Suite exacte à six termes en K-théorie pour les produits

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Mémoire de Master de Mathématiques
Fondamentales
Université Paris 7 - Diderot
K -théorie
C ∗-algèbres
Suite exacte à six termes en
pour les produits croisés de
par
Z
Clément Dell'Aiera
Directeur de mémoire : Hervé Oyono-Oyono
Jury : Salah Medhi, Hervé Oyono-Oyono, Jean-Louis Tu
Figure 1 Pavage de Penrose généré avec http ://www.spacegoo.com/penrose/
1
Résumé
Nous présentons dans ce court rapport un article de Pimsner et Voiculescu datant de 1980, dans lequel est établie une suite exacte à six
termes permettant le calcul des groupes de K -théorie d'un produit croisé
d'une C ∗ -algèbre par l'action de Z. Leurs travaux ont permis alors de
calculer ces groupes pour l'algèbre des rotations irrationnelles, ou tore
non-commutatif.
Nous commencerons par des rappels sur le cadre des C ∗ -algèbres, pour
ensuite dénir les basiques de la K -théorie et les théorèmes qui serviront
à la preuve du résultat proprement dit, qui occupe la dernière partie.
Table des matières
1 Introduction
1.1 Notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.2 Produits croisés discrets . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.2.1 Exemple : le tore non-commutatif . . . . . . . .
1.3 Rappels sur les produits tensoriels de C ∗ -algèbres . . .
1.4 Applications complètement positives et suites exactes .
2 K-théorie des C ∗ -algèbres
2.1 Dénitions et propriétés . . . . . . . . . .
2.2 La suite exacte à six termes . . . . . . . .
2.3 Produits croisés de C ∗ -algèbres . . . . . .
2.3.1 Suite exacte de Pimsner-Voiculescu
2.3.2 Extension de Toeplitz . . . . . . .
3 Suite exacte de Pimsner-Voiculescu
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17
17
21
24
3.1 La preuve originale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
3.2 Un exemple : le tore non-commutatif . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2
1
Introduction
1.1 Notations
Pour une C ∗ -algèbre A non nécessairement unitale, on note A+ la C ∗ -algèbre
unitale qui la contient en tant qu'idéal bilatère, dénie par :
A+ = {(a, λ) ∈ A × C}
(a, λ)(b, µ) = (ab + λb + µa, λµ)
(a, λ)∗ = (a∗ , λ)
et munie de la norme d'opérateur
||(a, λ)|| = sup{||ax + λx|| : x ∈ A, ||x|| = 1}.
On a alors une suite exacte :
0
A+
A
πC
C
0 .
On rappelle que pour tout semi-groupe abélien S , il existe un groupe GS , appelé
groupe de Grothendieck de S , et un morphisme de semi-groupe µ : S → GS tels
que, pour tout groupe G et tout morphisme de semi-groupe α : S → G, il existe
un unique morphisme de groupe α̃ : GS → G vériant α = µ ◦ α̃.
α
S
∃!α̃
G
µ
GS
Voici une construction explicite de GS . On considère S × S que l'on muni de la
relation d'équivalence
(x, y) ∼ (x0 , y 0 ) ssi ∃r ∈ S/x + y 0 + r = x0 + y + r.
Alors S × S/ ∼ est un groupe où la classe de (x, x) est constante pour tout
x ∈ S , et donne le neutre du groupe. L'inverse de la classe de (x, y) est quant à
lui donné par la classe de (y, x). On écrira [x] − [y] pour la classe de (x, y).
Enn, une remarque sur les limites inductives de C ∗ -algèbres. Par système inductif, on entend une famille de morphismes {φij : Aj → Ai }i>j , où i et j
sont éléments d'un ensemble partiellement ordonné, vériant la condition de
cohérence :
φij ◦ φjk = φik si i > j > k.
Il existe alors un objet universel A∞ , appelé la limite inductive algébrique du
système {Ai ; φij }, et des morphismes canoniques φi : Ai → A∞ qui rendent le
diagramme suivant commutatif :
Ai
φij
φi
φj
Aj
3
A∞
et tel que A∞ = ∪φj (Aj ). Cet objet est universel au sens où, pour tout autre
A0∞ et morphismes φ0i : Ai → A0∞ qui font commuter le précédent diagramme,
alors il existe un unique morphisme A∞ → A0∞ tel que le diagramme :
φi
Ai
0
φj φi
φij
φ0j
Aj
A∞
A0∞
commute. De plus, si chaque φ0j est injectif, la èche en pointillés l'est aussi. Et
elle est surjective si A∞ = ∪φ0j Aj .
Si x = φj (aj ),
α(x) := sup{||φij (aj )||}
i
dénit une semi-C∗-norme sur A∞ . On peut alors quotienter par l'idéal des
éléments qui annulent α, puis compléter par rapport à la norme obtenue sur le
quotient. On étend ainsi la limite inductive à la catégorie des C ∗ -algèbre. Dans
la suite de ce rapport, lorsque l'on parlera de limite inductive, cela désignera
par défaut cette construction.
1.2 Produits croisés discrets
Nous allons présenter dans cette section la construction d'un produit croisé
d'une C ∗ -algèbre A par un groupe Γ. Bien qu'il soit possible d'obtenir cette
construction dans le cas des groupes localement compacts, on se limite aux cas
où Γ discret et dénombrable.
On se donne un homomorphisme α : γ → Aut(A), et on note αs l'automorphisme donné par α évalué en s. Le triplet (A, Γ, α) dénit ce que l'on appelle
un C ∗ -système dynamique. Une paire (π, U ), où π est une ∗-représentation de
A sur un espace de Hilbert H et s 7→ Us est une représentation unitaire de Γ,
est appelée représentation covariante du C ∗ -système dynamique (A, Γ, α) si
Us π(a)Us∗ = π(αs (a)) , ∀a ∈ A, s ∈ Γ.
On considère l'algèbre des fonctions continues à support compact sur Γ à valeurs
dans A. Comme Γ est discret, c'est simplement l'algèbre A[Γ] des sommes nies
du type
X
f=
as s,
s∈Γ
que l'on munit du produit de convolution tordu dénit par
sas−1 = α(a) , ∀a ∈ A, s ∈ Γ.
L'adjoint est quant à lui déni par (as)∗ = s−1 a∗ . Cela donne explicitement,
pour f, g ∈ A[Γ] :
!
fg =
X X
s
fst−1 πst−1 (gt ) s,
t
4
f∗ =
X
πs (fs∗−1 )s.
s
Toute représentation covariante (π, U ) de (A, Γ, α) fournit une ∗-représentation
de A[Γ] par
X
π̃(f ) =
π(fs )Us .
s∈Γ
Réciproquement, toute ∗-représentation π̃ de A[Γ] dénit une représentation
covariante par π(a) = π̃(a1Γ ) et Us = π̃(1A s). Si A n'est pas unitale, on peut
utiliser une unité approché uλ de A et poser Us = limλ→∞ π̃(uλ s).
Dénition 1. Le produit croisé de A par Γ est la C ∗ -algèbre enveloppante de
A[Γ], c'est-à-dire que l'on complète cette ∗-algèbre par rapport à la norme
||f || = sup ||π̃(f )||
π̃
où π̃ parcourt l'ensemble des ∗-représentations de A[Γ].
La norme dénie est toujours majorée par s ||fs ||. Il est possible de construire
des ∗-représentations de A[Γ], donc le sup n'est pas pris sur un ensemble vide.
On peut par exemple, à partir de n'importe quelle ∗-représentation de A sur
un espace de Hilbert H , construire une ∗-représentation de A[Γ] à partir de la
représentation régulière gauche de Γ. Pour cela, on considère l'espace des suites
de carrés sommables
P
l2 (G, H) = {x : G → H :
X
||xs ||2 < ∞},
et on dénit une représentation covariante de (A, Γ, α) par :
(π 0 (a)x)s = π(αs (a))xs
,
(Λt x)s = x(t−1 s) .
Dans le cas général, ces représentations construites à partir de la représentation
régulière gauche ne susent pas à déterminer la norme sur A ×α Γ. Si on limite
le sup à de telles représentations, on obtient ce que l'on appelle le produit croisé
réduit de A par Γ. Toutefois, lorsque le groupe Γ est moyennable, le produit
croisé et le produit croisé réduit coïncident. Dans la suite de ce rapport, on
s'intéressera uniquement à des produits croisés par Z, qui est moyennable.
Le produit croisé vérie la propriété universelle suivante : pour toute représenatation covariante (π, U ) de (A, Γ, α), il existe une unique ∗-représentation de
A ×α Γ dans la C ∗ -algèbre engendrée par π(A) et U (Γ). Elle est donnée par
π̃(f ) =
X
s
puis par extension par continuité.
5
π(fs )Us
1.2.1 Exemple : le tore non-commutatif
Dénition 2. Soit θ un nombre réel. On dénit l'algèbre de rotation associée à θ
Aθ , ou tore non-commutatif, comme la C ∗ -algèbre unitale universelle engendrée
par deux unitaires u et v vériant la relation
uvu∗ = eiθ v.
Cela signie que pour toute C ∗ -algèbre A0 contenant deux unitaires u0 et v 0
vériant cette même relation, il existe un unique ∗-homomorphisme Aθ → A0
qui envoie u sur u0 et v sur v 0 .
On note Rθ l'automorphisme de C(S1 ) qui à une fonction continue sur le cercle
f associe z 7→ f (eiθ ). Alors Aθ peut être réalisée dèlement par C(S1 ) ×Rθ Z.
En eet, C(S1 ) ×Rθ Z est générée par la l'inclusion z : S1 → C (qui est un
unitaire) et un autre unitaire U vériant U zU ∗ = Rθ (z) = eiθ z . Par propriété
universelle de Aθ , il existe un unique ∗-morphisme Aθ → C(S1 ) ×Rθ Z qui
envoie u sur U et v sur z . Mais Aθ fournit une représentation covariante de
(C(S1 ), Z, Rθ ), donc il existe un unique ∗-morphisme C(S1 ) ×Rθ Z → Aθ qui
envoie U sur u et z sur v . Ces deux morphismes sont inverses l'un de l'autre et
l'assertion est démontrée.
1.3 Rappels sur les produits tensoriels de C ∗ -algèbres
Cette section présente les résultats qui seront utilisés sur les produits tensoriels
de C ∗ -algèbres. Toutes les preuves des armations non justiées peuvent être
trouvées dans le livre de Murphy [5] par exemple.
On rappelle que le produit tensoriel de 2 espaces vectoriels E et F est déni
comme l'unique (à isomorphisme près) espace vectoriel E ⊗ F muni d'une application bilinéaire π : E × F → E ⊗ F tel que, pour tout espace vectoriel W
et toute application bilinéaire φ : E × F → W , il existe une unique application
linéaire ϕ : E ⊗ F → W telle que φ = ϕ ◦ π . On note π(x, y) = x ⊗ y . Ce sont ces
éléments, appelés tenseurs élémentaires, qui engendrent E ⊗ F comme espace
vectoriel.
Le lemme suivant donne l'unicité à isomorphisme près :
Lemme 1. Soient E et F deux espaces vectoriels sur un corps K . S'il existe deux
K -espaces vectoriels V1 et V2 munis d'applications bilinéaires πj : E × F → Vj
telles que, pour tout espace vectoriel W , toute application bilinéaire E×F → W ,
se factorise uniquement via π1 et π2 , alors V1 et V2 sont isomorphes en tant que
K -espaces vectoriels.
V1
π1
E×F
W
6
π2
V2
Preuve 1. En appliquant la propriété d'unique factorisation aux deux applications πj elles-mêmes, il existe deux uniques applications linéaires φ1 : V2 → V1
et φ2 : V1 → V2 telles que :
π1 = φ1 ◦ π2
π2 = φ2 ◦ π1 .
Montrons que ces deux applications sont inverses. Comme :
φ1 ◦ φ2 ◦ π1 = φ1 ◦ π2 = π1 ,
φ1 ◦ φ2 = idV1 par unicité de la factorisation de π1 via π1 . Symétriquement, on
démontre que : φ2 ◦ φ1 = idV2 , et le résultat est démontré.
Le problème qui va se poser, si l'on veut dénir des produits tensoriels d'espaces vectoriels topologiques par exemple, est celui de la topologie que l'on veut
dénir sur celui-ci. Alexandre Grothendieck a étudié ces constructions dans sa
thèse, voir le séminaire Bourbaki [2] pour une présentation. C'est au cours de
sa thèse que A. Grothendieck a d'ailleurs introduit la nucléarité, notion clé pour
les C ∗ -algèbres. On verra en eet que les C ∗ -algèbres nucléaires sont exactes :
le foncteur obtenu en tensorisant par elle-même préserve l'exactitude des complexes de C ∗ -algèbres.
Sur les espaces de Hilbert, notre travail est simplié : il existe un unique produit scalaire sur le produit tensoriel algébrique vériant : hx ⊗ x0 , y ⊗ y 0 i =
hx, yihx0 , y 0 i. La complétion du produit tensoriel algébrique de H et K par rapˆ . Ce résultat peut alors être transféré
port à ce produit scalaire est noté H ⊗K
aux C ∗ -algèbres, grâce à leurs représentations sur des espaces de Hilbert.
Proposition 1. Soit A et B deux C ∗ -algèbres et (H, ϕ) et (K, ψ) deux représentations associées. Alors, il existe un unique ∗-homomorphisme π : A ⊗ B →
ˆ
B(H ⊗K)
tel que π(a ⊗ b) = ϕ(a) ⊗ ψ(b). De plus, π est injectif si ϕ et ψ le sont.
On appelle représentation universelle d'une C ∗ -algèbre A la somme directe de
toutes les représentations (Hτ , φτ ), τ parcourant l'espace des états de A, la
représentation associée dérivant de la construction GNS. On peut alors dénir
deux normes sur le produit tensoriel algébrique de deux C ∗ -algèbres A et B .
Dénition 3. Soit
A et B deux C ∗ -algèbres de représentations universelles
(HA , φA ) et (HB , φB ). Soit π l'unique ∗-homomorphisme donné par la proposition précédente : π(a ⊗ b) = φA (a) ⊗ φB (b).
Le produit tensoriel spatial A ⊗min B est déni comme la complétion du
produit tensoriel algébrique A ⊗ B par rapport à la norme
A ⊗ B → R+
||.||min
c 7→ ||π(c)||
Le produit tensoriel maximal A ⊗max B est déni comme la complétion
du produit tensoriel algébrique A ⊗ B par rapport à la norme
||.||max
A ⊗ B → R+
c 7→ maxp p(c)
où p parcourt l'ensemble des semi-C ∗ -normes sur A ⊗ B .
7
On se servira de la propriété suivante : pour tout ∗-homomorphismes de C ∗ algèbres ϕ : A → B et ψ : A0 → B 0 , il existe un unique ∗-homomorphisme
π : A ⊗min A0 → B ⊗min B 0 tel que
π(a ⊗ a0 ) = ϕ(a) ⊗ ψ(a0 ) , ∀a ∈ A, a0 ∈ A0 .
On a alors Im π = Im ϕ ⊗min Im ψ . De plus, π est injective si ϕ et ψ le sont.
On notera ϕ ⊗min ψ à la place de π .
Dénition 4. Une C ∗ -algèbre est dite nucléaire s'il n'existe qu'une seule C ∗ norme sur le produit tensoriel algébrique A ⊗ B , pour toute C ∗ -algèbre B .
Dans les parties suivantes de ce rapport, lorsque l'on tensorisera par des C ∗ algèbres nucléaires, on omettra le symbole min, et le produit tensoriel topologique sera noté comme le produit tensoriel algébrique.
Théorème 1. Soit
B une C ∗ -algèbre et 0
A0
ϕ
A
ψ
A00
0 une
suite exacte de C ∗ -algèbres. Si le produit tensoriel algébrique A00 ⊗ B n'admet qu'une seule C ∗ -norme, ce qui arrive lorsque A00 ou B est nucléaire, alors
la suite
0
A0 ⊗min B
ϕ̃
A ⊗min B
ψ̃
A00 ⊗min B
0
reste exacte.
On a noté ϕ̃ = ϕ ⊗min idB et ψ̃ = ψ ⊗min idB .
Preuve 2. Soit
a00 ⊗ b ∈ A00 ⊗ B . Par surjectivité, il existe a ∈ A tel que
ψ(a) = a00 , et donc ψ̃(a ⊗ b) = a00 ⊗ b. Les éléments a00 ⊗ b générant A00 ⊗ B ,
l'image de ψ̃ est dense, donc ψ̃ est surjective.
L'identité de B et ϕ étant des ∗-homomorphismes injectifs, ϕ̃ = ϕ ⊗min idB est
injectif.
Observons que Im ϕ̃ = Im ϕ ⊗min B ⊂ A ⊗min B est un idéal. On vérie facilement que Im ϕ̃ ⊂ ker ψ̃ . Soit donc R = Im ϕ̃ et f l'application canonique
(A ⊗min B)/R → A00 ⊗min B obtenue en factorisant ψ̃ . Nous allons construire
une application g : A00 ⊗min B → (A ⊗min B)/R qui vérie g ◦ f = id. Cela
montrera que f est injective et donc que Im ϕ̃ = ker ψ̃ .
Soit a00 ∈ A00 . On choisit a ∈ A tels que ψ(a) = a00 et on dénit :
A00 × B →
a00 , b 7→
(A ⊗ B)/R
a ⊗ b (mod R)
Cette application ne dépend pas de la préimage de a00 choisie : si ψ(a1 ) =
ψ(a2 ) = a00 , alors ψ(a1 − a2 ) = 0 donc a1 − a2 = ϕ(a0 ) pour un certain a0 ∈ A0 ,
d'où a1 ⊗ b − a2 ⊗ b = ϕ(a0 ) ⊗ b et donc a1 ⊗ b = a2 ⊗ b mod R.
De plus, la fonction A00 ⊗ B → R+ : x 7→ max(||g(x)||, ||x||min ) est une C ∗ norme. Par hypothèse, elle est donc égale à ||.||min , ce qui montre que g est
continue. Etant bilinéaire et continue, cette application se factorise en l'application g : A00 ⊗min B → (A ⊗min B)/R recherchée. En eet :
gf (a ⊗ b + R) = g ψ̃(a ⊗ b) = g(ψ(a) ⊗ b) = a ⊗ b + R
8
donc g ◦ f = id(A⊗min B)/R .
Ce théorème sera utile pour la construction de l'extension de Toeplitz. Il sert
aussi à la preuve du
Théorème 2. Soit
A0
0
ϕ
A
ψ
∗
0 une suite exacte de C -algèbres.
A00
Si A0 et A00 sont nucléaires, alors A l'est aussi.
Les C ∗ -algèbres nies dimensionelles ainsi que les C ∗ -algèbres commutatives
sont nucléaires.
1.4 Applications complètement positives et suites exactes
Une application bornée σ : A → B entre deux C ∗ -algèbres unitales est dite
complètement positive si σ(1) = 1 et :
X
bi σ(ai a∗j )b∗j ≥ 0
i,j
pour tout entier n, tout a1 , ...,an dans A et b1 , ..., bn dans B .
Le résultat suivant caractérise les applications complètement positives.
Théorème 3 (Stinespring). Soit
A une C ∗ -algèbre unitale. Une application
unitale σ : A → B(H) est complètement positive ssi il existe :
une isométrie V : H → H1
une représentation non-dégénérée ρ : A → B(H1 )
telles que σ(a) = V ∗ ρ(a)V pour tout a ∈ A.
Ce résultat permet de montrer que si σ : A → A0 est une application complètement positive, alors l'application σ ⊗ 1, dénie sur le produit tensoriel algébrique de manière évidente, s'étend en une application complètement positive
σ ⊗ 1 : A ⊗ B → A0 ⊗ B .
En eet, σ étant complètement positive, elle est, en gardant les même notation,
de la forme σ(a) = V ∗ ρ(a)V . Mais alors :
(σ ⊗ 1)(a ⊗ b) = (V ∗ ρ(a)V ) ⊗ b = (V ⊗ 1)∗ (a ⊗ b)(V ⊗ 1).
Les éléments a⊗b générant le produit tensoriel A⊗B , l'extension par continuité
de σ ⊗ 1 est bien complètement positive.
Cette remarque nous permettra plus loin de construire l'extension de Toeplitz
sans passer par la nucléarité. Il sura alors de remarquer que lorsque l'on a une
suite exacte courte scindée de C ∗ -algèbres, si la section est complètement positive, alors elle s'étend en une section complètement positive de la suite obtenue
en tensorisant par une C ∗ -algèbre quelconque.
Proposition 2. Soit
0
A0
ϕ
ψ
A
A00
∗
0 une suite exacte de C -
algèbres. Si la surjection ψ a une section complètement positive, alors, pour
toute C ∗ -algèbre B , la suite
0
A0 ⊗min B
ϕ̃
A ⊗min B
reste exacte.
9
ψ̃
A00 ⊗min B
0
Preuve 3. L'injectivité de ϕ̃ et la surjectivité de ψ̃ fonctionne comme pour la
preuve du théorème 2. On réitère la même technique pour montrer que la suite
tensorisée est exacte au milieu. Toutefois, on ne peut plus utiliser l'unicité d'une
C ∗ -norme sur A00 ⊗min B , et on a aucune assurance que l'application
g : A00 × B → (A ⊗min B)/R
se factorise depuis A” ⊗ B .
On peut par contre étendre la section complètement positive σ : A” → A en
une section complètement positive σ̃ : A” ⊗min B → A ⊗min B . Alors ψ̃ = f ◦ π
et ψ̃ ◦ σ̃ = idA”⊗B , donc f ◦ π ◦ σ̃ = id, où
π : A ⊗min B → (A ⊗min B)/R
est la projection naturelle sur R = Im ϕ̃.
Pour montrer que f est injective, il sut donc de remarquer que π ◦ σ̃ est un
inverse à droite de f .
10
2
K-théorie des
C ∗ -algèbres
2.1 Dénitions et propriétés
Avant de nous attaquer proprement dit au résultat de l'article de Pimsner et
Voiculescu [4], nous allons citer les résultats de K -théorie des C ∗ -algèbres dont
nous aurons besoin. Les preuves ne seront pas toujours détaillées, et peuvent
être trouvées dans n'importe quel livre d'introduction au sujet, par exemple celui de Wegge-Olsen [10].
Dénition 5. Soit p et q deux projecteurs dans une C ∗ -algèbre A. On dénit
trois relations d'équivalences :
p ∼ q s'il existe une isométrie partielle u de A telle que p = u∗ u et q = uu∗ . (
équivalence de Murray-Von Neumann)
p ∼u q s'il existe un unitaire u de A+ tel que p = uqu∗ . (Similitude)
p ∼h q s'il existe un chemin continu en norme de projections de p à q .(Homotopie)
En général, on a : ∼h ⇒∼u ⇒∼. Pour avoir les implications inverses, on peut se
placer dans M∞ (A). (Doubler la dimension à chaque fois sut) On peut alors
considérer l'ensemble des projections de M∞ (A) et quotienter par l'unique relation d'équivalence dénie ci-dessus. L'ensemble obtenu est un semi-groupe
pour l'opération de somme directe de projecteur, nommé V (A). On notera
pn = diag(1, ..., 1, 0, 0, ...) l'élément de V (A) avec des 1 sur les n premiers emplacements diagonaux.
Dénition 6. Le premier groupe de K -théorie de A est :
le groupe de Grothendieck de V (A) si A est unitale.
le noyau de K0 (A+ ) → K0 (C) sinon.
Tout élément de K0 (A) se représente comme la diérence de deux classes de
projecteurs de Mk (A+ ), qui peuvent être choisis dans Mk (A) si A est unitale.
Plus précisément, tout élément de K0 (A) peut s'écrire
[p] − [pn ]
où p ∈ Mk (A+ ) est un projecteur avec k ≤ n tel que p − pn ∈ Mk (A).
K0 est un foncteur covariant de la catégorie des C ∗ -algèbres dans celle des
groupes abéliens, c'est pourquoi l'on se permettra de noter, pour tout homomorphisme involutif ϕ : A → B entre deux C ∗ -algèbres, K0 (ϕ) = ϕ∗ : K0 (A) →
K0 (B) l'homomorphisme de groupes déni par
ϕ∗ ([p] − [q]) = [ϕ(p)] − [ϕ(q)].
Pour passer aux groupes de K -théorie d'indices supérieurs de A, on se servira
du foncteur de suspension S(A) = A ⊗ C0 (R).
Dénition 7. Pour toute algèbre de Banach unitale, on pose
GL∞ (A) = lim GLn (A) (limite inductive)
−→
11
munie de la topologie de la limite inductive.
Pour n ≥ 1, on dénit :
Kn (A) = πn−1 (GL∞ (A))
où πn , n ≥ 1 désigne le nie -groupe d'homotopie, et π0 le groupe des composantes
connexes.
Quelques remarques :
1. Le groupe K1 (A) est donc généré par les classes [u] où u est un unitaire ou
un inversible de GLn (A), avec la présentation [1] = 0, [u] + [v] = [u ⊕ v]
et [u] = [v] si u et v sont reliés par un chemin continu d'unitaires ou
d'inversibles.
2. On a en fait la relation suivante
∀i ∈ N,
Ki+1 (A) = Ki (S(A)).
3. Dans le cas des C ∗ -algèbres comme en K -théorie topologique, on a périodicité de Bott : Ki+2 (A) ' Ki (A).
4. K
abélien.Premièrement, notons
que la matrice
1 (A)est bien un groupe 1 0
0 −1
cos t − sin t
est connectée à
par l'arc t 7→
de
0 1
1 0
sin t cos t
GL(2, C). Ceci assure, par multiplication à gauche et à droite par des
matrices élémentaires, que l'on peut échanger deux colonnes ou deux
lignes d'une matrice sans changer sa classe dans K1 (A). Si ∼ signie
"être dans la même composante connexe", alors :
0
x
∼
1
0
x
∼
0
x
∼
0
xy
0
0
y 0
1
0 1
0
1 0
1
0 y
0
.
y
Le dernier termeétant symétrique,
K1 (A) est bien abélien. On a montré
0
, ce que l'on utilisera fréquemment,
y u 0
par exemple lorsque l'on armera que
est connectée à l'identité
0 u∗
si u est unitaire.
au passage que
xy
0
0
1
∼
x
0
Cette dernière remarque nous amène à un autre résultat utile.
Proposition 3. Soit A une C ∗ -algèbre unitale. Un élément z ∈ A est inversible
et connecté
à 1 par un chemin d'inversibles ssi il existe a1 , ..., an ∈ A tels que
Q
z = j eaj .
Preuve 4. Toute exponentielle est connectée par un chemin d'inversibles à
l'identité par l'arc t 7→ eta , a ∈ A : le sens indirect est prouvé.
Q On note exp(A) les
éléments qui sont des produits d'exponentielles. Soit z = j eaj un tel élément.
12
1
0 −1
est
Alors, si z 0 est assez proche de z : ||z − z 0 || < ||z−1
|| , le spectre de z z
contenu dans le disque ouvert de rayon 1 et de centre 1, on peut donc dénir son
log. Donc z 0 = exp(log(z 0 z −1 ))z est bien un produit d'exponentielles. Comme
exp(A) est ouvert et fermé et qu'il contient 1, GL1 (A)0 = exp(A).
Cette proposition a pour corollaire un résultat de relèvement important.
Proposition 4. Soit
ψ : A → A00 un ∗-homomorphisme surjectif entre deux
C -algèbres unitales. Alors tout unitaire (resp. inversible)de A00 qui est connecté
à l'identité peut se relever en un unitaire (resp. inversible) de A.
∗
Preuve 5. Soit a00 ∈ AQ00 un unitaire connecté à l'identité. La proposition précé-
dente assure que a00 = j exj . Par surjectivité
de ψ , il existe des éléments yj de
Q
A tels que ψ(yj ) = xj . Mais alors a = j eyj est un relevé inversible connecté à
1
l'identité qui relève a00 . Si a00 est unitaire, a(a∗ a)− 2 convient.
Ces foncteurs de la catégorie des C ∗ -algèbres dans celle des groupes abéliens
sont semi-exacts, i.e. ils transforment toute suite exacte courte en suite exacte
très courte. Un point remarquable, et qui sera utilisé plus tard : leur comportement vis à vis de la stabilisation est naturel.
Donnons en exemple quelques calculs de groupes de K -théorie.
Deux projections dans Mn (C) sont équivalentes précisément lorsque elles ont
même rang. Ceci assure que K0 (C) = GN = Z, un générateur étant n'importe
quel projecteur de rang 1. La K -théorie étant stable par augmentation et limite
inductive, on a aussi : Z = K0 (Mn (C)) = K0 (K) avec même générateur.
K0 (C(S1 )) = Z est généré par la classe du projecteur z 7→ 1C , et K1 (C(S1 )) =
Z avec pour générateur la classe de l'unitaire z 7→ z . En eet, C(S1 ) n'admet que 0 et 1 comme projecteurs. De plus K1 (C(S1 )) = π0 (GL∞ (C(S1 ))) et
π0 (GL(n, C(S1 ))) = π1 (GL(n, C)) = Z pour tout entier n.
Dénition 8. Une
C ∗ -algèbre A est dite stable si A ' A ⊗ K, où A ⊗ K est
par déntion la stabilisation de A. On dit de deux C ∗ -algèbres qu'elles sont
stablement isomorphes si A ⊗ K ' B ⊗ K .
L'agèbre des matrices se plonge naturellement (mais non canoniquement) dans
l'algèbre de opérateurs bornés Mn ' Pn BPn ⊂ K, où Pn est le projecteur sur
les n premières coordonnées. Et le diagramme commutatif
Mm
ιnm
lim Mn
−→
Mn
φm
φm
K
permet d'armer que l'algèbre des opérateurs compacts est limite inductive du
sytème inductif des matrices K ' lim
M . Ici, une matrice de taille m ≤ n
−→ n
est plongée dans Mn en la positionnant dans le coin haut-gauche. L'injectivité
de la èche verticale provient de celle des φn et la surjectivité de la densité
des opérateurs de rang ni dans K. Finalement, comme Mn (A) ' A ⊗ Mn , on
13
obtient que A ⊗ K = −
lim Mn (A).
→
Il est facile de voir que homomorphismes ιnm∗ = K0 ιnm sont de isomorphismes,
on obtient ainsi un diagramme commutatif pour tout n ≥ m, que l'universalité
de la limite inductive permet de compléter par une unique èche (en pointillés) :
K0 (Mn (A))
φm∗
K0 (A ⊗ K)
φn∗
ιn1∗
ιnm∗
K0 (Mm (A))
.
K0 (A)
ιm1∗
Comme les ι∗ sont des isomorphismes, cette èche l'est. Mais le diagramme
commute, donc son inverse est donnée par φn∗ ◦ ιn1∗ = φ1∗ . On vient de montrer
que
A →
a 7→
A⊗K
a ⊗ e11
induit un isomorphisme K0 (A) ' K0 (A ⊗ K).
Soit p ∈ Mn (A+ ) un projecteur. Posons
, ∀z ∈ S1 .
fp (z) := zp − 1n + p
Pour tout z ∈ S1 , fp (z) dénit un unitaire, donc [fp ]1 ∈ K1 (SA). De plus
||fp − fq || = supz∈S1 ||(z − 1)(p − q)|| = 2||p − q||, ce qui montre que p 7→ fp
et fp 7→ p sont continues. Enn, la relation fp fq = fp+q lorsque p et q sont
orthogonales assure que p 7→ [fp ]1 se factorise en un homomorphisme V (A) →
K1 (SA).
Dénition 9. Soit
A une C ∗ -algèbre. L'application de Bott est l'homomor-
phisme de groupe déni par :
βA :
K0 (A) → K1 (SA)
[p]0 − [q]0 7→ [fp fq∗ ]1
Soit u ∈ Un+ (A). Comme
u 0
0 u∗
∼
uu∗
0
0
,
1n
on peut trouver un chemin continu d'unitaires t 7→ wt de 12n à
u 0
. Mais
0 u∗
alors qt := wt pn wt∗ ∈ M2n (A+ ) est un lacet continu de projecteurs d'origine
pn . Comme πC (qt ) = pn , qt − pn ∈ M2n ((SA)+ ) et on peut dénir l'application
Theta.
Dénition 10. L'application Theta est l'homomorphisme déni par :
θA :
K1 (A) →
[u]1 7→
K0 (SA)
[q]0 − [pn ]
Ces deux applications, Bott et Theta, sont toutes deux des transformations
naturelles entre les foncteurs K0 et K1 S pour Bott, K1 et K0 S pour Theta.
14
Cela signie que tout ∗-homomorphisme α : A → B entre deux C ∗ -algèbres
induit deux diagrammes commutatifs :
K0 (A)
α∗
K0 (B)
βA
K1 (SA)
βB
α∗
α∗
K1 (A)
K1 (B)
θA
K1 (SB)
θB
α∗
K0 (SA)
K0 (SB)
2.2 La suite exacte à six termes
Théorème 4. Soit
0
J
ι
A
π
B
0 une suite exacte de C ∗ -algèbres.
Alors la suite à six termes suivante est exacte :
K0 (J)
ι∗
K0 (A)
π∗
K0 (B)
∂
δ
K1 (B)
π∗
K1 (A)
K1 (J)
ι∗
C'est l'un des résultats fondamentaux en K -théorie, il permet des calculs eectifs. Le premier pas à faire est de construire l'indice associé à toute suite exacte
∂ : K1 (B) → K0 (J), qui transforme toute suite exacte courte en suite exacte
longue.
Si J est un idéal bilatère fermé de A, et x= [u]∈ K1 (A/J) pour un certain
u 0
soit connectée à 1n+k (par
u ∈ Un+ (A), on choisit v ∈ Uk+ (A) tel que
0
v
exemple v = u convient). Alors on peut relever
∗
Un+k (A).
u 0
0 v
en un unitaire w ∈
Dénition 11. L'indice d'un élément x ∈ K1 (A/J) décrit ci-dessus est déni
comme
∂(x) = [wpn w∗ ] − [pn ] ∈ K0 (J).
u 0
Si l'on se donne un relevé w de
, alors v = (1 − pn )w∗ est une isométrie
0 u∗
partielle :
vv ∗ = 1 − pn
v ∗ v = 1 − wpn w∗
sont en eet des projecteurs. Mais en remplaçant ces expressions dans la formule
de l'indice, on obtient
∂[u] = [1 − v ∗ v] − [1 − vv ∗ ].
Est-on obligé de doubler la dimension? Non, si u se relève
en une isométrie
a
1 − aa∗
partielle a par exemple. Alors w =
est un unitaire qui
∗
∗
relève
1−a a
a
u 0
, et on peut calculer l'indice de [u] avec des matrices de taille
0 u∗
identique :
∂[u] = [1 − a∗ a] − [1 − aa∗ ].
15
Proposition 5. Si la suite de C ∗ -algèbres
0
J
A
A/J
0
est exacte, alors la suite de groupes abéliens
K1 (J)
K1 (A)
K1 (A/J)
∂
K0 (J)
K0 (A)
K0 (A/J)
est exacte.
On peut trouver 2 isomorphismes naturels qui donnent la périodicité de Bott :
Ki+1 (A) ' Ki (A), i = 0, 1.
Ces isomorphismes sont donnés par l'application de Bott β : K0 → K1 S et
θ : K1 → K0 S . La périodicité permet de conclure en enroulant la suite exacte
longue grâce à l'application exponentielle δ : K0 (B) → K1 (J) qui est la composition θJ−1 ◦ ∂ ◦ βB .
Proposition 6 (Remarque sur le nom d'application exponentielle). Soit J un
idéal bilatère de la C ∗ -algèbre A. Si p − pn ∈ M∞ (A/J) et x ∈ M∞ (A+ ) est un
relevé auto-adjoint de p, alors :
δ([p] − [pn ]) = [exp(−2iπx)].
De plus, si toutes les projections de M∞ (A/J + ) peuvent se relever en des projections de M∞ (A+ ), alors l'application exponentielle est triviale :
exp(−2iπx) =
∞
X
(−2iπx)n
= 1 + (e−2iπ − 1)x = 1
n!
n=0
car x = x2 .
Preuve 6. Rappelons que δ est la composée donnée par :
K0 (A/J)
δ
K1 (J)
βA/J
K1 (SA/J)
θJ
∂
K0 (SJ)
Soient p ∈ A/J et x ∈ A un élément auto-adjoint tel que π(x) = p. Comme
e2iπtp = 1 + (e2iπt − 1)p, fx (t) := 1 + (e2iπt − 1)x relève fp (t) = e2iπtp .
∗
Notons, dans un premier temps, que tout élément y d'une
tel que le
C -algèbre √
spectre de y ∗ y soit inclus dans [0; 1] produit un unitaire
On peut alors armer que
wfx :=
p fx
− 1 − fx∗ fx
16
p
√ y
− 1 − y∗ y
1 − fx fx∗
fx∗
1 − yy ∗
.
y∗
fp 0
, relevé qui nous donne l'indice de [fp ]1 =
est un relevé unitaire de
0 fp∗
βA/J [p]0 :
∂[fp ]1 = [wfx pn wfx∗ ] − [pn ].
Soit gx (t) := (1 − t)1A+ + te2iπx un chemin continu entre l'identité et e2iπx .
L'image de e2iπx par θJ se calcule comme l'indice [wgx pn wgx∗ ] − [pn ]. Montrer
que fx et gx sont homotopes sut donc à conclure.
Pour cela, remarquons que, t variant de 0 à 1 et le spectre de x étant inclu dans
[0, 1] , les éléments fx et gx ne dépendent que des valeurs des fonctions réelles
f (t, x)
g(t, x)
= 1 + (e2iπt − 1)x
= 1 − t + te2iπx = f (x, t)
au voisinage du bord du carré ∂[0; 1] × [0; 1], homéomorphe au cercle S1 . Les
classes d'homotopie de fonctions continues sur le cercle sont classiées par leur
nombre de tours, voir le livre d'Hatcher par exemple [3], et on vérie que f et g
sont ainsi homotopes en tant que fonctions sur le cercle à valeurs dans le cercle,
et donc que :
[wfx pn wfx∗ ] = [wgx pn wgx∗ ].
L'identité ∂ ◦ βB = θJ ◦ δ est démontrée, ce qui conclut.
2.3 Produits croisés de C ∗ -algèbres
2.3.1 Suite exacte de Pimsner-Voiculescu
Voici le résultat central de ce rapport. Il a été demontré par Pimsner et Voiculescu en 1980. [4]
Théorème 5 (Pimsner-Voiculescu). Soit A une C ∗ -algèbre et α ∈ Aut(A). Il
existe alors une suite exacte à six termes :
K0 (A)
1−α∗
K0 (A)
ι∗
K0 (A ×α Z)
.
K1 (A ×α Z)
ι∗
K1 (A)
1−α∗
K1 (A)
La première chose que l'on peut, et que l'on va, dire à propos des produits croisés est que les générateurs de leurs groupes de K -théorie prennent une forme
sympathique, qui va nous permettre de faire des calculs explicites dans la preuve
de la suite de Pimsner-Voiculescu.
Lemme 2. Soit B une C ∗ -algèbre unitale, 1B
∈ A une sous-C ∗ -algèbre de B ,
et u un unitaire de B tels que A et u engendrent B et uAu∗ = A.
Alors K1 (B) est engendré par les inversibles de la forme :
1B ⊗ 1n + x(u∗ ⊗ 1n ) , n ∈ N, x ∈ A ⊗ Mn .
De plus, si B = A ×α Z, alors on peut se limiter aux classes d'unitaires de la
forme :
1B ⊗ 1n − F + F x(u∗ ⊗ 1n )F
où F désigne une projection auto-adjointe.
17
F, x ∈ A ⊗ Mn
La remarque suivante est importante pour la preuve du lemme 6 : dans le cas
B = A ×α Z, les classes concernées sont stables par somme, donc tout élément
de K1 (B) est la diérence de deux générateurs.
Preuve 7. On note Γ le sous-groupe de K1 (B) engendré par les éléments de la
forme 1B ⊗ 1n + x(u∗ ⊗ 1n ).
Comme u est unitaire, si 0 ≤ t ≤ 1, le spectre de t(1B + 2u∗ ) + (1 − t)u∗ =
t1B + (1 + t)u∗ ne contient pas 0, et on a donc un chemin continu d'inversibles
entre 1B + 2u∗ et u∗ , d'où :
(1)
[1B + 2u∗ ]1 = [u∗ ]1 .
Les éléments s≤j≤t aj (uj ⊗1p ), aj ∈ A⊗Mp , s, t ∈ Z sont denses dans B ⊗Mp .
Il sut donc de prouver notre assertion pour ce type d'éléments. Mais, d'après
l'équation 1, [u]1 ∈ Γ, donc s = 0 sut.
P
Soit donc y =
P
0≤j≤t
aj (uj ⊗ 1p ) un inversible. On pose :

0
−I

S = 


0
0
−I
0
.
.
0
.
I






...
−I
, ∀ > 0
0
la matrice avec des −I := −1B ⊗ 1p sur la sous-diagonale et un I dans le coin
haut-droit, et :


a0
0

T =


a1
I
.
.
0
.
at


.


I
0
...
I
Si l'on note up = u ⊗ 1p et yk =
obtient l'identité :

a0
−up

S0 (u ⊗ 1n ) + T = 



I
0

=


y1
I
a1
I
−up
0
.
Pt−k
j=0
.
.
0
.
.
0
.
...
at






I
I
0
aj+k (uj ⊗ 1p ) = yk+1 (u ⊗ 1p ) + ak , on
...
−up I

yt
y 0
 0 I




0
I
.
.
0
.
0
I
...

I
 −up




I
−up
0
I
Les matrices de droite et de gauche de la dernière ligne sont unipotentes, leur
classe dans K1 (B) est donc nulle. Mais la classe de l'élément central est celle de
18
.
0

.
...
−up


.


I
y . Ajoutons à cela l'invariance de K1 par homotopie, nous pouvons alors écrire,
pour assez petit :
[y]1 = [S (u ⊗ 1n ) + T ]1
= [u ⊗ 1n + S−1 T ]1
car [S ]1 = 0
= [u ⊗ 1n ]1 + [1B ⊗ 1n + S−1 T (u∗ ⊗ 1n )]1
= n[u]1 + [1B ⊗ 1n + S−1 T (u∗ ⊗ 1n )]1
et la première partie du lemme est démontrée.
Si maintenant B est un produit croisé A×α Z, qui est engendré par A et l'unitaire
u vériant
αn (x) = un xu∗n ,
les générateurs peuvent être donnés plus explicitement.
On note β : S1 → Aut(B) l'automorphisme donné par l'identité sur A et
β(z)u = zu pour tout z ∈ S1 . La C ∗ -algèbre A est exactement l'algèbre des
points xes de β . Vu la première partie du lemme, il sut de montrer que, pour
tout générateur de la forme 1B ⊗ 1n + x(u∗ ⊗ 1n ) où x ∈ A ⊗ Mn , on peut trouver un unitaire 1B ⊗1n −F +F x(u∗ ⊗1n )F , où F est un projecteur auto-adjoint.
Soit donc un inversible y = 1B ⊗ 1n + x(u∗ ⊗ 1n ) : −1 n'est donc pas dans le
spectre de x(u∗ ⊗ 1n ). Comme β est un automorphisme qui xe A, il laisse
invariant les spectres : le spectre de x(u∗ ⊗ 1n ) est le même que celui de
(β(z) ⊗ idn )x(u∗ ⊗ 1n ) = zx(u∗ ⊗ 1n ), pour tout z ∈ S1 . Donc tout l'orbite
de −1 sous l'action du cercle, c'est-à-dire le cercle S1 , est dans la résolvante de
x(u∗ ⊗ 1n ).
On note U− et U+ les composantes connexes respectivement bornée et nonbornée de C − S1 , et T l'opérateur x(u∗ ⊗ 1n ). Alors la fonction e− qui vaut 1
sur U− et 0 sur U− est holomorphe sur C − S1 , et on peut dénir P− = e− (T )
par calcul holomorphe. De même pour P+ = e+ (T ). Ces deux éléments sont des
projecteurs (non auto-adjoints) car e∗ (z)2 = e∗ (z), et sont appelés les projecteurs spectraux de x(u∗ ⊗ 1n ) associés à U− et U+ .
Comme x(u∗ ⊗ 1n ) et zx(u∗ ⊗ 1n ) ont même spectre, les projecteur spectraux
z
associés à U+ et U− , que l'on note P+/−
, peuvent se dénir avec les mêmes
fonctions holomorphes e+ et e− . Comme elles sont invariantes par rotation, on
obtient que :
Z
1
e+ (w)(w − zT )−1 dw
2iπ γ
Z
z
e+ (w)(zw − T )−1 dw
=
2iπ γ
Z
dw
1
e+ (zw)(w − T )−1
=z
2iπ γ
z
P+z = e+ (zT ) =
= P+ .
19
en posant w0 = zw
(γ est un lacet entourant le spectre de T .)
On a donc montré que :
(β(z) ⊗ idn )P+/− = P+/− .
Ceci assure que P+/− ∈ A ⊗ Mn , ce qui n'était pas évident a priori, x(u∗ ⊗ 1n )
étant élément de B ⊗ Mn .
On dénit un chemin d'éléments inversibles par
y = P+ + x(u∗ ⊗ 1n )P+ + P− + x(u∗ ⊗ 1n )P− ,
pour tout 0 ≤ ≤ 1. Pour voir l'inversibilité, il sut de remarquer que l'on
a scindé x(u∗ ⊗ 1n ) sur l'image de P+ et P− , et que l'on lui a ajouté un scalaire qui ne se trouve pas dans le spectre relatif à ce projecteur. On a donc
[y0 ] = [y1 ] = [y]. Comme y0 = 1 − P+ + P+ x(u∗ ⊗ 1n )P+ , il sut de montrer
que l'on peut remplacer P+ par un projecteur auto-adjoint pour conclure.
Soit F le projecteur orthogonal sur l'image de P+ . Alors il existe T ∈ A ⊗ Mn
tel que :
P+ = F + F T (1A ⊗ 1n − F )
(On peut prendre T = P+ par exemple.) Comme F x(u∗ ⊗ 1n )F = x(u∗ ⊗ 1n )F ,
on vérie par un simple calcul que :
y0 = 1A ⊗ 1n − F + F x(u∗ ⊗ 1n )F + F S(1A ⊗ 1n − F ),
où S = −T − x(u∗ ⊗ 1n )F T . L'inversibilité de y0 donne celle de
1A ⊗ 1n − F + F x(u∗ ⊗ 1n )F + F S(1A ⊗ 1n − F )
pour tout ∈ C, donc
[y] = [1A ⊗ 1n − F + F x(u∗ ⊗ 1n )F ].
On aurait pu remplacer y0 par (y0 y0∗ )− 2 y0 qui est unitaire et homotope à y0 , ce
qui conclut le lemme.
1
2.3.2 Extension de Toeplitz
Soient A et C deux C ∗ -algèbres.
Par extension de A par C , on entend un triplet (B, α, β) d'une C ∗ -algèbre et de
deux morphismes telle que la suite :
0
A
α
B
β
C
0
soit exacte.
Cette section présente la construction d'une extension de A ⊗ K par A ×α Z
qui sera utile dans la preuve de l'exactitude de la suite de PV : l'extension de
20
Toeplitz. Dans tout le document H dénote un espace de Hilbert, l2 par exemple,
dont on xe une base hilbertienne (en ), et B et K sont respectivement l'algèbre
des opérateurs bornés et compacts sur H. K est un idéal bilatère et :
π : B → B/K
est la projection naturelle sur l'algèbre de Calkin.
H 2 (S1 ) désigne le sous-espace hilbertien de L2 (S1 ) engendré par les fonctions
z 7→ z n pour n ≥ 0. Lorque l'on prendra H 2 (S1 ) pour H, en dénotera ces
fonctions. Pour f ∈ C(S1 ), on désigne par Tf l'opérateur de H 2 (S1 ), appelé
opérateur de Toeplitz associé à f , déni par Tf (g) = P(f g), où P est le projecteur orthogonal sur H 2 (S1 ). On appelle f le symbole de Tf .
Soit S ∈ B l'opérateur de shift unilatéral, qui envoie en sur en+1 . On note C ∗ (S)
la C ∗ -algèbre unitale engendrée par S . On voit que S ∗ envoie e1 sur 0 et en sur
en−1 lorsque n ≥ 2. Si on note Eij (x) = hx, ej iei , on a :
Eij = S i−1 S ∗j−1 − S i S ∗j ∈ C ∗ (S)
K est donc un idéal bilatère de C ∗ (S) et P = 1 − SS ∗ = E11 est de rang 1 donc
compact.
Lemme 3. L'application
τ
C(S1 ) →
f 7→
B(H 2 (S1 ))/K(H 2 (S1 ))
π(Tf )
est un ∗-homomorphisme injectif.
Preuve 8. Si l'on confond f
∈ C(S1 ) avec l'opérateur de multiplication associé
dans L (S ), alors f P − Pf est un opérateur compact. En eet, si f (z) = z ,
on a un opérateur de rang 1, et cette fonction génère C(S1 ) par théorème de
2
1
Stone-Weiertrass.
Ceci permet d'écrire la relation suivante :
Tf Tg = Pf Pg = P(Pf + compact)g = Pf g + compact
Donc Tf Tg = Tf g mod K, et comme Tf∗ = Tf , τ est bien un ∗-homorphisme.
Pour l'injectivité, observons le noyau de τ . C'est un idéal bilatère de C(S1 ), il
existe donc un ouvert X ⊂ S1 tel que :
ker τ = {f ∈ C(S 1 ) : f (z) = 0, ∀z ∈ X}
Mais si f ∈ ker τ , alors z 7→ f (eiθ z) est aussi dans le noyau pour tout θ, ce
qui assure que X = S1 ou ∅. Mais comme Tz n'est pas compact, X = S1 et
l'injectivité est démontrée.
Comme C(S1 ) est généré par z , qui s'envoit sur S par T , l'image de T. est
C ∗ (S). La remarque précédente permet d'armer que C ∗ (S)/K est ∗-isomorphe
21
à l'algèbre des fonctions continues sur le tore C(S1 ), et l'image de S est la
fonction identité sur S1 , noté z . On a donc une extension, écrite sous la forme
d'une suite exacte :
0
K
C ∗ (S)
C(S1 )
0
Dénition 12. On dénit l'algèbre de Toeplitz T associée à la paire (A, α)
comme la C ∗ -sous-algèbre de (A ×α Z) ⊗ C ∗ (S) engendré par A ⊗ I et u ⊗ S .
Rappelons que l'on voit A comme une sous-∗-algèbre de A ×α Z, et que l'on note
u l'unitaire qui rend intérieure l'action de α :
∀a ∈ A, n ∈ Z,
α(n)a = u∗n aun
Observons maintenant A ×α Z, dont on va montrer qu'elle se réalise comme un
quotient de T par un idéal bilatère fermé. Soit donc J l'idéal bilatère fermé
engendré par la projection 1 ⊗ P . La première chose à remarquer, c'est que l'on
a un ∗-morphisme :
φ
K
eij
→
T
.
→ S i P S ∗j
Il est ici déni sur le système d'unités de K,
eij (x) = hx, ei iej
ce qui permet facilement de l'étendre à K entier.
L'identité suivante permet d'étendre φ à A ⊗ K :
(u ⊗ S)i (a ⊗ P )(u ⊗ S)∗j = (ui au∗j ) ⊗ φ(eij )
dénit l'extension ψ de φ à A ⊗ K. Alors ψ(A ⊗ K) = J ⊂ T et ψ est injective.
Pimsner et Voiculescu montrent [4] que :
im ψ = (A ×α Z) ⊗ φ(K) ∩ T
(2)
En eet, soit y ∈ (A ×α Z) ⊗ φ(K) ∩ T . Comme y est dans (A ×α Z) ⊗ φ(K),
J 3 (1 ⊗ En )y(1 ⊗ En ) −→ y
n→∞
où En = 1 ⊗ φ(e00 + e11 + ... + enn ) = ψ(1 ⊗ (e00 + e11 + ... + enn )) ∈ J ( on utilise
une unité approchée de K). J étant un idéal fermé, on en déduit que y ∈ J .
L'inclusion inverse est directe.
Les C ∗ -algèbres K, C ∗ (S) et C(S1 ) sont nucléaires car commutative pour C(S1 )
ou limite inductive de C ∗ -algèbres nie-dimensionnelles pour K. Ceci assure qu'il
n'y a qu'une seule norme de C ∗ -algèbre sur leur produit tensoriel avec A ×α Z.
De plus, avec le théorème T.2.6.26 de l'appendice T du livre de Wegge-Olsen
[10], on a, sans ambiguité, une suite exacte :
0
(A ×α Z) ⊗ K
(A ×α Z) ⊗ C ∗ (S)
22
(A ×α Z) ⊗ C(S1 )
0
Une autre méthode pour l'obtenir est d'utiliser la proposition 2. En eet, f 7→ Tf
est une section complètement positive de la première suite exacte :
X
X
X
bi Tfi )(
bi Tfi )∗ .
bi Tfi fj∗ b∗j = (
i
i,j
i
Cette suite exacte et l'identité 2 permet d'identier T /J à la C ∗ -algèbre engendrée par A ⊗ 1 et u ⊗ z où z est l'inclusion S1 → C. Cette dernière étant
∗-isomorphe à A ×α Z, on en déduit la suite exacte :
0
A⊗K
ψ
T
π
(A ×α Z)
C'est l'extension de Toeplitz associée à (A, α).
23
0.
3
Suite exacte de Pimsner-Voiculescu
3.1 La preuve originale
Maintenant que le décor est planté, nous pouvons passer à la K -théorie. On
pose :
A →
a 7→
d:
T
a⊗I
Nous allons d'abord démontrer le :
Lemme 4. Les diagrammes suivants :
ψ∗
Ki (A ⊗ K)
Ki (T )
'
Ki (A)
d∗
(idA )∗ −α(−1)∗
Ki (A)
sont commutatifs pour i ∈ {0, 1} , et d∗ : K1 (A) → K1 (T ) est injectif.
Preuve 9. L'isomorphisme K1 (A) → K1 (A ⊗ K) associe à une classe [v] ∈
K1 (A) l'élément [v ⊗ e00 + (I − 1 ⊗ e00 )], dont l'image par ψ∗ est :
ψ∗ [v ⊗ e00 + (I − 1 ⊗ e00 )] = [v ⊗ P ] + [1 ⊗ I − 1 ⊗ P ] = [v ⊗ P ] + [1 ⊗ SS ∗ ] (3)
Maintenant :
(4)
d∗ ◦ (idA − α(−1))∗ [v] = [v ⊗ I] − [u∗ vu ⊗ I]
Soit l'unitaire :
Ω=
u⊗S
0
Q
u∗ ⊗ S ∗
∈ T ⊗ M2
où Q est le projecteur auto-adjoint 1 ⊗ P .
On remarque que :
u∗ vu ⊗ I
Ω
0
0
v ⊗ SS ∗ + QQ∗
∗
Ω =
1⊗I
(u∗ ⊗ S ∗ )Q∗
v ⊗ SS ∗ + QQ∗
0
=
0
1⊗I
Q(u ⊗ S)
1⊗I
Mais la classe dans K1 est invariante par augmentation, i.e. [x] =
et par conjugaison par un unitaire, donc :
∗
u vu ⊗ I
Ω
0
0
Ω∗ = [u∗ vu ⊗ I]
1⊗I
En remplaçant dans (4), on obtient :
[v ⊗ I] − [v ⊗ SS ∗ + Q] = [(v ⊗ I)(v ⊗ SS ∗ + Q)−1 ]
= [(v ⊗ I)(v ∗ ⊗ SS ∗ + Q)]
= [1 ⊗ SS ∗ + v ⊗ P ]
24
x 0
,
0 1
qui est l'expression que l'on avait trouvé pour l'image de [v] par ψ∗ dans (3). La
commutativité du diagramme i = 0 suit la même preuve : il sut de remarquer
que si l'on prend une projection auto-adjointe q ∈ A, alors dans K0 (T ) :
(α(−1)q) ⊗ I
[(α(−1)q) ⊗ I] = Ω
0
∗
q ⊗ SS
0
=
0
0
0
Ω∗
0
= [q ⊗ SS ∗ ].
Ceci assure que :
d∗ ◦ ((idA )∗ − α(−1)∗ ) [q ⊗ e00 ] = [q ⊗ I] − [(α(−1)q) ⊗ I] = [q ⊗ P ] = ψ∗ [q ⊗ e00 ].
Les diagrammes commutent bien, il reste à montrer l'injectivité de d∗ .
Pour cela, montrons que si v0 et v1 sont des unitaires de A, et t 7→ wt un chemin continu dans les unitaires de T d'origine v0 ⊗ I et d'arrivée v1 ⊗ I , alors
[v0 ] = [v1 ] dans K1 (A).
Calculons :
0
α̃(−1)wt∗
Ω
1⊗I
0
wt
0
0
wt (1 ⊗ S)wt∗ (1 ⊗ S ∗ ) + wt Q
0
Ω∗ =
.
1⊗I
0
1⊗I
Le chemin unitaire yt = wt (1 ⊗ S)wt∗ (1 ⊗ S ∗ ) + wt Q ∈ T vérie :
∀t,
yt ∈ 1 ⊗ I + J.
En eet :
yt − 1 ⊗ I = (wt − 1 ⊗ I)Q + wt (1 ⊗ S)wt∗ − wt∗ (1 ⊗ S) (1 ⊗ S ∗ ),
mais un élément de la forme (1 ⊗ S)w − w(1 ⊗ S) est toujours dans B ⊗ φ(K),
si w ∈ T . Si w est dans A ⊗ I ou vaut u ⊗ S , on obtient 0, et si w = u∗ ⊗ S ∗ , le
commutateur vaut u∗ ⊗ P ∈ B ⊗ φ(K). Ces éléments génèrent un algèbre dense
dans T : l'assertion en découle.
On a donc un chemin continu d'unitaires de 1 ⊗ SS ∗ + v0 ⊗ P à 1 ⊗ SS ∗ + v1 ⊗ P ,
qui reste dans 1 ⊗ I + J . Comme ψ établit un isomorphisme de C1 ⊗ I + J sur
˜ K, on a donc, dans K1 (A ⊗
˜ K) :
A⊗
[I˜ − 1 ⊗ e00 + v0 ⊗ e00 ] = [I˜ − 1 ⊗ e00 + v1 ⊗ e00 ]
donc : [v0 ] = [v1 ] dans K1 (A), et l'injectivité de d∗ est démontrée.
En passant l'extension de Toeplitz en K -théorie, et en combinant avec le lemme
4, on obtient le diagramme suivant :
K1 (A ⊗ K)
ψ∗
'
K1 (A)
K1 (T )
d∗
(idA −α(−1))∗
π∗
K1 (A ×α Z)
ι∗
K1 (A)
25
δ
K0 (A ⊗ K)
dont la première ligne est exacte, et le carré commute. Le triangle commute
aussi : l'image de a ∈ A par d est a ⊗ I , que l'on envoie sur a ⊗ I mod J via π .
Mais cette dernière coïncide avec a ⊗ 1 dans (A ×α Z) ⊗ C(S1 ), où 1 est la fonction constante. C'est justement l'inclusion A → A ×α Z modulo l'isomorphisme
entre A ×α Z et (A ×α Z) ⊗ C(S1 ).
Lemme 5. d∗ : K1 (A) → K1 (T ) est un isomorphisme.
Preuve 10. Montrons que Ker δ ⊂ Im ι∗ . Cela sut puisque si
d∗ n'est pas
surjectif, il existe un élément x ∈ K1 (T ) \ Im d∗ , dont l'image par π∗ n'est pas
dans l'image de ι∗ . Pourtant : δ ◦ π∗ (z) = 0.
Nous allons montrer que tout élément de Ker δ s'écrit :
w = [1 ⊗ 1n − F1 + F1 x1 (u∗ ⊗ 1n )F1 ]1 − [1 ⊗ 1n − F2 + F2 x2 (u∗ ⊗ 1n )F2 ]1
pour certains x1 , x2 , F1 et F2 dans A ⊗ Mn tels que Fi soient des projections
auto-adjointes unitairement équivalentes : il existe un unitaire v ∈ A ⊗ Mn les
entrelaçant F1 = vF2 v ∗ .
Montrons que cela conclut. Dans K1 (A ×α Z), on a l'égalité :
[1 ⊗ 1n − F2 + F2 x2 (u∗ ⊗ 1n )F2 ]1 = [1 ⊗ 1n − F1 + F1 vx2 (u∗ ⊗ 1n )v ∗ F1 ]1
= [1 ⊗ 1n − F1 + F1 y(u∗ ⊗ 1n )F1 ]1
où y = vx2 (α(−1) ⊗ idn )(v ∗ ) ∈ A ⊗ Mn . Alors :
∗
w = [(1 ⊗ 1n − F1 + F1 x1 (u∗ ⊗ 1n )F1 ) (1 ⊗ 1n − F1 + F1 y(u∗ ⊗ 1n )F1 ) ]1
= [1 ⊗ 1n − F1 + F1 x1 (α(−1) ⊗ idn )(F1 )y ∗ F1 ]1
L'élément entre crochets est dans A ⊗ Mn , ce qui veut dire que sa classe w est
dans l'image de ι∗ : Ker δ ⊂ Im ι∗ est démontré.
Montrons maintenant la remarque. Le lemme 2 nous permet d'armer que tout
élément de K1 (A ×α Z) s'écrit comme une diérence de générateurs unitaires
de la forme [1n − F + F x(u∗ ⊗ 1n )F ]1 . Si n = 1, un tel élément a un relevé
w = (1 − F ) ⊗ I + F xu∗ F ⊗ S ∗ ∈ T . Mais alors :
ww∗ = (1 − F ) ⊗ I + F xu∗ F ux∗ F ⊗ S ∗ S
= (1 − F ) ⊗ I + F ⊗ I
=1⊗I
w∗ w = (1 − F ) ⊗ I + F ux∗ F u∗ xF ⊗ SS ∗
= (1 − F ) ⊗ I + F ⊗ (I − P )
=1⊗I −F ⊗P
L'index est donc facilement calculable :
δ[1n − F + F x(u∗ ⊗ 1n )F ]1 = [1 ⊗ I − w∗ w]0 − [1 ⊗ I − ww∗ ]0
= [F ⊗ P ]0
= [F ⊗ e00 ]0
26
Ce calcul assure que
[1n − F1 + F1 x1 (u∗ ⊗ 1n )F1 ]1 − [1m − F2 + F2 x2 (u∗ ⊗ 1m )F2 ]1 ∈ Ker δ
ssi [F1 ]0 = [F2 ]0 dans K0 (A).
Quitte à remplacer Fi et xi par 0p ⊕ Fi et Ip ⊕ xi , on peut supposer m = n.
De même, quitte à remplacer Fi et xi par Fi ⊕ 1 ⊗ 1p et xi ⊕ 1 ⊗ 1n+p , on peut
supposer que F1 et F2 sont unitairement équivalentes.
On a donc montré que d∗ induisait un isomorphisme en K1 -théorie. On obtient
donc une suite exacte à 6 termes à partir de l'extension de Toeplitz, dont on
voudrait déduire le théorème, ce que l'on peut faire à condition de montrer que
d∗ induit un isomorphisme au niveau des K0 -groupes.
Lemme 6.
d∗ : K0 (A) → K0 (T ) est un isomorphisme.
Preuve 11. La suite exacte
A
0 est scindée,
et induit, modulo la périodicité de Bott, le diagramme commutatif suivant :
K1 (A)
0
SA
C(A ⊗ S1 )
K0 C(A ⊗ S1 )
K0 (A)
.
K0 (A)
K1 C(A ⊗ S1 )
K1 (A)
Mais, la suite étant scindée, tout élément de Ki (A) se relève, et les èches
connectantes, qui mesurent l'obstruction à être relevé, sont donc nulles : on
obtient deux suites exactes scindées :
0
K1−i (A)
Ki C(A ⊗ S1 )
Ki (A)
0
et donc Ki C(A ⊗ S1 ) ' K0 (A) ⊕ K1 (A).
Si on note φA : SA ⊕ A → A ⊗ C(S1 ) l'isomorphisme obtenu à partir des suites
exactes scindées, alors :
T
(idC(S1 ) ⊗ d)∗ ◦ φA
∗ = φ∗ ◦ d ∗ .
(5)
Le lemme 6 appliqué à idC(S1 ) ⊗ d : A ⊗ C(S1 ) → T (A ⊗ C(S1 )), et le fait
que T (A ⊗ C(S1 )) = T (A) ⊗ C(S1 ), assurent que (idC(S1 ) ⊗ d)∗ établit un
isomorphisme de K1 (A ⊗ C(S1 )) sur K1 (T ⊗ C(S1 )), ce qui, avec la remarque
(5) conclut.
Le théorème 5 découle directement des lemmes précédents : on passe l'extension
de Toeplitz en K -théorie et on se sert de la stabilité Ki (A ⊗ K) ' Ki (A) et de
l'isomorphisme Ki (A) ' Ki (T ).
27
3.2 Un exemple : le tore non-commutatif
Si on se xe un automorphisme α ∈ Aut(A), on peut construire le produit
croisé A ×α Z comme la C ∗ -algèbre universelle engendrée par A et un unitaire
u vériant :
∀a ∈ A, uau∗ = α(a).
Pour la construire eectivement, considérons A[u]. La relation de commutation
nous donne le produit suivant :
aun bum = aαn (b)un+m
∀a, b ∈ A, ∀n, m ∈ Z
Avec A = C(S1 ) et α l'automorphisme induit par z 7→ e2iπθz , on obtient le tore
non-commutatif Aθ . Le chemin φt : z 7→ e2itπθz montre que α est homotope à
l'identité et la suite exacte de Pimsner-Voiculescu se transforme alors en :
K0 (C(S1 ))
K1 (Aθ )
0
ι∗
K0 (C(S1 ))
K1 (C(S1 ))
ι∗
0
K0 (Aθ )
K1 (C(S1 )).
Mais Ki (C(S1 )) = Ki (SC ⊕ C) = K1−i (C) ⊕ Ki (C) = Z, d'où : Ki (Aθ ) =
Z ⊕ Z, i = 0, 1. Nous avons donc calculé les groupes de K -théorie du tore noncommutatif, mais nous allons dire plus. On peut en eet calculer les générateurs
de ces groupes.
Dénition 13. Un projecteur de Rieel de A ×α Z est un idemptotent autoadjoint de la forme x0 + x1 u + u∗ x∗1 , où x0 , x1 ∈ A.
Un projecteur de Rieel étant autoadjoint, nous pouvons immédiatement en
déduire que x0 aussi. L'idempotence conduit elle aux trois relations suivantes :
x0 = x20 + α−1 (x∗1 x1 ) + x1 x∗1
x1 = x0 x1 + x1 α(x0 )
0 = α−1 (x1 )x1 .
Rappelons que l'algèbre de Von Neumann enveloppante d'une C ∗ -algèbre A est
dénie par le bicommutant dans L(Hu ) de πu (A), où πu : A → L(Hu ) est la
représentation universelle de A, c'est-à-dire la somme hilbertienne de toutes les
représentations irréductibles de A.
Dénition 14. Soit x ∈ A un élément d'une C ∗ -algèbre.
Le support à gauche de x est déni comme le projecteur orthogonal de L(Hu )
sur la fermeture de l'image de πu (x). On le note lx .
Le support à droite de x est déni comme le projecteur orthogonal de L(Hu )
sur l'orthogonal du noyau de πu (x). On le note rx .
Ces deux projecteurs vérient : lx x = x = xrx , ∀x ∈ A et si x est autoadjoint,
alors ils sont égaux.
Proposition 7. Soit p = x0 + x1 u + u∗ x∗1 ∈ A ×α Z une projection de Rieel
et ∆ := lx1 le support à gauche de x1 . Alors l'unitaire exp(2iπx0 ∆) est dans A
et :
δ[p]0 = [exp(2iπx0 ∆)]1 .
28
Preuve 12. Soit
p = x0 + x1 u + u∗ x∗1 ∈ A ×α Z une projection de Rieel.
Montrons par récurrence que le relevé autoadjoint a = u∗ x∗1 ⊗ S ∗ + x0 ⊗ I +
x1 u ⊗ S ∈ T de p vérie :
∀n ≥ 1,
an = a + (xn0 − x0 )∆ ⊗ P.
Si c'est vrai au rang n,
an+1 = a2 + a(xn0 − x0 )∆ ⊗ P
= a + a(x20 − x0 )∆ ⊗ P + x0 (xn0 − x0 )∆ ⊗ P + x1 u(xn0 − x0 )∆ ⊗ SP
= a + (xn+1
− x0 )∆ ⊗ P + u(α(−1)x1 )(xn0 − x0 )∆ ⊗ SP
0
Le dernier terme étant nul (SP = 0), le principe de récurrence conclut.
Ayant exhibé un relevé autoadjoint de p, on est en mesure de calculer son indice.
Mais :
exp(2iπa) = 1 ⊗ I +
X 1
(a + (xn0 − x0 )∆ ⊗ P )
n!
n≥1
= (e
2iπ
− 1)(a − x0 ∆ ⊗ P ) + exp(2iπx0 ∆) ⊗ P + 1 ⊗ (I − P )
= ψ (exp(2iπx0 ∆) ⊗ e00 + 1 ⊗ (I − e00 )) .
Il vient :
∂[p]0 = [exp(2iπa)]1 = [exp(2iπx0 ∆) ⊗ e00 + 1 ⊗ (I − e00 )]1
La calcul montre au passage que e2iπx0 ∆ ∈ A. En eet, π(e2iπa ) = 1 donc
(e2iπx0 ∆ − 1) ⊗ P ∈ Ker π = Im ψ donc e2iπx0 ∆ ⊗ e00 ∈ A ⊗ K.
Le ∗-homomorphisme δ étant la composition du connectant ∂ : K0 (A ×α Z) →
K1 (A × K) avec l'isomorphisme K1 (A × K) ' K1 (A), on en déduit :
δ[p]0 = [exp(2iπx0 ∆)]1 .
Ce résultat met à notre disposition une autre méthode de calcul de l'image par
l'application exponentielle d'un projecteur dans le cas des projecteurs de Rieffel. Il est à rapprocher de la proposition 6 : Pimsner et Voiculescu [4] décrivent
de manière eective l'application exponentielle dans le cas d'un produit croisé
A ×α Z.
Nous avons vu que la suite exacte à 6 termes donnait deux suites exactes courtes,
dont :
0
K0 (C(S1 ))
K0 (Aθ )
δ
K1 (C(S1 )))
0
On sait que les groupes à gauche et à droite sont tous les deux Z, l'un étant
généré par la classe de la projection 1 ∈ C(S1 ), l'autre par la classe de l'unitaire
29
z = idS1 ∈ C(S1 ). Si l'on trouve un projecteur p tel que δ[p]0 = [z]1 , on peut
dire que K0 (Aθ ) est engendré par [1]0 et [p]0 .
On note ϕ la fonction dénie par α(f )(z) = f (e2iπθ z) = f ◦ϕ(z). Soit 0 < δ < θ.
Soit f la fonction de R, ane par morceaux et 1 périodique, qui vaut 1 si t est
dans [δ, θ], 0 si t ∈ [θ + δ, 1] et est nulle en 0. On relève f en une fonction
x0 : S1 → R telle que f (t) = x0 (e2iπt ), ainsi que 10<t<δ (prolongée par 1périodicité) en ξ . Enn on pose :
x1 =
p
x0 (1 − x0 )ξ.
On vérie par un simple calcul que pθ = x0 +x1 u+u∗ x∗1 dénit un projecteur de
Rieel. Maintenant, g étant auto-adjoint, son support gauche et droit coïncide
(c'est le support de g ), et (x0 ∆)(e2iπt ) = δt 10<t<δ . Cette fonction est homotope
à z , et donc la proposition précédente conclut :
δ[pθ ]0 = [z]1 .
Pour déterminer les générateurs de K1 (Aθ ), observons la suite exacte
0
K1 (C(S1 ))
K1 (Aθ )
δ
K0 (C(S1 )))
0 .
A nouveau, les deux groupes à droite et à gauche sont Z donc K1 (Aθ ) est un
groupe libre abélien à deux générateurs. Le premier est donné gratuitement :
on a vu que K1 (C(S1 )) était généré par la classe de l'inclusion v : S1 → C, donc
son image dans K1 (Aθ ), c'est à dire [v]1 , est un premier générateur.
Grâce aux lemmes 2 et 6, on sait que K1 (Aθ ) est généré par des classes d'unitaires de la forme [1 − F + F x(u∗ ⊗ 1n )]1 dont l'indice est
δ[1 − F + F x(u∗ ⊗ 1n )]1 = [F ⊗ e00 ]0 .
L'indice de u∗ est donc directement calculable :
δ[u∗ ]1 = [1]0 ,
et c'est un générateur de K0 (C(S1 )). Donc K1 (Aθ ) est isomorphe à Z2 , généré
par les classes de u et v . Ici, u représente l'unitaire qui rend intérieure l'action
de Z sur C(S1 ), et Aθ est engendrée par les deux unitaires u et v soumis à la
relation u∗ vu = e2iπθ v .
Tout élément de Aθ peut se décomposer en série de Fourier sous la forme
x=
X
fn un
, fn ∈ C(S1 )
n∈Z
avec convergence en norme des séries partielles. Alors τ (x) := S1 f0 (z)µ(dz),
où µ est la mesure de Haar normalisé sur S1 , dénit une trace continue normalisée, qui est dèle lorsque θ est irrationnel. Cette trace induit un morphisme
τ∗ : K0 (Aθ ) → C.
R
Quelques remarques :
30
1. On voit que K∗ (Aθ ) = Z ⊕ Z, pour tout θ irrationnel. En particulier les
groupes de K -théorie ne distinguent pas entre les diérentes algèbres de
rotations irrationnelles.
2. Le résultat précédent permet en particulier de montrer que l'image du
morphisme induit τ∗ : K0 (Aθ ) → C est exactement Z + θZ, en calculant
τ (1) = 1 et τ (pθ ) = θ. Ceci a permis à M. Rieel de montrer dans [9]
que, si θ et θ0 sont irrationnels, alors Aθ et A0θ sont isomorphes ssi les
parties fractionnaires de θ et θ0 ou celles de θ et 1 − θ0 sont égales.
En guise de conclusion, le lecteur interessé est invité à lire l'article de Pimsner
écrit en 1997, A class of C ∗ -algebras generalizing both Cuntz-Krieger algebras
and crossed products by Z [8], qui généralise la suite exacte à six-termes pour les
produits croisés. Dans ce papier, Pimsner construit pour tout A − A-bimodule
hilbertien E deux C ∗ -algèbres OE et TE . Il montre alors que lorsque l'on considère A comme bimodule hilbertien sur lui-même, on retrouve OA = A ×α Z
pour un certain automorphisme α. De la même façon que dans [4], il prouve
une K -équivalence entre TE et A, et en déduit des suites exactes à six-termes
en KK -théorie.
Côté applications, le tore non-commutatif apparaît dans des modèles appelés
modèles de Harper, dont l'objectif est de décrire un électron se déplaçant dans un
réseau cristallin soumi à un champ magnétique uniforme : l'électron se déplace
dans un solide constitué de noyaux immobiles positionnés aux noeuds du réseau.
Par exemple, on peut considérer le réseau Z2 sur lequel on applique un champ
magnétique perpendiculaire constant, dont le ux normalisé est 2πα = 2π φφ0 ,
φ0 = ~/e étant le quantum de ux et φ le ux par maille. L'espace de Hilbert
naturellement associée à ce problème est l2 (Z2 ), et on considère alors l'algèbre
d'opérateurs dénie par
W (m)ψ(x) = eiπα{x,m} ψ(x − m) , ∀m, x ∈ Z2 , ψ ∈ l2 (Z2 )
où {x, m} = x1 m2 − x2 m1 .
En posant U1 = W (1, 0) et U2 = W (0, 1), tout opérateur s'écrit
W (m) = U1m1 U2m2 eiπαm1 m2
et U1 et U2 vérient la relation U1 U2 = e2iπα U2 U1 : on reconnaît A2πα . Or
les physiciens arment que l'opérateur hamiltonien du système étudié, dont le
spectre donne les valeurs possibles de l'énergie, est l'opérateur de Harper :
Hα = U1 + U1∗ + U2 + U2∗ .
On peut montrer qu'en un certain sens, le spectre est continu en α. Si le ux
α = pq est rationnel, le spectre est séparé en q bandes. Pour les valeurs irrationnelles du ux, le spectre est un ensemble de Cantor, c'est-à-dire un fermé
nulle part dense sans point isolé. Pour plus de détails, on pourra se reporter au
séminaire Bourbaki de J. Bellissard [1]. Pour en avoir une idée, on peut observer
numériquement les valeurs du spectre pour les rationnels. Il sut pour cela de
calculer le spectre de matrices de dimensions nies grâce à la représentation
31
dèle de A2π pq

0 1 0...
0 0 1...

.
π(U1 ) = 
. .
0 0 0...
1 0 0...

0 0
0 0

. .
 ∈ Mq (C),
0 1
0 0
p
π(U2 ) = diag e2iπ(j−1) q
.
j=1,q
On obtient alors ce que l'on appelle le papillon de Hoftstadter i.e. l'ensemble
{(x, α) : α ∈]0, 1[, x ∈ Spec(Hα )} du plan. Voici une image générée avec Scilab.
Figure 2 Papillon de Hofstadter
32
Références
[1] Jean Bellissard. Le papillon de hofstadter. Seminaire N. Bourbaki, 745 :7
39, 1991-1992.
[2] Alexandre Grothendieck. Produits tensoriels d'espace topologiques et espaces nucléaires. Séminaire N. Bourbaki, 69 :193200, 1951-1954.
[3] A. Hatcher. Algebraic Topology. 2001.
[4] D. Voiculescu M. Pimsner. Exact sequences for k-groups and ext-groups of
certain cross-products of c∗ -algebras. Operator theory, 4 :93118, 1980.
[5] Gerard J. Murphy. C ∗ -algebras and operator theory. Academic Press Inc.,
1990.
[6] Alain Connes Paul Baum. Geometric k-theory for lie groups and foliations.
Enseign. Math., 46 :342, 2000.
[7] Nigel Higson Paul Baum, Alain Connes. Classifying space for proper actions
and k-theory of group c∗ -algebras. Contemporary Mathematics, 197 :241
291, 1994.
[8] Michael V. Pimsner. A class of c∗ -algebras generalizing both cuntz-krieger
algebras and crossed products by z. Fields Institute Communications,
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