée a environ 6 000 milliards
de F CFA au 31 décembre 2011, le stock de la dette extérieure ivoirienne a été constitue sur plusieurs années et est à
mettre en relation avec le développement prodigieux qu’a connue le pays entre 1960 et 1980. Bon an, mal an, le service de
cette dette absorbe entre 40 et 50% des ressources budgétaires.
Le PPTE permet, via l’annulation du stock de dette extérieure de libérer des espaces budgétaires pour les gouvernements.
En effet, sa philosophie est de permettre de restaurer la solvabilité des bénéficiaires. La Cote d’Ivoire est sur la bonne voie
pour atteindre le point d’achèvement en juin 2012, synonyme d’effacement de 80 à 90% de sa dette dont une partie sera
recyclée sous forme de projets sociaux.
Un travail a été fait avec les principaux bailleurs de fonds de la Cote d’Ivoire sur un paquet de reformes, a cet effet. C’est
sur cette base que les pays débiteurs ont consenti à effacer substantiellement sa dette. Au terme du processus, la Cote
d’Ivoire va se retrouver avec une capacité d’endettement qui lui permet de négocier de biens meilleurs termes avec ses
nouveaux créanciers. Le pays pourra donc à nouveau s’endetter, mais de manière beaucoup plus saine, pour financer son
développement.
Il faut tirer les leçons du passe pour bâtir une stratégie d’endettement beaucoup plus réaliste, c’est-à-dire conforme aux
capacités financières du pays et en harmonie avec les aspirations de développement réelles des populations.
4. Cette question fondamentale sous-entend une variété d’interrogations spécifiques : Comment les jeunes
cadres ivoiriens se positionnent par rapport a l’impérieuse nécessité pour la Cote d’Ivoire de tenir
pleinement ses rôle et statut de leader naturel de la sous-region ? » ; « quel rôle pour le secteur privé dans
la restauration du leadership sous-régional de la Cote d’Ivoire ? » ; « quelle gouvernance (au sens large)
pour que la Cote d’Ivoire tienne efficacement sa place de locomotive économique et culturelle de la sousrégion ? »…
5. L’enjeu en arrière-plan de ce questionnement en cascade est d’apporter des solutions concrètes et
efficaces aux problèmes de constitution d’une base solide de croissance de l’économie nationale et du
chômage des jeunes. Actuellement contrainte sociale, le problème de l’emploi des jeunes pourrait très
rapidement se muer en contrainte sécuritaire et déstabilisatrice, si des réponses appropriées, -qui ne
peuvent découler d’une dynamique de création de richesse et de croissance-, n’y sont apportées.
III- L’emploi des jeunes et l’entreprenariat des problématiques prioritaires
6. En effet, les jeunes représentent environ 36% des 22 millions d’habitants que compte la Cote d’Ivoire. Sans
occupation réelle, cette jeunesse constitue une véritable bombe à retardement. Conséquemment, la
question du chômage des jeunes est, et demeure, une problématique prioritaire.
7. En tout état de cause, ce n’est pas l’Etat qui va créer les emplois nécessaires pour absorber tout ce
potentiel de productivité. Tout au plus créera-t-il les conditions incitatives a la création d’emplois qui devront
être exploitées et capitaliser par le secteur privé.
8. Il y a d’autant d’incertitude sur le front de l’emploi que les établissements de crédits ne soutiennent pas
véritablement l’initiative privée, notamment la création et le développement des PME/PMI. Le sous
financement de l’économie en général et des PME, qui constituent le gros du tissu industriel, étant la
traduction concrète de cet état de fait.
Encadre III.1 L’entreprenariat moteur de croissance
L’entreprenariat, est l’un des plus puissants moteurs de la croissance économique. En effet, en développant
les capacités entrepreneuriales et en facilitant la création d’entreprises on peut promouvoir le développement
de PME axées sur la croissance, qui à leur tour contribueront à la création d’emplois, à l’innovation, à la
création de valeur ajoutée et aux recettes budgétaires.
Ce processus facilite la transformation structurelle et la modernisation industrielle. En encourageant
l’entreprenariat on peut promouvoir la croissance de la productivité et aider à trouver des solutions
commerciales concrètes à des problèmes sociaux et environnementaux, par exemple à travers le
développement d’activités économiques respectueuses de l’environnement ou l’emploi de femmes, de jeunes
ou de personnes appartenant à des groupes désavantagés.
La promotion de l’entreprenariat est une stratégie d’action fondamentale des pays ayant l’économie la plus
compétitive, et elle peut contribuer au développement équitable et durable actuellement recherché.
Soutenu par l’investissement étranger, -notamment dans un contexte d’épargne intérieure insuffisante comme
celui de la Cote d’Ivoire-, le développement des entreprises locales peut enclencher un cercle vertueux de
croissance et de développement.
Source : www.unctad.org
9. Au nombre des raisons explicatives de cette situation, malheureusement générale dans la sous-région,
figure en bonne place le caractère quelque peu aléatoire de la justice et de l’application sujette a caution
des règles de droit. Mais les obstacles à l’initiative privée et a la création d’emplois à obvier sont multiples.
10. La Cote d’Ivoire ne peut valablement prétendre à un certain niveau de développement si une réponse
pertinente et efficace n’est pas apportée au problème de financement des PME/PMI et de l’économie en
général. Il s’agit également d’une problématique prioritaire. Car, en jeu sont la création de la richesse, la
création d’emplois, l’amélioration de la qualité de vie des populations…
11. Cette réponse peut prendre diverses formes. Au Sénégal, elle a pris la forme d’un programme impliquant la
Société financière internationale (SFI), l’Etat sénégalais et les établissements bancaires du pays pour
financer les PME. Le programme reposait sur deux piliers : d’une part, une structure appuyée par la SFI et
en charge du financement des études de faisabilité des PME et, d’autre part, des financements souples
accordés par la Banque mondiale a l’Etat du Sénégal qui les rétrocédait aux banques commerciales pour
financer les projets des PME. Il a été couronné de succès. Soin avait été pris de le border au préalable par
un travail sur l’environnement des affaires en aval, et, en amont, par l’incitation des PME à sortir de
l’informel pour s’intégrer pleinement dans le secteur formel.
12. Le leasing est une autre réponse au problème de la faiblesse de financement de des PME/PMI ivoiriennes
par le secteur bancaire. Il constitue une solution efficace pour les doter des premiers équipements dont
elles ont besoin pour démarrer leurs activités. Il suffit alors pour l’Etat de créer les conditions règlementaires
incitatives au développement du crédit-bail.
Encadre III.2 La problématique du sous financement des économies et des PME au sein de l’Uemoa
En Cote d’Ivoire, comme dans l’ensemble des pays de l’Uemoa, le financement de l’économie est quasiment assuré
par les établissements bancaires. Cette situation, qui trahit un développement insuffisant des marches financiers,
n’offre pas beaucoup d’alternatives de financement aux entreprises en général, et aux PME en particulier.
En effet, bien que « le secteur bancaire de l’Uemoa se caractérise par un niveau de rentabilité financière élevée, -le
résultat net des établissements de crédit est ressorti bénéficiaire de 143,4 milliards de F CFA en 2010contre 122,5
milliards en 2009-, la contribution des banques au financement des économies des Etats membres de l’Union reste
faible. Au 31 décembre 2010, les crédits bancaires ont représente 22,3% du PIB de l’Union contre 70% en Tunisie,
80% au Maroc et 145% en Afrique du Sud » indique la Bceao, dans une étude datant d’octobre 2011.
Les causes de ce sous financement bancaire des économies de l’Union sont multiples et multiformes. Elles portent,
entre autres, sur : la structure des ressources des banques, les contraintes liées a la règlementation prudentielle et
au dispositif des accords de classement, les conditions contraignantes de financement imposées par les banques,
tant en matière de taux d’intérêt que de garanties demandées ; les apports en fonds propres exigés par les
établissements de crédits aux jeunes promoteurs; les insuffisances dans les montages des dossiers de demande de
financement déposées auprès des banques ; la mauvaise gouvernance des entreprises ; l’accumulation d’arriérés de
paiements intérieurs par l’Etat qui impacte négativement le remboursement des crédits bancaires ; les incertitudes
sociopolitiques et judiciaires qui freinent le dynamisme des affaires ; les déficits de structures de refinancement des
crédits hypothécaires, d’institutions spécialisées dans le domaine du capital investissement, d’organismes d’appui et
d’encadrement des PME/PMI
Face a ces insuffisances, les défis majeurs à relever portent sur l’accroissement des financements bancaires et le
développement des marches financiers.
IV- Rôle déterminant de l’Etat, responsable de sa politique de développement
13. Le rôle de l’Etat est déterminant car, il est responsable du type de développement qu’il choisit de conduire.
Le développement de la Cote d’Ivoire ne peut conséquemment se faire que par les ivoiriens eux-mêmes
prioritairement. La Banque mondiale et les autres bailleurs de fonds sont dans un rôle d’accompagnement
des options stratégiques retenues par le gouvernement ivoirien.
14. La vision de développement a laquelle la Banque mondiale apporte son appui est celle déclinée par les
ivoiriens eux-mêmes par l’entremise de leurs autorités. Cette vision précédemment traduite au travers d’un
Document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) va être déclinée dans un Programme national
de développement (PND) en préparation. Ce nouveau document prend en compte les engagements du
DSRP et du Programme présidentiel et va servir de cadre de cohérence dans lequel les bailleurs de fonds
vont inscrire leur accompagnement.
15. Il est toutefois des évidences stratégiques que le PND ne saurait occulter. Ce sont : la diversification de la
production agricole avec le développement de la production de l’anacarde pour laquelle la Cote d’Ivoire est
1er producteur africain et l’accroissement de la part transformée localement, actuellement estimée a moins
10% de la production globale nationale ; la révision de la politique industrielle dans sa globalité dans le sens
d’une modernisation des filières ; l’optimisation et la capitalisation des potentiels supposés des filières
minières, énergétiques et pétrolières.
Encadre III.2 L’Etat, le nouveau x-factor du développement
La crise économique et financière récente a mis en lumière l’important rôle de l’investissement public,
considéré comme un instrument anticyclique et aussi comme une fonction essentielle de l’État en tant
qu’investisseur en dernier ressort.
Par ailleurs, l’investissement public est extrêmement important pour la croissance à long terme et le
développement, notamment parce qu’il contribue à l’expansion des capacités productives, stimule la
demande globale et favorise l’allocation des ressources économiques.
Les investissements dans l’agriculture, les infrastructures et dans les activités liées aux changements
climatiques sont autant d’opportunité d’interaction bénéfique entre investissement étranger et
investissement intérieur, et entre investissement public et investissement privé.
Source : www.unctad.org
V- Conclusion
16. La Cote d’Ivoire regorge d’énormes potentiels qui, s’ils sont concrétisés, devraient la propulser au rang des
économies émergentes, comme l’ambitionnent légitimement les autorités. Le pays porté actuellement par
une dynamique positive devrait atteindre, sauf cataclysme, le point d’achèvement de l’initiative PPTE au
plus tard fin juin 2012. Pour autant tout n’est pas gagné. Nombreux sont les progrès qu’il lui faut encore
enregistrer pour se positionner durablement sur une courbe de croissance forte et régulière.
17. Mais la grande chance de la Cote d’Ivoire, pour relever ce challenge, réside dans la qualité indéniable de
ses ressources humaines. Et parce qu’elle dispose, en plus des ressources naturelles, de compétences et
expertises réelles dans tous les domaines, la Cote d’Ivoire ne peut pas échouer dans la reconstruction
économique ; la réconciliation nationale ; la construction de son développement…
18. La responsabilité des citoyens est aussi importante que celle des gouvernants dans la réussite du pays à
faire a nouveau rêver, comme du temps du « miracle ivoirien ». Il leur revient donc de créer les
circonstances devant conduire les autorités publiques à rendre compte. Il y a nécessité de mettre en place
des systèmes de "check and balances".
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