Epreuve écrite de culture générale - Central Authentication Service

Hugo Coniez – IEP – Conférence de préparation à l’épreuve de culture générale
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Epreuve écrite de culture générale :
thodologie et conseils divers
L’épreuve de culture générale aux concours administratifs fait peur. Elle ne porte sur
aucune des disciplines universitaires reconnues ce qui la rendrait aléatoire et elle s’affiche
comme une épreuve sélective ce qui signifierait qu’elle est socialement injuste. Cette réputation
n’est pas justifiée. En respectant quelques principes simples, en mobilisant toutes ses
connaissances, il est possible non seulement de se sortir de cette épreuve avec les honneurs, mais
encore de marquer des points, sans qu’il soit besoin pour cela de disposer de connaissances
encyclopédiques.
I. Lesprit de lépreuve- généralités
Les jurys successifs insistent sur la nécessité pour les candidats de faire preuve
d’originalité, d’identifier les vrais enjeux du sujet, de construire une pensée personnelle, cohérente
et bien articulée. Tout cela signifie que le candidat doit savoir prendre du recul. Il lui faut placer
une question en perspective et la saisir dans son contexte. C’est le point le plus difficile. Le
reste est rhétorique. Le reste s’acquiert avec l’entraînement.
Le café du commerce, voilà l’ennemi !
1. Les pièges classiques
- Faire une copie de droit, d’économie, de questions européennes, etc. Il faut
impérativement chercher des éléments ailleurs que dans les matières qui sont
enseignées en Prép’ENA, et se tourner notamment vers l’histoire, la littérature, la
sociologie, l’art, la philosophie… Attention à la dérive technique.
- Ne traiter que l’actualité d’une question, ce qui s’achève en général par un programme
consensuel bêlant. L’actualité est toujours au point de départ, jamais à l’arrivée (elle
apparaît nécessairement dans l’introduction, où elle permet de faire semblant qu’il y a une
bonne raison de donner ce sujet).
- Replacer maladroitement des fiches de lecture. Il est préférable de n’utiliser le jour de
l’épreuve que des références pleinement maîtrisées. Les lectures utiles s’arrêtent en juin.
- Faire un catalogue d’auteurs (name dropping) ou les évoquer de façon trop elliptique ou
caricaturale. Sans s’appesantir, naturellement, il est nécessaire d’expliciter les références sur cinq à
six lignes. Il faut sans doute distinguer « l’illustration » placée au détour d’une phrase
pour la beauté du discours de « l’exemple », qui dans l’idéal doit être un peu fouillé,
parfois même repris, réinterprété et nuancé plus loin dans la copie.
- Se répéter, s’enliser, tourner en rond.
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2. La voie à suivre
- Il faut toujours veiller à progresser dans la copie, en déroulant l’argumentation, en
suivant un ordre logique ou chronologique. Il faut aller du fait à la théorie, des réalités
concrètes à l’interprétation abstraite, du simple au complexe, de l’évident au moins connu,
de l’apparence au sens caché, de l’opinion (doxa) à la vérité, du passé à l’avenir. Trop de
copies se répètent ou reviennent en arrière en livrant en fin de devoir des aperçus
historiques, des éléments factuels, des chiffres ou des évidences par lesquels il eût fallu
commencer.
- Il faut dans la mesure du possible faire montre de son savoir, sans vanité mais sans
complexe non plus. Faites votre miel de tout : livres, événements, citations, anecdotes... Si
vous le pouvez, privilégiez toutefois les références aux trois cultures qui sont aujourd’hui
en déclin mais qui ont marqué les générations précédentes et qui témoignent encore
souvent d’un authentique savoir : la culture classique des humanités, la culture catholique
et la culture marxiste.
- Sans tomber dans la polémique ni dans l’agressivité, sans se départir du ton impersonnel
qui caractérise la dissertation, il faut engager son opinion personnelle, notamment en
II-B et dans la conclusion. Trop de candidats répugnent à trancher, même sur des points
sans conséquence. Un candidat ne sera jamais sanctionné pour ses opinions même si
naturellement il est exclu d’exprimer dans une copie de concours le moindre sentiment
extrémiste.
- Enfin, l’épreuve est en bonne partie destinée à vérifier votre capacité à écrire un bon
français (cf. infra).
3. Pour se préparer à l’épreuve - Bibliographie
- Lire les rapports des jurys des années précédentes, si vous ne l’avez déjà fait.
- Faire des devoirs, mais toujours dans les conditions de l’épreuve (rien de plus absurde
que de passer deux jours sur une copie). Ensuite, lire les copies des autres (les bonnes
et les publiées, mais aussi, parfois, les moins bonnes).
- Lire un quotidien, en étant très attentif à son supplément littéraire.
- Sur Internet : site « La vie des idées.fr », de Rosenvallon. Eventuellement, « La
République des livres », le blog de Pierre Assouline.
- Etre curieux de ce qui paraît : aller régulièrement en librairie. Lire les « livres du
jour », conseillés à chaque cours.
- Lire une revue intellectuelle. Plutôt que s’abonner à une publication en particulier, je
suggère de suivre régulièrement en bibliothèque les parutions de Commentaire, Esprit, Le
débat et Le Banquet, en sélectionnant les articles les plus intéressants.
- Lire cet automne un manuel d’histoire de France, que l’on relira à l’été prochain avant
les épreuves. Je suggère l’Histoire de France de Marc Ferro (Odile Jacob poches), et/ou
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l’Histoire de France sous la direction de Jean Carpentier et de François Lebrun (collection
Points histoire).
- Relire vos cours de philosophie de terminale, s’ils sont bien faits, ou tout autre cours qui
ferait référence à la culture générale (enseignements d’ouverture…).
- Avoir un auteur de chevet dont le style et les idées pourront servir d’inspiration.
Choisissez un classique que vous pourrez citer et qui ait réfléchi aux questions politiques.
Ce pourrait être Tocqueville, Constant, Valéry, Aron, Sartre, Foucault ou d’autres à votre
convenance.
- Lire progressivement, au cours de l’année, les meilleurs articles des Lieux de mémoire de
Pierre Nora (Gallimard, Quarto). Cet ouvrage est une mine d’or.
- Aller aux textes mêmes et ne pas s’encombrer des publications « parascolaires » qui
résument les œuvres et vous feront perdre votre temps et votre argent.
- Constituer un carnet de citations, de formules, de bons mots que vous remplirez au
cours de l’année. Apprenez-en le plus possible, et retenez l’idée générale des autres.
- Constituer un carnet de vocabulaire technique.
- Consulter ponctuellement, en fonction des besoins - certaines références classiques :
L’histoire des idées politiques de Jean Touchard ; le Dictionnaire encyclopédique d’Histoire de
Mourre ; le Lagarde et Michard pour la littérature ; le Dictionnaire culturel de la Bible (édité au
Cerf).
II. Face au sujet
Rappel préliminaire : sauf cas exceptionnels, la lecture du sujet glace et laisse désemparé. Cette
impression est tout à fait naturelle de même qu’il est tout à fait normal dans les épreuves de
note sur dossier de ne rien comprendre pendant la première heure de lecture du dossier. Suivez
calmement la méthode que vous vous serez forgée, à partir de mes conseils et de votre propre
expérience. Répétez vous la phrase de Montaigne, d’après Tite-Live : « moins d’ordinaire on a
peur, moins on court de danger ».
Je propose une méthode articulée autour de six étapes (définition, grille, lecture, plan, pause,
rédaction), qui peuvent évidemment se confondre ou s’agencer dans un ordre différent, selon vos
préférences ou selon les sujets. De même, les indications de temps proposées pour chaque étape
sont indicatives.
1. Définir le sujet
Deux approches successives :
- D’abord, type « dictionnaire de mots » : le ou les sens de l’expression (ou des expressions)
qui constituent le cœur du sujet ou de la citation, son étymologie et la date de son
apparition si vous les connaissez. Ex : république, qui vient de res publica, qui ne prend son
sens de « régime opposé à la monarchie » qu’au XVIIIe siècle, etc. Attention à ne pas
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définir trop longuement des mots dont le sens est évident : vos correcteurs sont censés
avoir une culture minimale et connaître le français…
- Ensuite, type « dictionnaire de choses » : l’histoire de la notion, ce qu’elle signifie
aujourd’hui, son contexte, ses résonances dans l’actualité. Cette deuxième approche est la
plus utile, elle est même la plupart du temps décisive, car elle vous permet de prendre du
recul sur les choses.
Dès ce stade, vous notez tout ce que vous évoque le sujet. Pensez aux concepts proches (Etat >
Nation > République…), aux expressions associées, aux clichés, aux jeux de mots.
Si le sujet est une citation longue d’un auteur, centrez votre réflexion sur l’idée essentielle mais
dans votre copie faites de fréquentes allusions aux notions périphériques évoquées dans la
citation. Rassemblez tout ce que vous savez de l’auteur (et notamment le titre de ses autres
œuvres), et recasez le ensuite dans la copie.
Attention si ce sujet a été partiellement traité en cours, de ne pas vouloir plaquer des éléments qui
ne lui correspondraient pas exactement. Chaque sujet est unique.
Un petit truc qui peut vous être utile, notamment si vous maîtrisez déjà l’exercice : essayez de
repérer très vite ce que la masse des candidats va dire. Avec un peu de chances, vous allez
voir le contre-sens ou le piège dans lequel nombre de vos camarades vont tomber. Dans ce cas,
pas de charité qui tienne : indiquez dès l’introduction que telle piste n’est pas la bonne… C’est ce
que j’appelle « bâtir sa copie sur les décombres des copies des autres ». De même, avec un peu
d’expérience vous verrez ce fera la matière des complaintes du prochain rapport du jury. Ecartez-
vous en le plus possible, votre originalité en ressortira d’autant.
2. Remplir cette grille, par libres associations d’idées
Actualité/
Politique
Histoire
Philosophie
(politique)/
Essais
Littérature/
cinéma/arts
(musique,
peinture…)
Sociologie/
questions de
société/sciences
Autres
matières
étudiées en
cours
d’année
Ainsi sollicitez-vous tous les aspects de votre culture. Attention, tout ne se vaut pas !
- Pour chaque rubrique, pensez systématiquement aux anecdotes, qui donneront de la vie
à votre copie et qui valent mieux qu’un long discours théorique.
- La rubrique « histoire » doit être la plus fournie. Les jurys y sont très sensibles. Travaillez
donc votre culture historique. Commencez toujours par situer la question posée
dans une perspective historique. Vous pouvez utiliser toutes les périodes de l’Histoire
(mais attention toutefois à ne pas tomber dans l’excès inverse, à savoir une copie
purement historique dans laquelle les époques s’enchaînent sans réflexion). La
philosophie politique sera le second pilier de votre devoir.
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- La rubrique « actualité » est importante, car elle fournit parfois le point de départ de la
réflexion et donc de la copie. Ne pensez pas qu’au journal de la veille, mais aussi à
l’actualité éditoriale et à celle des revues. Un sujet sur la laïcité, par exemple, doit conduire
à faire référence dans l’introduction au centenaire de la loi de 1905, mais aussi à la
floraison de publications qu’il a entraînées (numéro d’Esprit du mois de mai 2005, etc.)
- Les références littéraires, cinématographiques ou artistiques doivent tenir la route.
Respectez la hiérarchie des œuvres culturelles et privilégiez donc les classiques. Evoquez
les films de Jean Renoir ou de Stanley Kubrick, pas de Steven Spielberg !
- Privilégiez les références aux beaux-arts, qui ne s’enseignent pas à l’école : commenter
un tableau sur quelques lignes, pour en faire ressortir l’idéologie, sera du meilleur effet et
attestera de votre originalité.
- Pour la philosophie, bannissez les auteurs médiatiques à la mode mais de nul contenu
(cette conférence vous apprendra à les repérer). Attention aussi au piège classique
« Hobbes (ou Hegel, Kant…) en deux lignes ».
- Les références aux autres matières étudiées en Prép’ENA (droit, économie…) doivent
rester tout à fait exceptionnelles, sinon le jury pensera que vous vous trompez d’épreuve.
Même si le sujet porte sur la responsabilité, ne ressortez jamais l’arrêt Blanco !
- Même si les sujets donnés ont souvent une forte connotation nationale, efforcez-vous de
sortir du cadre étroit des références et des polémiques hexagonales. Pensez
systématiquement à faire des comparaisons internationales. Elles contribueront à
distinguer votre copie.
- Dernier conseil : ne prenez pas de risque. Le concours de l’ENA ne s’y prête guère.
Dans le doute, abstenez-vous. Rien de plus dommageable que de « prendre le Pirée pour
un homme ».
4. Faire le plan
Vous pouvez faire autant de parties que vous le souhaitez, pourvu qu’il y en ait deux.
Rédigez au brouillon les titres, qui constitueront les premières phrases de vos parties et sous-
parties.
Surtout, veillez toujours à ce que les sous-parties soient équilibrées, en prévoyant au stade du plan
autant de munitions que nécessaire. Pour équilibrer vos parties, pensez qu’un même fait, une
même référence, une même idée peuvent être présentées sous un jour positif aussi bien que
négatif.
Le plan aux épreuves de l’ENA est assez souvent stéréotypé. Ne vous cassez pas la tête à
trouver quelque chose de très original, vous perdriez du temps. L’expérience montre que le plan
suit assez souvent ce schéma :
[ Intro : accroche, ce qui fait que la question est d’actualité, définition (qui permet de progresser
jusqu'à la problématique), problématique (question au style direct ou indirect), annonce du plan. ]
A. Historique d’un problème, d’une institution – les causes d’une situation.
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