Chemins de Dialogue – 20 - Institut Catholique de la Méditerranée

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Chemins de Dialogue – 20
L’Église et les religions
de Vatican II à nos jours
Chemins de Dialogue, 2002
Marseille
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© 2002, Chemins de Dialogue
11, impasse Flammarion – 13001 Marseille
✆ 04 91 50 35 50 – Fax 04 91 50 35 55
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I.S.S.N. 1244-8869
Publié avec le concours du CNL
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Chemins de Dialogue
Revue théologique et pastorale sur le dialogue interreligieux,
fondée par l’Institut de sciences et théologie des religions de Marseille
de l’Institut catholique de la Méditerranée,
éditée par l’association « Chemins de Dialogue »,
publiée avec le concours du Centre National du Livre.
NUMÉRO 20 – SEPTEMBRE 2002
DIRECTEUR DE L’ÉDITION
Christian Salenson
COORDINATION DU COMITÉ DE RÉDACTION
Jean-Marc Aveline,
Roger Michel, Christian Salenson
COMPOSITION
Olivier Passelac
COUVERTURE
Peinture d’André Gence
REVUE BISANNUELLE
Numéro 20 : 18 €
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SOMMAIRE
Liminaire ............................................................................................................. 7
Jean-Marc Aveline
L’Église et les religions ......................................................................... 15
Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux ......................................... 17
Jean-Marc Aveline
Dialoguer, pourquoi ? ........................................................................................ 39
Jacques Levrat
Le Pape Jean-Paul II et les musulmans ............................................................ 57
Roger Michel
Textes de référence ................................................................................... 67
Nostra ætate ..................................................................................................... 69
Concile Vatican II [1965]
Ecclesiam suam (extraits) ................................................................................... 79
Paul VI [1964]
Redemptoris missio (extraits) .............................................................................. 83
Jean-Paul II [1990]
Dialogue et mission (extraits) .............................................................................
Secrétariat pour les non-chrétiens [1984]
91
Dialogue et annonce (extraits) ............................................................................
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et
Congrégation pour l’évangélisation des peuples [1991]
99
Dominus Iesus (extraits) ...................................................................................
Congrégation pour la doctrine de la foi [2000]
111
Chrétiens et musulmans sous le regard de Dieu ............................................ 129
Jean-Paul II [1985]
Visite à la Synagogue de Rome ...................................................................... 143
Jean-Paul II [1986]
Discours aux Cardinaux et à la Curie Romaine .............................................163
Jean-Paul II [1986]
Discours à la grande mosquée Omeyyade de Damas ......................................177
Jean-Paul II [2001]
Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix ..................... 181
Jean-Paul II [2002]
Tables générales de Chemins de Dialogue 1 à 20 ................... 197
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DIALOGUE ET VÉRITÉ
Lorsqu’au cœur du concile Vatican II le pape Paul VI publia, le
6 août 1964, sa première lettre encyclique Ecclesiam suam, il invitait
l’Église à un triple travail : approfondir le mystère de son identité
et de sa mission, en dépendance du mystère de Jésus Christ,
lumière du monde ; s’engager courageusement sur la voie du
renouveau, afin de mieux correspondre à sa vocation ; proposer au
monde le dialogue du salut, en se faisant elle-même « parole,
message, conversation »1, avec tous les membres de la famille
humaine, qu’ils soient athées, indifférents ou croyants, quelles que
soient leurs cultures et leurs religions. Vivre la mission comme un
dialogue et le dialogue comme un service : telle est la vocation de
l’Église dans le monde de ce temps. « Le climat du dialogue, c’est
l’amitié. Bien mieux, c’est le service. »2
On ne dira jamais assez l’importance et la fécondité de ce
programme de Paul VI, en accord profond avec le concile Vatican
II3. À en croire les fréquentes invitations du pape Jean-Paul II, il
importe grandement aujourd’hui de revenir à ce concile, d’en
approfondir les textes, d’en mettre en œuvre les orientations4.
Parmi ces orientations, celle de la rencontre et du dialogue avec
les fidèles des différentes religions est devenue, au fil des années
post-conciliaires et plus fortement encore à l’orée du troisième
millénaire, d’une évidente nécessité. Non pas que l’Église privilégierait, dans la famille humaine, ceux qui partagent avec elle
l’expérience d’une croyance religieuse : elle sait que le Dieu de
l’Évangile s’est fait proche de tous les hommes, du croyant comme
1. Cf. Ecclesiam suam, n° 67.
2. Ibid., n° 90.
3. Sur Ecclesiam suam, on pourra consulter le dossier réalisé dans Chemins de
dialogue [CdD] 4 (1994), comprenant les textes de Jean Chelini (p. 25-47),
Maurice Vidal (p. 49-63) et du cardinal Josez Tomko (p. 65-105).
4. Voir, par exemple : Jean-Paul II, Entrez dans l’espérance, Paris, Plon-Mame, 1994,
notamment p. 233-245.
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de l’incroyant ! Non pas qu’elle se comprenne elle-même comme
devant jouer un rôle fédérateur, pour unir les religions contre l’irréligion ou pour la défense de leurs intérêts : elle sait que toutes les
religions, y compris le christianisme, peuvent trahir le message sur
lequel elles prétendent être fondées, et que le Dieu de l’Évangile,
loin de consacrer une religion absolue, s’est offert en dialogue à
tout homme de bonne volonté, spécialement aux faibles et aux
petits, aux étrangers et aux exclus.
Non : si l’Église s’engage dans le dialogue interreligieux, c’est
parce qu’elle croit que l’initiative de ce dialogue d’alliance vient de
Dieu5, et que cela fait partie de sa mission d’être sacrement de
l’amitié de Dieu pour tous les hommes, signe et moyen « de l’union
intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain »6. Petit
troupeau à la nuque parfois raide, elle sait d’expérience que,
malgré ses erreurs et ses infidélités, sa vocation est d’accueillir, de
célébrer et d’annoncer cette relation d’amitié, relation d’alliance,
que Dieu propose à l’humanité tout entière. Sachant aussi que celui
qu’elle confesse comme le Christ, l’unique sauveur du monde,
Jésus de Nazareth, a payé de sa vie l’aveuglement et l’absolutisme
politico-religieux refusant son message d’amour et de libération,
de justice et de paix, elle comprend que son rôle est de rester
prophétique, vigilante et humble, au service des plus pauvres, sous
la conduite de l’Esprit du Christ, qui suscite et appelle partout, à
l’intérieur comme à l’extérieur des religions, des amis de Dieu.
L’engagement dans le dialogue interreligieux est donc pour
l’Église une façon parmi d’autres de mettre en œuvre cette amitié
qui vient de Dieu et qui rend l’homme libre. Et elle le fait d’une
double façon. D’une part, par l’infini respect qu’elle témoigne à la
famille humaine, dans la diversité de ses cultures et de ses
religions, cherchant à les connaître et à les rencontrer, dans l’esprit
de la déclaration conciliaire Nostra ætate7. D’autre part, par un
5. « Voilà, vénérables frères, l’origine transcendante du dialogue. Elle se trouve
dans l’intention même de Dieu » (Paul VI, Ecclesiam suam, n° 72).
6. Concile Vatican II, Lumen Gentium, n° 1.
7. « L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions.
Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles
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Liminaire
vigoureux appel à la prière, à la réflexion et à l’action, comme ce fut
le cas lors de la grande journée d’Assise du 27 octobre 19868, au
service des grandes aspirations qui font la dignité de l’humain :
l’amour et la vérité, la justice et la paix, l’espérance et le pardon.
Faisant cela au nom de Jésus Christ, l’Église accomplit concrètement
sa vocation de « sacrement universel du salut »9, témoin et artisan
de l’accueil du monde dans la vie trinitaire de Dieu.

Cette expérience nouvelle de la rencontre interreligieuse a
entraîné pour la théologie et la pastorale chrétiennes, selon les
profondes intuitions de Paul VI, de multiples réflexions et initiatives. En octobre 1992, à la faveur d’un synode diocésain, l’Église
qui est à Marseille créait un Institut de sciences et théologie des
religions (ISTR)10, sur le modèle de celui existant déjà à l’Institut
catholique de Paris depuis 196711. L’année suivante, en janvier 1993,
l’ISTR de Marseille fondait la revue Chemins de dialogue, dans le but
d’apporter une contribution à la réflexion théologique et pastorale
sur le dialogue interreligieux, en permettant une communication des
idées, des recherches, des expériences et des questionnements12.
8.
9.
10.
11.
12.
et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’ellemême tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui
illumine tous les hommes » (Nostra ætate, n° 2).
Sur cette journée, voir l’ensemble de CdD 7 (1996). Voir également : Christian
Salenson, « Assise, de 1986 à 2002 », CdD 19 (2002), p. 7-12.
Lumen gentium, n° 48.
Cf. Paul Bony et Jean-Marc Aveline, « À l’origine de l’ISTR de Marseille », CdD
1 (1993), p. 13-18.
Cf. Bernard Lucchési, « Henri Bouillard et l’ISTR de Paris », CdD 15 (2000), p.
189-199.
Pour une réflexion sur la portée théologique de l’édition d’une revue de
théologie, voir les profondes remarques de Joseph Moingt, « L’acte théologal
de communiquer », dans François Bousquet, Henri-Jérôme Gagey, Geneviève
Médevielle, Jean-Louis Souletie, La responsabilité des théologiens. Mélanges offerts
à Joseph Doré, Paris, Desclée, 2002, p. 581-593, notamment p. 589, où l’auteur
présente l’édition d’une revue de théologie comme « un acte formellement
théologal (et non un simple instrument au service de la théologie) en tant
qu’elle participe de la nature même de la théologie, qui est, réciproquement,
de communiquer et de faire communiquer. »
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J’ai déjà eu l’occasion, lors de la dixième livraison en 1997, de
faire le point sur les différents thèmes abordés dans notre revue et
d’en proposer une lecture synthétique, qui se voulait refléter le lien
existant entre le développement d’une revue et l’état de la société
dans laquelle elle s’élabore13. Une rapide relecture des dix dernières
livraisons m’invite à ajouter à la synthèse d’alors une triple considération, dans la ligne des trois invitations de Paul VI dans
Ecclesiam suam.
Je relève tout d’abord le travail d’approfondissement des
questions théologiques qu’entraîne la réflexion sur ce que devient
l’identité chrétienne lorsqu’elle est engagée dans la rencontre interreligieuse. C’est, par exemple, la question posée par le cardinal
Etchegaray au début du numéro 11 : est-ce que le christianisme a
besoin du judaïsme ? Ou encore, dans un tout autre style, celle
soulevée par Pierre Gisel dans le même numéro : quelle place et
quelle fonction de la théologie dans l’approche du religieux et des
religions ? C’est, d’une autre façon, l’effort engagé pour recueillir
les réflexions de quelques chercheurs et témoins, plongés dans des
problématiques et des contextes parfois bien différents des nôtres,
mais cependant fort instructives pour la tâche d’aujourd’hui,
comme Albert Schweitzer14 ou Rudolf Bultmann15, Maître Eckhart16
ou Thomas Merton17. Ce sont aussi des essais d’appréciation
comparée de thèmes importants dans diff é rentes traditions,
comme le thème du messianisme et de la loi dans le dialogue
judéo-chrétien18, le thème de la non-dualité dans la rencontre avec
13. Cf. Jean-Marc Aveline, « Pluralisme et vérité », CdD 10 (1997), p. 7-13.
14. Cf. André Gounelle, « Les religions du monde selon Albert Schweitzer », CdD
12 (1998), p. 157-177.
15. Cf. Henri-Jérôme Gagey, « Bultmann et la théologie de la mission », ibid., p.
179-203.
16. Cf. Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière, « L’expérience religieuse
selon Maître Eckhart », CdD 15 (2000), p. 83-94.
17. Cf. Patrick Hart, « Thomas Merton : un moine œcuménique », CdD 13 (1999),
p. 81-91 ; Thomas Merton, « L’expérience intérieure. Notes sur la contemplation », CdD 15 (2000), p. 17-75.
18. Cf. Jean Richard, « La personnalité messianique, une voie de dialogue judéochrétien », CdD 14 (1999), p. 179-204 ; Geneviève Comeau, « Loi et liberté dans
le judaïsme et le christianisme », ibid., p. 205-216..
10
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l’hindouisme19, ou celui de la compassion dans la rencontre avec le
bouddhisme20, ou encore la figure de Marie, dans le dialogue
islamo-chrétien21. En définitive, c’est sur les dossiers christologique22 et ecclésiologique23 que convergent, en ce premier domaine,
nombre de réflexions.
Je souligne ensuite, dans la ligne de l’effort de renouveau souhaité
par Paul VI, l’importance de toutes ces recherches pastorales24, ces
compte-rendus d’expériences25, ces efforts pour que chaque Église
locale puisse communiquer ses propres réflexions et questions aux
autres, en fonction de sa pratique et de sa situation26. En ce
19. Voir l’ensemble du dossier reprenant un colloque organisé au Centre théolo gique de Meylan et publié dans CdD 17 (2001), avec les contributions d’Henri
Bourgeois, Jean-Pierre Schetzler, Michel Fédou, Éric Rommeluère, Marie-Anne
Vannier, Bernard de Give et Pierre-Jean Labarrière.
20. Cf. Henri Bourgeois, « Amour et compassion selon le christianisme et le
bouddhisme », CdD 16 (2000), p. 101-116.
21. Cf. Cardinal Francis Arinze, « La Bienheureuse Vierge Marie, un signe pour les
croyants », CdD 19 (2002), p. 209-226.
22. Cf. Charles Perrot, « Jésus le juif », C d D 17 (2001), p. 15-34 ; Michaël
Amaladoss, « Comment les Hindous considèrent-ils Jésus Christ ? », ibid., p.
35-46 ; Claude Geffré, « Le paradoxe christologique comme clé herméneutique
du dialogue interreligieux », CdD 19 (2002), p. 161-182 ; Jean Richard, « Thèses
pour une théologie pluraliste des religions », ibid., p. 183-206.
23. Cf. Jean-Marc Aveline, « L’engagement de Dieu et la mission de l’Église », CdD
16 (2000), p. 17-58 ; Jean-Marie Ploux, « Mystiques et dialogue interreligieux »,
CdD 18 (2001), p. 221-259.
24. Cf. Joseph Doré, « Foi islamique et pastorale chrétienne », CdD 12 (1998), p. 73100, et l’ensemble du sossier consacré au fait religieux à l’école dans CdD 14
(1999), avec des interventions de Pierre Gire, Joseph Decoopman, Jean-Marc
Aveline et Christian Salenson.
25. Cf. Marie-Christine Ray, « Le témoignage de Tibhirine. Un chemin de
rencontre entre chrétiens et musulmans », CdD 13 (1999), p. 17-29 ; Daniel Pont,
« Dans les monastères zen du Japon », ibid., p. 53-65 ; Jacques Levrat, « La
Source, à Rabat : un lieu de rencontre islamo-chrétien », ibid., p. 221-229 ;
Michel Guillaud, « Faire France avec les jeunes musulmans », CdD 14 (1999),
p. 109-124.
26. Cf. Pierre Fournier, « La rencontre des religions au Liban », CdD 11 (1998), p.
205-224 ; Joseph Maalouf, « Pour une collaboration éthique entre chrétiens et
musulmans au Liban : de la polémique au dialogue », CdD 15 (2000), p. 133167 ; Joseph Doré, « Aspects de la réception de Nostra ætate dans l’Église de
France », CdD 16 (2000), p. 125-144 ; Henri Sanson, « Église d’Algérie », CdD 17
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deuxième domaine, l’acte de communiquer rendu possible par une
revue peut apporter une précieuse contribution à l’effort de renouvellement des pratiques pastorales et de la vie institutionnelle de
l’Église.
Je remarque enfin, selon une orientation souvent exprimée par
Jean-Paul II à la suite de Paul VI et de Jean XXIII, notamment
depuis l’inoubliable encyclique Pacem in Terris du 11 avril 1963,
l’importance du lien entre l’engagement pour le dialogue et la
cause de la paix, dans toute l’étendue de ses dimensions27. C’est
ainsi, et seulement ainsi, que le dialogue proposé est bien « dialogue
du salut ». Là encore, que ce soit par l’évocation de certaines
grandes figures comme François d’Assise28 ou Charles de
Foucauld29, l’émir Abd-el-Kader30 ou Christian de Chergé31, ou que
ce soit par des réflexions philosophiques ou théologiques sur la
violence et les religions32, Chemins de dialogue s’efforce d’apporter
une contribution à la tâche de tous ceux qui veulent bâtir la paix
par l’engagement dans le dialogue, le combat pour la justice et
l’apprentissage du pardon33.

27.
28.
29.
30.
31.
32.
(2001), p. 191-204 ; Jordi Llambrich, « Dialogue islamo-chrétien en Tunisie »,
CdD 18 (2001), p. 263-273.
« À tous les hommes de bonne volonté incombe aujourd’hui une tâche
immense, celle de rétablir les rapports de la vie en société sur les bases de la
vérité, de la justice, de la charité et de la liberté : rapports des particuliers entre
eux, rapports entre les citoyens et l’État, rapport des États entre eux, rapport
enfin entre individus, familles, corps intermédiaires et États d’une part et
communauté mondiale d’autre part. Tâche noble entre toutes, puisqu’elle
consiste à faire régner la paix véritable, dans l’ordre établi par Dieu » (Jean
XXIII, Pacem in Terris, n° 163).
Cf. Gwénolé Jeusset, « François d’Assise et les musulmans », CdD 18 (2001), p.
89-103.
Cf. Jean-François Berjonneau, « Charles de Foucauld, frère universel, dans sa
relation avec l’étranger et sa rencontre avec les musulmans », ibid., p. 105-128.
Cf. Henri Teissier, « L’Émir, homme de dialogue », CdD 19 (2001), p. 29-47.
Cf. les deux textes de Christian de Chergé publiés dans CdD 13.
Cf. Bruno-Marie Duffé, « Religion et politique – Un rapport paradoxal », CdD
13 (1999), p. 185-198 ; Dennis Gira, « La non violence dans le bouddhisme :
entre rêve et réalité », CdD 19 (2002), p. 95-112 ; François Chirpaz, « La violence
dans les religions », ibid., p. 113-134.
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Ainsi va notre revue, solidement adossée à l’ISTR de Marseille,
en lien avec ceux de Paris et de Toulouse, et avec le Centre d’études
des religions de la Faculté de théologie de Lyon. Les Tables qui se
trouvent à la fin de cette vingtième livraison permettent de
compléter le trop rapide panorama que je viens d’esquisser. Elles
montrent également la diversité des champs de réflexion et de
recherche ouverts par la rencontre interreligieuse et suggèrent ainsi
l’immensité du travail qu’il reste à accomplir ! Ces tables sont
précédées du dossier principal de ce numéro, à savoir les Textes de
référence qui expriment les fondements et les modalités de l’engagement de l’Église catholique dans le dialogue interreligieux,
depuis Vatican II jusqu’à nos jours. Reprenant l’essentiel de ce que
nous avions publié dans notre numéro 7, épuisé depuis plus d’un
an, nous y avons ajouté plusieurs autres textes ou messages du
magistère signifiant l’importance que l’Église catholique accorde à
la rencontre des religions et la façon dont elle en comprend les
enjeux et les conditions.
Cet ensemble de textes officiels, que l’on pourra utilement
compléter par l’ouvrage édité par le Conseil pontifical pour le dialogue
interreligieux34, se trouve ici introduit d’une triple manière dans un
dossier sur L’Église et les religions : d’abord, par le signataire de ces
lignes, sous l’angle du débat théologique suscité par la rencontre de
la foi chrétienne avec les religions du monde ; ensuite, grâce à un
texte de Jacques Levrat, à partir d’une relecture d’expériences
concrètes de rencontres interreligieuses vécues au Maroc ; enfin,
selon l’aspect particulier de la réflexion de Jean-Paul II sur l’islam,
relue et commentée par Roger Michel.
33. Cf. Bénédicte du Chaffaud, « Engagement pour la justice sociale des jeunes
musulmans en France », CdD 14 (1999), p. 153-172 ; Mgr Bernard Panafieu,
« Chrétiens et musulmans face à l’avenir du monde », CdD 15 (2000), p. 99-105 ;
Christian Delorme, « Le sacrement de l’amitié – Compagnon de route de
l’islam », CdD 16 (2000), p. 167-184 ; Jacques Jomier, « Les attentats du 11
septembre 2001 et les questions sur l’islam soulevées dans les médias », ibid.,
p. 135-154.
34. Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, Le dialogue interreligieux dans
l’enseignement officiel de l’Église catholique (1963-1997), Éditions de Solesmes,
1998.
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Conçu de la sorte, ce vingtième numéro se veut avant tout un
outil de travail, qui pourra être utile à tous ceux qui désirent mieux
comprendre les raisons pour lesquelles la rencontre des religions,
loin d’être simplement un fait indéniable du monde d’aujourd’hui,
constitue également pour les croyants, et pour les chrétiens en
particulier, un mystère, au sens profondément théologique de ce
mot35, invitant à approfondir le mystère insondable de Dieu, qui se
révèle toujours plus grand lorsqu’il est cherché à hauteur de
visage, dans le dialogue et la vérité.
Jean-Marc Aveline
35. Paul VI donnait du mot « mystère », appliqué à l’Église, la définition suivante,
pétrie de la réflexion des Pères de l’Église : « une réalité imprégnée de la
présence de Dieu, et, par conséquent, d’une nature telle, qu’elle admet
toujours de nouvelles et plus profondes explorations d’elle-même » (Discours
d’ouverture de la deuxième session du concile Vatican II, 29 septembre 1963,
dans Jean XXIII / Paul VI, Discours au Concile, Paris, Éditions du Centurion,
« Documents conciliaires » 6, 1966, p. 108. Commentant ce passage, Henri de
Lubac ajoutait que pour cette « exploration », l’expérience est plus importante
que la pure théologie, car le mystère est plus un fait vécu qu’un objet de claire
conception (cf. Henri de Lubac, Paradoxe et Mystère de l’Église, Paris, AubierMontaigne, 1967, p. 30).
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L’Église et les religions
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Jean-Marc Aveline
ISTR de Marseille
LES ENJEUX THÉOLOGIQUES
DU DIALOGUE INTERRELIGIEUX
La déclaration conciliaire sur les relations de l’Église avec les
religions non-chrétiennes, Nostra ætate, la création par Paul VI, le 19
mars 1964, du Secrétariat pour les non-chrétiens, transformé en 1988
en Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, la constitution du
Secrétariat pour les non-croyants, institué par Paul VI le 9 avril 1975
et devenu en 1989 Conseil pontifical pour le dialogue avec les noncroyants, sont autant d’événements qui ont signifié l’orientation
théologique et pastorale que l’Église catholique a prise lors du
concile Vatican II, sa volonté de dialogue avec tout homme, qu’il
soit croyant, indiff é rent ou athée. Dans son discours du 11
septembre 1962, un mois avant l’ouverture officielle du concile, et
alors que les travaux des commissions préparatoires pouvaient
laisser sceptiques ceux qui attendaient du concile de profonds
renouvellements, Jean XXIII trouvait, dans la contemplation
sereine et joyeuse du Christ ressuscité, la source d’où jaillirait l’élan
conciliaire :
Que peut être un concile, sinon le renouvellement de cette
rencontre avec le visage de Jésus ressuscité, Roi glorieux et
immortel, rayonnant à travers toute l’Église, pour sauver, réjouir et
illuminer les nations humaines ? C’est à la lumière de cette
apparition qu’on reprend bien à propos le mot du psaume antique :
« Fais lever sur nous la lumière de ta face, Seigneur ! Tu as mis la
joie dans mon cœur » (cf. Ps 4,7-8). Une véritable joie pour l’Église
universelle du Christ : voilà ce que veut être le nouveau concile
œcuménique.1
1. Jean XXIII, Message au monde entier « Ecclesia Christi lumen gentium » (11
septembre 1962), dans Jean XXIII / Paul VI, Discours au concile, Paris, Éditions
du Centurion, « Documents conciliaires » 6, 1966, p. 43.
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Chemins de Dialogue
Quarante ans après ce discours, la vingtième livraison de la
revue Chemins de dialogue offre l’occasion de faire le point sur l’un
des aspects les plus novateurs de Vatican II, à savoir l’affirmation
de la liberté religieuse et l’engagement dans le dialogue interreligieux2. D’autant que les événements internationaux, notamment
depuis le tragique 11 septembre 2001 (dramatique coïncidence !) et
l’aggravation de la crise au Proche-Orient, mettent davantage en
évidence l’importance des questions interculturelles et interreligieuses. Nombreux sont ceux qui, aujourd’hui, s’interrogent : Dieu
serait-il devenu l’otage des religions ? Celles-ci auraient-elles réussi
à l’annexer pour mieux servir leurs propres intérêts, au risque de
provoquer le malheur de l’humanité ? De Croisades en Guerres
Saintes, les religions seraient-elles irrémédiablement des fauteurs
de troubles, vecteurs d’intolérance et de fanatisme, alors même que
leurs textes fondateurs ne manquent pourtant pas d’encouragements aux « artisans de paix » ?
Chaque religion est concernée par ces questions et invitée à
entreprendre avec sérieux l’exigeant travail d’autocritique qu’elles
suscitent. L’Église catholique s’y est, pour sa part, courageusement
et résolument engagée3. Mais que deviendra le dialogue interreligieux au cours du vingt-et-unième siècle ? Certains ne voient en lui
qu’une belle utopie héritée du siècle précédent, encore entretenue
par quelques rêveurs naïfs, mais irrémédiablement destinée à
disparaître à l’épreuve de l’histoire et de son cortège de guerres et
d’incompréhensions. D’autres font remarquer qu’il s’agit là d’une
initiative typiquement chrétienne, incomprise tout autant à l’intérieur, parce que soupçonnée de s’accorder trop facilement au relativisme ambiant, qu’à l’extérieur, parce que perçue comme un
nouveau prosélytisme, d’autant plus redoutable qu’il avance
masqué sous une candide invitation à la rencontre et au dialogue.
2. Je reprends ici, en le modifiant légèrement, le texte d’un article publié comme
chapitre 12 du livre de Marcel NEUSCH et Bruno CHENU (dir.), Dieu au XXIe
siècle. Contribution de la théologie aux temps qui viennent, Paris, Bayard Éditions,
2002, p. 323-347.
3. Cf. Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, Le dialogue interreligieux
dans l’enseignement officiel de l’Église catholique (1963-1997). Documents
rassemblés par Francesco Gioia, Éditions de Solesmes, 1998.
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Il importe donc d’y regarder de plus près. Quelle est la position
des Églises chrétiennes sur ce sujet ? La foi des chrétiens peut-elle
comprendre de manière positive le rôle des religions dans l’histoire
du salut, après des siècles passés sous la gouverne de la trop
fameuse formule : « hors de l’Église, point de salut » ? Est-il
possible d’articuler théologiquement l’affirmation de l’unicité et de
l’universalité du salut en Jésus Christ avec le respect sincère et la
reconnaissance véritable des « rayons de la vérité » qui illuminent
tout homme, quelles que soient sa culture et sa religion ?
Ces questions, parmi d’autres, traduisent à la fois l’enthousiasme et la perplexité qui entourent, au seuil d’un nouveau siècle,
la question du rapport entre la foi chrétienne et les religions.
D’autant que la sécularisation a fait son œuvre et que le contexte de
ces questions est celui d’une indifférence de plus en plus grande à
l ’ é g a rd des traditions religieuses, voire même d’un sérieux
discrédit de leurs institutions, indiff é rence et discrédit qui
coïncident cependant avec l’apparition de nouvelles formes
d’expression du religieux, prenant parfois des allures sectaires,
mais traduisant l’indéniable quête spirituelle qui travaille
l’humanité.
Pour tenter de faire le point sur ce vaste sujet et pour introduire
le lecteur aux Textes de référence consignés dans ce vingtième
numéro de Chemins de dialogue, nous procéderons en deux temps.
Dans une première partie, nous retracerons les étapes de l’enga gement en faveur de la liberté religieuse et du dialogue interreligieux, prôné depuis quelques décennies par les Églises chrétiennes.
Puis, en une seconde partie, nous préciserons les fondements théologiques de cet engagement et prendrons connaissance des débats qui
ont agité l’espace œcuménique chrétien devant les problèmes
redoutables que pose à la foi en Jésus Christ, « unique médiateur
du salut », la prise en compte positive de la pluralité des religions
et de leurs prétentions à la vérité. Cela nous permettra, en
conclusion, de repérer quelques perspectives de recherches susceptibles de connaître un développement fécond au cours du siècle qui
commence.
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Chemins de Dialogue
1. L’engagement dans le dialogue interreligieux
Premières étapes
On peut faire remonter à 1893 le début d’un mouvement
amorçant le dialogue interreligieux contemporain. Cette année-là,
à l’initiative du pasteur presbytérien John Henry Barrows, eut lieu
à Chicago un Parlement des religions, dans le cadre des festivités
célébrant le quatre-centième anniversaire de la découverte du
continent américain4. Bien que la préparation de cet événement ait
rencontré de fortes résistances, sa réalisation suscita un grand
mouvement d’enthousiasme. C’était la première fois que des
responsables religieux venus du monde entier pouvaient se
rencontrer, découvrir leurs différentes religions et faire état de la
part que leur propre tradition religieuse avait apporté au patrimoine culturel de l’humanité5. Même si la majorité des participants
étaient des chrétiens et si l’objectif n’était pas à proprement parler
le dialogue, mais plutôt l’union des croyants contre l’irréligion, il
reste que cet événement constitua le point de départ de l’histoire
du mouvement interreligieux.
Un autre événement important fut la « Conférence internationale extraordinaire pour combattre l’antisémitisme », organisée
en Suisse à Seeligsberg, du 30 juillet au 5 août 1947, deux ans après
la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Dans l’esprit des travaux
de l’historien juif Jules Isaac6, une soixantaine de participants
4. Cf. Jean-Claude BASSET, Le dialogue interreligieux. Chance ou déchéance de la foi,
Paris, Les Éditions du Cerf, « Cogitatio Fidei » 197, 1996, p. 73-78.
5. Quatre cents délégués étaient présents, dont cent cinquante prirent la parole
au cours des dix-huit jours que dura la rencontre. Quatre mille personnes
assistèrent à la séance inaugurale le 11 septembre et près du double à la séance
de clôture le 27 septembre.
6. Cf. Jules ISAAC, Jésus et Israël, Paris, Fasquelle Éditeur, 1959 (première édition :
1946).
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Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux
protestants, juifs et catholiques se sont réunis pour tenter de lutter
c o n t re de fausses interprétations de l’Évangile, susceptibles
d’encourager le mépris ou la haine à l’égard du peuple juif. Pour
guider la prédication et l’enseignement catéchétique sur ce thème,
la conférence de Seeligsberg a adopté un texte en dix points7, qui
constitue une sorte de prélude à l’impulsion que le pape Jean XXIII,
ami de Jules Isaac, voulut donner au concile Vatican II, lorsqu’il
chargea le cardinal Bea de préparer un « Décret sur les Juifs ». C’est
ce décret qui, au fil des sessions conciliaires et non sans difficultés
théologiques et politiques, se transforma progressivement pour
devenir la déclaration Nostra ætate sur les relations de l’Église
catholique avec les religions non-chrétiennes, déclaration
promulguée le 28 octobre 19658.
Du côté protestant, les grandes conférences missionnaires du
début du vingtième siècle, à Edimbourg (1910), Jérusalem (1928) et
Tambaran (1938) insistèrent plutôt sur la mission et sur la lutte
contre l’irréligion que sur la rencontre entre les religions. Après la
déclaration contre l’antisémitisme lors de la première assemblée
générale du Conseil œcuménique des Églises à Amsterdam en
1948, c’est surtout le colloque de Davos (21-25 juillet 1955) qui a
initié une réflexion sur le christianisme et les religions. En 1961,
l’assemblée de New-Dehli adopta une importante déclaration sur
la liberté religieuse et le colloque d’Ajaltoun au Liban (16-25 mars
1970) constitua une première expérience de rencontre et d’échange
entre chrétiens, bouddhistes, hindous et musulmans. Lors de la
cinquième assemblée générale du Conseil œcuménique des Églises à
Nairobi en 1975, cinq représentants d’autres traditions religieuses
furent officiellement invités à participer aux débats.
Néanmoins, de grandes divergences subsistent au sein des
Églises de la Réforme, concernant l’engagement dans le dialogue
interreligieux, engagement auquel s’opposent non seulement le
7. Texte dans Chemins de dialogue 7 (1996), p. 58, et maintenant dans Chemins de
dialogue 20, p. 77-78.
8. Sur cette déclaration, voir : A.-M. HENRY (dir.), Vatican II. Les relations de
l’Église avec les religions non chrétiennes, Paris, Les Éditions du Cerf, « Unam
Sanctam » 61, 1966. Texte intégral dans Chemins de dialogue 20, p. 69-75.
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Chemins de Dialogue
courant de la théologie évangélique, pour lequel ce dialogue représente au mieux un moyen d’évangélisation et au pire une trahison
du devoir missionnaire, mais aussi le courant de la théologie
politique, qui considère que le défi principal n’est pas les religions
mais la sécularisation et les luttes pour l’émancipation économique, sociale et culturelle des peuples opprimés.
Le concile Vatican II et l’esprit d’Assise
Bien qu’elle ait connu d’illustres précurseurs, tels Jean Daniélou,
Karl Rahner, Henri de Lubac, Romano Guardini, Yves Congar ou
encore Pierre Teilhard de Chardin, pour n’en citer que quelquesuns9, la théologie catholique des religions est née dans la mouvance
du concile Vatican II, et notamment des deux déclarations Nostra
ætate et Dignitatis humanæ, respectivement sur l’attitude de l’Église
envers les religions non-chrétiennes et sur la liberté religieuse.
On re m a rquera tout d’abord que, pour fonder et décrire
l’attitude que l’Église catholique entend adopter à l’égard des
fidèles des autres religions, attitude d’ouverture à la rencontre et à
la coopération, la déclaration Nostra ætate prend pour point de
départ la quête religieuse existentielle, jaillie du cœur de l’homme :
Les hommes attendent des diverses religions la réponse aux
énigmes cachées de la condition humaine, qui, hier comme aujourd’hui, troublent profondément le cœur humain : qu’est-ce que
l’homme ? Quel est le sens et le but de la vie ? Qu’est-ce que le bien
et qu’est-ce que le péché ? Quels sont l’origine et le but de la
souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ?
9. Cf. Giacomo CANOBBIO, « L’emergere dell’interesse per le religioni nella
teologia cattolica del novecento », dans Mariano CROCIATA (ed.) Teologia delle
Religioni. Bilanci e prospettive, Milano, Paoline, 2001, p. 15-55. Sur l’apport
spécifique de la théologie française à la constitution de la théologie des
religions, voir ma contribution dans le même ouvrage : « Il contributo francese
alla teologia delle religioni », ibid., p. 59-79.
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Qu’est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ?
Qu’est-ce enfin que le mystère dernier et ineffable qui entoure notre
existence, d’où nous tirons notre origine et vers lequel nous
tendons ?10
Le concile estime que, d’une part, ces questions fondamentales,
loin d’avoir été écartées par le progrès technique et scientifique de
l’humanité, se posent aujourd’hui avec une acuité renouvelée11 et
que, d’autre part, les religions peuvent être considérées comme des
codifications sociales et rituelles en réponse à cette quête existentielle jamais assouvie. Dans ce contexte, le paragraphe central de la
déclaration Nostra ætate exprime sans équivoque l’intention de
l’Église catholique :
L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans
ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières
d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles
diffèrent beaucoup de ce qu’elle-même tient et propose, cependant
apportent souvent un rayon de la Vérité qui illumine tous les
hommes. […] Elle exhorte donc ses fils pour que, avec prudence et
charité, par le dialogue et la collaboration avec ceux qui suivent
d’autres religions, et tout en témoignant de la foi et de la vie
chrétiennes, ils reconnaissent, préservent et fassent progresser les
valeurs spirituelles, morales et socioculturelles qui se trouvent en
eux.12
Dans sa genèse comme dans son orientation, ce texte est étroitement lié à la déclaration du Concile sur la liberté religieuse,
Dignitatis humanæ13, déclaration dans laquelle l’invitation soutenue
à la recherche de la vérité en matière de religion se conjugue avec
10. Nostra ætate, 1
11. Cf. Gaudium et spes, 10, § 1.
12. Nostra ætate 2. D’autres documents conciliaires abordent le thème des
religions. Parmi les plus importants, il faut souligner : la Constitution dogmatique sur l’Église, Lumen Gentium n° 16, 17 ; la Constitution pastorale sur
l’Église dans le monde de ce temps, Gaudium et spes n° 28, 29, 92 ; le Décret sur
l’activité missionnaire Ad gentes n° 9-12, 16, 26, 34 ; la Déclaration conciliaire
sur la liberté religieuse Dignitatis humanæ.
13. Cf. J. HAMER et Y. CONGAR (dir.), Vatican II. La liberté religieuse, Paris, Les
Éditions du Cerf, « Unam Sanctam » 60, 1967.
23
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l’affirmation vigoureuse de la liberté religieuse14. Tout en s’engageant dans la coopération et le dialogue avec les autres religions,
l’Église se sait tenue de confesser que le Christ est, dans sa
personne même, la vérité :
Toutefois, [l’Église] annonce, et elle est tenue d’annoncer sans
cesse, le Christ qui est « la voie, la vérité et la vie » (Jn 14, 6), dans
lequel les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse
et dans lequel Dieu s’est réconcilié toutes choses.15
On observera également que le concile invite à conjuguer deux
démarches, celle de l’annonce et celle du dialogue. L’annonce est
indissociable de l’identité et de la mission de l’Église, et elle doit
être poursuivie avec fidélité et franchise, même en contexte de
pluralisme religieux. Toutefois, lorsqu’ils parlent de « mission » ou
de « proclamation », les textes conciliaires soulignent la nécessité
du respect et de l’estime envers les religions, et invitent au dialogue
et à la coopération. Outre cette approche globale des religions,
caractérisée par les deux mots de dialogue et d’annonce, la déclaration conciliaire suggère une approche différenciée de chaque
religion, et sollicite pour chacune un minutieux travail de discernement : tout n’est pas vrai et saint dans toutes les religions, et le
critère de l’Évangile doit être appliqué avec une égale rigueur au
christianisme lui-même et entraîner, de la part de l’Église, un réel
effort de repentance.
Après le concile et l’encyclique-programme de Paul VI,
Ecclesiam suam16, publiée le 6 août 1964, l’engagement de l’Église
catholique dans la rencontre et la coopération interreligieuses a été
14. « En vertu de leur dignité, tous les hommes, parce qu’ils sont des personnes,
[…] sont pressés par leur nature même et tenus par obligation morale à
chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus
aussi à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie
selon les exigences de cette vérité » (Dignitatis humanæ, 2). « Mais la vérité doit
être cherchée, selon la manière propre à la personne humaine et à sa nature
sociale, à savoir par une libre recherche » (ibid., 3).
15. Nostra ætate, 2.
16. Sur l’importance de cette encyclique pour le dialogue interreligieux, voir :
Jacques GADILLE, « La pensée missiologique de Paul VI », dans : Paul VI et la
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fortement encouragé lors du pontificat de Jean-Paul II, par des
documents17 et des gestes symboliques forts, comme la rencontre
du pape avec des jeunes musulmans à Casablanca le 19 août 198518,
ou encore sa visite à la synagogue de Rome le 13 avril 198619, et
surtout la journée d’Assise le 27 octobre de cette même année
198620. Plus récemment, le pèlerinage du pape en Terre Sainte au
cours du Grand Jubilé de l’an 200021 et sa visite à la mosquée des
Omeyyades à Damas22 le dimanche 6 mai 2001, constituent de
nouveaux signes éloquents de cet engagement.
17.
18.
19.
20.
21.
22.
modernité dans l’Église. Actes du colloque organisé par l’École française de Rome
(Rome 2-4 juin 1983), École française de Rome, Palais Farnèse, 1984, p. 787-805.
On peut également se référer avec profit aux conférences prononcées lors du
colloque organisé par l’ISTR de Marseille pour le trentième anniversaire
d’Ecclesiam suam : Jean CHELINI, « Paul VI et la mission de l’Église », Chemins
de dialogue 4 (1994), p. 25-47 ; Maurice VIDAL, « Dialogue au cœur de la
mission. Perspectives ecclésiologiques », ibid., p. 49-63 ; Jozef TOMKO, « Le
dialogue, chemin de la mission », ibid., p. 65-105.
Parmi ces documents, il faut signaler des lettres encycliques (Redemptor
hominis [1979], Dominum et vivifivantem [1986], Redemptoris missio [1990]) et des
textes émanant du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux :
« Attitude de l’Église devant les croyants des autres religions. Réflexions
concernant le dialogue et la mission » [1984] (à l’époque, ce « Conseil »
s’appelait encore « Secrétariat pour les non-chrétiens » ; le changement
d’appellation est intervenu en 1988) ; « Dialogue et annonce. Réflexions et
orientations concernant le dialogue interreligieux et l’annonce de l’Évangile »
[1991] (ce texte est l’œuvre conjointe du Conseil pontifical pour le dialogue
interreligieux et de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples). Le
premier texte est paru dans La Documentation catholique 1880 (1984), p. 844-849 ;
le second : ibid., 2036 (1991), p. 874-890. L’ensemble de ces textes, y compris la
déclaration conciliaire Nostra ætate, a été repris dans Chemins de dialogue 7
(1996) : « L’esprit d’Assise ».
Texte dans Chemins de dialogue 20, p. 129-142.
Texte dans Chemins de dialogue 20, p. 143-161.
Textes dans : Commission pontificale « Iusticia et Pax » (éd.), Assise. Journée
mondiale de prière pour la paix, Rome, 1987. Pour un bilan de cette journée, voir :
François BŒSPFLUG et Yves LABBÉ (dir.), Assise, dix ans après. 1986-1996,
Paris, Cerf, 1996. Voir également : Joseph DORÉ, « Aspects de la réception de
Nostra ætate dans l’Église de France », Chemins de dialogue 16 (2000), p. 125-143.
Texte dans Chemins de dialogue 20, p. 175.
Voir le compte-rendu de la visite de Jean-Paul II en Syrie du 5 au 10 mai 2001
dans Istina XLVI (2001), p. 264-285. Texte dans Chemins de dialogue 20, p. 177-180.
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Néanmoins, cet encouragement officiel au dialogue interreligieux se heurte, il faut bien le reconnaître, à des réserves ou à des
réticences, de la part de certains chrétiens, qui craignent qu’une
telle attitude ne conduise au scepticisme ou à une forme de relativisme ou d’indifférence. Si toutes les religions témoignent authentiquement d’une quête d’absolu et peuvent être pour leurs adeptes
une voie efficace de salut, alors pourquoi privilégier encore
l’Évangile de Jésus Christ et à quoi bon continuer le travail
missionnaire ? En outre, comme on l’évoquait en commençant, il
n’est pas rare que les adeptes d’autres religions comprennent mal
cette nouvelle attitude des chrétiens, qui leur paraît comme un
mauvais déguisement de leur souci missionnaire. Le dialogue
serait alors une nouvelle méthode d’évangélisation, et le prosélytisme chrétien, ainsi déguisé, n’en serait que plus dangereux.
Pourtant, l’engagement de l’Église catholique dans le dialogue
interreligieux repose sur de solides fondements théologiques qu’il
convient maintenant d’exposer brièvement.
2. Les fondements théologiques
du dialogue interreligieux
Je procéderai en deux temps. Tout d’abord, j’exposerai en la
synthétisant la position actuelle du magistère de l’Église catholique, telle qu’elle apparaît au travers des documents déjà
mentionnés et dont le lecteur trouvera les textes dans ce numéro de
Chemins de dialogue. Ensuite, j’indiquerai quelques-unes des
positions qui alimentent le débat contemporain à l’intérieur de ce
qu’il est convenu d’appeler la « théologie des religions ».
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La position du magistère
La position actuelle du magistère catholique peut être synthétisée en trois points.
L’Église catholique reconnaît tout d’abord le rôle positif des autres
religions, en tant qu’institutions historico-sociales, dans l’économie
générale du salut. Elle affirme que leurs rites et leurs doctrines
peuvent avoir une réelle efficacité pour le salut de leurs adeptes23.
Par là se trouve écartée une position exclusiviste qui, au nom d’un
ecclésiocentrisme étroit, refuserait aux religions non-chrétiennes
toute valeur salvatrice et révélatrice, en s’appuyant sur une interprétation durcie, et donc faussée, de l’antique adage patristique :
« hors de l’Église, point de salut ». Puisque Dieu veut que « tous les
hommes soient sauvés » (1Tm 2,4), il est possible d’affirmer que se
trouvent déposées, dans les religions elles-mêmes, des « semences
du Verbe »24, des « rayons de la vérité qui illumine tout homme »25,
et que « l’Esprit-Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la
possibilité d’être associés au mystère pascal »26.
À cette première affirmation s’ajoute une deuxième, que le
magistère entend tenir avec la même détermination, à savoir
l’unicité et l’universalité de la médiation christique dans l’économie
générale du salut. Jésus le Christ est « l’unique médiateur du
salut » (1Tm 2,5) et « il n’y a aucun salut ailleurs qu’en lui, car il n’y
a sous le ciel aucun autre nom offert aux hommes, qui soit nécessaire à notre salut » (Ac 4,11-12). En conséquence, ce n’est que de
leurs relations au Christ que les religions détiennent, aux yeux des
chrétiens, leur valeur positive dans l’ordre du salut : « le concours
de médiations de types et d’ordres divers n’est pas exclu, mais
celles-ci tirent leur sens et leur valeur uniquement de celle du
Christ et elles ne peuvent être considérées comme parallèles ou
23.
24.
25.
26.
Nostra ætate 2.
Redemptor hominis 11.
Nostra ætate 2 (cf. Jn 1, 9)
Gaudium et spes 22 § 5.
27
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Chemins de Dialogue
complémentaires. »27 Par là se trouve cette fois-ci écartée une
position relativiste, qui tiendrait que toutes les religions peuvent
conduire au salut d’une manière totalement indépendante de l’histoire concrète du salut accomplie en Jésus Christ.
Enfin, le magistère de l’Église catholique affirme que la mission
de l’Église, en tant que « sacrement universel du salut » apporté par
le Christ28, a elle-même un fondement dialogal. C’est parce que
Dieu, dans sa révélation, a pris l’initiative, comme le disait Paul VI,
d’instaurer avec l’humanité un « dialogue »29, que l’Église est tenue
d’engager avec tout homme, y compris mais pas exclusivement,
avec les croyants d’autres religions, un authentique « dialogue de
salut »30. Le dialogue interreligieux n’est en définitive que l’un des
aspects de la mission des chrétiens dans le monde. L’Église
confesse que l’Esprit du Christ, qui l’anime et la constitue en tant
qu’Église du Christ, est également présent et efficace dans
l’ensemble de la création et donc aussi dans les cultures et dans les
religions en tant qu’institutions socio-historiques, de sorte que ces
religions peuvent être considérées par les chrétiens comme n’étant
pas étrangères à l’unique médiation salvifique du Christ.
Tout cela montre combien il faut être prudent lorsqu’on parle de
dialogue interreligieux. Que ce soit à propos de Dieu, du salut, du
sens de la vie ou du statut de la communauté croyante, il y a, entre
les religions, de grandes et profondes différences qu’il ne faut
surtout pas négliger. Mais cette prudence n’est là que pour pousser
à l’audace, comme le suggérait déjà, par rapport au bouddhisme, le
geste de pensée d’Henri de Lubac, mis au jour par Michel Fédou :
« Non seulement il n’y a pas contradiction entre la lucidité du P. de
Lubac sur les divergences entre religions et l’ouverture qu’il
manifeste par rapport à la haute spiritualité qui a pu être vécue
dans le cadre de l’amidisme, mais paradoxalement c’est la
première qui rend possible la seconde. »31 L’ultime question semble
27.
28.
29.
30.
Redemptoris missio 5. Texte dans Chemins de dialogue 20, p. 83-90.
Lumen gentium I, 1 ; II, 9 ; VII, 48 ; également Gaudium et spes 42, § 3.
Ecclesiam suam 72.
Dialogue et annonce 38.
28
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être celle que posait Christian de Chergé, prieur de Tibhirine,
assassiné avec six de ses frères en 1996. En définitive, se
demandait-il, quel est le sens divin de ce qui humainement nous
sépare ?32 Et il répondait qu’en attendant dans la foi que ce sens
nous soit révélé lorsque, réunis dans la maison du Père, nous
comprendrons mieux la richesse de nos différences, il revient aux
chrétiens, à cause même de leur foi en l’incarnation du Fils de Dieu,
de tout faire pour vivre ici-bas « le quasi-sacrement d’une entente
confiante entre nous dès maintenant », cet accord devant
s’exprimer « par tous les moyens de la solidarité et de la coresponsabilité politique et sociale au service de la justice et de la paix. »
Ces profondes intuitions, qui n’ont sans doute pas encore livré,
pour la vie de l’Église et pour la théologie, toute leur fécondité,
nous conduisent à faire le point sur les débats actuels en théologie
des religions.
3. Le débat contemporain en théologie des religions
Dans la mouvance de l’engagement conciliaire s’est progressivement constituée une « théologie des religions » à laquelle, dans
un document de 1996, la Commission théologique internationale
assigne une triple tâche :
31. Michel FÉDOU, « Henri de Lubac et la “théologie des religions” », dans Paul
MAGNIN (dir.), L’intelligence de la rencontre du bouddhisme. Actes du colloque du
11 octobre 2000 à la Fondation Singer-Polignac, « La rencontre du bouddhisme et de
l’Occident depuis Henri de Lubac », Paris, Les Éditions du Cerf, 2001, p. 111-126 ;
ici p. 125. L’auteur continue : « [C]’est seulement si les différences doctrinales
sont identifiées qu’il est possible, sans ambiguïtés, de contempler cette
expérience spirituelle comme le lieu même où peut advenir, dans les meilleurs
des cas, une authentique relation entre les croyants et le “Dieu inconnu” qui
mystérieusement se révèle à eux et les attire vers Lui. »
32. Cf. Christian de CHERGÉ, « Chrétiens et musulmans : nos différences ont-elles
le sens d’une communion ? », Lettre de Ligugé 227 (1984-5) et 228 (1954-6).
29
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En premier lieu, le christianisme devra chercher à se
comprendre et à s’évaluer lui-même dans le contexte d’une
pluralité des religions ; il devra réfléchir concrètement sur la vérité
et l’universalité qu’il revendique. En second lieu, il devra
rechercher le sens, la fonction et la valeur propre des religions dans
la totalité de l’histoire du salut. Enfin, la théologie chrétienne devra
examiner les religions concrètes, avec leurs contenus bien définis,
qui devront être confrontés aux contenus de la foi chrétienne. Pour
cela, il est nécessaire d’établir des critères qui permettent une
discussion critique de ces données et une herméneutique qui les
interprète.33
Sur ce vaste chantier, de multiples travaux de recherche ont déjà
été entrepris, qui permettent d’observer une certaine évolution de
la problématique, passant de la théologie du salut des infidèles, où l’on
s’interrogeait sur les conditions de possibilité du salut pour les
personnes qui ne confessent pas le Christ et n’appartiennent pas à
l’Église institutionnelle34, à une véritable théologie des religions, dont
l’objectif est de déterminer le rôle que jouent les religions, en tant
qu’institutions socio-historiques, dans le plan divin de salut. Ce
passage permet de désigner d’une manière sotériologique la
« question de fond » de la théologie des religions :
La question de fond est la suivante : les religions sont-elles des
médiations de salut pour leurs membres ? Certains donnent à cette
question une réponse négative, et il en est même qui ne voient
aucune signification au fait de la poser. D’autres donnent une
réponse affirmative, qui à son tour laisse apparaître d’autres
questions : s’agit-il de médiations salvifiques autonomes, ou bien
du salut de Jésus Christ qui se réalise en elles ? Il s’agit donc de
définir le statut du christianisme et des religions en tant que réalités
socioculturelles en rapport avec le salut de l’homme.35
33. Commission théologique internationale, Le christianisme et les religions, Paris,
Centurion / Cerf, 1997, p. 27-28.
34. Sur cette problématique, la contribution fondamentale reste celle de Louis
CAPERAN, Le problème du salut des infidèles, I. Essai historique, II. Essai théolo gique, Paris, 1912 (éd. revue, Toulouse, 1934).
35. Commission théologique internationale, Le christianisme et les religions, op. cit.,
p. 28.
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Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux
Cette question fondamentale a très vite donné lieu à plusieurs
types de réponses36. Elle suscite aujourd’hui, aussi bien en
théologie catholique que protestante37, un vif débat où s’affrontent
des positions divergentes, notamment sur la question du statut de
la médiation de Jésus Christ dans l’histoire du salut. En 1985, un
article de Claude Geffré présentait, vingt ans après le concile, un
bilan de la recherche en « théologie de religions », en prenant acte
d’un contexte historique en pleine évolution, marqué par la vitalité
des religions non-chrétiennes, la conscience de la particularité
historique du christianisme, le défi du néo-paganisme et une vision
plus optimiste des possibilités de salut hors de l’Église38.
C’est au cours des deux dernières décennies du vingtième siècle
que s’est également développé le courant des théologies pluralistes. Les théologiens dits « pluralistes »39 se reconnaissent dans
36. On trouve une première classification des diverses tendances théologiques sur
cette question dans l’article synthétique de Joseph GELOT, « Vers une
théologie chrétienne des religions non-chrétiennes », Islamochristiana 2 (1976),
p. 1-57.
37. Pour une présentation synthétique des positions protestantes, voir : Leroy
ROUNER, « La théologie des religions dans la théologie protestante récente »,
Concilium 203 (1986), p. 139-148. L’auteur distingue deux types de positions
théologique : la position pluraliste mais non-relativiste (dans laquelle il range
Smart, Hick et Smith), et la position christocentrique mais non-exclusiviste (où
figurent Pannenberg, Cobb et Moltmann), position qui a sa faveur. Une autre
présentation synthétique est réalisée par André GOUNELLE, « Théologie des
religions du monde. Essai de typologie », Chemins de dialogue 1 (1993), p. 47-65.
La typologie proposée comporte six modèles : « l’exclusivisme » (essentiellement rattaché à Barth), « les religions comme préparation à l’Évangile », « la
révélation étagée », « le Christ anonyme », « le relativisme » et « le syncrétisme ».
38. Claude GEFFRÉ, « La théologie des religions non-chrétiennes vingt ans après
Vatican II »39, Islamochristiana 11 (1985), p. 115-133.
39. Les positions des théologiens pluralistes ont été développées dans : J. HICK et
P. F. KNITTER (éd.) The Myth of Christian Uniqueness, Maryknoll, New York,
Orbis Books, 1987. De nombreuses critiques à l’égard des positions prises dans
cet ouvrage, critiques formulées notamment par Cobb, Pannenberg et
Moltmann, sont rassemblées dans : Gavin D’COSTA (éd.), Christian Uniqueness
Reconsidered. The Myth of a Pluralistic Theology of Religions, Maryknoll, New
York, Orbis Books, 1990. D’autres positions critiques sont présentées dans :
Michael von BRÜCK et Jürgen WERBICK (éd.), Der einzige Weg zum Heil ? Die
Herausforderung des christlichen Absolutheitsanspruchs durch pluralistische
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leur volonté de dépassement non seulement de l’exclusivisme ecclé siocentrique, héritier d’une interprétation durcie de l’adage « Hors
de l’Église, point de salut », interprétation que soutient, selon eux,
la théologie de Karl Barth, mais aussi de l’inclusivisme christocen trique, qu’ils dénoncent dans le concile Vatican II et chez la plupart
des théologiens catholiques, notamment Karl Rahner. Les théologiens pluralistes estiment que ces deux schèmes sont insuffisamment adaptés aux nécessités concrètes du dialogue interreligieux et proposent donc de passer à un théocentrisme, avec ou sans
référence normative à Jésus Christ40, voire à un sotériocentrisme,
accordant le primat, en matière de rencontre interreligieuse, à
l’engagement concret au service de l’humanité souffrante (orthopraxie) plutôt qu’à la confrontation dogmatique entre religions
(orthodoxie)41. Quoi qu’il en soit, c’est le statut d’unique médiateur
du salut, que la foi chrétienne, sur la base des écrits du Nouveau
Testament, confère à Jésus Christ42, qui se trouve mis en question
par la prise au sérieux de l’irréductible diversité des religions et de
leurs prétentions légitimes à la vérité43.
40.
41.
42.
43.
Religionstheologien, Fre i b u rg / B a s e l / Wien, Herd e r, 1993. Voir également
l’article de Michel FÉDOU, « La théologie des religions à l’heure du pluralisme », Études 370/6 (1989), p. 821-830, et, plus récemment, l’essai de Jean
RICHARD, « Thèses pour une théologie pluraliste des religions », Chemins de
dialogue 19 (2002), p. 183-206.
Pour une présentation synthétique des différentes positions, voir : Joseph
DORÉ, « La présence du Christ dans les religions non-chrétiennes », Chemins
de dialogue 9 (1997), p. 13-50. L’auteur présente l’élargissement progressif de
l’éventail des positions (passant de’« absolutisme formel et relativisme total »
à « exclusivisme, inclusivisme, pluralisme », puis « ecclésiocentrisme, christocentrisme, théocentrisme, sotériocentrisme »), et propose une réponse dont le
principe fondamental est « une christologie d’accomplissement pascal »
permettant de lier christocentrisme et théocentrisme et de reconnaître, à titre
de principe et sous réserve de discernement détaillé, une « fonction christique » aux religions. On trouvera par ailleurs une excellente présentation
typologique des différentes positions dans l’ouvrage de Jacques DUPUIS, Jésus
Christ à la rencontre des religions, Paris, Desclée, « Jésus et Jésus Christ » 39, 1989,
p. 133-141.
Cf. Paul KNITTER, « La théologie catholique à la croisée des chemins »,
Concilium 203 (1986), p. 136. Voir également, dans un sens analogue : Aloysius
PIERIS, Une théologie asiatique de la libération, Paris, Centurion, 1990.
Cf. I Tm 2, 5.
L’ouvrage magistral de Jacques DUPUIS, Vers une théologie chrétienne du plura -
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Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux
Dans ce débat, on ne saurait oublier que le problème de la
rencontre des religions ne doit pas occulter celui de la sécularisation et de l’indifférentisme religieux. Dans un article publié en
1987, le théologien français Joseph Moingt estimait que « le vrai
problème aujourd’hui concerne la multitude de gens de toutes
origines, y compris chrétienne, qui ont rejeté toutes pratiques et
croyances religieuses »44. Est-il dès lors « légitime et fécond de […]
tenir les diverses religions non-chrétiennes pour d’autres voies de
révélation et de salut, instituées par Dieu au bénéfice de populations que leurs traditions historiques et culturelles tenaient à l’écart
du christianisme » ? Moingt répond à cette question par la négative,
en invoquant trois raisons : tout d’abord, une telle disposition n’est
pas nécessaire, puisque l’affirmation selon laquelle tout homme
peut avoir accès au salut en Jésus Christ repose sur la sincérité du
cœur et la droiture de la conscience et qu’il n’est donc pas nécessaire d’y ajouter, comme moyen de salut, l’appartenance religieuse ;
ensuite, l’argument que nous venons de citer, selon lequel le vrai
problème n’est pas la pluralité des religions mais l’importance
croissante de l’indifférence religieuse ; enfin, l’Évangile est plus et
autre chose qu’une religion, dans la mesure où il s’adresse à « ce
qu’il y a de plus universel dans la conscience et dans la raison des
hommes, quelle que soit leur appartenance confessionnelle, qu’ils
en aient une ou non ». Moingt en déduit que les religions peuvent
être certes utiles pour éclairer les consciences, à titre de
pédagogues (Ga 4,1-3), mais que la théologie chrétienne n’est
nullement autorisée à leur conférer un statut « théologal », qui les
situerait en concurrence avec « la Nouvelle Alliance dont l’Église
du Christ exerce le ministère ».
En définitive, les deux questions, celle du pluralisme religieux et
celle de l’indifférentisme religieux, ne peuvent pas être dissociées,
et l’engagement pris par l’Église catholique à Vatican II dans le sens
lisme religieux, Paris, Les Éditions du Cerf, « Cogitatio Fidei » 200, 1997, est tout
entier traversé par ce débat. Voir également Monique AEBISCHER-CRETTOL,
Vers un œcuménisme interreligieux. Jalons pour une théologie chrétienne du plura lisme religieux, Paris, Les Éditions du Cerf, « Cogitatio Fidei » 221, 2001.
44. Joseph MOINGT, « Rencontre des religions », Études, janvier 1987 (366/1), p.
97-110 ; ici, p. 101.
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d’une rencontre et d’un dialogue avec des croyants d’autres
religions, appelle un approfondissement de la réflexion christologique sur l’économie du salut et sur la place que tiennent en elle,
non seulement l’Église de Jésus Christ mais aussi les religions et les
cultures du monde, fussent-elles séculières. La publication en
septembre 2000 de la déclaration Dominus Jesus constitue un
avertissement à l’égard de certaines formes de théologies pluralistes qui, prenant argument des exigences de réciprocité
inhérentes au dialogue interreligieux, en viendraient à nier ou à
affaiblir non seulement l’unicité et l’universalité de la médiation de
Jésus Christ, mais aussi la spécificité du lien entre le Christ et
l’Église45. Il reste que, tenant compte de la gravité du danger
signalé, la tâche de la christologie consiste précisément à explorer,
sur la base même de l’unicité de la médiation christique et de la
spécificité de la mission de l’Église, la possibilité, dans l’ordre du
salut, du « concours de médiations de type et d’ordre divers »,
comme le dit audacieusement l’encyclique de Jean-Paul II
Redemptoris missio46. Cette orientation, profondément enracinée
dans le concile Vatican II47, définit, à n’en pas douter, de nouvelles
et prometteuses perspectives de recherche pour la théologie48.
45. Sur ce dossier, voir : Dennis GIRA, « Réflexions sur Dominus Jesus »,
Transversalités 78 (avril-juin 2001), p. 1-10 ; François BOUSQUET, « Dominus
Jesus : questions posées dans le cadre du dialogue interreligieux », ibid., p. 1129 ; Jean-Marc AVELINE, « L’engagement de Dieu et la mission de l’Église »,
Chemins de dialogue 16 (2000), p. 17-36.
46. Redemptoris missio (1990), n° 5. C’est dans cette perspective que la déclaration
Dominus Jesus invite la théologie à « élucider le contenu de cette médiation
participée, qui doit rester guidée par le principe de l’unique médiation du
Christ » (Dominus Jesus [2000], § 14). Extraits dans Chemins de dialogue 20,
p. 111-127.
47. Qu’il suffise de rappeler : « Et cela ne vaut pas seulement pour ceux qui croient
au Christ mais bien pour tous les hommes de bonne volonté, dans le cœur
desquels, invisiblement, agit la grâce. En effet, puisque le Christ est mort pour
tous et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir
divine, nous devons tenir que l’Esprit-Saint offre à tous, d’une façon que Dieu
connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal » (Gaudium et spes 22,
§5).
48. Dans un ouvrage paru récemment en français, mais reprenant une conférence
donnée en 1991 à l’Université de Saint Louis aux États-Unis, Panikkar prend
soin d’avertir que le terme de « christophanie » ne doit pas être compris d’une
manière docète, mais plutôt en concordance avec le « phaneros » des Écritures,
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Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux
Conclusion
Peut-on dégager, au terme de ce parcours, quelques perspectives de recherche susceptibles d’être développées par la réflexion
théologique du siècle qui commence ? La centralité de la christologie
apparaît tout d’abord. Au cœur de la foi chrétienne se trouve le
Mystère de Jésus Christ. Seul l’approfondissement, et non pas
l’abandon ou l’adaptation séduisante de ce Mystère, peut
permettre d’entrer loyalement dans le dialogue interreligieux.
Quelqu’inédites et redoutables que soient alors les difficultés
rencontrées, l’impulsion donnée au concile Vatican II et par le
Conseil œcuménique des Églises montrent que la tâche de la christologie est aujourd’hui profondément stimulée et renouvelée par la
prise en compte du pluralisme religieux49.
Un autre chantier est celui de la réflexion sur la mission de
l’Église. On se souvient peut-être des questions posées jadis par
Henri de Lubac : pourquoi cette Église ? Que donne-t-elle de plus,
que les autres religions donneraient de moins ? Pourquoi continuerait-elle d’être missionnaire ? Ou, dans une formulation qui
c’est-à-dire comme désignant une « manifestation visible, nette et publique
d’une vérité » (Raimon PANIKKAR, Une christophanie pour notre temps, Arles,
Actes Sud, 2001, p. 11). Il vise alors à démontrer que, d’une part, le mystère du
Christ est accessible en dehors d’une connaissance explicite de l’homme Jésus,
et que, d’autre part, ce n’est que dans la foi de l’Église que le croyant peut
confesser que Jésus est le Christ. Dès lors : « La réflexion sur les données
concernant Jésus, comprenant l’expérience du Christ par les chrétiens,
n’épuise pas les richesses de cette réalité que les chrétiens ne peuvent qu’appeler Christ » (ibid., p. 28). C’est la raison pour laquelle Panikkar plaide en
faveur d’une christologie devenant une christophanie, au sens où elle dépasserait l’explicitation chrétienne de l’expérience christique vers une prise en
charge des « équivalents homéomorphiques » (ibid., p. 15), présents en
d’autres cultures et religions, de la problématique chrétienne du Christ. Même
si le terme de « christophanie » risque à mes yeux d’induire en erreur à cause
de sa connotation inévitablement docète, j’estime que le projet de Panikkar
mérite aujourd’hui toute l’attention de la recherche en théologie des religions.
49. Cf. Claude GEFFRÉ, « Le paradoxe christologique comme clé herméneutique
du dialogue interreligieux », Chemins de dialogue 19 (2002), p. 161-182.
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Chemins de Dialogue
annonçait déjà ses futurs débats avec Karl Rahner : « Si un christianisme implicite suffit au salut de qui n’en connaît point d’autre,
pourquoi nous mettre en quête du christianisme explicite ? »50 Il
s’agira donc de préciser le lien entre Jésus Christ et l’Église, entre
l’unique médiateur du salut et la communauté de ceux et celles qui
sont ses disciples. Que signifie pour l’Église le fait de se
comprendre elle-même non pas comme une voie de salut parmi
d’autres, mais comme étant, dans le Christ, le sacrement universel du
salut, comme le souligne avec force Vatican II ?51
Ni fusion des religions, ni suprématie de l’une d’entre elles, ni
extinction du religieux : l’enjeu de la rencontre actuelle entre les
religions est leur propre transformation au sein d’une expérience
de dialogue. Dans cette perspective, l’universalité du message que
le christianisme confesse avoir reçu mission de proclamer ne
saurait être prouvée d’une manière théorique. Sa vérité est à faire.
Elle est d’ordre praxéologique. Au retour d’un important voyage
au Japon effectué au printemps 1960, le grand théologien
protestant Paul Tillich (1886-1965) disait que la mission du christianisme ne devait pas avoir pour objectif d’annoncer le christianisme lui-même, toujours relatif à une culture, mais bien plutôt la
puissance de transformation, d’ébranlement et de retournement
qui procède de la révélation sur laquelle il est fondé. Le but du
dialogue interreligieux est alors de créer « une communauté de
conversation », capable de transformer les deux partenaires du
dialogue et de les ouvrir à une véritable liberté spirituelle :
Ainsi le christianisme sera le porteur de la réponse religieuse
dans la mesure où il sera capable de briser sa propre particularité
pour la dépasser. Le chemin qui conduit à ce but ne consiste pas à
abandonner notre propre tradition religieuse pour une idée universelle qui ne serait rien qu’une abstraction. Ce chemin nous conduit
plutôt dans le sens d’un approfondissement de notre propre
50. Henri de LUBAC, Catholicisme. Les aspects sociaux du dogme, Paris, Cerf, Unam
Sanctam 3, 1941 (deuxième édition), p. 63. Nous soulignons.
51. L’Église est « dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c’est-à-dire à la fois
le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre
humain » (Lumen gentium 1).
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Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux
religion par la prière, la pensée et l’action. Dans la profondeur de
toute religion vivante, il y a un point où la religion comme telle
perd son importance et ce vers quoi elle se dirige brise sa particularité et l’élève à une liberté spirituelle qui lui donne une vision de
la présence du divin dans toutes les expressions du sens ultime de
la vie humaine. C’est ce que le christianisme doit découvrir dans sa
rencontre actuelle avec les grandes religions.52
Peut-être faudra-t-il, pour cela, quitter le terrain, souvent miné
d’avance, de seules controverses doctrinales, pour venir sur celui
de l’expérience concrète, là où la différence prend un contour plus
familier, parce que vécue tout simplement, à longueur de
quotidien. Lorsque la foi en Dieu est ainsi partagée et mise à
l’épreuve de la rencontre « à hauteur de visage », elle en ressort
grandie dans l’aveu même de son caractère fragile et fragmentaire.
S’il est bien vrai, comme l’affirmait le grand philosophe juif
Emmanuel Lévinas, que « ce sont nos relations avec les hommes
qui donnent aux concepts théologiques l’unique signification qu’ils
comportent »53, alors l’aventure de la rencontre entre les religions,
non-exclusive de la rencontre avec les non-croyants et les athées,
augure d’un prometteur renouvellement du discours théologique
au vingt-et-unième siècle.
52. Paul TILLICH, Le christianisme et les religions [1961], Paris, Aubier, 1968, p. 173.
53. Emmanuel LEVINAS, Totalité et infini. Essai sur l’extériorité, La Haye /
Boston / Lancaster, Martinus Nijhoff, 1984 [1961], p. 51.
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Diocèse de Rabat.
DIALOGUER, POURQUOI ?
De ce qui m’a été donné de vivre au Maroc dans le champ interreligieux depuis 35 ans je retiendrai trois expériences qui m’ont
plus profondément marqué. Je les présenterai brièvement, dans la
première partie de mon exposé, car elles me semblent significatives
de ce qui peut se vivre en ce domaine, aujourd’hui, en ce pays.
Dans une seconde partie je rapporterai quelques convictions qui se
dégagent de telles expériences.
1. Le lieu d’où je parle : trois expériences
Les deux premières expériences ici présentées ont un caractère
plutôt culturel, la troisième un caractère proprement religieux.
1.1. La bibliothèque de La Source à Rabat
Durant l’époque coloniale, des chrétiens étrangers résidant au
Maroc ont désiré connaître le Maroc, son histoire, ses langues, ses
traditions sociales et religieuses… Ainsi, dans le cadre de la
communauté chrétienne, s’est constituée, à Rabat, une bibliothèque
CdD 20 - IX 2002 - p. 39-55
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Chemins de Dialogue
de qualité permettant de mieux comprendre la richesse de la
personnalité marocaine et sa foi. Avec l’Indépendance du pays, les
chrétiens qui étaient les premiers utilisateurs de ce fonds documentaire ont, progressivement, quitté le Maroc. La bibliothèque est
restée là, mais pratiquement en sommeil… En 1980, en accord avec
l’Église, j’ai décidé avec l’aide de quelques amis, de mettre cette
bibliothèque à la disposition des chercheurs marocains. Cette
initiative a été bien comprise et appréciée par la communauté
scientifique ; les lecteurs sont venus nombreux, de toutes les villes
du pays. Ils ont compris que La Source ne se situait pas comme un
centre culturel étranger qui veut faire connaître sa langue et sa
culture, mais qu’elle se veut solidaire d’un pays qui cherche à
mieux connaître son histoire, sa société, sa propre culture et, ainsi,
mieux se développer… Pour gérer cette bibliothèque nous avons
reçu des aides extérieures mais également beaucoup de dons de
livres et de thèses, apportés par des lecteurs amis qui nous ont
aussi rendu de multiples services. De même nous avons eu
l’occasion d’échanger de nombreux ouvrages et de coopérer de
diverses manières avec des universités et institutions, marocaines
et étrangères1.
Après quelques années, La Sourc e est devenue une des
meilleures bibliothèques spécialisées sur le Maroc, un lieu
important de la recherche scientifique sur ce pays. Et aussi, malgré
nos limites, un lieu de rencontres naturelles et vraies entre
chrétiens et musulmans, un lieu d’échanges fraternels. Signe
sensible que chrétiens et musulmans nous pouvons travailler
ensemble, apprendre ainsi à nous connaître, à nous respecter, et
tisser des liens d’amitié, construire un climat de paix et de
fraternité.
Après avoir assuré la direction de cette maison durant vingt ans,
j’ai eu la joie de trouver un ami qui a accepté de prendre ma
succession. Je me suis, donc, retiré. À cette occasion deux livres
m’ont été offerts : des « Mélanges » et un recueil de quelques-uns
1. Cf. Jacques Levrat, « La Source, à Rabat, un lieu de rencontre entre chrétiens et
musulmans », dans Chemins de Dialogue 13, 1999, p. 221-229.
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Dialoguer, pourquoi ?
de mes textes devenus introuvables2. Des signes d’amitié, de reconnaissance, auxquels j’ai été très sensible.
1.2. Le complexe culturel de Beni Mellal
Libéré de la direction de La Source, plusieurs propositions de
travail m’étaient faites. Parmi elles, après mûre réflexion, j’ai choisi
de répondre à la demande d’un ami marocain, Omar Akalay, avec
qui j’avais déjà eu l’occasion de travailler. Banquier, il avait lancé
une maison d’édition, Wallada, pour participer au développement
intellectuel de son pays. Un historien, universitaire, juif marocain,
dirigeait la collection de sciences humaines. Lorsque ce dernier a
été emporté par la maladie Omar Akalay m’a demandé de prendre
la direction de cette collection avec pleine liberté de choisir les
livres à publier. Quand un musulman demande à un chrétien,
étranger de surcroît, de succéder à un juif pour diriger une
collection de sciences humaines, cela manifeste un vrai climat de
confiance et de liberté !
Ayant travaillé ensemble durant des années nous avions assez
d’estime et de confiance réciproques, pour nous lancer dans une
nouvelle aventure. Omar Akalay m’a proposé de prendre en
charge un complexe culturel. Il apportait sa bibliothèque familiale ;
5 ou 6.000 livres, des manuscrits, une collection de 150 toiles de
peintres marocains, et de bijoux traditionnels. Il voulait mettre ce
patrimoine à la disposition de son pays, si possible dans une région
démunie au plan culturel. Or l'Église se trouvait posséder à Beni
Mellal un terrain libre attenant à notre lieu de culte et nous
pouvions en disposer pour ce projet. Comme cette région connaît
un grand nombre de jeunes chômeurs tentés de fuir leur pays, leur
p roposer des activités culturelles, c’était leur permettre de
2. Empreintes, Mélanges offerts à Jacques Levrat, Rabat, Al Assas / La Source,
2000, 334 p.
Jacques Levrat, Approches, Rabat, Al Assas, 1999, 140 p.
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Chemins de Dialogue
développer leur formation, de retrouver confiance en eux,
d’espérer. Nous nous sommes donc mis d’accord sur ce lieu. Omar
Akalay entreprend maintenant à ses frais la construction sur ce
terrain d’une bibliothèque pouvant accueillir 200 lecteurs et stocker
40.000 livres. Dans un second temps nous aménagerons les locaux
actuels pour créer le musée.
Certes, le geste de ce citoyen qui fait don de son patrimoine, et
qui fait grande confiance à l’Église, n’est pas compris par tous les
Marocains. Mais c’est un geste significatif, exemplaire. Il suscite
déjà d’autres gestes. La Fondation du Roi Abdul Aziz al-Saoud, par
exemple, située à Casablanca, nous a envoyé ses ouvrages en
double : 4 tonnes de livres et périodiques, 8 000 volumes en
sciences humaines, tous ouvrages de qualité ! Et diverses
personnes et institutions nous ont promis - et certains sont déjà
réalisés - des dons de livres, de bijoux, des aides multiformes…
Les raisons qui m’ont décidé à m’engager dans ce projet sont
principalement :
• dire oui à un ami qui fait une telle confiance à l’Église,
• travailler ensemble, chrétiens et musulmans, au service des plus
démunis, pour ce qui est de l’équipement culturel,
• enfin, ce complexe culturel peut participer au dynamisme de la
région et donner un peu d’espoir à sa jeunesse.
1.3. Le GRIC (Groupe de recherche islamo-chrétien)
Depuis 25 ans je fais partie d’un groupe de recherche islamochrétien, le GRIC. L’équipe de Rabat est en lien avec d’autres
équipes basées à Tunis, Paris, Bruxelles, mais aussi, plus épisodiquement, Alger, Dakar, Beyrouth, Le Caire… Nous avons déjà
publié quatre livres, un cinquième est en chantier. Ces livres sont
écrits en commun par des chrétiens et des musulmans. Notre choix
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Dialoguer, pourquoi ?
est de travailler avec la rigueur des méthodes scientifiques
modernes. Nous faisons effort en particulier pour écouter
longuement l’autre, pour l’accueillir et l’accepter tel qu’il est et se
veut être. Ainsi, peu à peu, notre regard sur l’autre se purifie, se
renouvelle.
Le premier des livres que nous avons publiés a pour titre : Ces
Écritures qui nous questionnent, la Bible et le Coran3. Il nous fallait
commencer par travailler sur nos sources. Le deuxième est plus
engagé : Foi et Justice, un défi pour le christianisme et pour l’islam4, le
troisième porte sur un sujet actuellement sensible pour les
musulmans : Pluralisme et laïcité, chrétiens et musulmans proposent5, le
dernier sorti s’intitule : Péché et responsabilité éthique dans le monde
contemporain6. Ces divers travaux, certes un peu spécialisés, nous
ont montré que nous pouvions travailler ensemble, bénéficier de
l’expérience les uns des autres, nous stimuler dans notre recherche,
approfondir chacun notre propre tradition pour répondre mieux
aux questions de l’autre… C’est à ma connaissance le premier
travail scientifique dans le champ religieux, qui ait été réalisé en
commun par des chrétiens et des musulmans.
Personnellement, je dois beaucoup à ces années de travail en
commun. Nous avons appris à nous connaître, de forts liens
d’amitié se sont tissés. Je ne peux plus parler de l’islam et des
musulmans sans me sentir très solidaire d’eux. Je pense que dans
ce groupe je me suis profondément renouvelé et, dans le miroir de
l’autre, j’ai mieux compris ma foi chrétienne, son originalité.
3.
4.
5.
6.
Paris, Le Centurion, 1987.
Paris, Le Centurion, 1993.
Paris, Bayard Éditions, 1996.
Paris, Bayard Éditions, 2000.
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Chemins de Dialogue
2. Quelques convictions personnelles
qui se dégagent de ces expériences
À partir de ces expériences et de ma longue pratique du
dialogue, je vous propose maintenant quelques convictions
personnelles, fortes, concernant le dialogue interreligieux. Les
premières ont un caractère plutôt profane (2.1. à 2.5.), les suivantes
(2.6. à 2.11.) un caractère proprement spirituel, la dernière (2.11.)
étant spécifiquement chrétienne.
2.1. Des lieux de rencontre
De ces diverses expériences, je retiens la nécessité de créer des
lieux de rencontre entre adeptes de différentes religions. Tant que
nous restons, les uns et les autres, limités à nos petits univers,
l’autre apparaît toujours comme une menace : la peur, la méfiance
nous paralysent. Alors l’agressivité se développe insensiblement
et, à la moindre occasion ; des réactions violentes peuvent surgir. Il
est donc nécessaire de créer des lieux de rencontre, des lieux
communs, des lieux où l’on apprend à s’accueillir les uns les autres.
Ces lieux peuvent prendre des formes diverses : art, culture, sport,
association humanitaire… L’important est de se retrouver pour
vivre et faire quelque chose ensemble dans un climat de liberté, de
respect, d’amitié. Là, s’il y a un véritable vivre ensemble dépassant de simples relations cordiales - avec du temps et de la
patience, l’ignorance et la peur peuvent se dissiper progressivement. C’est une première étape, d’apprivoisement mutuel. Elle
me semble indispensable.
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2.2. Écouter et interroger
Rencontrer l’Autre7, l’accueillir, c’est d’abord l’écouter. L’écouter
longuement, écouter sa différence, acceptant de ne pas tout savoir
de lui. Écouter en étant désireux de l’accueillir avec ses richesses et
de comprendre ce qui donne sens à sa vie. À l’exemple de Jésus
assis au milieu des docteurs « les écoutant et les interrogeant »
(Lc 2,46). Écouter, oui, et aussi interroger. Interroger, discrètement
certes, non comme un juge, mais comme un amoureux qui désire
mieux connaître, mieux comprendre le secret de l’Autre, ce qui est
au cœur de sa vie et lui donne sens… L’écoute et le questionnement
sont une condition du dialogue, le moment le plus important.
Certes, Jésus, nous le savons, a aussi parlé avec, et à ses concitoyens. Il les a enseignés mais seulement après de longues années
de silence, d’écoute, de questionnements. Et de ce long silence une
parole a jailli « avec douceur et respect » mais aussi « avec autorité »,
c’est-à-dire capable de faire grandir8 l’autre, de l’ouvrir à son
propre avenir9…
L’écoute, l’accueil de la parole de l’Autre, et donc de l’Autre luimême, permettent à un dialogue vrai de s’engager… Chacun alors
peut livrer le meilleur de ses convictions. Le dialogue devient
partage, il peut porter des fruits.
2.3. Le travail intellectuel
L’écoute, le questionnement ne dispensent pas d’une approche
plus intellectuelle, plus abstraite de l’Autre, de sa culture, de sa
7. J’écris Autre avec une majuscule lorsqu’il s’agit d’une personne bien déterminée, eu égard à sa dignité.
8. C’est le sens étymologique du mot autorité.
9. Cf. Le démoniaque gérasénien (Mc 5,18-20).
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religion. Nous sommes tous héritiers d’une culture, de ses
richesses certes, mais aussi de ses limites, de ses routines sociales,
de ses préjugés, souvent fruits de manipulations politiques.
Souvent notre connaissance des autres traditions religieuses est
partielle, partiale - voire même simpliste et caricaturale. Notre
bagage intellectuel sur les autres religions se limite parfois à
quelques stéréotypes, quelques clichés. C’est pourquoi le travail
intellectuel - selon les dons de chacun - est indispensable pour
connaître la tradition de l’Autre et en découvrir les richesses.
Ce travail permet aussi de purger notre mémoire et notre imaginaire de ce qui les encombre, de ce qui pollue et fait écran, de ce qui
nous empêche de porter un regard serein sur l’Autre. Cela a été
bien exprimé du point de vue musulman par un penseur tunisien
contemporain, Abdelmajid Charfi, qui a écrit : « Les Musulmans ne
pourront rentrer dans la paix, dans la construction d’un monde fraternel,
s’ils ne relisent pas leur histoire », réflexion valable pour toute
société… Le travail intellectuel nous libère de nos a priori, de nos
idées toutes faites. Idées qui parfois se structurent en système clos,
en idéologie, et sont très proches des « idoles », comme nous le
verrons plus loin.
Dimension indispensable du dialogue, le travail intellectuel est
un chemin de réalisme, d’objectivité et de vérité. Il permet de
renouveler notre regard sur les autres et de mieux connaître notre
p ro p re histoire. Mais aussi, dans un second temps, il nous
demande de re l i re nos pro p res Écritures et nos Traditions
religieuses avec un regard plus ouvert nous permettant d’en
découvrir de nouvelles dimensions, de nouvelles richesses, de
nouvelles exigences. C’est là, incontestablement, un très beau fruit
du dialogue.
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2.4. Se libérer de ses idoles
Lorsque - plutôt que d’accueillir l’Autre et de l’écouter, de
s’ouvrir à son histoire et à sa tradition - on préfère rester enfermé
dans ses certitudes, dans un univers culturel et religieux limité, on
demeure prisonnier d’un cocon qui paralyse et emprisonne, et qui
empêche de « naître » au monde tel qu’il est. Un cocon, dont on se
fait une véritable idole. On pense être dans le meilleur des mondes
possibles, le seul cohérent, logique et raisonnable ; mais en fait c’est
une prison qui nous étouffe ! Alors que risquer la rencontre d’un
Autre, différent, produit un choc, un ébranlement des certitudes, ce
qui conduit à une prise de conscience salutaire : il y a d’autres
conceptions du monde possibles, elles ont aussi leurs logiques,
leurs cohérences… Je découvre ainsi que ma vision du monde est
limitée, partiale. Je suis alors invité à naître à une vision plus large,
plus universelle, à ouvrir, très progressivement, mon regard et mon
cœur aux dimensions du regard et du cœur de Dieu.
La sortie du cocon est un arrachement à une vision limitée du
monde. Le cocon, l’idole qui se brise permet une nouvelle
naissance… Mais cet arrachement, cette conversion ne peuvent se
faire tant que l’on demeure seul, enfermé dans son propre univers
culturel et religieux. L’Autre, différent, est le médiateur indispensable de cette nouvelle naissance !
2.5. La réciprocité
Certaines personnes pensent que le dialogue n’est pas possible
du fait de « décalages culturels » ou de « décalages historiques » ou
bien encore de situation de domination de type politique ou
d’exploitation économique ou encore de statut social (apartheid,
relation homme-femme, par exemple). Il est certain que ces divers
facteurs pèsent très lourd dans les relations humaines, ils inter47
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viennent donc dans le dialogue et peuvent même le perturber
gravement. Il importe d’en être conscient mais ce n’est pas une
raison pour y renoncer !
En effet, si l’on entre dans la logique de la domination et si l’on
intègre cette dimension, on risque d’en prendre son parti, passivement. On peut, encore dans cette même logique, se situer en
victime et faire des autres les seuls responsables de nos malheurs.
Alors que choisir la voie du dialogue c’est sortir de cette logique,
vouloir se mettre debout et se faire respecter. C’est refuser les
oppressions physiques et psychologiques que la société tente
d’imposer… Gandhi face aux colonisateurs de l’Inde, Martin
Luther King à Atlanta, Nelson Mandela en Afrique du Sud, et bien
d’autres, inconnus pour la plupart, ont choisi cette voie-là. C’est la
logique des droits de l’Homme, d’un Homme qui compte non pour
ce qu’il possède d’avoir, de savoir ou de pouvoir, mais pour ce qu’il
est. D’un Homme qui s’affirme tout en reconnaissant et assumant
ses limites. Dialoguer, c’est tenter de se situer à ce niveau de
réciprocité, dans un face-à-face d’Homme à Homme, d’égale
dignité ; dans une confrontation qui permet à chacun de donner et
de recevoir, et ainsi de grandir en humanité.
Le dialogue ne dispense pas du combat pour la justice et le
respect de chaque personne. Il ne supprime pas les décalages
divers et les oppressions hérités de l’Histoire. Cependant, il permet
de les relativiser un peu… et aussi de les réduire - même si c’est très
lentement - par les relations qu’il contribue à mettre en place.
2.6. Tous, créatures de Dieu
Les lieux de rencontre interreligieux qui favorisent l’accueil,
l’écoute, la connaissance de l’Autre développent aussi, chez ceux
qui y participent, une conscience solidaire. Ils expérimentent une
appartenance humaine commune. À partir de là, certains, dont je
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suis, osent, risquent, une lecture proprement spirituelle. Une
lecture qui tient que notre Monde, notre Terre, et nous-mêmes,
venons de Dieu. Avant toute autre considération religieuse, avant
tout message révélé, avant toute religion historique, le mystère du
Dieu Créateur nous concerne tous, nous englobe tous.
Ainsi, avant d’être un membre de l’Église catholique, je suis une
créature de Dieu. D’un Dieu qui nous a créés différents pour que
nous apprenions à vivre ensemble, comme des frères… C’est là
notre appartenance première, et elle est fondamentale. Ensuite, du
fait de notre histoire, nous avons aussi une appartenance religieuse
spécifique : hindoue, bouddhiste, juive, musulmane, chrétienne ou
autre. Il ne peut y avoir d’opposition entre ces appartenances ; mais
bien plutôt une cohérence profonde. Le principe de cette cohérence
du Dieu de la création et du Dieu de la révélation a été particulièrement bien montré par Ibn Ruchd dans divers travaux : je pense
en particulier à sa parole célèbre : « Le vrai ne peut contredire le
vrai »10.
Les Pères de L’Église exprimaient cette même réalité dans un
autre langage. Pierre Chrysologue dans son commentaire de
l’Évangile de Matthieu parle des « deux grands livres de la
Révélation : le livre de la nature créée et le livre des Saintes Écritures »
(2,1-2). Le Moyen Âge latin rendra classique cette formulation :
liber naturae (livre de la nature) et liber scripturae (livre des Écritures,
de la révélation écrite).
Ma relation au Créateur m’invite à me situer en être humain
responsable de cette Terre et de son devenir, responsable et
solidaire de mes frères humains, surtout les plus démunis, ceux qui
souffrent et sont méprisés, ceux que l’on n’écoute pas. Cette appartenance fondamentale et la prise de conscience de notre solidarité
humaine nous invitent impérativement au respect de toute
personne, quelle que soit son appartenance religieuse spécifique.
10. Dans son Fasl al-maqâl.
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2.7. Créés à l’image de Dieu
Ce respect des personnes est confirmé par les textes de la
tradition abrahamique : la Bible pour la tradition judéo-chrétienne,
comme le hadith pour la tradition musulmane, nous disent que la
personne humaine a été créée à « l’image de Dieu ». Le Coran
affirme, lui, que l’homme a reçu le « souffle divin ». Ce sont là des
formulations légèrement différentes mais pratiquement équivalentes dans leur signification profonde. Elles nous disent la
grandeur de chaque personne, l’incomparable richesse qui
l’habite : en elle demeure une trace du divin.
Ainsi, la tradition abrahamique nous invite à porter un regard
positif sur toute personne humaine : au-delà du poids des histoires
communautaires et personnelles, au-delà des apparences, qui
peuvent être trompeuses – tellement les imaginaires et les
mémoires sont encombrés –, une étincelle divine est là ! Ainsi, la foi
nous invite à dépasser nos réactions instinctives, à ne pas considérer l’Autre d’abord comme un danger potentiel, une menace… Si
nous ne maîtrisons pas cette peur, nous sommes incapables de
l’accueillir et de nous enrichir de cette part de divin qui est en lui.
La foi nous permet de dépasser la peur d’affirmer que l’Autre est
porteur d’une richesse qui le dépasse et qui nous dépasse. Elle
nous invite donc à accueillir l’Autre comme un don de Dieu…
Dans cette perspective chacun peut recevoir et donner dans une
réciprocité reconnue. Certes, l’Autre, tout comme moi, est limité. Il
n’est qu’une créature, il en a les limites, les faiblesses. Je dois donc
accepter ces limites avec réalisme et ne pas trop attendre et exiger
de lui ; il ne peut tout me donner. Le manque reconnu, accepté nous
renvoie à notre désir. Et le désir qui nous habite n’a pas de
limites… C’est pourquoi l’expérience de rencontres de qualité doit
se multiplier, se diversifier pour répondre à notre désir sans
limites. Mais, en fin de compte, seul le Tout Autre peut satisfaire
pleinement ce désir. La rencontre de l’Autre permet de nous
acheminer progressivement à la rencontre du Tout Autre.
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2.8. La kénose, le vide en soi
Il m’a fallu de nombreuses années pour franchir ces diverses
étapes, pour accueillir l’Autre gratuitement, comme un don de
Dieu… Spontanément je partais de moi, de ma foi chrétienne, de
mon expérience humaine, et spirituelle, pour rejoindre l’Autre et
tenter de l’accueillir avec le maximum de bonne volonté… Il me
semble que depuis quelques années une mutation profonde se
produit, comme une révolution copernicienne… Je ne suis plus au
centre du Monde… Je suis un parmi les autres, avec les autres.
Alors mon accueil de l’Autre est plus libre, plus gratuit, je ne suis
plus préoccupé d’une « mission » à accomplir… Je vis avec l’Autre
simplement, sans souci, sans inquiétude pour lui. Mon seul souci
devient d’accueillir chaque jour l’amour divin - pour moi, comme
pour lui - gratuitement, aussi librement et intensément que
possible11.
Ainsi j’ai été conduit à approfondir le sens de la parole de Paul
aux Philippiens : Jésus « s’est dépouillé, prenant la condition de
serviteur » (2,7). Ce dépouillement implique ce que nous avons déjà
dit de nos idées et de nos idoles mais il demande aussi une
libération plus radicale, un vrai « détachement » de tout ce qui ne
se situe pas au niveau de l’être, pour reprendre le vocabulaire de
Maître Eckhart. Le détachement en effet permet une grande liberté
intérieure : celui qui n’a rien à défendre n’a plus peur de l’Autre,
celui qui ne veut plus exercer de mainmise sur l’Autre dépasse la
violence qui l’habite. J’ai ainsi mieux compris comment, dans le
11. J’ai été aidé en cette démarche par l’évolution de l’Église catholique qui au
Concile Vatican II, est partie de son propre fonds pour s’ouvrir aux autres. Et
qui, quelques décades plus tard, avant de célébrer le Jubilée de l’an 2000 a
organisé à Rome et à Assise une rencontre interreligieuse, se situant ainsi
d’abord au cœur du Monde pour mieux accueillir et célébrer sa propre foi. Cf.
les propos du Cardinal Etchegaray sur cette rencontre : « Elle était bien plus
qu’un simple lever de rideau. Elle en constituait comme le premier acte, entraînant
l’Église à approfondir le sens de sa mission au sein de la caravane humaine où la
pluralité des religions s’impose comme un fait et encore plus comme un mystère… »
(Documentation catholique, n° 2250, p. 572).
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contexte très violent des Croisades, la pauvreté radicale vécue par
François d’Assise l’avait préparé à la rencontre courtoise du Sultan
Malek al-Kamil. Pauvre, il était libre pour accueillir… Faire le vide
en soi12 permet d’accueillir l’Autre et prépare à la rencontre du Tout
Autre.
2.9. Compagnonnage spirituel
Des années de vie partagée, de confiance, d’amitié m’ont permis
en certaines occasions de vivre des moments d’intense fraternité.
Pouvoir nous retrouver - chrétiens et musulmans - sous le regard
de Dieu ; pouvoir nous confier, les uns aux autres, nos souffrances
les plus personnelles, nos espoirs et notre recherche spirituelle, est
une expérience très forte. Au-delà des mots, il y a à ces momentslà un partage spirituel, une expérience de fraternité, de
communion spirituelle intense. Cette expérience difficilement
exprimable permet par ailleurs de mieux supporter, accepter et
assumer, les différences - très éprouvantes - dont nous ne pouvons
raisonnablement et religieusement rendre compte.
Dans ce climat spirituel, une grande confiance devient possible.
Le dialogue n’est plus alors limité au domaine conceptuel, à un
échange d’idées, de points de vue. Il devient existentiel, un partage
du plus profond des expériences religieuses : un témoignage
mutuel. Il renvoie chacun à son propre cheminement spirituel, le
stimule, le féconde.
12. Il y a là une convergence profonde avec la tradition bouddhiste.
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2.10. Le pardon
D’étape en étape le dialogue nous conduit à mieux prendre
conscience de nous-même, à mieux prendre conscience de l’Autre
également. Il nous a fait découvrir combien notre point de vue
pouvait être partial, nos jugements sur l’Autre injustes. Mieux
écouter l’Autre nous oblige aussi à reconnaître les graves situations
d’injustices politiques, économiques, sociales et culturelles que
nous a léguées l’histoire. Ma relation à l’Autre est parasitée, polluée
par ce poids d’histoires personnelles et sociales. La prise de
conscience des malentendus, des incompréhensions, des violences,
des souffrances multiples qui traversent l’histoire me conduit à
reconnaître ma responsabilité personnelle et communautaire.
À un moment donné, ce poids qui pèse sur ma conscience
apparaît comme insupportable. Et je suppose qu’il est aussi
partagé, à sa manière, par mon interlocuteur. Nous éprouvons
alors le besoin intense de nous libérer de ce poids, de ce péché… Ce
qui nous invite à une nouvelle étape, à une nouvelle démarche : le
pardon.
Pardonner n’est jamais facile mais ce geste de vérité libère et
permet un nouveau départ : reconnaître et assumer le passé, avec
son caractère à la fois personnel et communautaire, favorise
l’ouverture de voies nouvelles. Le pardon ne remplace pas le
combat pour la justice, mais il demande de dépasser la rancune, la
haine, le désir de vengeance. Le pardon demandé et partagé est
créateur d’une relation nouvelle, d’une vie nouvelle. Lui seul
guérit les blessures du passé, pacifie les consciences, ouvre à
l’avenir.
Chrétiens et Musulmans nous avons entre nous un lourd
contentieux dont nous devons nous libérer pour préparer un
avenir meilleur. Chrétiens et Musulmans nous savons aussi la
grande place que nos Traditions respectives accordent au pardon pardon que nous oublions si souvent et que nous pratiquons fort
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peu. Notre Dieu, Lui, est toujours disposé au pardon, Il nous invite
à entrer nous aussi dans cette voie…
2.11. Un Dieu relationnel, une communion
Accepter et assumer le passé tout en reconnaissant les différences qui, elles, ne s’effacent pas, et cependant entrer librement en
relations fraternelles, en communion spirituelle intense, est une
expérience magnifique. Une expérience qui touche et fait vibrer les
fibres les plus profondes de notre personnalité. Pour le chrétien
que je suis, il me semble qu’à ces moments-là j’expérimente
quelque chose du plus profond de moi-même, de cette vie divine
qui est en moi : la différence - que j’éprouve et qui m’éprouve - me
dépasse, elle a donc un caractère proprement religieux, je dois donc
tenter d’en percevoir le sens. Je perçois alors intuitivement que la
vie en Dieu peut être une vie de relation, d’échange, de
communion qui suppose et implique la différence. Une différence
qui est au cœur de la vie divine, qui en est le moteur. Cette
expérience me renvoie au mystère de la vie trinitaire…
Le dialogue interreligieux vécu comme une relation et non
comme une fusion ne conduit pas à un quelconque syncrétisme
fade. Au contraire, assumer la différence renvoie le chrétien que je
suis au cœur de sa foi, au cœur du mystère divin, à un Dieu qui vit
au plus intime de Lui-même la kénose évoquée plus haut. D’un
Dieu qui ne s’approprie rien, qui est tout entier accueil et don, dans
sa vie interpersonnelle comme dans sa relation au créé. Ou, selon
la belle formule de Maurice Zundel, « la Trinité, c’est la pauvreté de
Dieu ». L’unité en Dieu est unité d’un Vivant, elle est dans la
relation, l’échange incessant, la communion, l’amour. Il en est de
même de l’unité et de la vie du genre humain. Nous avons été créés
à l’image de Dieu pour nous accueillir les uns les autres, nous
enrichir de nos différences et apprendre à nous aimer…
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En fin
En mettant par écrit ces convictions, je constate que j’ai mis
l’accent sur ce que la vie avec l’Autre, l’écoute, le dialogue ont
produit en moi. Je comprends ainsi que j’ai beaucoup reçu de ces
diverses rencontres.
Mais alors je suis amené à me poser la question : si le dialogue
produit en moi des changements, des évolutions, de bons fruits, en
va-t-il de même pour l’Autre ? Cette question qui m’a souvent
préoccupé me semble aujourd’hui inutile. Je pense avoir perçu que
le mystère de Dieu me dépasse de toutes parts et que nous sommes
dans le domaine de la gratuité pure : « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement » (Mt 10,8). Je dois donc veiller à
laisser Dieu être Dieu, à ne pas Lui fixer des limites, à Lui
permettre d’agir librement sans trop Lui faire écran, sans être plus
pressé que Lui… Je dois ainsi risquer le plus gratuitement possible
la rencontre de l’Autre, sans me préoccuper de ce qui se passe en
lui. Il y a là, en effet, un secret que je me dois de respecter : le
mystère de sa relation à Dieu.
Le dialogue nous a permis de nous connaître, de nous estimer,
de nous respecter et, également, de nous enrichir les uns par les
autres. Il nous fait entrer progressivement dans un monde fraternel
et relationnel, un monde vivant à l’image de Dieu Lui-même…
Ainsi, modestement, nous commençons à vivre dès maintenant
quelque chose de cette vie qui connaîtra sa plénitude dans le
Monde à venir…
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Roger Michel
ISTR de Marseille.
LE PAPE JEAN-PAUL II ET LES MUSULMANS
Dans le sillage du concile Vatican II et à la suite de son prédécesseur le pape Paul VI1, le pape Jean-Paul II n’a cessé de creuser le
sillon du dialogue islamo-chrétien au cours de ses nombreux
voyages apostoliques à travers le monde.
Dès 1979, en Tu rquie, devant la communauté catholique
d’Ankara, Jean-Paul II affirme l’estime de l’Église catholique pour
les valeurs religieuses de l’islam.
« Soyez toujours prêt à répondre à quiconque vous demande
raison de l’espérance qui est en vous. Mais que ce soit avec douceur
et respect, en possession d’une bonne conscience » (1P 3,15-16).
Ces paroles sont la règle d’or pour les rapports et les contacts
que le chrétien doit avoir avec ses concitoyens qui ont une foi différente. Aujourd’hui, pour vous, chrétiens résidant ici en Turquie,
votre sort est de vivre dans le cadre d’un État moderne – qui
prévoit pour tous la libre expression de leur foi sans s’identifier
avec aucune -, et avec des personnes qui, dans leur grande majorité,
tout en ne partageant pas la foi chrétienne, se déclarent « obéissants
envers Dieu », « soumis à Dieu », et même « serviteurs de Dieu »,
selon leurs propres paroles, qui rejoignent celles de saint Pierre déjà
citées (cf. ibid. 2,16) ; ils ont donc, comme vous, la foi d’Abraham
dans le Dieu unique tout-puissant et miséricordieux. Vous savez
que le Concile Vatican II s’est prononcé ouvertement sur ce sujet, et
moi-même j’ai rappelé, dans ma première encyclique Redemptor
1. Cf. Maurice Boormans, « Paul VI et les musulmans », in Islamochristiana 4,
1978.
CdD 20 - IX 2002 - p. 57-65
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Chemins de Dialogue
hominis, que le « Concile… a exprimé son estime pour les croyants
de l’Islam, dont la foi se réfère aussi à Abraham » (n° 11).
Aux Philippines, en 1981, le pape s’adresse aux musulmans
comme à des « frères » et s’entretient avec eux de la « miséricorde
de Dieu » inscrite dans la Bible et le Coran.
C’est à dessein que je m’adresse à vous avec le titre de « frères » :
frères, vous l’êtes à coup sûr car vous êtes des membres de la même
famille humaine, dont les efforts, qu’ils en aient conscience ou non,
tendent vers Dieu et la vérité qui vient de lui. Mais nous sommes
particulièrement frères en Dieu qui nous a créés en ce que nous
nous efforçons d’atteindre, selon nos propres voies, par la foi, la
prière et l’adoration, l’observation de sa loi et la soumission à ses
desseins.
La société ne peut apporter aux citoyens le bonheur qu’ils
attendent que si la société elle-même est bâtie sur le dialogue. Le
dialogue à son tour repose sur la confiance, et la confiance
présuppose non seulement la justice mais la miséricorde. Sans
aucun doute, l’égalité et la liberté, qui sont au fondement de toute
société, requièrent la loi et la justice. Mais, comme je l’ai dit dans
une récente lettre adressée à toute l’Église catholique, la justice à
elle seule ne suffit pas : « L’égalité introduite par la justice se limite
cependant au domaine des biens objectifs et extérieurs, tandis que
l’amour et la miséricorde permettent aux hommes de se réconcilier
entre eux dans cette valeur qu’est l’homme même, avec la dignité
qui lui est propre » (Dives in Misericordia, 14).
Chers musulmans, mes frères : je voudrais ajouter que, nous
chrétiens, tout comme vous, nous cherchons le fondement et le
modèle de la miséricorde en Dieu lui-même, ce Dieu auquel votre
Livre donne le très beau nom de al-Rahman, et que la Bible appelle
al-Rahum, le Miséricordieux.
C’est seulement dans ce cadre de religion et dans des promesses
de foi partagées que l’on peut réellement parler de respect mutuel,
d’ouverture et de collaboration entre chrétiens et musulmans.
Alors naît la disponibilité à travailler ensemble, à bâtir une société
plus fraternelle.
L’année suivante, au Nigéria, Jean-Paul II insiste sur les points
communs entre le christianisme et l’islam.
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Le Pape Jean-Paul II et les musulmans
Tous, chrétiens et musulmans, nous vivons sous le soleil de
l’unique Dieu de miséricorde.
Les uns et les autres, nous croyons au Dieu unique, créateur de
l’homme. Nous proclamons la souveraineté de Dieu et défendons
la dignité de l’homme en tant que serviteur de Dieu. Nous adorons
Dieu et professons une totale soumission à son égard. Nous
pouvons donc, au vrai sens du terme, nous appeler frères et sœurs
dans la foi au Dieu unique. Et nous sommes reconnaissants de cette
foi puisque, sans Dieu, la vie de l’homme serait semblable au ciel
sans soleil.
À cause de cette foi que nous avons en Dieu, le christianisme et
l’islam possèdent de nombreux points communs : le privilège de la
prière, le souci de la justice qui s’accompagne de la compassion et
de l’aumône et, par-dessus tout, le respect sacré de la dignité de
l’homme, qui est à l’origine des droits fondamentaux de chaque
être humain, y compris le droit à la vie des enfants qui vont naître.
Nous, chrétiens, avons reçu de Jésus, notre Seigneur et Maître,
la loi fondamentale de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain (cf.
Mt 22,37-39). Je sais que cette loi d’amour trouve également un
profond écho dans vos cœurs, car dans votre livre sacré vous êtes
invités à la foi en même temps qu’exhortés à exceller dans les
bonnes œuvres (cf. Sourate, 5,48).
1985 : une année capitale pour le dialogue islamo-chrétien
En Belgique, le pape aborde avec les responsables de la communauté musulmane le thème de l’émulation spirituelle qui
s’enracine dans le Coran (5,48) comme dans la Bible (Tt 3,8).
Il ne nous est pas donné de former une communauté unique ;
c’est là une épreuve qui nous est imposée. Face à cette situation,
permettez-moi de reprendre une consigne de l’apôtre saint Paul :
« Que ceux qui ont placé leur foi en Dieu aient à cœur d’exceller
dans la pratique du bien. » (cf. Tt 3,8). C’est ce type d’émulation qui
peut bénéficier à toute la société, surtout à ceux qui ressentent le
plus vivement le besoin de justice, de consolation, d’espérance, en
un mot ceux qui ont besoin de raisons de vivre. Sachons collaborer
fraternellement, cela nous rapprochera de la volonté de Dieu.
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Chemins de Dialogue
Le 19 août, à Casablanca, au Maroc, Jean-Paul II prononce un
discours important. Sa visite au Maroc représente un événement
considérable et comme un commencement absolu, tant par son
caractère officiel que par le contenu de son adresse à la jeunesse
marocaine. Le discours de Casablanca est un modèle de mise en
valeur du patrimoine commun au christianisme et à l’islam. C’est
une invitation sereine et forte à associer le témoignage commun sur
le sens de Dieu et sur la dignité de l’homme, dans le respect des
différences. En voici un extrait significatif.
L’homme est un être spirituel. Nous, croyants, nous savons que
nous ne vivons pas dans un monde fermé. Nous croyons en Dieu.
Nous sommes des adorateurs de Dieu. Nous sommes des
chercheurs de Dieu.
L’Église catholique regarde avec respect et reconnaît la qualité de
votre démarche religieuse, la richesse de votre tradition spirituelle.
Nous aussi, chrétiens, nous sommes fiers de notre tradition
religieuse.
Je crois que nous, chrétiens et musulmans, nous devons reconnaître avec joie les valeurs religieuses que nous avons en commun
et en rendre grâce à Dieu. Les uns et les autres nous croyons en un
Dieu, le Dieu unique, qui est toute Justice et toute Miséricorde ;
nous croyons à l’importance de la prière, du jeûne et de l’aumône,
de la pénitence et du pardon ; nous croyons que Dieu nous sera un
Juge miséricordieux à la fin des temps et qu’après la résurrection, Il
sera satisfait de nous et nous serons satisfaits de Lui.
La loyauté exige aussi que nous reconnaissions et respections
nos différences. La plus fondamentale est évidemment le regard
que nous portons sur la personne et l’œuvre de Jésus de Nazareth.
Vous savez que, pour les chrétiens, ce Jésus les fait entrer dans une
connaissance intime du mystère de Dieu et dans une communion
filiale à ses dons, si bien qu’ils le reconnaissent et le proclament
Seigneur et Sauveur.
Ce sont là des différences importantes, que nous pouvons
accepter avec humilité et respect, dans la tolérance mutuelle ; il y a
là un mystère sur lequel Dieu nous éclairera un jour, j’en suis
certain.
Chrétiens et Musulmans, nous nous sommes généralement mal
compris, et quelquefois, dans le passé, nous nous sommes opposés
et même épuisés en polémiques et en guerres.
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Le Pape Jean-Paul II et les musulmans
Je crois que Dieu nous invite, aujourd’hui, à changer nos vieilles
habitudes. Nous avons à nous respecter, et aussi à nous stimuler les
uns les autres dans les œuvres de bien sûr le chemin de Dieu.
En 1989, après plus de quatorze années de luttes meurtrières,
Jean-Paul II lance un Appel Solennel à tous les musulmans en faveur
du Liban, « au nom du même Dieu que nous adorons »
Voilà pourquoi j’ai voulu aujourd’hui m’adresser à vous, fidèles
de l’islam, fils d’une religion où la justice et la paix sont
éloquemment enseignées. Faites entendre votre voix et, plus encore,
déployez tous vos efforts en union avec ceux qui réclament pour le Liban
le droit de vivre, et de vivre dans la liberté, la paix et la dignité ! Il
s’agit d’un devoir de solidarité humaine que votre conscience
d’homme et votre appartenance à la grande famille des croyants
imposent à chacun de vous.
Au Mali, en 1990, le pape parle aux jeunes de Bamako de
l’image de Dieu chez les chrétiens et chez les musulmans, conjuguant deux approches fondées sur la Bible et le Coran.
Lorsque la Bible raconte la création du monde et de l’homme,
elle nous montre que l’être humain possède une dignité unique et
une valeur souveraine : « Dieu dit : Faisons l’homme à notre image,
selon notre ressemblance… Dieu créa l’homme à son image, à
l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme » (Gn 1,2627).
Il nous faut donc respecter, aimer et aider tout être humain
parce qu’il est une créature de Dieu, et qu’il a une relation privilégiée avec Celui qui lui a tout donné. Qu’il en soit, dans un certain
sens, l’image fidèle ou le représentant attitré, il est toujours un
« signe » qui mène à Dieu. Ses droits sont l’expression de la volonté
de Dieu et l’existence de la nature humaine telle que Dieu l’a créée.
Créature de Dieu, l’homme est donc radicalement marqué d’une
dépendance. Cette dépendance mortifie peut-être son orgueil, mais
s’il la reconnaît et l’accepte librement, elle l’enracine dans une
existence pleine de sens, elle le tourne vers un horizon où seront
abolies toutes les limites, sans aucune angoisse ici-bas que celle de
ne pas aimer assez.
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Chemins de Dialogue
Musulmans et chrétiens ont certes des motifs et des moyens
différents pour réaliser cet idéal. Pour les uns, l’homme est appelé
à être un parfait représentant de Dieu, sur terre, en y témoignant,
pour le service de tous, de ce que signifient ces très Beaux Noms :
miséricorde et compréhension, pardon et réconciliation. Pour les
autres, l’expression « créé à l’image de Dieu » dévoile un mystère
encore plus profond car, pour eux, il existe entre l'homme et Dieu
une relation de communion qu’ils osent appeler une relation filiale.
L’homme est ainsi invité à devenir vraiment fils de Dieu dans un
partage de vie et d’amour. Ce mystère nous est pleinement révélé
par Jésus Christ, lui qui sait « tout ce qu’il y a dans l’homme »
(cf. Jn 2,25).
Traditionnellement, un message de vœux est adressé par le
conseil pontifical pour le dialogue interreligieux à tous les
musulmans, à l’occasion de la fin du Ramadan. En 1991, en raison
de la guerre du Golfe, Jean-Paul II leur adresse ce Message
Personnel :
Aux musulmans du monde entier, je voudrais exprimer la
disponibilité de l’Église catholique pour travailler avec vous, et
avec toutes les personnes de bonne volonté, afin d’aider les
victimes de la guerre et d’élever les structures d’une paix durable,
au Moyen-Orient et partout dans le monde. Cette coopération
solidaire en faveur des plus affligés sera la base concrète d’un
dialogue sincère, profond et constant entre catholiques et croyants
musulmans, d’où pourra jaillir une plus grande connaissance et
confiance mutuelles, et l’assurance que partout chaque croyant
pourra professer sa foi librement et d’une façon authentique…
Je termine ces vœux en citant les paroles d’un de mes prédécesseurs, le Pape Grégoire VII qui, en 1076, écrivit à l’Émir musulman
Al-Nacir, qui régnait à Bijâya, dans l’actuelle Algérie : « Dieu toutpuissant, qui veut que tous les hommes sont sauvés et qu’aucun ne
périsse, n’apprécie rien tant chez chacun de nous que l’amour du
prochain après son amour, et que le soin de ne point faire à autrui
ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît. Or cette charité, nous
et vous, nous nous la devons mutuellement puisque nous reconnaissons et confessons – de façon différente il est vrai - le Dieu Un,
que nous louons et vénérons chaque jour comme créateur des
siècles et maître de ce monde ».
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Ces mots, écrits voici presque mille ans, sont aptes à exprimer
aujourd’hui mes sentiments à votre égard, alors que vous célébrez
l’Aïd al-Fitr, la fête de la Rupture du jeûne. Que le Dieu Très-Haut
nous remplisse tous de son amour miséricordieux et de sa paix.
De nouveau en pèlerinage sur le sol africain, au Sénégal et en
Guinée (1992), au Bénin (1993), puis au Nigéria (1998), le pape
poursuit sa catéchèse islamo-chrétienne en invitant chrétiens et
musulmans à vivre comme des partenaires pour le bien commun
de tous, illustrant ses propos par un proverbe africain suggestif :
« une seule main ne peut ficeler un paquet. »
En 1996, la Tunisie offre à Jean-Paul II l’occasion de rappeler les
conditions nécessaires pour un dialogue fructueux :
Permettez-moi de réfléchir un instant avec vous sur les condi tions nécessaires pour que ce dialogue soit fructueux. Il est indispensable tout d’abord qu’il soit animé par un vrai désir de connaître
l’autre. Il ne s’agit pas d’une simple curiosité humaine. L’ouverture
à l’autre est, en quelque sorte, une réponse à Dieu qui permet nos
différences et qui veut que nous nous connaissions plus profondément. Et pour cela, se situer en vérité les uns par rapport aux
autres est une exigence essentielle.
Les partenaires du dialogue seront assurés et sereins dans la
mesure où ils seront vraiment enracinés dans leurs religions respectives. Et cet enracinement permettra l’acceptation des différences et
fera éviter deux écueils opposés : le syncrétisme et l’indifférentisme. Il permettra également de tirer profit du regard critique de
l’autre sur la façon de formuler et de vivre sa foi.
En 1997, à Sarajevo, Jean-Paul II s’adresse aux représentants de
la communauté musulmane. Il appelle au pardon et à la réconciliation toutes les communautés ethniques et religieuses de BosnieHerzégovine.
2000 : Année du grand Jubilé. Le pape entreprend un pèlerinage
jubilaire sur « les lieux liés à l’histoire du salut ». En février, il
rencontre au Caire le Cheikh Sayed Tantawi d’Al-Azhar. En mars,
il est reçu par le grand Mufti de Jérusalem où il prononce
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Chemins de Dialogue
également une allocution devant les responsables religieux juifs,
chrétiens et musulmans.
Chacune de nos religions connaît, sous une forme ou une autre,
la Règle d’Or : « Fais pour ton prochain ce que tu souhaiterais qu’il
fasse pour toi-même ». Aussi précieuse que soit cette règle pour
nous guider, l’amour authentique du prochain va bien au-delà. Il se
fonde sur la conviction que lorsque nous aimons notre prochain,
nous montrons de l’amour pour Dieu, et que lorsque nous blessons
notre prochain, c’est Dieu que nous offensons. Cela signifie que la
religion est l’ennemie de l’exclusion et de la discrimination, de la
haine et de la rivalité, de la violence et du conflit. La religion n’est
pas et ne doit pas devenir un prétexte à la violence, en particulier
quand l’identité religieuse coïncide avec l’identité ethnique et
culturelle. Religion et paix vont ensemble ! La croyance et la
pratique religieuses ne peuvent être séparées de la défense de
l’image de Dieu dans chaque être humain.
À l’aube du troisième millénaire, en mai 2001, le pape est reçu
pour la première fois dans une mosquée. Il rencontre des représentants de la communauté musulmane à la mosquée des Omeyyades
de Damas et y prononce un important discours confirmant toutes
ses démarches antérieures et traçant la voie pour le siècle à venir2.
C’est dans les mosquées ou les églises que les communautés
musulmanes et chrétiennes ont façonné leur identité religieuse, et
c’est en leur sein que les jeunes reçoivent une part importante de
leur éducation religieuse. Quel sens de l’identité insuffle-t-on chez
les jeunes chrétiens et chez les jeunes musulmans dans nos églises
et nos mosquées ? Je souhaite ardemment que les responsables
religieux et les professeurs de religion, musulmans et chrétiens,
présentent nos deux importantes communautés religieuses comme
des communautés engagées dans un dialogue respectueux, et plus
jamais comme des communautés en conflit. Il est capital
2. Les tragiques événements qui se succèdent depuis le 11 septembre 2001 ont
suscité de la part du pape Jean-Paul II toute une série d’initiatives interreligieuses aboutissant à la grande rencontre d’Assise du 24 février 2002 (cf.
Christian Salenson, « Assise, de 1986 à 2002 », dans Chemins de Dialogue 19,
2002, p. 7-12).
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Le Pape Jean-Paul II et les musulmans
d’enseigner aux jeunes les chemins du respect et de la compréhension, afin qu’ils ne soient pas conduits à faire un mauvais usage
de la religion elle-même pour promouvoir ou pour justifier la haine
ou la violence. La violence détruit l’image du Créateur dans ses
créatures, et elle ne devrait jamais être considérée comme le fruit de
convictions religieuses.
J’espère vraiment que notre rencontre d’aujourd’hui dans la
Mosquée des Omeyyades sera le signe de notre détermination à
faire progresser le dialogue interreligieux de l’Église catholique et
de l’islam. Ce dialogue s’est accru lors des récentes décennies ; et
nous pouvons aujourd’hui manifester notre reconnaissance pour la
route qu’aussi loin nous avons parcourue ensemble. Au plus haut
niveau, le Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux représente l’Église catholique dans cet effort. Depuis plus de trente ans,
le Conseil envoie un message aux musulmans à l’occasion de l’Aïd
al-Fitr à la clôture du Ramadan, et je suis très heureux que ce geste
ait été bien accueilli par de nombreux musulmans comme un signe
d’amitié croissante entre nous. Ces dernières années, le Conseil a
mis en place un comité de liaison avec des Org a n i s a t i o n s
islamiques internationales, et aussi avec l’Université al-Azhar en
Egypte, que j’ai eu le plaisir de visiter l’an dernier.
Il est important que musulmans et chrétiens continuent à
explorer ensemble les questions philosophiques et théologiques,
afin de parvenir à une connaissance plus objective et plus approfondie de leurs convictions religieuses respectives. Une meilleure
compréhension mutuelle conduira sûrement, sur le plan pratique,
à une nouvelle manière de présenter nos deux religions non pas en
opposition, comme cela est advenu trop souvent par le passé, mais
en partenariat pour le bien de la famille humaine.
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Textes
de référence
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Concile Vatican II
NOSTRA ÆTATE
Déclaration sur les relations de l’Église
avec les religions non-chrétiennes
Le texte de ce document a été discuté au cours de la troisième session du Concile
(du 28 au 30 septembre 1964 – voir la Documentation catholique, 1964, n° 1435,
col. 1379-1393). Le 20 novembre, il faisait l’objet d’un premier vote et était
approuvé par 1651 placet contre 99 non placet et 242 placet juxta modum. Ce texte a
provoqué par la suite des remous dans les pays arabes (voir DC 1965, n° 1442,
col. 313-316). Après avoir été remanié, le texte a été soumis de nouveau aux votes
des Pères les 14 et 15 octobre 1965. Il a été approuvé dans sa totalité le 15 octobre
par 1763 placet contre 250 non placet. Avant d’être promulgué, au cours de la séance
publique du 28 octobre, il a fait l’objet d’un dernier vote : 2221 placet, 88 non placet,
2 placet juxta modum et 1 nul. (Voir DC 1965, n° 1458, col. 1825).
Préambule
1
A notre époque, où le genre humain devient de jour en jour
plus étroitement uni et où les relations entre les divers peuples
augmentent, l’Église examine plus attentivement quelles sont ses
relations avec les religions non-chrétiennes. Dans sa tâche de
promouvoir l’unité et la charité entre les hommes, et même entre
les peuples, elle examine ici d’abord ce que les hommes ont en
commun et qui les pousse à vivre ensemble leur destinée.
Tous les peuples forment, en effet, une seule communauté ; ils
ont une seule origine, puisque Dieu a fait habiter toute la race
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Chemins de Dialogue
humaine sur la face de la terre1 ; ils ont aussi une seule fin dernière,
Dieu, dont la providence, les témoignages de bonté et les desseins
de salut s’étendent à tous2, jusqu’à ce que les élus soient réunis
dans la cité sainte, que la gloire de Dieu illuminera, et où tous les
peuples marcheront à sa lumière3.
Les hommes attendent des diverses religions la réponse aux
énigmes cachées de la condition humaine, qui, hier comme aujourd’hui, troublent profondément le cœur humain : Qu’est-ce que
l’homme ? Quel est le sens et le but de la vie ? Qu’est-ce que le bien
et qu’est-ce que le péché ? Quels sont l’origine et le but de la
souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ?
Qu’est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ?
Qu’est-ce enfin que le mystère dernier et ineffable qui entoure
notre existence, d’où nous tirons notre origine et vers lequel nous
tendons ?
Les diverses religions non-chrétiennes
2
Depuis les temps les plus reculés jusqu’à aujourd’hui, on
trouve dans les différents peuples une certaine sensibilité à
cette force cachée qui est présente au cours des choses et aux événements de la vie humaine, parfois même une reconnaissance de la
Divinité suprême, ou encore du Père. Cette sensibilité et cette
connaissance pénètrent leur vie d’un profond sens religieux. Quant
aux religions liées au progrès de la culture, elles s’efforcent de
répondre aux mêmes questions par des notions plus affinées et par
un langage plus élaboré. Ainsi, dans l’hindouisme, les hommes
scrutent le mystère divin et l’expriment par la fécondité inépui-
1. Cf. Ac 17, 26.
2. Cf. Sg 8, 1 ; Ac 14, 17 ; Rm 2, 6-7 ; 1 Tm 2, 4.
3. Cf. Ap 21, 23 s.
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Nostra ætate
sable des mythes et par les efforts pénétrants de la philosophie ; ils
cherchent la libération des angoisses de notre condition, soit par les
formes de la vie ascétique, soit par la méditation profonde, soit par
le refuge en Dieu avec amour et confiance. Dans le bouddhisme,
selon ses formes variées, l’insuffisance radicale de ce monde
changeant est reconnue et on enseigne une voie par laquelle les
hommes, avec un cœur dévot et confiant, pourront acquérir l’état
de libération parfaite, soit atteindre l’illumination suprême par
leurs propres efforts ou par un secours venu d’en-haut. De même
aussi, les autres religions qu’on trouve de par le monde s’efforcent
d’aller, de façons diverses, au-devant de l’inquiétude du cœur
humain en proposant des voies, c’est-à-dire des doctrines, des
règles de vie et des rites sacrés.
L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans
ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières
d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles
diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et
propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui
illumine tous les hommes. Toutefois, elle annonce, et elle est tenue
d’annoncer sans cesse le Christ qui est « la voie, la vérité et la vie »
(Jn 14,6), dans lequel les hommes doivent trouver la plénitude de
la vie religieuse et dans lequel Dieu s’est réconcilié toutes choses4.
Elle exhorte donc ses fils pour que, avec prudence et charité, par
le dialogue et par la collaboration avec ceux qui suivent d’autres
religions, et tout en témoignant de la foi et de la vie chrétiennes, ils
reconnaissent, préservent et fassent progresser les valeurs spirituelles, morales et socioculturelles qui se trouvent en eux.
4. Cf. 2 Co 5, 18-19.
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Chemins de Dialogue
La religion musulmane
3
L’Église regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent
le Dieu un, vivant et subsistant, miséricordieux et toutpuissant, créateur du ciel et de la terre5, qui a parlé aux hommes. Ils
cherchent à se soumettre de toute leur âme aux décrets de Dieu,
même s’ils sont cachés, comme s’est soumis à Dieu Abraham,
auquel la foi islamique se réfère volontiers. Bien qu’ils ne reconnaissent pas Jésus comme Dieu, ils le vénèrent comme prophète ; ils
honorent sa Mère virginale, Marie, et parfois même l’invoquent
avec piété. De plus, ils attendent le jour du jugement où Dieu rétribuera tous les hommes ressuscités. Aussi ont-ils en estime la vie
morale et rendent-ils un culte à Dieu, surtout par la prière,
l’aumône et le jeûne.
Si, au cours des siècles, de nombreuses dissensions et inimitiés
se sont manifestées entre les chrétiens et les musulmans, le Concile
les exhorte à oublier le passé et à s’efforcer sincèrement à la
compréhension mutuelle, ainsi qu’à protéger et à promouvoir
ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs
morales, la paix et la liberté.
La religion juive
4
Scrutant le mystère de l’Église, le Concile rappelle le lien qui
relie spirituellement le peuple du Nouveau Testament avec la
lignée d’Abraham.
5. Cf. saint Grégoire VII, Epist. 21 ad Anzir (Nacir), regem Mauritaniae : éd.
Caspar in MGH Ep. sel. II, 1920, I, p. 288, 11-15 ; PL 148, 450 s.
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Nostra ætate
L’Église du Christ, en effet, reconnaît que les prémices de sa foi
et de son élection se trouvent, selon le mystère divin du salut, dans
les patriarches, Moïse et les prophètes. Elle confesse que tous les
fidèles du Christ, fils d’Abraham selon la foi6, sont inclus dans la
vocation de ce patriarche et que le salut de l’Église est mystérieusement préfiguré dans la sortie du peuple élu hors de la terre de
servitude. C’est pourquoi l’Église ne peut oublier qu’elle a reçu la
révélation de l’Ancien Testament par ce peuple avec lequel Dieu,
dans sa miséricorde indicible, a daigné conclure l’antique Alliance,
et qu’elle se nourrit de la racine de l’olivier franc sur lequel ont été
greffés les rameaux de l’olivier sauvage que sont les gentils7.
L’Église croit, en effet, que le Christ, notre paix, a réconcilié les Juifs
et les Gentils par sa croix et en lui-même, des deux, a fait un seul8.
L’Église a toujours devant les yeux les paroles de l’apôtre Paul
sur ceux de sa race « à qui appartiennent l’adoption filiale, la gloire,
les alliances, la législation, le culte, les promesses et les patriarches,
et de qui est né, selon la chair, le Christ » (Rm 9, 4-5), le Fils de la
Vierge Marie. Elle rappelle aussi que les apôtres, fondements et
colonnes de l’Église, sont nés du peuple juif, ainsi qu’un grand
n o m b re des premiers disciples qui annoncèrent au monde
l’Évangile du Christ.
Au témoignage de l’Écriture Sainte, Jérusalem n’a pas reconnu
le temps où elle fut visitée9 ; les juifs, en grande partie, n’acceptèrent pas l’Évangile, et même nombreux furent ceux qui s’opposèrent à sa diffusion10. Néanmoins, selon l’Apôtre, les juifs restent
encore, à cause de leurs pères, très chers à Dieu, dont les dons et
l’appel sont sans repentance11. Avec les prophètes et le même
Apôtre, l’Église attend le jour, connu de Dieu seul, où tous les
6.
7.
8.
9.
10.
11.
Cf. Ga 3, 7.
Cf. Rm 11, 17-24.
Cf. Ep 2, 14-16.
Cf. Lc 19, 44.
Cf. Rm 11, 28.
Cf. Rm 11, 28-29 - cf. Lumen gentium, 16.
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Chemins de Dialogue
peuples invoqueront le Seigneur d’une seule voix et « le serviront
sous un même joug » (So 3, 9)12.
Du fait d’un si grand patrimoine spirituel, commun aux
chrétiens et aux juifs, le Concile veut encourager et recommander
entre eux la connaissance et l’estime mutuelles, qui naîtront surtout
d’études bibliques et théologiques ainsi que d’un dialogue
fraternel.
Encore que des autorités juives, avec leurs partisans, aient
poussé à la mort du Christ13, ce qui a été commis durant sa Passion
ne peut être imputé ni indistinctement à tous les juifs vivant alors,
ni aux juifs de notre temps. S’il est vrai que l’Église est le nouveau
peuple de Dieu, les juifs ne doivent pas, pour autant, être présentés
comme réprouvés par Dieu ni maudits, comme si cela découlait de
la Sainte Écriture. Que tous donc aient soin, dans la catéchèse et la
prédication de la parole de Dieu, de n’enseigner quoi que ce soit
qui ne soit conforme à la vérité de l’Évangile et à l’esprit du Christ.
En outre, l’Église, qui réprouve toutes les persécutions contre
tous les hommes quels qu’ils soient, ne pouvant oublier le patrimoine qu’elle a en commun avec les juifs, et poussée non pas par
des motifs politiques mais par la charité religieuse de l’Évangile,
déplore les haines, les persécutions et toutes les manifestations
d’antisémitisme, qui, quels que soient leur époque et leurs auteurs,
ont été dirigées contre les juifs.
D’ailleurs, comme l’Église l’a toujours tenu et comme elle le
tient, le Christ, en vertu de son immense amour, s’est soumis
volontairement à la Passion et à la mort à cause des péchés de tous
les hommes et pour que tous les hommes obtiennent le salut. Le
devoir de l’Église, dans sa prédication, est donc d’annoncer la croix
du Christ comme signe de l’amour universel de Dieu et comme
source de toute grâce.
12. Cf. Is 66, 23 ; Ps 65, 4 ; Rm 11, 11-32.
13. Cf. Jn 19, 6.
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Nostra ætate
La fraternité universelle excluant toute discrimination
5
Nous ne pouvons invoquer Dieu, Père de tous les hommes, si
nous refusons de nous conduire fraternellement envers
certains des hommes créés à l’image de Dieu. La relation de
l’homme à Dieu le Père et la relation de l’homme à ses frères
humains sont tellement liées que l’Écriture dit : « Qui n’aime pas ne
connaît pas Dieu » (1 Jn 4, 8).
Par là est sapé le fondement de toute théorie ou de toute
pratique qui introduit entre homme et homme, entre peuple et
peuple, une discrimination en ce qui concerne la dignité humaine
et les droits qui en découlent.
L’Église réprouve donc, en tant que contraire à l’esprit du
Christ, toute discrimination ou vexation opérée envers des
hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur classe ou de
leur religion. En conséquence, le Concile, suivant les traces des
saints apôtres Pierre et Paul, adjure ardemment les fidèles du
Christ « d’avoir au milieu des nations une belle conduite » (1 P 2,
12), et, si c’est possible, de vivre en paix, pour autant qu’il dépend
d’eux, avec tous les hommes14, de manière à être vraiment les fils
du Père qui est dans les cieux15.
Tout l’ensemble et chacun des points qui ont été édictés dans cette
déclaration ont plu aux Pères du Concile. Et Nous, en vertu du pouvoir
apostolique que Nous tenons du Christ, en union avec les vénérables
Pères, Nous les approuvons, arrêtons et décrétons dans le Saint-Esprit, et
Nous ordonnons que ce qui a été ainsi établi en Concile soit promulgué
pour la gloire de Dieu.
Rome, à Saint-Pierre, le 28 Octobre 1965.
Moi, Paul, évêque de l’Église catholique (suivent les signatures des Pères).
14. Cf. Rm 12, 18.
15. Cf. Mt 5, 45.
75
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LA CONFÉRENCE DE SEELISBERG
Pour lutter contre de fausses interprétations de l’Évangile qui
pourraient encourager le mépris ou la haine du peuple juif, une conférence de 60 participants catholiques, protestants et juifs, tenue à
Seelisberg (Suisse) en 1947, a adopté les dix points suivants comme guide
de la prédication et de l’enseignement chrétien (cf. Vatican II, Les relations
de l’Église avec les religions non-chrétiennes, Cerf, « Unam Sanctam » n° 61,
1966, p. 310-311).
1. Rappeler que c’est le même Dieu vivant qui nous parle à tous,
dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament.
2. Rappeler que Jésus est né d’une mère juive, de la race de
David et du peuple d’Israël, et que son amour éternel et son pardon
embrassent son propre peuple et le monde entier.
3. Rappeler que les premiers disciples, les Apôtres et les
premiers martyrs étaient juifs.
4. Rappeler que le précepte fondamental du christianisme, celui
de l’amour de Dieu et du prochain, promulgué déjà dans l’Ancien
Testament et confirmé par Jésus, oblige chrétiens et juifs dans
toutes les relations humaines sans exception.
5. Éviter de rabaisser le judaïsme biblique ou post-biblique dans
le but d’exalter le christianisme.
CdD 20 - IX 2002 - p. 77-78
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Chemins de Dialogue
6. Éviter d’user du mot « juifs » au sens exclusif de « ennemis de
Jésus », ou de la locution « ennemis de Jésus » pour désigner le
peuple juif tout entier.
7. Éviter de présenter la Passion de telle manière que l’odieux de
la mise à mort de Jésus retombe sur tous les juifs ou sur les juifs
seuls. En effet, ce ne sont pas tous les juifs qui ont réclamé la mort
de Jésus. Ce ne sont pas les juifs seuls qui en sont responsables, car
la Croix qui nous sauve tous révèle que c’est à cause de nos péchés
que le Christ est mort (rappeler à tous les parents et éducateurs la
grave responsabilité qu’ils encourent du fait de présenter
l’Évangile et surtout le récit de la Passion d’une manière simpliste).
En effet, ils risquent par là d’inspirer, qu’ils le veuillent ou non, de
l’aversion dans la conscience ou le subconscient de leurs enfants ou
auditeurs. Psychologiquement parlant, chez des âmes simples,
mues par un amour ardent et une vive compassion pour le Sauveur
crucifié, l’horreur qu’ils éprouvent tout naturellement envers les
persécuteurs de Jésus tournera facilement en une haine généralisée
des juifs de tous les temps, y compris ceux d’aujourd’hui.
8. Éviter de rapporter les malédictions scripturaires et le cri
d’une foule excitée : « que son sang retombe sur nous et sur nos
enfants », sans rappeler que ce cri ne saurait prévaloir contre la
prière infiniment plus puissante de Jésus : « Père, pardonne-leur,
car ils ne savent pas ce qu’ils font ».
9. Éviter d’accréditer l’opinion impie que le peuple juif est
réprouvé, maudit, réservé pour une destinée de souffrance.
10. Éviter de parler des juifs comme s’ils n’avaient pas été les
premiers à être de l’Église.
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Paul VI
ECCLESIAM SUAM
(extraits)
Le 6 août 1964, Paul VI publie sa première lettre encyclique,
« Ecclesiam suam », dans laquelle il développe longuement le
thème du dialogue (colloquium) qui, pour la première fois,
apparaît dans un texte officiel de l’Église. Il s’agit pour Paul VI, de
son « encyclique-programme » marquant les grandes lignes de
l’esprit de son pontificat. Le ton en est donné dès les premières
lignes : « L’Église du Christ a été voulue par son Fondateur comme
mère aimante de tous les hommes et dispensatrice du salut » (n° 1).
Puis l’encyclique s’organise en trois parties, qui s’accordent aux
objectifs généraux du Concile : (I) la conscience de soi de l’Église,
la réflexion et la méditation sur son mystère ; (II) son renouvellement et sa réforme, pour être fidèle à sa mission ; (III) le dialogue
entre l’Église et le monde moderne.
Paul VI donne une définition du dialogue en le rattachant à
l’activité missionnaire de l’Église :
« Le devoir lié par la nature au patrimoine reçu du Christ, c’est de
répandre ce trésor, c’est de l’offrir, c’est de l’annoncer. (…) À propos de
cette impulsion intérieure de charité qui tend à se traduire en un don
extérieur, Nous emploierons le nom, devenu aujourd’hui usuel, de
dialogue » (n° 66).
Et le Pape de décrire la charte de l’Église :
« L’Église doit entrer en dialogue avec le monde dans lequel elle vit.
L’Église se fait parole ; l’Église se fait message ; l’Église se fait conver sation » (n° 67).
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Chemins de Dialogue
Plus loin, Paul VI donne le fondement théologique du
dialogue :
« Dans notre esprit sont profondément gravées les paroles du Christ
que, humblement, mais sans démission, Nous voudrions Nous appro prier : “Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le
monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui” (Jn. 3, 17). Voilà,
vénérables frères, l’origine transcendante du dialogue. Elle se trouve dans
l’intention même de Dieu. La religion est de sa nature un rapport entre
Dieu et l’homme. La prière exprime en dialogue ce rapport. La Révélation,
qui est la relation surnaturelle que Dieu lui-même a pris l’initiative d’ins taurer avec l’humanité, peut être représentée comme un dialogue dans
lequel le Verbe de Dieu s’exprime par l’Incarnation, et ensuite par
l’Évangile » (n° 71-72).
Puis Paul VI en vient aux applications pastorales :
« Dans le dialogue, on découvre combien sont divers les chemins qui
conduisent à la lumière de la foi et comment il est possible de les faire
converger à cette fin (n° 86). (…) On ne sauve pas le monde du dehors ; il
faut, comme le Verbe de Dieu qui s’est fait homme, assimiler, en une
certaine mesure, les formes de vie de ceux à qui on veut porter le message
du Christ. (…) Le climat du dialogue, c’est l’amitié. Bien mieux, c’est le
service (n° 90) ».
Précisant ensuite les différents types de dialogue que l’Église est
invitée à proposer aujourd’hui, le Pape distingue quatre cercles
concentriques, en commençant par celui qui est le plus éloigné
(l’ensemble de l’humanité et l’univers), puis en passant par un
deuxième (les fidèles des autres religions) :
« Puis, autour de nous, nous voyons aussi se dessiner un autre cercle
immense, lui aussi, mais moins éloigné de nous : c’est avant tout celui des
hommes qui adorent le Dieu unique et souverain, celui que nous adorons
nous aussi ; nous faisons allusion aux fils, dignes de notre affectueux
respect, du peuple hébreu, fidèles à la religion que nous nommons de
l’Ancien Testament ; puis aux adorateurs de Dieu selon la conception de
la religion monothéiste, musulmane en particulier, qui méritent
admiration pour ce qu’il y a de vrai et de bon dans leur culte de Dieu ; et
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Ecclesiam suam
puis encore aux fidèles des grandes religions afro-asiatiques. Nous ne
pouvons évidemment partager ces différentes expressions religieuses, ni
ne pouvons demeurer indifférents, comme si elles s’équivalaient toutes,
chacune à sa manière, et comme si elles dispensaient leurs fidèles de
chercher si Dieu lui-même n’a pas révélé la forme exempte d’erreur,
parfaite et définitive, sous laquelle il veut être connu, aimé et servi ; au
contraire, par devoir de loyauté, nous devons manifester notre conviction
que la vraie religion est unique et que c’est la religion chrétienne, en
nourrissant l’espoir de la voir reconnue comme telle par tous ceux qui
cherchent et adorent Dieu.
Mais nous ne voulons pas refuser de reconnaître avec respect les
valeurs spirituelles et morales des différentes confessions religieuses nonchrétiennes ; nous voulons avec elles promouvoir et défendre les idéaux
que nous pouvons avoir en commun dans le domaine de la liberté
religieuse, de la fraternité humaine, de la saine culture, de la bienfaisance
sociale et de l’ordre civil. Au sujet de ces idéaux communs, un dialogue de
notre part est possible et nous ne manquerons pas de l’offrir là où, dans
un respect réciproque et loyal, il sera accepté avec bienveillance » (n° 111112).
Suit un troisième cercle (les autres chrétiens, frères séparés) et
enfin un dernier (le dialogue à l’intérieur même de l’Église).
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Jean-Paul II
REDEMPTORIS MISSIO
(extraits)
En décembre 1990, le Pape Jean-Paul II signe une encyclique intitulée
Redemptoris missio, qui sera publiée en janvier 1991, dans le but de
stimuler dans l’Église la mission « ad gentes », 25 ans après le Concile
Vatican II.
Se fondant sur une théologie trinitaire où s’articulent la mission du Fils
et la mission de l’Esprit, le texte aborde la problématique du dialogue
interreligieux comme un « défi positif pour l’Église d’aujourd’hui » et
situe ce dialogue au sein de la mission évangélisatrice de l’Église.
4
« À toutes les époques, et plus particulièrement à la nôtre, le
devoir fondamental de l’Église, comme je le rappelais dans ma
première encyclique qui avait valeur de programme, est de diriger
le regard de l’homme, d’orienter la conscience et l’expérience de
toute l’humanité vers le mystère du Christ ».
La mission universelle de l’Église découle de la foi en Jésus
Christ, comme le proclame la profession de foi trinitaire : « Je crois
en un seul Seigneur, Jésus Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père
avant tous les siècles (…). Pour nous les hommes, et pour notre
salut, il descendit du ciel. Par l’Esprit Saint, il a pris chair de la
Vierge Marie et s’est fait homme ». L’événement de la Rédemption
est le fondement du salut de tous, « parce que chacun a été inclus
dans le mystère de la Rédemption, et Jésus Christ s’est uni à
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Chemins de Dialogue
chacun, pour toujours, à travers ce mystère ». La mission ne peut
être comprise et fondée que dans la foi.
Et pourtant, à cause des changements de l’époque moderne et
de la diffusion de nouvelles conceptions théologiques, certains
s’interrogent : la mission auprès des non-chrétiens est-elle encore
actuelle ? N’est-elle pas remplacée par le dialogue interreligieux ?
La promotion humaine n’est-elle pas un objectif suffisant ? Le
respect de la conscience et de la liberté n’exclut-il pas toute proposition de conversion ? Ne peut-on faire son salut dans n’importe
quelle religion ? Alors, pourquoi la mission ?
« Nul ne vient au Père que par moi » (Jn 14, 6)
5
En remontant aux origines de l'Église, nous voyons clairement
affirmé que le Christ est l'unique Sauveur de tous, celui qui
seul est en mesure de révéler Dieu et de conduire à Dieu. Aux
autorités religieuses juives qui interrogent les Apôtres au sujet de
la guérison de l'impotent qu'il avait accomplie, Pierre répond :
« C'est par le nom de Jésus Christ le Nazôréen, celui que vous, vous
avez crucifié, et que Dieu a ressuscité des morts, c'est par son nom
et par nul autre que cet homme se présente guéri devant vous…
Car il n'y a pas sous le ciel d'autre nom donné aux hommes, par
lequel nous devions être sauvés » (Ac 4,10.12). Cette affirmation
adressée au Sanhédrin, a une portée universelle, car pour tous Juifs et païens -, le salut ne peut venir que de Jésus Christ.
L'universalité de ce salut dans le Christ est affirmée dans tout le
Nouveau Testament. Saint Paul reconnaît dans le Christ ressuscité
le Seigneur : « Car - écrit-il -, bien qu'il y ait, soit au ciel, soit sur la
terre, de prétendus dieux - et de fait il y a quantité de dieux et
quantité de seigneurs -, pour nous en tout cas, il n'y a qu'un seul
Dieu, le Père, de qui tout vient et pour qui nous sommes, et un seul
Seigneur, Jésus Christ, par qui tout existe et par qui nous sommes »
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Redemptoris missio
(1Co 8,5-6). Le Dieu unique et l'unique Seigneur sont proclamés
par contraste avec la multitude des « dieux » et des « seigneurs »
que le peuple reconnaissait. Paul réagit contre le polythéisme du
milieu religieux de son temps et met en relief le trait caractéristique
de la foi chrétienne : la foi en un seul Dieu, et en un seul Seigneur
envoyé par Dieu.
Dans l'Évangile de saint Jean, l'universalité du salut par le
Christ comprend les aspects de sa mission de grâce, de vérité et de
révélation : « Le Verbe est la lumière véritable, qui éclaire tout
homme » (cf. Jn 1,9). Et encore : « Nul n'a jamais vu Dieu ; le Fils
unique, qui est dans le sein du Père, lui l'a fait connaître » (Jn 1, 18 ;
cf. Mt 11,27). La révélation de Dieu devient, par son Fils unique,
définitive et achevée : « Après avoir, à maintes reprises et sous
maintes formes, parlé jadis aux Pères par les prophètes, Dieu, en
ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par le Fils qu'il a établi
héritier de toutes choses, par qui aussi il a fait les siècles » (He 1,12 ; cf. Jn 14,6). Dans cette Parole définitive de sa révélation, Dieu
s'est fait connaître en plénitude : il a dit à l'humanité qui il est. Et
cette révélation définitive que Dieu fait de lui-même est la raison
fondamentale pour laquelle l'Église est missionnaire par sa nature.
Elle ne peut pas ne pas proclamer l'Évangile, c'est-à-dire la
plénitude de la vérité que Dieu nous a fait connaître sur lui-même.
Le Christ est l'unique médiateur entre Dieu et les hommes :
« Car Dieu est unique, unique aussi le médiateur entre Dieu et les
hommes, le Christ Jésus, homme lui-même, qui s'est livré en
rançon pour tous. Tel est le témoignage rendu aux temps marqués
et dont j'ai été établi, moi, héraut et apôtre - je dis vrai, je ne mens
pas - docteur des païens, dans la foi et la vérité » (1Tm 2,5-7 ; cf. He
4,14-16). Les hommes ne peuvent donc entrer en communion avec
Dieu que par le Christ, sous l'action de l'Esprit. Sa médiation
unique et universelle, loin d'être un obstacle sur le chemin qui
conduit à Dieu, est la voie tracée par Dieu lui-même, et le Christ en
a pleine conscience. Le concours de médiations de types et d'ordres
divers n'est pas exclu, mais celles-ci tirent leur sens et leur valeur
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Chemins de Dialogue
uniquement de celle du Christ, et elles ne peuvent être considérées
comme parallèles ou complémentaires.
28
L’Esprit se manifeste d’une manière particulière dans
l’Église et dans ses membres ; cependant sa présence et son
action sont universelles, sans limites d’espace ou de temps. Le
Concile Vatican II rappelle l’œuvre de l’Esprit dans le cœur de tout
homme, par les « semences du Verbe », dans les actions même
religieuses, dans les efforts de l’activité humaine qui tendent vers
la vérité, vers le bien, vers Dieu.
L’Esprit offre à l’homme « lumière et forces pour lui permettre
de répondre à sa très haute vocation » ; par l’Esprit, « l’homme
parvient, dans la foi, à contempler et à goûter le mystère de la
volonté divine » ; et « nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à
tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associés au
Mystère Pascal ». Dans tous les cas, l’Église sait que « l’homme,
sans cesse sollicité par l’Esprit de Dieu, ne sera jamais tout à fait
indifférent au problème religieux » et qu’il « voudra toujours
connaître, ne serait-ce que confusément, la signification de sa vie,
de ses activités et de sa mort ». L’Esprit est donc à l’origine même
de l’interrogation existentielle et religieuse de l’homme qui ne naît
pas seulement de conditions contingentes mais aussi de la
structure même de son être.
La présence et l’activité de l’Esprit ne concernent pas
seulement les individus, mais la société et l’histoire, les peuples,
les cultures, les religions. En effet, l’Esprit se trouve à l’origine des
idéaux nobles et des initiatives bonnes de l’humanité en marche :
« Par une providence admirable, il conduit le cours des temps et
rénove la face de la terre ». Le Christ ressuscité « agit désormais
dans le cœur des hommes par la puissance de son Esprit ; il n’y
suscite pas seulement le désir du siècle à venir, mais, par là même,
anime aussi, purifie et fortifie ces aspirations généreuses qui
poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie et à
soumettre à cette fin la terre entière ». C’est encore l’Esprit qui
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répand les « semences du Verbe », présentes dans les rites et les
cultures, et les prépare à leur maturation dans le Christ.
29
Ainsi l’Esprit, qui « souffle où il veut » (Jn 3, 8) et qui « était
déjà à l’œuvre avant la glorification du Christ », lui qui
« remplit le monde et qui, tenant unies toutes choses, a connaissance de chaque mot » (Sg 1, 7), nous invite à élargir notre regard
pour contempler son action présente en tout temps et en tout lieu.
Moi-même, j’ai souvent renouvelé cette invitation et cela m’a guidé
dans mes rencontres avec les peuples les plus divers. Les rapports
de l’Église avec les autres religions sont inspirés par un double
respect : « Respect pour l’homme dans sa quête de réponses aux
questions les plus profondes de sa vie, et respect pour l’action de
l’Esprit dans l’homme ». La rencontre interreligieuse d’Assise, si
l’on écarte toute interprétation équivoque, a été l’occasion de redire
ma conviction que « toute prière authentique est suscitée par
l’Esprit Saint qui est mystérieusement présent dans le cœur de tout
homme ».
Ce même Esprit a agi dans l’Incarnation, dans la vie, la mort et
la résurrection de Jésus, et il agit dans l’Église. Il ne se substitue
donc pas au Christ, et il ne remplit pas une sorte de vide, comme,
suivant une hypothèse parfois avancée, il en existerait entre le
Christ et le Logos. Ce que l’Esprit fait dans le cœur des hommes et
dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions,
remplit une fonction de préparation évangélique et cela ne peut
pas être sans relation au Christ, le Verbe fait chair par l’action de
l’Esprit, « afin que, homme parfait, il sauve tous les hommes et
récapitule toutes choses en lui ».
L’action universelle de l’Esprit n’est pas à séparer de l’action
particulière qu’il mène dans le corps du Christ qu’est l’Église. En
effet, c’est toujours l’Esprit qui agit quand il vivifie l’Église et la
pousse à annoncer le Christ, ou quand il répand et fait croître ses
dons en tous les hommes et en tous les peuples, amenant l’Église à
les découvrir, à les promouvoir et à les recevoir par le dialogue. Il
faut accueillir toutes les formes de la présence de l’Esprit avec
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respect et reconnaissance, mais le discernement revient à l’Église à
laquelle le Christ a donné son Esprit pour la mener vers la vérité
tout entière (cf. Jn 16, 13).
39
Toutes les formes de l’activité missionnaire sont marquées
par la conscience que l’on favorise la liberté de l’homme
en lui annonçant Jésus Christ. L’Église doit être fidèle au Christ
dont elle est le corps et dont elle poursuit la mission. Il est nécessaire qu’elle « suive la même route que le Christ, la route de la
pauvreté, de l’obéissance, du service et de l’immolation de soi
jusqu’à la mort, dont il est sorti victorieux par sa résurrection ».
L’Église doit donc tout faire pour déployer sa mission dans le
monde et atteindre tous les peuples ; elle en a aussi le droit, qui lui
a été donné par Dieu pour la mise en œuvre de son plan. La liberté
religieuse, parfois encore limitée ou restreinte, est la condition et la
garantie de toutes les libertés qui fondent le bien commun des
personnes et des peuples. Il faut souhaiter que la véritable liberté
religieuse soit accordée à tous en tout lieu, et l’Église s’y emploie
dans les différents pays, surtout dans les pays à majorité catholique
où elle a une plus grande influence. Cependant, il ne s’agit pas
d’une question de religion de la majorité ou de la minorité, mais
bien d’un droit inaliénable de toute personne humaine.
D’autre part, l’Église s’adresse à l’homme dans l’entier respect
de sa liberté : la mission ne restreint pas la liberté, mais elle la
favorise. L’Église propose, elle n’impose rien : elle respecte les
personnes et les cultures, et elle s’arrête devant l’autel de la
conscience. À ceux qui s’opposent, sous les prétextes les plus
variés, à son activité missionnaire, l’Église répète : Ouvrez les
portes au Christ !
Je m’adresse à toutes les Églises particulières, jeunes et
anciennes. Le monde est en train de s’unifier toujours davantage,
l’esprit de l’Évangile doit conduire à surmonter les barrières des
cultures, des nationalismes, écartant toute fermeture. Benoît XV
donnait déjà cet avertissement aux missionnaires de son époque :
ne jamais « oublier sa dignité personnelle au point de penser
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davantage à sa patrie terrestre qu’à celle du ciel ». La même recommandation vaut aujourd’hui pour les Églises particulières : ouvrez
les portes aux missionnaires, car « toute Église particulière qui se
couperait volontairement de l’Église universelle perdrait sa
r é f é rence au dessein de Dieu ; elle s’appauvrirait dans sa
dimension ecclésiale ».
55
Le dialogue interreligieux fait partie de la mission
évangélisatrice de l’Église. Entendu comme méthode et
comme moyen en vue d’une connaissance et d’un enrichissement
réciproques, il ne s’oppose pas à la mission ad gentes ; au contraire,
il lui est spécialement lié et il en est une expression. Car cette
mission a pour destinataires les hommes qui ne connaissent pas le
Christ ni son Évangile et qui, en grande majorité, appartiennent à
d’autres religions. Dieu appelle à lui toutes les nations dans le
Christ ; il veut leur communiquer la plénitude de sa révélation et de
son amour ; il ne manque pas non plus de manifester sa présence
de beaucoup de manières, non seulement aux individus mais
encore aux peuples, par leurs richesses spirituelles dont les
religions sont une expression principale et essentielle, bien qu’elles
comportent « des lacunes, des insuffisances et des erreurs ». Le
Concile et les enseignements ultérieurs du magistère ont
amplement souligné tout cela, maintenant toujours avec fermeté
que le salut vient du Christ et que le dialogue ne dispense pas de
l’évangélisation.
À la lumière de l’économie du salut, l’Église estime qu’il n’y a
pas contradiction entre l’annonce du Christ et le dialogue interreligieux, mais elle sent la nécessité de les coordonner dans le cadre de
sa mission ad gentes. En effet, il faut que ces deux éléments
demeurent intimement liés et en même temps distincts, et c’est
pourquoi on ne doit ni les confondre, ni les exploiter, ni les tenir
pour équivalents comme s’ils étaient interchangeables.
J’ai écrit récemment aux évêques d’Asie : « Bien que l’Église
reconnaisse volontiers tout ce qui est vrai et saint dans les traditions religieuses du bouddhisme, de l’hindouisme et de l’islam,
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Chemins de Dialogue
comme un reflet de la vérité qui éclaire tous les hommes, cela ne
diminue pas son devoir et sa détermination de proclamer sans
hésitation Jésus Christ qui est « la Voie, la Vérité et la Vie » (…). Le
fait que les adeptes d’autres religions puissent recevoir la grâce de
Dieu et être sauvés par le Christ en dehors des moyens ordinaires
qu’il a institués n’annule donc pas l’appel à la foi et au baptême
que Dieu veut pour tous les peuples ». En effet, le Christ lui-même,
« en nous enseignant expressément la nécessité de la foi et du
baptême (…), nous a confirmé en même temps la nécessité de
l’Église elle-même dans laquelle les hommes entrent par la porte
du baptême ». Le dialogue doit être conduit et mis en œuvre dans
la conviction que l’Église est la voie ordinaire du salut et qu’elle
seule possède la plénitude des moyens du salut.
56
Le dialogue n’est pas la conséquence d’une stratégie ou
d’un intérêt, mais c’est une activité qui a ses motivations,
ses exigences et sa dignité propres : il est demandé par le profond
respect qu’on doit avoir envers tout ce que l’Esprit, qui « souffle où
il veut », a opéré en l’homme. Grâce au dialogue, l’Église entend
découvrir les « semences du Verbe », les « rayons de la vérité qui
illumine tous les hommes », semences et rayons qui se trouvent
dans les personnes et dans les traditions religieuses de l’humanité.
Le dialogue est fondé sur l’espérance et la charité, et il portera des
fruits dans l’Esprit. Les autres religions constituent un défi positif
pour l’Église d’aujourd’hui ; en effet, elles l’incitent à découvrir et
à reconnaître les signes de la présence du Christ et de l’action de
l’Esprit, et aussi à approfondir son identité et à témoigner de l’intégrité de la Révélation dont elle est dépositaire pour le bien de tous.
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Secrétariat pour les non-chrétiens
ATTITUDE DE L’ÉGLISE CATHOLIQUE
DEVANT LES CROYANTS DES AUTRES RELIGIONS
Réflexions et orientations
concernant le dialogue et la mission
(extraits)
Ce texte est l’aboutissement d’un document de travail qui a eu quatre rédactions
successives (mars 1981, juin 1981, février 1982 et février 1983). Il répondait à une
demande explicite qui avait été faite par les membres du Secrétariat pour les nonchrétiens lors de l’assemblée plénière du Secrétariat qui a eu lieu du 24 au 27 avril
1979. Les membres et consulteurs du Secrétariat et des autres dicastères ont
commenté chacune de ces rédactions. En vue de l’assemblée plénière de 1983, le
Secrétariat a aussi consulté des évêques et des théologiens de différentes aires
culturelles. Le texte final du document a été étudié, modifié et voté lors de
l’assemblée plénière qui s’est tenu du 27 février au 3 mars 1984 à Grottaferrata
(Voir DC 1984, n° 1880, p. 844).
1. Mission
13
Dans la conscience de l’Église, la mission apparaît comme
une réalité unitaire mais complexe et articulée dont nous
indiquons les éléments principaux. La mission est, d’abord,
réalisée par la simple présence et le témoignage efficace de la vie
chrétienne (cf. Evangelii nuntiandi, 21) même si on doit reconnaître
que « nous portons ce trésor dans des vases d’argile » (2Co 4,7) et
que l’écart est toujours impossible à combler entre la manière dont
le chrétien vit réellement et ce qu’il affirme être.
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Chemins de Dialogue
Il y a, ensuite, l’engagement effectif au service des hommes ainsi
que toute l’action pour la promotion sociale, pour la lutte contre la
pauvreté et les structures qui la favorisent. Il y a, en plus, la vie
liturgique, la prière et la contemplation qui sont des témoignages
éloquents d’une relation vivante et libératrice avec le Dieu vivant
et vrai qui nous appelle dans son Royaume et dans sa gloire (cf. Ac
2, 42). Il y a, aussi, le dialogue grâce auquel les chrétiens rencontrent les croyants d’autres traditions religieuses pour marcher
ensemble à la recherche de la vérité et pour collaborer en des
œuvres d’intérêt commun. Il y a, enfin, l’annonce et la catéchèse,
lorsqu’on proclame la Bonne Nouvelle, qu’on en approfondit les
répercussions sur la vie et les cultures. Tous ces éléments entrent
dans le cadre de la mission.
19
Le respect de chaque homme doit être le signe de l’activité
missionnaire dans le monde de notre temps (cf. Ecclesiam
suam, 77 ; AAS [Actes du Saint Siège] 1964, 642-643 ; Evangelii
nuntiandi, 79-80 ; Redemptor hominis, 12). « L’homme est la première
route que l’Église doit parcourir dans l’accomplissement de sa
mission » (Redemptor hominis, 14). Les valeurs que l’Église continue
d’apprendre du Christ, son Maître, doivent guider le chrétien à
aimer et à respecter tout ce qu’il y a de bon dans la culture et
l’engagement religieux de l’interlocuteur. « Il s’agit du respect pour
tout ce que l’Esprit, qui souffle ou il veut, a opéré en lui » (ibid. 12 ;
cf. Evangelii nuntiandi, 79).
La mission chrétienne ne peut jamais se dissocier de l’amour et
du respect pour les autres. Cela, pour nous chrétiens, met en
évidence l’importance du dialogue dans la mission.
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Dialogue et mission
2. Le dialogue
A) Fondements
22
L’Église est pleinement consciente d’être engagée dans le
dialogue avant tout à cause de sa foi. La révélation nous
fait entrevoir une vie de communion et d’échanges dans le mystère
trinitaire.
En Dieu-Père, nous contemplons un amour prévenant sans
limites d’espace ni de temps. L’Univers ainsi que l’histoire sont
remplis de ses dons. Chaque être et chaque événement sont
imprégnés de son amour. Malgré la manifestation, parfois violente,
du mal dans l’histoire de tout homme et de tout peuple est présente
la force de la grâce qui élève et qui rachète. L’Église a mission de
découvrir, de mettre en lumière, de faire mûrir toute la richesse que
le Père a déposée dans la création et dans l’histoire, non seulement
pour célébrer la gloire de Dieu dans la liturgie, mais également
pour développer la circulation des dons divins parmi tous les
hommes.
23
En Dieu-Fils, nous est donnée la Parole, la Sagesse en
laquelle, déjà avant le temps, tout est contenu et subsiste.
Le Christ est le Verbe qui illumine tout homme, car en Lui se
manifestent le mystère de Dieu et le mystère de l’homme (cf.
Redemptor hominis, 8, 10, 11, 13). Il est le Rédempteur présent avec
sa grâce en chaque rencontre humaine, pour nous libérer de notre
égoïsme et nous amener à nous aimer les uns les autres comme Il
nous a aimés. « Tout homme, écrit Jean-Paul II, sans aucune
exception, a été racheté par le Christ, parce que le Christ est en
quelque sorte uni à l’homme, à chaque homme sans aucune
exception, même si ce dernier n’en est pas conscient. Le Christ,
mort et ressuscité pour tous, offre à l’homme, à tout homme et à
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Chemins de Dialogue
tous les hommes, lumière et forces pour lui permettre de répondre
à sa très haute vocation » (Redemptor hominis, 14).
24
En Dieu-Esprit Saint, la foi nous aide à discerner la force
de vie, de mouvement et de « régénération » permanente
(cf. Lumen gentium, 4) qui opère dans la profondeur des consciences
et accompagne la marche mystérieuse des cœurs vers la Vérité (cf.
Gaudium et spes, 22). L’Esprit opère aussi « au-delà des frontières
visibles du Corps mystique » (Redemptor hominis 6 ; cf. Lumen
gentium, 16 ; Gaudium et spes, 22 ; Ad gentes, 15). L’Esprit précède et
accompagne la marche de l’Église qui doit discerner les signes de
Sa présence et Le suivre n’importe où Il la conduit, et Le servir
comme sa collaboratrice humble et discrète.
27
Vatican II a tiré les conséquences de l’engagement des
chrétiens en ces termes : « Pour qu’ils puissent donner avec
fruit ce témoignage du Christ, ils doivent se joindre à ces hommes
par l’estime et la charité, se reconnaître comme des membres du
groupement humain dans lequel ils vivent, avoir part dans la vie
culturelle et sociale au moyen des divers échanges et des diverses
affaires humaines ; ils doivent être familiers avec leurs traditions
nationales et religieuses, découvrir avec joie et respect les semences
du Verbe qui s’y trouvent cachées ; ils doivent en même temps faire
attention à la transformation profonde qui s’opère parmi les
nations, et travailler à ce que les hommes de notre temps, trop
attentifs à la science et à la technique du monde moderne, ne soient
pas détournés des choses divines ; bien au contraire, à ce qu’ils
soient éveillés à un désir plus ardent de la vérité et de la charité
révélées par Dieu. Le Christ lui-même a scruté le cœur des hommes
et les a amenés par un dialogue humain à la lumière divine ; de
même ses disciples, profondément pénétrés de l’Esprit du Christ,
doivent connaître les hommes au milieu desquels ils vivent,
engager conversation avec eux, afin qu’eux aussi apprennent, dans
un dialogue sincère et patient, quelles richesses Dieu, dans sa
munificence, a dispensées aux nations ; ils doivent en même temps
s’efforcer d’éclairer ces richesses de la lumière évangélique, de les
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Dialogue et mission
libérer, de les ramener sous l’autorité de Dieu Sauveur » (Ad gentes,
11 ; cf. 41 ; Apostolicam actuositatem, 14, 29).
B) Formes du dialogue
28
L’expérience des dernières années a clairement montré les
diverses manières dont se fait le dialogue. Les principales
formes-modèles qui vont suivre sont vécues soit séparément, soit
ensemble.
29
Le dialogue est avant tout un style d’action, une attitude
et un esprit qui inspirent le comportement. Il comporte
attention, respect et accueil de l’autre, à qui on laisse l’espace nécessaire à son identité, à son expression propre et à ses valeurs. Un tel
dialogue est la norme et le style indispensables de toute mission
chrétienne et de chacune de ses formes, qu’il s’agisse de la simple
présence et du témoignage, ou du service ou d’annonce directe
(CJC [Code de Droit Canon] 787, 1). Une mission qui ne serait pas
imprégnée de l’esprit du dialogue serait contraire aux exigences de
la nature humaine et aux enseignements de l’Évangile.
30
Tout disciple du Christ, en vertu de sa vocation humaine et
chrétienne, est appelé à vivre le dialogue dans sa vie quotidienne, qu’il soit en situation de majorité ou de minorité. Il doit
répandre le parfum de l’Évangile dans le milieu où il vit et
travaille : famille, société, éducation, arts, économie, politique, etc.
Ainsi le dialogue est-il inséré dans le dynamisme global de la
mission de l’Église.
31
Un autre niveau est le dialogue des œuvres et de la collaboration visant les objectifs de caractère humanitaire,
social, économique et politique qui favorisent la libération et le
développement de l’homme. Ce dialogue est fréquent au sein des
organisations locales, nationales et internationales, dans lesquelles
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Chemins de Dialogue
chrétiens et croyants des autres religions se penchent ensemble sur
les problèmes mondiaux.
32
Le champ de la collaboration peut être très vaste. Parlant
en particulier des musulmans, le Concile Vatican II exhorte
à « oublier le passé », à « protéger et promouvoir ensemble, pour
tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la
liberté » (Nostra ætate, 3 ; cf. Ad gentes, 11, 12, 15, 21). Paul VI, d’une
manière spéciale dans « Ecclesiam suam » (AAS [Actes du Saint
Siège] 56, 1964, p. 655), et Jean-Paul II, au cours de nombreuses
rencontres avec les chefs et les représentants de diverses religions,
se sont prononcés dans le même sens. Les grands problèmes qui
affligent l’humanité stimulent les chrétiens à une collaboration
avec les autres croyants, à cause de leur foi respective.
33
D’un intérêt particulier est le dialogue au niveau des
spécialistes, pour comparer, approfondir et enrichir les
patrimoines religieux des uns et des autres, pour en utiliser les
ressources à la solution des problèmes qui se posent aux hommes
à travers l’histoire. Ce dialogue a lieu normalement là où l’interlocuteur a déjà conçu une façon propre de voir le monde et adhère à
une religion qui le pousse à agir. Il se réalise plus facilement dans
les sociétés pluralistes, au sein desquelles cohabitent et parfois se
combattent les traditions et les idéologies différentes.
34
Dans cet échange, les interlocuteurs apprennent à
connaître et à apprécier leurs valeurs spirituelles et leurs
catégories culturelles réciproques, ouvrant la voie à la communion
et à la fraternité entre les hommes (cf. Nostra ætate, 1). Le chrétien
collabore ainsi à la transformation des cultures par l’Évangile (cf.
Evangelii nuntiandi, 1820, 63).
35
A un niveau plus profond, des hommes, enracinés dans
leurs traditions religieuses peuvent partager leurs
expériences de prière, de contemplation, de foi et d’engagement,
expressions et voies de recherche de l’Absolu. Cette forme du
dialogue est un enrichissement mutuel et une coopération féconde
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Dialogue et mission
pour promouvoir et protéger les valeurs et les finalités spirituelles
les plus élevées de l’homme. Le dialogue religieux conduit
naturellement à se communiquer les uns aux autres les raisons de
sa propre foi et ne s’arrête pas devant les différences, parfois
profondes, mais se soumet, avec humilité et confiance, à Dieu « qui
est plus grand que notre cœur » (1 Jn 3, 20). Ainsi, le chrétien a une
occasion d’offrir à l’autre la possibilité de connaître, d’une manière
vécue, les valeurs de l’Évangile.
3. Dialogue et mission
B) Le dialogue pour la construction du Royaume
41
Dieu continue de se réconcilier les hommes par l’Esprit.
L’Église croit en la promesse que le Christ lui a faite :
l’Esprit la guidera, dans l’histoire, vers la plénitude de la vérité (cf.
Jn 16, 13). Forte de cette promesse, elle va à la rencontre des
hommes, des peuples et de leurs cultures, avec une entière
conscience que chaque communauté humaine possède les
semences du bien et de la vérité, que Dieu a un projet d’amour
pour chaque peuple (cf. Ac 17, 26-27). L’Église désire donc collaborer avec tous pour la réalisation de ce projet, en mettant en
valeur toutes les richesses de la Sagesse infinie et multiforme de
Dieu et en ouvrant la voie à l’évangélisation des cultures (Evangelii
nuntiandi, 18-20).
Le 10 juin 1984, solennité de la Pentecôte.
+ Mgr Francis Arinze, pro-président.
P. Marcello Zago, omi, secrétaire.
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Document du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux
et de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples1.
DIALOGUE ET ANNONCE
Réflexions et orientations concernant
le dialogue interreligieux et l’annonce de l’Évangile
(extraits)
Le texte de Dialogue et annonce est le résultat de cinq années de travail par les
dicastères concernés (le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et la
Congrégation pour l’évangélisation des peuples). Il a bénéficié aussi des observations des Conférences épiscopales de par le monde qui ont pu étudier le texte
entre 1987 et 1990. Dialogue et annonce ne se réfère à l’encyclique Redemptoris missio
qu’une seule fois. La raison en est que le texte final du document était pratiquement prêt avant la publication de l’encyclique.
Pour une présentation de la genèse et du contenu de Dialogue et annonce faite par
le cardinal Arinze, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux,
et le cardinal Tomko, préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples,
voir le Bulletin du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, 1991-XXVI/2 (77),
p. 251-259.
CdD 20 - IX 2002 - p. 99-110
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Chemins de Dialogue
Plan du document
Introduction
1. Dialogue interreligieux
A) Une approche chrétienne des traditions religieuses
B) La place du dialogue interreligieux
dans la mission évangélisatrice de l’Église
C) Formes de dialogue
D) Dispositions et fruits du dialogue interreligieux
E) Obstacles au dialogue
2. Annonce de Jésus Christ
A) La mission donnée par le Seigneur ressuscité
B) Le rôle de l’Église
C) Le contenu de l’annonce
D) La présence et la force du Saint-Esprit
E) L’urgence de l’annonce
F) Les modalités de l’annonce
G) Obstacles à l’annonce
H) L’annonce dans la mission évangélisatrice de l’Église
3. Dialogue interreligieux et annonce
A) Liés mais non interchangeables
B) L’Église et les religions
C) Annoncer Jésus Christ
D) Engagement dans l’unique mission
E) Jésus, notre modèle
Conclusion
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Dialogue et annonce
Introduction
8
Le terme mission évangélisatrice, ou plus simplement évangéli sation, se réfère à la mission de l’Église dans son ensemble.
Dans l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, le terme
« évangélisation » est utilisé de différentes manières. Il signifie
« porter la Bonne Nouvelle à toute l’humanité et, par son impact,
transformer du dedans, rendre neuve l’humanité elle-même »
(Evangelii nuntiandi, 18). Ainsi, par l’évangélisation, l’Église
« cherche à convertir, par la seule énergie divine du Message
qu’elle annonce, les consciences personnelles et collectives, les
activités dans lesquelles les hommes sont engagés, leurs manières
de vivre, et les milieux concrets dans lesquels ils vivent » (ibid.).
L’Église accomplit sa mission d’évangélisation dans des activités
variées. Il y a donc un sens large du concept d’évangélisation.
Cependant, dans le même document, évangélisation est aussi pris
dans un sens plus spécifique comme « l’annonce claire et sans
ambiguïté du Seigneur Jésus » (Evangelii nuntiandi, 22).
L’exhortation dit que « cette annonce, kerygma, prédication et
catéchèse, occupe une place tellement importante dans l’évangélisation qu’elle en est souvent synonyme ; cependant, ce n’est qu’un
aspect de l’évangélisation » (ibid.). Dans ce document, le terme
mission évangélisatrice est utilisé pour évangélisation au sens
large, tandis que le sens plus spécifique est rendu par le terme
annonce.
9
Le terme de dialogue peut se comprendre de différentes
manières. P remièrement, au niveau purement humain, cela
signifie communication réciproque en vue d’un but commun ou, à
un niveau encore plus profond d’une communion interpersonnelle. Deuxièmement, le terme de dialogue peut être pris dans le
sens d’une attitude de respect et d’amitié, qui imprègne ou devrait
imprégner toutes les activités qui constituent la mission évangélisatrice de l’Église. Cela peut être, à juste titre, appelé « l’esprit du
dialogue ». Troisièmement, dans un contexte de pluralisme religieux,
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Chemins de Dialogue
le terme de dialogue signifie « l’ensemble des rapports interreligieux, positifs et constructifs, avec des personnes et des communautés de diverses croyances, afin d’apprendre à se connaître et à
s’enrichir les uns les autres » (Dialogue et mission, 3), tout en
obéissant à la vérité et en respectant la liberté de chacun. Il
implique à la fois le témoignage et l’approfondissement des convictions religieuses respectives. C’est dans ce troisième sens que le
présent document utilise le terme de dialogue comme étant l’un
des éléments intégrants de la mission évangélisatrice de l’Église.
10
Le terme d’annonce signifie la communication du message
évangélique, le mystère du salut réalisé pour tous par Dieu
en Jésus Christ avec la puissance de l’Esprit Saint. C’est une
invitation à un engagement de foi en Jésus Christ, une invitation à
entrer par le baptême dans la communauté des croyants qu’est
l’Église. Cette annonce peut se faire sous forme solennelle et
publique, comme ce fut le cas au jour de la Pentecôte (cf. Ac 2,5-41),
ou bien sous forme de simple conversation privée (cf. Ac 8,30-38).
Elle conduit tout naturellement à une catéchèse qui tend à approfondir cette foi. L’annonce est le fondement, le centre et le sommet
de l’évangélisation (cf. Evangelii nuntiandi, 27).
11
L’idée de conversion inclut toujours un mouvement de tout
l’être vers Dieu, « le retour d’un cœur humble et contrit à
Dieu, avec le désir de lui soumettre plus pleinement sa propre vie »
(Dialogue et mission, 37). D’autre part, le terme de conversion peut
aussi se référer de manière plus spécifique à un changement
d’adhésion religieuse et, plus particulièrement, au fait d’embrasser
la foi chrétienne. Le sens du terme conversion utilisé dans ce
document dépendra du contexte auquel il se réfère.
12
Les termes de religions et de traditions religieuses sont ici
utilisés en un sens générique et analogique. Ils
comprennent les religions qui, avec le christianisme, aiment à se
1. Puisque le patrimoine spirituel qui est commun aux chrétiens et aux juifs est
si grand (cf. Nostra ætate, 4), le dialogue entre chrétiens et juifs a ses propres et
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Dialogue et annonce
référer à la foi d’Abraham1, ainsi que les grandes traditions
religieuses de l’Asie, de l’Afrique et du reste du monde.
1. Dialogue interreligieux
A) Une approche chrétienne des traditions religieuses
29
Il découle de ce mystère d’unité que tous ceux et celles qui
sont sauvés participent, bien que différemment, au même
mystère de salut en Jésus Christ par son Esprit. Les chrétiens en
sont bien conscients, grâce à leur foi, tandis que les autres
demeurent inconscients du fait que Jésus Christ est la source de
leur salut. Le mystère du salut les atteint, néanmoins, par des voies
connues de Dieu seul, grâce à l’action invisible de l’Esprit du
Christ. Concrètement, c’est dans la pratique sincère de ce qui est
bon dans leurs traditions religieuses et en suivant les directives de
leur conscience, que les membres des autres religions répondent
positivement à l’appel de Dieu et reçoivent le salut en Jésus Christ,
même s’ils ne le reconnaissent et ne le confessent pas comme leur
Sauveur (cf. Ad gentes, 3, 9, 11).
30
Les fruits de l’Esprit de Dieu dans la vie personnelle des
individus, chrétiens ou non, peuvent être facilement
discernés (cf. Ga 5,22-23). Identifier, dans les autres traditions
religieuses, ces éléments de grâce capables de soutenir la réponse
spéciales exigences. Il n’en est pas traité dans le présent document. Pour s’en
faire une idée complète, voir les travaux de la Commission pour les relations
religieuses avec le judaïsme : Orientations et suggestions pour l’application de la
Déclaration conciliaire « Nostra ætate » n° 4, 1er décembre 1974, La Documentation
catholique, n° 1668 (19 janvier 1975), p. 59-61 ; Notes pour une correcte présentation des juifs et du judaïsme dans la prédication et la catéchèse de l’Église
catholique, 24 juin 1985. La Documentation catholique, n° 1900 (21 juillet 1985,
p. 733-738).
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Chemins de Dialogue
positive de leurs membres à l’appel de Dieu est bien plus difficile.
Un discernement est ici requis, pour lequel des critères doivent être
établis. Bien des personnes sincères, inspirées par l’Esprit de Dieu,
ont certainement marqué de leur empreinte l’élaboration et le
développement de leurs traditions religieuses respectives. Mais
cela ne veut pas dire pour autant que tout en celles-ci soit nécessairement bon.
31
Affirmer que les autres traditions religieuses comprennent
des « éléments de grâce » ne signifie pas pour autant que
tout en elles soit le fruit de la grâce. Le péché a été à l’œuvre dans
le monde et donc les autres traditions religieuses, malgré leurs
valeurs positives, sont aussi le reflet des limitations de l’esprit
humain qui est parfois enclin à choisir le mal. Une approche
ouverte et positive des autres traditions religieuses n’autorise donc
pas à fermer les yeux sur les contradictions qui peuvent exister
entre elles et la révélation chrétienne. Là où c’est nécessaire, on doit
reconnaître qu’il y a incompatibilité entre certains éléments essentiels de la religion chrétienne et certains aspects de ces traditions.
32
Cela signifie donc que, tout en entrant avec un esprit
ouvert dans le dialogue avec les membres des autres traditions religieuses, les chrétiens peuvent, d’une manière pacifique,
les inciter à réfléchir au contenu de leur croyance. Mais les
chrétiens eux-mêmes doivent accepter, à leur tour, d’être remis en
question. En effet, malgré la plénitude de la révélation de Dieu en
Jésus Christ, la manière suivant laquelle ils comprennent parfois
leur religion et la vivent peut avoir besoin de purification.
C) Formes de dialogue
42
Il existe différentes formes de dialogue interreligieux. Il
semble cependant utile de rappeler ici celles que
mentionne le document de 1984 du Conseil pontifical pour le
dialogue interreligieux. Quatre formes y sont mentionnées, sans
qu’on ait voulu y mettre un ordre de priorité :
104
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42.1. Le dialogue de la vie, où les gens s’efforcent de vivre dans un esprit
d’ouverture et de bon voisinage, partageant leurs joies et leurs peines,
leurs problèmes et leurs préoccupations humaines ;
42.2. Le dialogue des œuvres, où il y a collaboration en vue du développement intégral et de la libération totale de l’homme ;
42.3. Le dialogue des échanges théologiques, où des spécialistes
cherchent à approfondir la compréhension de leurs héritages religieux
respectifs et à apprécier les valeurs spirituelles les uns des autres ;
42.4. Le dialogue de l’expérience religieuse, où des personnes enracinées
dans leurs propres traditions religieuses partagent leurs richesses spirituelles, par exemple par rapport à la prière et à la contemplation, à la foi
et aux voies de la recherche de Dieu ou de l’Absolu.
43
Il ne faut pas perdre de vue cette variété des formes de
dialogue. Si on réduisait celui-ci à l’échange théologique, le
dialogue pourrait être facilement considéré comme un produit de
luxe dans la mission de l’Église, et donc un domaine réservé à des
spécialistes. Au contraire, guidées par le Pape et leurs évêques,
toutes les Églises locales et tous les membres de ces Églises sont
appelés au dialogue, mais non point tous de la même manière. Il
est en outre évident que les différentes formes sont liées les unes
aux autres. Les contacts de la vie quotidienne et l’engagement
commun dans l’action ouvriront normalement la voie pour
promouvoir ensemble les valeurs humaines et spirituelles. Ils
peuvent ensuite conduire aussi au dialogue de l’expérience
religieuse, en réponse aux graves questions que les circonstances
de la vie ne manquent pas de susciter dans l’esprit humain (cf.
Nostra ætate, 2). Les échanges au niveau de l’expérience religieuse
peuvent également rendre plus vivantes et profondes les discussions théologiques. Celles-ci en retour peuvent éclairer les
expériences et encourager des contacts plus étroits.
44
Il faut également souligner l’importance du dialogue pour
le développement intégral, la justice sociale et la libération
humaine. Les Églises locales, comme témoins de Jésus Christ, sont
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appelées à s’engager en ce domaine de manière désintéressée et en
toute impartialité. Il faut qu’elles se mobilisent en faveur des droits
de l’homme, qu’elles proclament les exigences de la justice et
qu’elles dénoncent les injustices, non seulement quand leurs
propres membres en sont les victimes, mais indépendamment de
l’appartenance religieuse des personnes qui en souffrent. Il faut
aussi que tous s’associent pour essayer de résoudre les graves
problèmes auxquels la société et le monde doivent faire face, et
pour promouvoir l’éducation à la justice et à la paix.
45
Un autre contexte dans lequel le dialogue interreligieux
semble urgent aujourd’hui est celui de la culture. Le
concept de culture est plus large que celui de religion. Selon une
certaine conception, la religion représente la dimension transcendante de la culture et donc son âme. Les religions ont certainement
contribué au progrès de la culture et à l’édification d’une société
plus humaine. Cependant, les pratiques religieuses ont parfois
aussi eu une influence aliénante à l’égard des cultures et une
culture autonome sécularisée peut aujourd’hui jouer un rôle
critique vis-à-vis de certains éléments négatifs dans telle ou telle
religion. La question est donc complexe, car plusieurs religions
peuvent coexister dans un seul et même cadre culturel, alors
qu’une même religion peut trouver à s’exprimer dans des contextes
culturels différents. Il arrive même que des différences religieuses
peuvent conduire à des cultures distinctes dans une même région.
46
Le message chrétien promeut nombre de valeurs qui se
trouvent et sont vécues dans la sagesse et le riche patrimoine des cultures, mais il peut aussi mettre en question des
valeurs généralement acceptées dans une culture donnée. C’est
dans un dialogue attentif qu’il faut savoir reconnaître et accueillir
les valeurs culturelles qui favorisent la dignité de l’homme et son
destin transcendant. D’autre part, certains aspects de cultures
traditionnellement chrétiennes peuvent être remis en question par
les cultures locales d’autres traditions religieuses (cf. Evangelii
nuntiandi, 20). Dans ces relations complexes entre culture et
religion, le dialogue interreligieux, au niveau de la culture, revêt
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donc une importance considérable. Son objectif sera de surmonter
les tensions et les conflits, et même les éventuelles confrontations
par une meilleure compréhension entre les cultures religieuses
variées en une région donnée. Il pourra contribuer à purifier les
cultures de tout élément déshumanisant et être ainsi un agent de
transformation. Il pourra aussi aider à promouvoir des valeurs
culturelles traditionnelles menacées par la modernité et le nivellement vers le bas que toute internationalisation indifférenciée
peut porter avec soi.
2. Annonce de Jésus Christ
B) Le rôle de l’Église
58
C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre la mission
confiée par le Seigneur ressuscité à l’Église apostolique. La
mission de l’Église est de proclamer le Royaume de Dieu établi sur
terre en Jésus Christ, par sa vie, sa mort et sa résurrection, comme
le don décisif et universel de salut que Dieu fait au monde. C’est
pourquoi «il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom, l’enseignement, la vie, les promesses, le Règne et le mystère de Jésus de
Nazareth, Fils de Dieu, ne sont pas annoncés » (Evangelii nuntiandi,
22). Il y a donc continuité entre le Royaume prêché par Jésus et le
mystère du Christ annoncé par l’Église.
59
Continuant la mission de Jésus, l’Église est « le germe et le
commencement » du Royaume (Lumen gentium, 5). Elle est
au service de ce Royaume et en « témoigne ». Cela inclut un témoignage de la foi en Jésus Christ, le Sauveur, puisque c’est le cœur
même de sa foi et de sa vie. Dans l’histoire de l’Église, tous les
apôtres furent « témoins » de la vie, de la mort et de la résurrection
2. Cf. Ac 2,32 ; 3,15 ; 10,39 ; 13,31 ; 23,11.
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du Christ2. Le témoignage se donne en paroles et en actes qu’on ne
peut opposer les uns aux autres. L’acte ratifie la parole, mais sans
la parole l’acte peut être mal interprété. Le témoignage des apôtres,
en paroles comme en signes, est subordonné à l’Esprit Saint,
envoyé par le Père, pour remplir cette tâche du témoignage3.
F) Les modalités de l’annonce
68
En proclamant le message de Dieu en Jésus Christ, l’Église
évangélisatrice doit toujours se rappeler que cette annonce
ne s’accomplit pas dans un vide complet. Car l’Esprit Saint, l’Esprit
du Christ, est présent et agissant parmi ceux qui entendent la
Bonne Nouvelle, même avant que l’action missionnaire de l’Église
ne soit engagée (Redemptor hominis, 12 ; Dei verbum, 53). Dans bien
des cas, ils peuvent avoir déjà répondu implicitement à l’offre de
salut en Jésus Christ : un des signes peut en être la pratique sincère
de leurs propres traditions religieuses, dans la mesure même où
celles-ci contiennent des valeurs religieuses authentiques. Ils
peuvent déjà avoir été touchés par l’Esprit et être associés, d’une
certaine manière, et sans le savoir, au Mystère pascal de Jésus
Christ (Gaudium et spes, 22).
69
Attentive à ce que Dieu a déjà accompli en ceux à qui elle
s’adresse, l’Église cherche à découvrir la manière adéquate
pour annoncer la Bonne Nouvelle. Elle suit la pédagogie divine.
Ceci signifie qu’elle se met à l’école de Jésus lui-même et observe
les temps et les saisons à l’écoute de l’Esprit. Ce n’est que progressivement que Jésus a révélé à ses auditeurs la signification du
Royaume, le plan de salut de Dieu réalisé dans son propre mystère.
C’est graduellement, et avec un soin infini, qu’il leur a dévoilé le
contenu de son message, son identité de Fils de Dieu et le scandale
de la croix. Même ses disciples les plus proches, comme l’attestent
les Évangiles, ne sont parvenus à la foi complète en leur Maître
qu’à travers leur expérience pascale et le don de l’Esprit. Ceux
donc qui désirent se faire disciples de Jésus aujourd’hui, passeront
3. Cf. Jn 15,26 s. ; 1Jn 5,7-l0 ; Ac 5,32.
108
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Dialogue et annonce
par ce même itinéraire fait de découverte et d’engagement.
L’annonce faite par l’Église sera donc progressive et patiente à la
fois, épousant l’allure de ceux qui entendent le message, respectant
leur liberté et même « leur lenteur à croire » (cf. Evangelii nuntiandi,
79).
3. Dialogue interreligieux et annonce
B) L’Église et les religions
80
L’Église encourage et stimule le dialogue interreligieux non
seulement entre elle-même et d’autres traditions
religieuses mais aussi entre ces traditions religieuses elles-mêmes.
C’est une manière pour elle de remplir son rôle de « sacrement »,
c’est-à-dire « de signe et instrument de l’union intime avec Dieu et
de l’unité de tout le genre humain » (Lumen gentium, 1). L’Esprit
l’invite à encourager toutes les institutions et tous les mouvements
de caractère religieux à se rencontrer, à collaborer et à se purifier
afin de promouvoir la vérité et la vie, la sainteté et la justice,
l’amour et la paix, dimensions de ce Règne que le Christ, à la fin
des temps, remettra à son Père (cf. 1Co 15,24). Par là, le dialogue
interreligieux fait vraiment partie du dialogue de salut dont Dieu a
pris l’initiative4.
D) Engagement dans l’unique mission
82
Tous les chrétiens sont appelés à être personnellement
impliqués dans ces deux façons d’accomplir l’unique
mission de l’Église, à savoir l’annonce et le dialogue. La manière
dont ils le font dépend des circonstances et aussi du degré de leur
4. Cf. Ecclesiam suam, ch. III. Voir aussi Insegnamenti di Giovanni Paolo II, vol. VII,
1 (1984), p. 598 ; texte français dans Bulletin, n° 56 (1984/2), p. 144.
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préparation. Ils doivent néanmoins toujours se rappeler que le
dialogue, comme on l’a déjà dit, ne constitue pas toute la mission
de l’Église, qu’il ne peut pas simplement remplacer l’annonce, mais
reste orienté vers l’annonce ; c’est en celle-ci en effet que le
processus dynamique de la mission évangélisatrice de l’Église
atteint son sommet et sa plénitude. En s’engageant dans le
dialogue interreligieux, ils découvrent les « semences du Verbe »
dans le cœur des hommes et dans les diverses traditions religieuses
auxquelles ils appartiennent. En approfondissant leur connaissance du mystère du Christ, ils discernent les valeurs positives de
la recherche humaine du Dieu inconnu ou connu partiellement. À
travers les différentes phases du dialogue, les interlocuteurs
éprouvent un grand besoin tant d’informer que d’être informés, de
donner comme de recevoir des explications, et de se poser réciproquement des questions. Les chrétiens engagés dans le dialogue ont
alors le devoir de répondre aux attentes de leurs partenaires
concernant le contenu de la foi chrétienne et de porter témoignage
de cette foi lorsqu’ils y sont appelés, de donner raison de l’espérance qui est en eux (cf. 1P 3,15). Pour ce faire, les chrétiens se
doivent d’approfondir leur foi, de purifier leurs attitudes, de
clarifier leur langage, et de rendre leur culte toujours plus authentique.
Pentecôte, 19 mai 1991.
Francis Card. Arinze, Président du Conseil pontifical pour le dialogue interreli gieux.
Jozef Card. Tomko, Préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples.
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Congrégation pour la doctrine de la foi
DÉCLARATION « DOMINUS IESUS »
SUR L’UNICITÉ ET L’UNIVERSALITÉ SALVIFIQUE DE JÉSUS
CHRIST ET DE L’ÉGLISE
(extraits)
Introduction
3
De la pratique et de la théorisation du dialogue entre la foi
chrétienne et les autres traditions religieuses, naissent de
nouvelles questions ; il faut les affronter en parcourant de nouvelles
pistes d'investigation, en avançant des propositions et en
suggérant des comportements, qui doivent être soumis à un discernement attentif. La présente Déclaration intervient dans cette
recherche pour rappeler aux Évêques, aux théologiens et à tous les
fidèles catholiques certains contenus doctrinaux essentiels, qui
puissent aider la réflexion théologique à découvrir peu à peu des
solutions conformes aux données de la foi et aptes à répondre aux
défis de la culture contemporaine.
Cette Déclaration est un exposé en raison de sa finalité. On
n'entend pas y traiter organiquement la problématique de l'unicité
et de l'universalité salvifique du mystère de Jésus Christ et de
l'Église, ni offrir des solutions à des questions théologiques
librement disputées. On veut plutôt exposer une nouvelle fois la
doctrine de la foi catholique sur ce point, en indiquant en même
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temps certains problèmes fondamentaux qui restent ouverts à
d'ultérieurs approfondissements, et réfuter quelques opinions
erronées ou ambiguës. Ainsi la Déclaration reprend la doctrine
enseignée dans de précédents documents du Magistère, pour
proclamer à nouveau des vérités qui appartiennent au patrimoine
de foi de l'Église.
4
La pérennité de l'annonce missionnaire de l'Église est aujourd'hui mise en péril par des théories relativistes, qui entendent
justifier le pluralisme religieux, non seulement de facto mais aussi de
iure (ou en tant que principe). Elles retiennent alors comme
dépassées des vérités comme par exemple le caractère définitif et
complet de la révélation de Jésus Christ, la nature de la foi
chrétienne vis-à-vis des autres religions, l'inspiration des livres de
la Sainte Écriture, l'unité personnelle entre le Verbe éternel et Jésus
de Nazareth, l'unité de l'économie du Verbe incarné et du SaintEsprit, l'unicité et l'universalité salvifique du mystère de Jésus
Christ, la médiation salvifique universelle de l'Église, la nonséparation, quoique dans la distinction, entre le Royaume de Dieu,
le Royaume du Christ et l'Église, la subsistance de l'unique Église
du Christ dans l'Église catholique.
Ces théories s'appuient sur certains présupposés de nature
philosophique ou théologique qui rendent difficiles la compréhension et l'accueil de la vérité révélée. On en signalera quelquesuns : la conviction que la vérité sur Dieu est insaisissable et
ineffable, même par la révélation chrétienne ; l'attitude relativiste
vis-à-vis de la vérité, entraînant que ce qui est vrai pour certains ne
le serait pas pour d'autres ; l'opposition radicale qu'on établit entre
la mentalité logique occidentale et la mentalité symbolique
orientale ; le subjectivisme de qui, tenant la raison comme seule
source de connaissance, devient « incapable d'élever son regard
vers le haut pour oser atteindre la vérité de l'être »1 ; la difficulté à
percevoir et comprendre dans l'histoire la présence d'événements
définitifs et eschatologiques ; la privation de sa dimension
métaphysique de l'incarnation historique du Logos éternel et sa
1. Jean-Paul II, Encycl. Fides et ratio, n° 5 : AAS 91 (1999) 5-88.
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réduction à une simple apparition de Dieu dans l'histoire ; l'éclectisme qui, dans la recherche théologique, prend des idées dans
différents contextes philosophiques et religieux, sans se soucier ni
de leur cohérence systématique ni de leur compatibilité avec la
vérité chrétienne ; la tendance finalement à lire et à interpréter la
Sainte Écriture en dehors de la Tradition et du Magistère de
l'Église.
Sur la base de ces présupposés adoptés sans uniformité, comme
des affirmations pour certains, comme des hypothèses pour
d'autres, des propositions théologiques sont élaborées qui font
perdre leur caractère de vérité absolue et d'universalité salvifique à
la révélation chrétienne et au mystère de Jésus Christ et de l'Église,
ou y jettent au moins une ombre de doute et d'incertitude.
1. La révélation de Jésus Christ complète et définitive
6
Est donc contraire à la foi de l'Église la thèse qui soutient le
caractère limité, incomplet et imparfait de la révélation de
Jésus Christ, qui compléterait la révélation présente dans les autres
religions. La cause fondamentale de cette assertion est la
persuasion que la vérité sur Dieu ne pourrait être ni saisie ni
manifestée dans sa totalité et dans sa complétude par aucune
religion historique, par le christianisme non plus par conséquent, et
ni même par Jésus Christ.
Cette position contredit radicalement les précédentes affirmations de foi selon lesquelles la révélation complète et définitive du
mystère salvifique de Dieu se réalise en Jésus Christ. Aussi, les
mots, les œuvres et toute l'existence historique de Jésus, quoique
limités en tant que réalités humaines, ont cependant comme sujet
la Personne divine du Verbe incarné, « vraiment Dieu et vraiment
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homme »2 ; ils portent donc en eux le caractère complet et définitif
de la révélation des voies salvifiques de Dieu, même si la
profondeur du mystère divin en lui-même demeure transcendante
et inépuisable. La vérité sur Dieu n'est pas abolie ou réduite quand
elle est exprimée dans un langage humain. Elle demeure en
revanche unique, complète et définitive car celui qui parle et qui
agit est le Fils de Dieu incarné. Dès lors la foi exige qu'on professe
que dans tout son mystère, de l'incarnation à la glorification, le
Verbe fait chair est la source, participée mais réelle, et l'accomplissement de toute révélation salvifique de Dieu à l'humanité3, et que
l'Esprit Saint, qui est l'Esprit du Christ, enseigne cette « vérité tout
entière » (Jn 16,13) aux apôtres et à travers eux à l'Église de tous les
temps.
7
La réponse adéquate à la révélation divine est « “l'obéissance
de la foi” (Rm 1,5 ; cf. Rm 16,26 ; 2Co 10,5-6), par laquelle
l'homme s'en remet tout entier et librement à Dieu dans un
“complet hommage d'intelligence et de volonté à Dieu qui révèle”
et dans un assentiment volontaire à la révélation qu'il fait »4. La foi
est un don de grâce : « Pour exister, cette foi requiert la grâce prévenante et aidante de Dieu, ainsi que les secours intérieurs du SaintEsprit qui touche le cœur et le tourne vers Dieu, ouvre les yeux de
l'esprit et donne “à tous la douceur de consentir et de croire à la
vérité” »5.
L'obéissance de la foi comporte l'accueil de la vérité de la
révélation du Christ, garantie par Dieu qui est la Vérité même6 :
« La foi est d'abord une adhésion personnelle de l'homme à Dieu ;
elle est en même temps, et inséparablement, l'assentiment libre à
toute la vérité que Dieu a révélée »7. La foi par conséquent, « don
de Dieu » et « vertu surnaturelle infuse par lui »8, comporte une
2. Conc. œcum. de Chalcédoine, Symbolum Chalcedonense : DH 301. Cf. S.
Athanase d'Alexandrie, De Incarnatione, 54, 3 : SC 199, 458.
3. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Dei verbum, n° 4.
4. Ibid., n° 5.
5. Ibid.
6. Cf. Catéchisme de l'Église Catholique, n° 144.
7. Ibid., n° 150.
8. Ibid., n° 153.
114
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double adhésion : à Dieu qui révèle et à la vérité qu'il révèle, à
cause de la confiance accordée à la personne qui affirme. C'est pour
cela que « nous ne devons croire en nul autre que Dieu, le Père, le
Fils et le Saint-Esprit »9.
On doit donc tenir fermement la distinction entre la foi
théologale et la croyance dans les autres religions. Alors que la foi
est l'accueil dans la grâce de la vérité révélée, qui « permet de
p é n é t rer le mystère, dont elle favorise une compréhension
cohérente »10, la croyance dans les autres religions est cet ensemble
d'expériences et de réflexions, trésors humains de sagesse et de
religiosité, que l'homme dans sa recherche de la vérité a pensé et
vécu, pour ses relations avec le Divin et l'Absolu11.
Cette distinction n'est pas toujours présente dans la réflexion
actuelle, ce qui provoque souvent l'identification entre la foi
théologale, qui est l'accueil de la vérité révélée par le Dieu Un et
Trine, et la croyance dans les autres religions, qui est une
expérience religieuse encore à la recherche de la vérité absolue, et
encore privée de l'assentiment à Dieu qui se révèle. C'est là l'un des
motifs qui tendent à réduire, voire même à annuler, les différences
entre le christianisme et les autres religions.
8
On avance aussi l'hypothèse de l'inspiration des textes sacrés
d'autres religions. Il faut certes reconnaître que certains
éléments de ces textes sont de fait des instruments pour que des
multitudes de personnes au cours du temps aient pu, aujourd'hui
comme hier, alimenter et conserver leur rapport religieux avec
Dieu. Ainsi donc, en considérant les manières de faire, les règles et
les doctrines des autres religions, le Concile Vatican II — comme on
l'a rappelé supra — affirme que : « Quoiqu'elles diffèrent en
beaucoup de points de ce qu'elle-même [l'Église] tient et propose,
cependant [elles] apportent souvent un rayon de la vérité qui
illumine tous les hommes »12.
9.
10.
11.
12.
Ibid., n° 178.
Jean-Paul II, Encycl. Fides et ratio, n° 13.
Cf. ibid., n° 31-32.
Conc. œcum. Vat. II, Décl. Nostra ætate, n° 2. Cf. aussi Conc. œcum. Vat. II,
115
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Néanmoins, la tradition de l'Église réserve la qualification de
textes inspirés aux livres canoniques de l'Ancien et du Nouveau
Testament, en tant qu'inspirés par le Saint-Esprit13. Recueillant cette
tradition, la Constitution dogmatique sur la Révélation divine du
Concile Vatican II enseigne : « Notre sainte Mère l'Église, de par sa
foi apostolique, juge sacrés et canoniques tous les livres tant de
l'Ancien que du Nouveau Testament, avec toutes leurs parties,
puisque, rédigés sous l'inspiration de l'Esprit-Saint (cf. Jn 20,31 ;
2Tm 3,16 ; 2P 1,19-21 ; 3,15-16), ils ont Dieu pour auteur et qu'ils ont
été transmis comme tels à l'Église elle-même »14. Ces livres « enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu pour
notre salut a voulu voir consignée dans les Lettres Sacrées »15.
Cependant, parce qu'il veut appeler à lui tous les peuples en
Jésus Christ et leur communiquer la plénitude de sa révélation et
de son amour, Dieu ne manque pas de se rendre présent de
manière multiforme « non seulement aux individus mais encore
aux peuples, par leurs richesses spirituelles dont les religions sont
une expression principale et essentielle, bien qu'elles comportent
“des lacunes, des insuffisances et des erreurs” »16. Par conséquent,
les livres sacrés des autres religions qui de fait nourrissent et
dirigent l'existence de leurs adeptes, reçoivent du mystère du
Christ les éléments de bonté et de grâce qu'ils contiennent.
13.
14.
15.
16.
Décr. Ad gentes, n° 9, qui évoque les éléments positifs présents dans « les rites
particuliers et les civilisations particulières des peuples » ; Const. dogm. Lumen
gentium, n° 16, qui fait référence à ce qui peut se trouver de bon et de vrai chez
les non-chrétiens et qui peut être considéré comme une préparation à l'accueil
de l'Évangile.
Cf. Conc. œcum. de Trente, Décr. De libris sacris et de traditionibus recipiendis :
DH 1501 ; Conc. œcum. Vat. I, Const. dogm. Dei Filius, cap. 2 : DH 3006.
Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Dei verbum, n° 11.
Ibid.
Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 55. Cf. aussi n° 56. Paul VI, Exhort.
ap. Evangelii nuntiandi, n° 53.
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2. Le logos incarné et le Saint-Esprit
dans l’œuvre du salut
9
Dans la réflexion théologique contemporaine, apparaît
souvent la conception de Jésus de Nazareth comme une figure
historique particulière, finie, révélatrice du divin mais sans
exclusive, comme complément d'autres présences révélatrices et
salvifiques. L'Infini, l'Absolu, le Mystère ultime de Dieu se
manifesterait ainsi à l'humanité sous maintes formes et par maintes
figures historiques : Jésus de Nazareth serait l'une d'entre elles.
Plus concrètement, il serait pour certains l'un des multiples visages
que le Logos aurait pris au cours du temps pour communiquer
salvifiquement avec l'humanité.
En outre, pour justifier d'une part l'universalité du salut chrétien
et d'autre part le fait du pluralisme religieux, on propose une
économie du Verbe éternel, également valide en dehors de l'Église
et sans rapport avec elle, et une économie du Verbe incarné. La
première aurait une valeur ajoutée d'universalité vis-à-vis de la
seconde, limitée aux seuls chrétiens, mais où la présence de Dieu
serait plus complète.
10
Ces thèses contrastent vivement avec la foi chrétienne. On
doit en effet croire fermement la doctrine de foi qui
proclame que Jésus de Nazareth, fils de Marie, et seulement lui, est
le Fils et le Verbe du Père. Le Verbe, qui « au commencement […]
était auprès de Dieu » (Jn 1,2) est celui qui « s'est fait chair » (Jn
1,14). En Jésus « le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16,16),
« habite corporellement toute la plénitude de la divinité » (Col 2,9).
Il est « le Fils Unique-Engendré, qui est dans le sein du Père » (Jn
1,18), son « Fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption […].
Dieu s'est plu à faire habiter en lui toute la plénitude et par lui à
réconcilier tous les êtres pour lui, aussi bien sur la terre que dans
les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix » (Col 1,13-14.1920).
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Fidèle à la Sainte Écriture et refusant les interprétations erronées
et réductrices, le premier Concile de Nicée définit solennellement
sa foi en « Jésus Christ le Fils de Dieu engendré du Père, unique
engendré, c'est-à-dire de la substance du Père, Dieu de Dieu,
lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré non pas créé,
consubstantiel au Père, par qui tout a été fait, ce qui est dans le ciel
et ce qui est sur la terre, qui à cause de nous les hommes et à cause
de notre salut est descendu et s'est incarné, s'est fait homme, a
souffert et est ressuscité le troisième jour, est monté aux cieux,
viendra juger les vivants et les morts »17. Suivant les enseignements
des Pères, le Concile de Chalcédoine professa aussi que le « seul et
même Fils, notre Seigneur Jésus Christ, le même parfait en divinité,
et le même parfait en humanité, le même vraiment Dieu et
vraiment homme […], consubstantiel au Père selon la divinité et le
même consubstantiel à nous selon l'humanité […], avant les siècles
engendré du Père selon la divinité, et aux derniers jours le même
[engendré] pour nous et pour notre salut de la Vierge Marie, Mère
de Dieu selon l'humanité »18.
Aussi, le Concile Vatican II affirme que le Christ, « Nouvel
Adam », « image du Dieu invisible » (Col 1,15), « est l'homme
parfait qui a restauré dans la descendance d'Adam la ressemblance
divine, altérée dès le premier péché […]. Agneau innocent, par son
sang librement répandu, il nous a mérité la vie ; et, en lui, Dieu
nous a réconciliés avec lui-même et entre nous, nous arrachant à
l'esclavage du diable et du péché. En sorte que chacun de nous
peut dire avec l'apôtre : le Fils de Dieu “m'a aimé et il s'est livré luimême pour moi” (Ga 2,20) »19.
À cet égard, Jean-Paul II a explicitement déclaré : « Il est
c o n t r a i re à la foi chrétienne d'intro d u i re une quelconque
séparation entre le Verbe et Jésus Christ […] : Jésus est le Verbe
incarné, Personne une et indivisible […]. Le Christ n'est autre que
Jésus de Nazareth, et celui-ci est le Verbe de Dieu fait homme pour
17. Conc. œcum. de Nicée I, Symbolum Nicaenum : DH 125.
18. Conc. œcum. de Chalcédoine, Symbolum Chalcedonense : DH 301.
19. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n° 22.
118
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le salut de tous […]. Alors que nous découvrons peu à peu et que
nous mettons en valeur les dons de toutes sortes, surtout les
richesses spirituelles, dont Dieu a fait bénéficier tous les peuples, il
ne faut pas les disjoindre de Jésus Christ qui est au centre du plan
divin de salut »20.
Il est donc contraire à la foi catholique de séparer l'action salvifique du Logos en tant que tel de celle du Verbe fait chair. Par
l'incarnation, toutes les actions salvifiques que le Verbe de Dieu
opère sont toujours réalisées avec la nature humaine qu'il a
assumée pour le salut de tous les hommes. L'unique sujet agissant
dans les deux natures, divine et humaine, est la personne unique
du Verbe21.
Elle n'est donc pas compatible avec la doctrine de l'Église la
théorie qui attribue une activité salvifique au Logos comme tel dans
sa divinité, qui s'exercerait « plus loin » et « au-delà » de l'humanité
du Christ, même après l'incarnation22.
11
Il faut pareillement croire fermement la doctrine de foi sur
l'unicité de l'économie salvifique voulue par le Dieu Un et
Trine. Cette économie a comme source et comme centre le mystère
de l'incarnation du Verbe, médiateur de la grâce divine pour la
création et pour la rédemption (cf. Col 1,15-20), regroupant toutes
choses (cf. Ep 1,10), « devenu pour nous sagesse, justice, sanctification et rédemption » (1Co 1,30). Le mystère du Christ en effet a
une unité intrinsèque, de l'élection éternelle en Dieu jusqu'à la
parousie : « [Le Père] nous a élus en lui, dès avant la fondation du
monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans
l'amour » (Ep 1,4) ; « En lui encore […] nous avons été mis à part,
désignés d'avance, selon le plan préétabli de celui qui mène toutes
choses au gré de sa volonté » (Ep 1,11) ; « Car ceux que d'avance il
20. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 6.
21. Cf. S. Léon le Grand, Tomus ad Flavianum : DH 294.
22. Cf. S. Léon le Grand, Lettre « Promisisse me memini » ad Leonem I Imp. : DH 318 :
« In tantam unitatem ab ipso conceptu Virginis deitate et humanitate conserta,
ut nec sine homine divina, nec sine Deo agerentur humana ». Cf. aussi ibid. :
DH 317.
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[le Père] a discernés, il les a aussi prédestinés à reproduire l'image
de son Fils, afin qu'il soit l'aîné d'une multitude de frères ; et ceux
qu'il a prédestinés, il les a aussi appelés, ceux qu'il a appelés, il les
a aussi justifiés ; ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés » (Rm
8,29-30).
Le Magistère de l'Église, fidèle à la révélation divine, confirme
que Jésus Christ est le médiateur et rédempteur universel : « Le
Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est lui-même fait chair, afin
que, homme parfait, il sauve tous les hommes et récapitule toutes
choses en lui […]. C'est lui [le Seigneur] que le Père a ressuscité
d'entre les morts, a exalté et a fait siéger à sa droite, le constituant
juge des vivants et des morts »23. Cette médiation salvifique
implique aussi l'unicité du sacrifice rédempteur du Christ, prêtre
souverain et éternel (cf. He 6,20 ; 9,11 ; 10,12-14).
12
D'autres envisagent encore l'hypothèse d'une économie de
l'Esprit Saint au caractère plus universel que celle du Verbe
incarné, crucifié et ressuscité. Cette affirmation aussi est contraire à
la foi catholique, qui considère en revanche l'incarnation salvifique
du Verbe comme un événement trinitaire. Dans le Nouveau
Testament le mystère de Jésus, Verbe incarné, constitue le lieu de la
présence du Saint-Esprit et le principe de son effusion sur
l'humanité non seulement aux temps messianiques (cf. Ac 2,32-36 ;
Jn 7,39 ; 20,22 ; 1Co 15,45), mais aussi à l'époque précédant la venue
du Christ dans l'histoire (cf. 1 Co 10,4 ; 1 Pt 1,10-12).
Le Concile Vatican II a rappelé cette vérité fondamentale à la
conscience de foi de l'Église. Dans l'exposition du plan salvifique
du Père sur toute l'humanité, le Concile relie immédiatement et
strictement le mystère du Christ et le mystère de l'Esprit24. Tout le
23. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n° 45. Cf. aussi Conc. œcum.
de Trente, Décr. De peccato originali, n° 3 : DH 1513.
24. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 3-4.
25. Cf. ibid., n° 7. Cf. S. Irénée, qui affirmait que dans l'Église « a été déposée la
communion avec le Christ, c'est-à-dire l'Esprit Saint » (Adversus haereses, III, 24,
1 : SC 211, 472).
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travail d'édification de l'Église par Jésus Christ Tête au cours des
siècles est décrit comme réalisé en communion avec son Esprit25.
En outre, l'action salvifique de Jésus Christ, avec et par son
Esprit, s'étend à toute l'humanité, au-delà des frontières visibles de
l'Église. Traitant du mystère pascal, où le Christ associe déjà
maintenant le croyant à sa vie dans l'Esprit et lui donne l'espérance
de la résurrection, le Concile affirme : « Et cela ne vaut pas
seulement pour ceux qui croient au Christ, mais bien pour tous les
hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels, invisiblement,
agit la grâce. En effet, puisque le Christ est mort pour tous et que
la vocation dernière de l'homme est réellement unique, à savoir
divine, nous devons tenir que l'Esprit Saint offre à tous, d'une façon
que Dieu connaît, la possibilité d'être associé au mystère pascal »26.
Le lien entre le mystère salvifique du Verbe fait chair et celui de
l'Esprit est donc clair, qui en fin de compte introduit la vertu salvifique du Fils incarné dans la vie de tous les hommes, appelés par
Dieu à une même fin, qu'ils aient précédé historiquement le Verbe
fait homme ou qu'ils vivent après sa venue dans l'histoire : l'Esprit
du Père, que le Fils donne sans mesure (cf. Jn 3,34) les anime tous.
Pour cette raison le Magistère récent de l'Église a fermement et
clairement rappelé la vérité sur l'unique économie divine : « La
présence et l'activité de l'Esprit ne concernent pas seulement les
individus, mais la société et l'histoire, les peuples, les cultures, les
religions […]. Le Christ ressuscité agit désormais dans le cœur des
hommes par la puissance de son Esprit […]. C'est encore l'Esprit
qui répand les “semences du Verbe”, présentes dans les rites et les
cultures, et les prépare à leur maturation dans le Christ »27. Tout en
reconnaissant le rôle historico-salvifique de l'Esprit dans l'univers
entier et dans toute l'histoire28, le Magistère précise cependant : « Ce
26. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n° 22.
27. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 28. Pour les « semences du Verbe »,
cf. aussi S. Justin, Apologia II, 8,1-2 ; 10,1-3 ; 13,3-6 : éd. E.J. Goodspeed, 84 ; 85 ;
88-89.
28. Cf. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 28-29.
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même Esprit a agi dans l'incarnation, dans la vie, la mort et la
résurrection de Jésus, et il agit dans l'Église. Il ne se substitue donc
pas au Christ, et il ne remplit pas une sorte de vide, comme,
suivant une hypothèse parfois avancée, il en existerait entre le
Christ et le Logos. Ce que l'Esprit fait dans le cœur des hommes et
dans l'histoire des peuples, dans les cultures et les religions,
remplit une fonction de préparation évangélique et cela ne peut
pas être sans relation au Christ, le Verbe fait chair par l'action de
l'Esprit, “afin que, homme parfait, il sauve tous les hommes et
récapitule toutes choses en lui” »29.
En conclusion, l'Esprit n'agit pas à côté ou en dehors du Christ.
Il n'y a qu'une seule économie salvifique du Dieu Un et Trine,
réalisée dans le mystère de l'incarnation, mort et résurrection du
Fils de Dieu, mise en œuvre avec la coopération du Saint-Esprit et
élargie dans sa portée salvifique à l'humanité entière et à l'univers :
« Les hommes ne peuvent donc entrer en communion avec Dieu
que par le Christ, sous l'action de l'Esprit »30.
3. Unicité et universalité du mystère salvifique
de Jésus Christ
15
On se propose souvent d'éviter en théologie des termes
comme « unicité », « universalité », « absolu », parce qu'ils
donneraient l'impression d'une insistance excessive sur le sens et la
valeur de l'événement salvifique de Jésus Christ vis-à-vis des
autres religions. Or, ce langage exprime en fin de compte la fidélité
à la révélation, car il est un développement : il provient des sources
mêmes de la foi. La communauté des croyants a en effet immédia-
29. Ibid., n° 29.
30. Ibid., n° 5.
122
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tement reconnu la vertu salvifique spécifique de Jésus : par cette
vertu, lui seul, comme Fils de Dieu fait homme crucifié et
ressuscité, donne la révélation (cf. Mt 11,27) et la vie divine (cf. Jn
1,12 ; 5,25-26 ; 17,2) à toute l'humanité et à chaque homme par la
mission reçue du Père et dans la puissance du Saint-Esprit.
Dans cette mesure, on peut et on doit dire que Jésus Christ a une
fonction unique et singulière pour le genre humain et pour son
histoire : cette fonction lui est propre, elle est exclusive, universelle
et absolue. Jésus est en effet le Verbe de Dieu fait homme pour le
salut de tous. Recueillant cette conscience de foi, le Concile Vatican
II enseigne : « Le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est luimême fait chair, afin que, homme parfait, il sauve tous les hommes
et récapitule toutes choses en lui. Le Seigneur est le terme de l'histoire humaine, le point vers lequel convergent tous les désirs de
l'histoire et de la civilisation, le centre du genre humain, la joie de
tous les cœurs et la plénitude de leurs aspirations. C'est lui que le
Père a ressuscité d'entre les morts, a exalté et fait siéger à sa droite,
le constituant juge des vivants et des morts »31. « C'est précisément
ce caractère unique du Christ qui lui confère une portée absolue et
universelle par laquelle, étant dans l'histoire, il est le centre et la fin
de l'histoire elle-même : “Je suis l'Alpha et l'Oméga, le Premier et le
Dernier, le Principe et la Fin” (Ap 22,13) »32.
31. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n° 45. La singularité et l'universalité du Christ dans l'histoire humaine sont nécessaires et absolues : saint
Irénée a bien exprimé ce concept dans sa contemplation de la primauté de
Jésus comme Premier-né : « [Primauté] aux cieux, d'abord, parce que Premierné du conseil du Père, Verbe parfait gouvernant toutes choses et leur imposant
sa loi ; sur la terre, ensuite, parce que Premier-né de la Vierge, homme juste,
saint, pieux, bon, agréable à Dieu, parfait en tout ; enfin, sauvant des enfers
tous ceux qui le suivent, parce que Premier-né des morts et Initiateur de la vie
de Dieu » : Demonstratio, 39 : SC 406, 138.
32. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 6.
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4. Unicité et unité de l’Église
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Le Seigneur Jésus, unique sauveur, n'a pas simplement
établi une communauté de disciples mais il a constitué
l'Église comme mystère de salut : il est lui-même dans l'Église et
l'Église est en lui (cf. Jn 15,1s. ; Ga 3,28 ; Ep 4,15-16 ; Ac 9,5) ; c'est
pourquoi la plénitude du mystère salvifique du Christ appartient
aussi à l'Église, inséparablement unie à son Seigneur. La présence
et l'œuvre de salut de Jésus Christ continuent en effet dans l'Église
et à travers l'Église (cf. Col 1,24-27)33, qui est son Corps (cf. 1Co
12,12-13.27 ; Col 1,18)34. Et comme la tête et les membres d'un corps
vivant sont inséparables mais distincts, le Christ et l'Église ne
peuvent être ni confondus ni séparés et forment un seul « Christ
total »35. Cette non-séparation est aussi exprimée dans le Nouveau
Testament par l'analogie de l'Église comme Épouse du Christ (cf.
2Co 11,2 ; Ep 5,25-29 ; Ap 21,2.9)36.
Par conséquent, compte tenu de l'unicité et de l'universalité de
la médiation salvifique de Jésus Christ, on doit croire fermement
comme vérité de foi catholique en l'unicité de l'Église fondée par le
Christ. Tout comme il existe un seul Christ, il n'a qu'un seul Corps,
une seule Épouse : une « seule et unique Église catholique et
apostolique »37. De plus, les promesses du Seigneur de ne jamais
abandonner son Église (cf. Mt 16,18 ; 28,20) et de la guider par son
Esprit (cf. Jn 16,13) impliquent, selon la foi catholique, que l'unicité
et l'unité, comme tout ce qui appartient à l'intégrité de l'Église, ne
feront jamais défaut38.
33. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 14.
34. Cf. ibid., n° 7
35. Cf. S. Augustin, Enarrat. in Psalmos, Ps 90, Sermo 2, 1 : CCL 39, 1266 ; S. Grégoire
le Grand, Moralia in Job, Praefatio, 6, 14 : PL 75, 525 ; S. Thomas d'Aquin, Summa
Theologiae, III, q. 48, a. 2, ad 1.
36. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 6.
37. Grand symbole de foi de l'Église arménienne : DH 48. Cf. Boniface VIII, Bulle Unam
Sanctam : DH 870-872 ; Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 8.
38. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redintegratio, n° 4 ; Jean-Paul II, Encycl.
Ut unum sint, n° 11 : AAS 87 (1995) 921-982.
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Les fidèles sont tenus de professer qu'il existe une continuité
historique — fondée sur la succession apostolique39 — entre l'Église
instituée par le Christ et l'Église catholique : « C'est là l'unique
Église du Christ […] que notre sauveur, après sa résurrection, remit
à Pierre pour qu'il en soit le pasteur (cf. Jn 21,17), qu'il lui confia, à
lui et aux autres apôtres, pour la répandre et la diriger (cf. Mt
28,18s.), et dont il a fait pour toujours la “colonne et le fondement
de la vérité” (1Tm 3,15). Cette Église comme société constituée et
organisée en ce monde, c'est dans l'Église catholique qu'elle se
trouve [subsistit in], gouvernée par le successeur de Pierre et les
Évêques qui sont en communion avec lui »40. Par l'expression
subsistit in, le Concile Vatican II a voulu proclamer deux affirmations doctrinales : d'une part, que malgré les divisions entre
chrétiens, l'Église du Christ continue à exister en plénitude dans la
seule Église catholique ; d'autre part, « que des éléments nombreux
de sanctification et de vérité subsistent hors de ses structures »41,
c'est-à-dire dans les Églises et Communautés ecclésiales qui ne sont
pas encore en pleine communion avec l'Église catholique42. Mais il
faut affirmer de ces dernières que leur « force dérive de la
plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l'Église catholique »43.
39. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 20 ; cf. aussi S. Irénée,
Adversus haereses, III, 3, 1-3 : SC 211, 20-44 ; S. Cyprien, Epist. 33, 1 : CCL 3 B,
164-165 ; S. Augustin, Contra adversarium legis et prophetarum, 1, 20, 39 : CCL 49,
70.
40. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 8.
41. Ibid., cf. Jean-Paul II, Encycl. Ut unum sint, n° 13. Cf. aussi Conc. œcum. Vat.
II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 15 et Décr. Unitatis redintegratio, n° 3.
42. Contraire à la signification authentique du texte conciliaire est donc l'interprétation qui tire de la formule subsistit in la thèse que l'unique Église du Christ
pourrait aussi subsister dans des Églises et Communautés ecclésiales non
catholiques. « Le Concile avait, à l'inverse, choisit le mot subsistit précisément
pour mettre en lumière qu'il existe une seule “subsistance” de la véritable
Église, alors qu'en dehors de son ensemble visible, existent seulement des
elementa Ecclesiae qui — étant des éléments de la même Église — tendent et
conduisent vers l'Église catholique » (À propos du livre « Église : charisme et
pouvoir » du P. Leonardo Boff. Notification de la Congrégation pour la Doctrine
de la Foi : AAS 77 [1985] 756-762).
43. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redintegratio, n° 3.
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6. L'Église et les religions face au salut
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Sur la modalité de transmission aux non-chrétiens de la
grâce salvifique de Dieu, toujours donnée par le Christ en
l'Esprit et dans un rapport mystérieux avec l'Église, le Concile
Vatican II s'est contenté d'affirmer que Dieu la donne « par des
voies connues de lui »44. La théologie cherche à approfondir cette
idée. Ce travail théologique doit être encouragé, parce qu'il sert
sans aucun doute à une meilleure compréhension des desseins
salvifiques de Dieu et des formes de leur réalisation. Cependant,
d'après ce qui a été rappelé jusqu'ici sur la médiation de Jésus
Christ et sur la « relation singulière et unique »45 entre l'Église et le
Royaume de Dieu parmi les hommes — qui est en substance le
Royaume du Christ sauveur universel —, il serait clairement
contraire à la foi catholique de considérer l'Église comme un
chemin de salut parmi d'autres. Les autres religions seraient
complémentaires à l'Église, lui seraient même substantiellement
équivalentes, bien que convergeant avec elle vers le Royaume
eschatologique de Dieu.
Certes, les différentes traditions religieuses contiennent et
proposent des éléments de religiosité qui procèdent de Dieu46 et
font partie de « ce que l'Esprit fait dans le cœur des hommes et
dans l'histoire des peuples, dans les cultures et les religions »47. De
fait, certaines prières et certains rites des autres religions peuvent
assumer un rôle de préparation évangélique, en tant qu'occasions
ou enseignements encourageant le cœur des hommes à s'ouvrir à
l'action divine48. On ne peut cependant leur attribuer l'origine
divine et l'efficacité salvifique ex opere operato qui sont propres aux
44. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Ad gentes, n° 7.
45. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 18.
46. Ce sont les semences du Verbe divin (semina Verbi), que l'Église reconnaît avec
joie et respect (cf. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Ad gentes, n° 11 ; Décl. Nostra ætate,
n° 2).
47. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 29.
48. Cf. ibid. ; Catéchisme de l'Église Catholique, n° 843.
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sacrements chrétiens49. Par ailleurs, on ne peut ignorer que d'autres
rites naissent de superstitions ou d'erreurs semblables (cf. 1Co
10,20-21) et constituent plutôt un obstacle au salut50.
Donné à Rome, au siège de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi,
le 6 août 2000, en la fête de la Transfiguration du Seigneur.
Joseph Card. Ratzinger - Préfet.
Tarcisio Bertone, S.D.B. - Archevêque émérite de Verceil - Secrétaire.
49. Cf. Conc. œcum. de Trente, Décr. De sacramentis, can. 8, de sacramentis in genere :
DH 1608.
50. Cf. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 55.
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Jean-Paul II
CHRÉTIENS ET MUSULMANS SOUS LE REGARD DE DIEU
Rencontre avec la jeunesse musulmane au stade de Casablanca
Lors de son voyage au Maroc, Jean-Paul II s’est rendu au palais
royal de Rabat où il s’est entretenu en tête à tête avec le roi pendant
cinquante minutes. Ensuite, pour souligner le caractère religieux
de la visite, le roi a présenté au Pape les membres du Conseil
supérieur des Oulémas (docteurs de la loi islamique) du Maroc.
Jean-Paul II a traversé la ville, fêté par une foule d’un million et
demi de personnes, pour arriver vers 19h30 au stade de
Casablanca, où s’étaient réunis 90 000 jeunes Marocains.
Allocution du roi Hassan II1
Louange à Dieu, et paix et prière pour notre Prophète et ses
fidèles !
Voici parmi nous, dans notre pays, notre grand ami Sa Sainteté
le Pape Jean-Paul II.
Qui aurait jamais pensé qu’une telle rencontre se déroulerait en
territoire marocain dans le bref délai écoulé entre notre visite au
Vatican et la visite de Sa Sainteté dans notre pays ? Mais sa volonté
et la nôtre se sont rencontrées sur le même plan et avec le même
objectif : tisser et renforcer les liens d’amitié et de concorde entre les
nations et les religions. Je me souviens que le Pape m’a dit avec son
1. Version italienne de cette allocution improvisée en arabe dans l’Osservatore
Romano du 21 août. Traduction de la Documentation catholique.
CdD 20 - IX 2002 - p. 129-142
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Chemins de Dialogue
bon sourire, lorsque je me suis rendu au Vatican et que je l’ai invité
à visiter le Maroc : « Mais que ferai-je, si je vais au Maroc ? Je ne
pourrai pas prier avec les gens, puisque votre pays est un État
purement musulman. » J’ai répondu : « Sainteté, vous avez une
responsabilité qui est non seulement religieuse mais aussi
éducative et morale. » Et j’ai ajouté : « Je suis sûr que des dizaines
et des dizaines de milliers de Marocains, et surtout les jeunes,
seraient très heureux si vous leur faisiez un discours sur la morale
et sur les rapports entre les hommes, les communautés, les peuples
et les religions. » Ainsi, votre désir et le nôtre se sont réalisés. Par
la volonté de Dieu nous avons atteint ce but pour démontrer au
monde entier qu’il n’y a rien qui puisse séparer les races et les
religions si les intentions et les bonnes volontés se rencontrent. Je
n’ai pas besoin de vous présenter le Pape Jean-Paul II parce que
vous le connaissez tous.
En demandant au Dieu tout-puissant et très-haut de lui donner
bonne santé, force et succès, je lui souhaite la bienvenue une
seconde fois, en votre nom et au mien, pour avoir accepté l’invitation et pour être venu dans un pays musulman et ami.
Que la paix et la miséricorde de Dieu soit sur nous !
Discours de Jean-Paul II2
En arabe.
Chers jeunes,
Je vous salue chaleureusement et je salue par votre intermédiaire tous les habitants de votre noble nation.
En français.
1. Je rends grâce et gloire à Dieu qui a permis que je me trouve
avec vous aujourd’hui. Sa Majesté le Roi m’a fait l’honneur de me
2. Texte original français dans l’Osservatore Romano du 21 août. Titre de la
Documentation catholique.
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rendre visite à Rome il y a quelques années, et il a eu la courtoisie
de m’inviter à visiter votre pays et à vous rencontrer. J’ai accepté
avec joie l’invitation du souverain de ce pays à venir vous parler,
en cette Année de la jeunesse. Je rencontre souvent des jeunes, en
général des catholiques. C’est la première fois que je me trouve
avec des jeunes musulmans.
Chrétiens et musulmans, nous avons beaucoup de choses en
commun, comme croyants et comme hommes. Nous vivons dans le
même monde, marqué par de nombreux signes d’espérance, mais
aussi par de multiples signes d’angoisse. Abraham est pour nous
un même modèle de foi en Dieu, de soumission à sa volonté et de
confiance en sa bonté. Nous croyons au même Dieu, le Dieu
unique, le Dieu vivant, le Dieu qui crée les mondes et porte ses
créatures à leur perfection. C’est donc vers Dieu que va ma pensée
et que s’élève mon cœur : c’est de Dieu même que je désire avant
tout vous parler ; de lui, parce que c’est en lui que nous croyons,
vous musulmans et nous catholiques, et vous parler aussi des
valeurs humaines qui ont en Dieu leur fondement, ces valeurs qui
concernent l’épanouissement de nos personnes, comme aussi celui
de nos familles et de nos sociétés, ainsi que celui de la communauté
internationale. Le mystère de Dieu n’est-il pas la réalité la plus
élevée dont dépend le sens même que l’homme donne à sa vie ? Et
n’est-ce pas le premier problème qui se présente à un jeune quand
il réfléchit sur le mystère de sa propre existence et sur les valeurs
qu’il entend choisir pour construire sa personnalité grandissante ?
Pour ma part, dans l’Église catholique, je porte la charge de
Successeur de Pierre, l’Apôtre que Jésus a choisi pour confirmer ses
frères dans la foi. Après les papes qui se sont succédé sans interruption au long de l’histoire, je suis aujourd’hui l’Évêque de Rome,
appelé à être parmi ses frères du monde le témoin de la foi et le
garant de l’unité de tous les membres de l’Église.
Aussi est-ce en croyant que je viens à vous aujourd’hui. C’est
tout simplement que je voudrais donner ici le témoignage de ce
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que je crois, de ce que je souhaite pour le bonheur de mes frères les
hommes et de ce que, par expérience, j’estime être utile pour tous.
Croire en Dieu
2. J’invoque tout d’abord le Très-Haut, le Dieu tout-puissant qui
est notre créateur. Il est à l’origine de toute vie, comme il est à la
source de tout ce qui est bon, de tout ce qui est beau, de tout ce qui
est saint. Il a séparé la lumière des ténèbres. Il a fait croître tout
l’univers selon un ordre merveilleux. Il a voulu que les plantes
croissent et portent leur fruit, comme il a voulu que se multiplient
les oiseaux du ciel, les animaux de la terre et les poissons de la mer.
Il nous a faits, nous les hommes, et nous sommes à lui. Sa loi sainte
guide notre vie. C’est la lumière de Dieu qui oriente notre destinée
et illumine notre conscience. Il nous rend capables d’aimer et de
transmettre la vie. Il demande à tout homme de respecter chaque
créature humaine et de l’aimer comme un ami, un compagnon, un
frère. Il invite à lui venir en aide quand il est blessé, quand il est
abandonné, quand il a faim et soif, bref quand il ne sait plus où
trouver sa route sur les chemins de la vie.
Oui, Dieu demande que nous écoutions sa voix. Il attend de
nous l’obéissance à sa volonté sainte dans une libre adhésion de
l’intelligence et du cœur.
C’est pourquoi, devant lui, nous sommes responsables. C’est lui,
Dieu, qui est notre juge, lui qui seul est véritablement juste. Nous
savons pourtant que sa miséricorde est inséparable de sa justice.
Quand l’homme revient vers lui repentant et contrit, après s’être
éloigné dans l’égarement du péché et les œuvres de mort, Dieu se
révèle alors comme celui qui pardonne et fait miséricorde.
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À lui donc notre amour et notre adoration. Pour ses bienfaits et
pour sa miséricorde, nous lui rendons grâce, en tout temps et en
tout lieu.
Cette rencontre est dans l’esprit du Concile Vatican II, de la
Déclaration sur le dialogue de l’Église avec les religions non-chrétiennes
3. Dans un monde qui désire l’unité et la paix et qui connaît
pourtant mille tensions et conflits, les croyants ne devraient-ils pas
favoriser l’amitié et l’union entre les hommes et les peuples qui
forment sur terre une seule communauté ? Nous savons qu’ils ont
une même origine et une même fin dernière : le Dieu qui les a faits
et qui les attend, parce qu’il les rassemblera. L’Église catholique
pour sa part, il y a vingt ans, lors du deuxième Concile du Vatican,
s’est engagée dans la personne de ses évêques, c’est-à-dire de ses
chefs religieux, à rechercher la collaboration entre les croyants. Elle
a publié un document sur le dialogue entre les religions (Nostra ætate).
Elle affirme que tous les hommes, spécialement les hommes de foi
vivante, doivent se respecter, dépasser toute discrimination, vivre
ensemble et servir la fraternité universelle (cf. document cité, n° 5).
L’Église manifeste une attention particulière pour les croyants
musulmans, étant donné leur foi au Dieu unique, leur sens de la
prière et leur estime de la vie morale (cf. n° 3). Elle souhaite
« promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale,
les valeurs morales, la paix, la liberté » (ibid.).
Appel au témoignage commun sur le sens de Dieu
4. Le dialogue entre chrétiens et musulmans est aujourd’hui
plus nécessaire que jamais. Il découle de notre fidélité envers Dieu
et suppose que nous sachions reconnaître Dieu par la foi et
témoigner de lui par la parole et l’action dans un monde toujours
plus sécularisé et parfois même athée.
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Chemins de Dialogue
Les jeunes peuvent construire un avenir meilleur s’ils mettent
d’abord leur foi en Dieu et s’ils s’engagent à édifier ce monde
nouveau selon le plan de Dieu, avec sagesse et confiance.
Dieu est source de toute joie. Aussi devons-nous témoigner de
notre culte envers Dieu, de notre adoration, de notre prière de
louange et de supplication. L’homme ne peut vivre sans prier, pas
plus qu’il ne peut vivre sans respirer. Nous devons témoigner de
notre humble recherche de Sa volonté ; c’est lui qui doit inspirer notre
engagement pour un monde plus juste et plus uni. Les voies de
Dieu ne sont pas toujours nos voies. Elles transcendent nos actions,
toujours incomplètes et les intentions de notre cœur, toujours
imparfaites. Dieu ne peut jamais être utilisé à nos fins car il est audelà de tout.
Ce témoignage de la foi, qui est vital pour nous et qui ne saurait
souffrir ni infidélité à Dieu ni indifférence à la vérité, se fait dans le
respect des autres traditions religieuses, car tout homme attend
d’être respecté pour ce qu’il est, de fait, et pour ce qu’il croit en
conscience. Nous désirons que tous accèdent à la plénitude de la
Vérité divine, mais tous ne peuvent le faire que par l’adhésion libre
de leur conscience, à l’abri des contraintes extérieures qui ne
seraient pas dignes de l’hommage libre de la raison et du cœur qui
caractérise la dignité de l’homme. C’est là le véritable sens de la
liberté religieuse, qui respecte à la fois Dieu et l’homme. C’est de
tels adorateurs que Dieu attend le culte sincère, des adorateurs en
esprit et en vérité.
Appel au témoignage commun sur la dignité de l’homme
5. Notre conviction est que « nous ne pouvons invoquer Dieu,
Père de tous les hommes, si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains de ces hommes créés à l’image de Dieu ».
(Décl. Nostra ætate, n° 5.) Il nous faut donc aussi respecter, aimer et
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aider tout être humain parce qu’il est une créature de Dieu et, dans
un certain sens, son image et son représentant parce qu’il est la
route menant à Dieu, et parce qu’il ne se réalise pleinement que s’il
connaît Dieu, s’il l’accepte de tout son cœur et s’il lui obéit jusque
sur les voies de la perfection. Aussi cette obéissance à Dieu et cet
amour pour l’homme doivent nous amener à respecter les droits de
l’homme, ces droits qui sont l’expression de la volonté de Dieu et
l’exigence de la nature humaine telle que Dieu l’a créée. Le respect
et le dialogue re q u i è rent donc la réciprocité dans tous les
domaines, surtout en ce qui concerne les libertés fondamentales et
plus particulièrement la liberté religieuse. Ils favorisent la paix et
l’entente entre les peuples. Ils aident à résoudre ensemble les
problèmes des hommes et des femmes d’aujourd’hui, plus spécialement ceux des jeunes.
Responsabilités et travail en commun des jeunes
pour un monde plus humain
6. Normalement, les jeunes regardent vers l’avenir ils aspirent à
un monde plus juste et plus humain. Dieu a fait les jeunes ainsi,
précisément pour qu’ils contribuent à transformer le monde selon
son plan de vie. Mais à eux aussi la situation apparaît souvent avec
ses ombres. Dans ce monde, il y a des frontières et des divisions
entre les hommes, ainsi que des incompréhensions entre les
générations ; il y a également du racisme, des guerres et des injustices, comme il y a aussi la faim, le gaspillage et le chômage. Ce
sont là des maux dramatiques qui nous touchent tous, et plus particulièrement les jeunes du monde entier. Certains risquent de se
décourager, d’autres risquent de se résigner, d’autres risquent de
vouloir tout changer par la violence ou par des solutions extrêmes.
La sagesse nous enseigne que l’autodiscipline et l’amour sont alors
les seuls leviers du renouveau désiré.
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Dieu ne veut pas que les hommes restent passifs. Il leur a confié la
terre pour qu’ils la maîtrisent, la cultivent, et la fassent fructifier
ensemble.
Vous êtes responsables du monde de demain. C’est en assumant
pleinement vos responsabilités, et avec courage, que vous pourrez
vaincre les difficultés actuelles. Il vous revient donc de prendre des
initiatives et de ne pas tout attendre des aînés et des gens en place.
Il vous faut construire le monde, et non pas seulement le rêver.
C’est en travaillant ensemble que l’on peut être efficace. Le travail
bien compris est un service des autres. Il crée des liens de
solidarité. L’expérience du travail en commun permet de se
purifier soi-même et de découvrir les richesses des autres. C’est
ainsi que peut naître, peu à peu, un climat de confiance, qui permet
à chacun de grandir, de s’épanouir et « d’être plus ». N’omettez
pas, chers jeunes, de collaborer avec les adultes, spécialement avec
vos parents et vos maîtres, ainsi qu’avec les « leaders » de la société
et de l’État. Les jeunes ne doivent pas s’isoler des autres. Les jeunes
ont besoin des adultes, comme les adultes ont besoin des jeunes.
Dans ce travail d’ensemble, la personne humaine, homme ou
femme, ne doit jamais être sacrifiée. Chaque personne est unique aux
yeux de Dieu, et irremplaçable dans cette œuvre de développement. Chacun doit être reconnu pour ce qu’il est, et, par suite,
respecté comme tel. Nul ne doit utiliser son semblable ; nul ne doit
exploiter son égal ; nul ne doit mépriser son frère.
C’est à ces conditions que pourra naître un monde plus humain,
plus juste et plus fraternel, où chacun pourra trouver sa place dans
la dignité et la liberté. C’est ce monde du XXIe siècle qui est entre
vos mains ; il sera ce que vous le ferez.
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Un monde pluraliste et solidaire
7. Ce monde à venir dépend des jeunes de tous les pays du monde.
Notre monde est divisé, et même éclaté ; il connaît de multiples
conflits et des injustices graves. Il n’y a pas de véritable solidarité
Nord-Sud ; il n’y a pas assez d’entraide entre les nations du Sud. Il
y a dans le monde des cultures et des races qui ne sont pas
respectées.
Pourquoi tout cela ? C’est que les hommes n’acceptent pas leurs diffé rences ; ils ne se connaissent pas assez. Ils rejettent ceux qui n’ont
pas la même civilisation. Ils refusent de s’entraider. Ils ne savent
pas se libérer de l’égoïsme et de la suffisance. Or, Dieu a créé tous les
hommes égaux en dignité, mais différents quant aux dons et aux
talents. L’humanité est un tout où chaque groupe a son rôle à jouer ;
il faut reconnaître les valeurs des divers peuples et des diverses
cultures. Le monde est comme un organisme vivant ; chacun a
quelque chose à recevoir des autres et quelque chose à leur donner.
Je suis heureux de vous rencontrer ici, au Maroc. Le Maroc a une
tradition d’ouverture ; vos savants ont voyagé et vous avez accueilli
des savants d’autres pays. Le Maroc a été un lieu de rencontre des
civilisations : il a permis des échanges avec l’Orient, l’Espagne et
l’Afrique. Le Maroc a une tradition de tolérance : dans ce pays
musulman, il y a toujours eu des juifs et presque toujours des
chrétiens ; cela a été vécu dans le respect, d’une manière positive.
Vous avez été et vous demeurez un pays hospitalier. Vous êtes
donc, jeunes Marocains, préparés à devenir des citoyens du monde
de demain, de ce monde fraternel auquel vous aspirez avec les
jeunes du monde entier.
Vous tous, jeunes, je suis sûr que vous êtes capables de ce
dialogue. Vous ne voulez pas être conditionnés par des préjugés.
Vous êtes prêts à construire une civilisation fondée sur l’amour.
Vous pouvez travailler à faire tomber les barrières dues parfois à
l’orgueil, plus souvent à la faiblesse et à la peur des hommes. Vous
voulez aimer les autres sans aucune frontière de nation, de race ou
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de religion. Pour cela, vous voulez la justice et la paix. « La paix et les
jeunes marchent ensemble », comme je l’ai dit dans mon message
pour la journée mondiale de la paix cette année. Vous ne voulez ni
la guerre ni la violence. Vous savez le prix qu’elles font payer aux
innocents. Vous ne voulez pas non plus l’escalade des armements.
Cela ne veut pas dire que vous voulez la paix à n’importe quel prix.
La paix va de pair avec la justice. Vous ne voulez l’oppression pour
personne. Vous voulez la paix dans la justice.
Des conditions de vie dignes pour tous
8. Vous voulez d’abord que les hommes aient de quoi vivre. Les
jeunes qui ont la chance de poursuivre leurs études ont le droit de
demeurer soucieux de la profession qu’ils pourront exercer pour
leur compte. Mais ils ont aussi à se préoccuper des conditions de
vie, souvent plus difficiles, de leurs frères et de leurs sœurs qui
vivent dans le même pays, et même dans le monde entier.
Comment rester indifférents, en effet, lorsque d’autres humains, en
grand nombre, meurent de faim, de malnutrition ou du manque
d’assistance sanitaire, quand ils souffrent cruellement de la sécheresse, quand ils sont réduits au chômage ou à l’émigration par des
lois économiques qui les dépassent, quand ils connaissent la
situation précaire de réfugiés, parqués dans des camps, par suite
des conflits des hommes ? Dieu a donné la terre à l’ensemble du
genre humain pour que les hommes en tirent leur subsistance dans
la solidarité et pour que chaque peuple ait les moyens de se
nourrir, de se soigner et de vivre en paix.
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Une réflexion intellectuelle de qualité
9. Mais, aussi importants que soient les problèmes économiques, l’homme ne vit pas seulement de pain, il a besoin d’une vie
intellectuelle et spirituelle : c’est là que se trouve l’âme de ce monde
nouveau auquel vous aspirez. L’homme a besoin de développer
son esprit et sa conscience. C’est souvent ce qui manque à l’homme
d’aujourd’hui. L’oubli des valeurs et la crise d’identité que traverse
notre monde nous obligent à un dépassement et à un effort
renouvelé de recherche et d’interrogation. La lumière intérieure qui
naîtra ainsi dans notre conscience permettra de donner sens au
développement, de l’orienter vers le bien de l’homme, de tout
homme et de tous les hommes, selon le plan de Dieu. Les Arabes
du Machreq et du Maghreb, et plus généralement les musulmans,
ont une longue tradition d’étude et de savoir : littéraire, scientifique,
philosophique. Vous êtes les héritiers de cette tradition, vous devez
étudier pour apprendre à connaître ce monde que Dieu nous a
donné, le comprendre, en découvrir le sens, avec le goût et le respect
de la vérité, et pour apprendre à connaître les peuples et les hommes
créés et aimés par Dieu, pour vous préparer à mieux les servir.
Bien plus, la recherche de la vérité vous conduira, au-delà des
valeurs intellectuelles, jusqu’à la dimension spirituelle de la vie
intérieure.
Une croissance dans la vie spirituelle
10. L’homme est un être spirituel. Nous, croyants, nous savons
que nous ne vivons pas dans un monde fermé. Nous croyons en
Dieu. Nous sommes des adorateurs de Dieu. Nous sommes des
chercheurs de Dieu.
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L’Église catholique regarde avec respect et reconnaît la qualité de
votre démarche religieuse, la richesse de votre tradition spirituelle.
Nous aussi, chrétiens, nous sommes fiers de notre tradition
religieuse.
Je crois que nous, chrétiens et musulmans, nous devons reconnaître avec joie les valeurs religieuses que nous avons en commun
et en rendre grâce à Dieu. Les uns et les autres nous croyons en un
Dieu, le Dieu unique, qui est toute justice et toute miséricorde ;
nous croyons à l’importance de la prière, du jeûne et de l’aumône,
de la pénitence et du pardon ; nous croyons que Dieu nous sera un
juge miséricordieux à la fin des temps et nous espérons qu’après la
résurrection, il sera satisfait de nous, et nous savons que nous
serons satisfaits de lui.
La loyauté exige aussi que nous reconnaissions et respections
nos différences. La plus fondamentale est évidemment le regard
que nous portons sur la personne et l’œuvre de Jésus de Nazareth.
Vous savez que, pour les chrétiens, ce Jésus les fait entrer dans une
connaissance intime du mystère de Dieu et dans une communion
filiale à ses dons, si bien qu’ils le reconnaissent et le proclament
Seigneur et Sauveur.
Ce sont là des différences importantes, que nous pouvons
accepter avec humilité et respect, dans la tolérance mutuelle ; il y a
là un mystère sur lequel Dieu nous éclairera un jour, j’en suis
certain.
Chrétiens et musulmans, nous nous sommes généralement mal
compris, et quelquefois, dans le passé, nous nous sommes opposés
et même épuisés en polémiques et en guerres.
Je crois que Dieu nous invite, aujourd’hui, à changer nos vieilles
habitudes. Nous avons à nous respecter, et aussi à nous stimuler les
uns les autres dans les œuvres de bien sur le chemin de Dieu.
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Vous savez, avec moi, quel est le prix des valeurs spirituelles.
Les idéologies et les slogans ne peuvent vous satisfaire ni résoudre
les problèmes de votre vie. Seules les valeurs spirituelles et morales
peuvent le faire, et elles ont Dieu pour fondement.
Je souhaite, chers jeunes, que vous puissiez contribuer à
construire ainsi un monde où Dieu ait la première place pour aider
et sauver l’homme. Sur ce chemin, vous êtes assurés de l’estime et
de la collaboration de vos frères et sœurs catholiques que je représente parmi vous ce soir.
Remerciements et prière
11. Je voudrais maintenant remercier Sa Majesté le Roi de
m’avoir invité, vous remercier vous aussi chers jeunes du Maroc,
d’être venus ici et d’avoir écouté avec confiance mon témoignage.
Mais plus encore, je voudrais remercier Dieu qui a permis cette
rencontre. Nous sommes tous sous son regard. Il est aujourd’hui le
premier témoin de notre rencontre. C’est lui qui met dans nos
cœurs les sentiments de miséricorde et de compréhension, de
pardon et de réconciliation, de service et de collaboration. Les
croyants que nous sommes n’ont-ils pas à reproduire dans leur vie
et leur cité les Très Bons Noms que nos traditions religieuses lui
reconnaissent ? Puissions-nous donc lui être disponibles, et être
soumis à sa volonté, aux appels qu’il nous adresse ! Ainsi nos vies
retrouveront un dynamisme nouveau.
Alors pourra naître, j’en suis convaincu, un monde où les
hommes et les femmes de foi vivante et efficiente chanteront la
gloire de Dieu et chercheront à construire une société humaine
selon la volonté de Dieu.
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Je voudrais terminer en l’invoquant personnellement devant
vous. Ô Dieu, tu es notre Créateur. Tu es bon et ta miséricorde est
sans limite. À toi la louange de toute créature. Ô Dieu, tu as donné
aux hommes que nous sommes une loi intérieure dont nous
devons vivre. Faire ta volonté, c’est accomplir notre tâche. Suivre
tes voies, c’est connaître la paix de l’âme. À toi, nous offrons notre
obéissance. Guide-nous en toutes les démarches que nous entreprenons sur terre. Affranchis-nous des penchants mauvais qui
détournent notre cœur de ta volonté. Ne permets pas qu’en
invoquant ton nom, nous venions à justifier les désordres humains.
Ô Dieu, tu es l’Unique. À toi va notre adoration. Ne permets pas
que nous nous éloignions de toi. Ô Dieu, juge de tous les hommes,
aide-nous à faire partie de tes élus au dernier jour. Ô Dieu, auteur
de la justice et de la paix, accorde-nous la joie véritable, et l’amour
authentique, ainsi qu’une fraternité durable entre les peuples.
Comble-nous de tes dons à tout jamais. Amen !
En arabe.
Au revoir, jeunes, et tous les habitants du Maroc ; je garderai
toujours votre souvenir avec une grande affection.
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VISITE DU PAPE JEAN-PAUL II À LA SYNAGOGUE DE ROME*
La première visite d’un Pape dans une synagogue a eu lieu à la
synagogue de Rome où Jean-Paul II s’est rendu le 13 avril 1986 comme
« Évêque de Rome et pasteur universel de l’Église catholique ». Il y a été
accueilli à 17 heures par la présidente de l’Union des communautés israélites d’Italie, Mme Tullia Zevi, et le président de la communauté israélite
de Rome, M. Giacomo Saban. Au cours de la célébration qui s’est déroulée
dans la synagogue, les personnes présentes ont d’abord écouté le chant
du psaume 150, puis le rabbin Della Rocca a lu un passage de la Genèse
(15, 1-7) et du prophète Michée (4, 1-5). Après les discours de M. Giacomo
Saban, du grand rabbin Toaff et du Pape, que nous reproduisons ci-après,
Jean-Paul II a lu le psaume 133 et le grand rabbin Toaff le psaume 125.
L’assistance a ensuite écouté, debout, le chant « Ani Ma’amin » (Je crois)
que les Juifs chantaient en allant vers les camps de concentration. Après
le chant du psaume 16, le Grand Rabbin et le Pape se sont retirés pour un
entretien privé au terme duquel Jean-Paul II a salué quelques membres de
la communauté juive.
*
Texte original italien dans l’Osservatore Romano des 14-15 avril. Traduction,
titre, sous-titres et notes de la Documentation catholique, 4 mai 1986, n° 1917, p.
433-439. Le Pape était accompagné dans sa visite à la Synagogue par le
c a rdinal Willebrands, président de la Commission pour les re l a t i o n s
religieuses avec le judaïsme, le P. Pierre Duprey, vice président de la
Commission, et Mgr Jorge Mejia, qui en fut durant de longues années le secrétaire. L’Église de Rome était également représentée par le cardinal Poletti,
vicaire du Pape pour la ville de Rome, et son auxiliaire, Mgr Clemente Riva.
Parmi les personnalités civiles se trouvaient les ministres Scalfaro et Darida,
ainsi que le maire de Rome, M. Signorello. La télévision italienne a retransmis
l’ensemble de la cérémonie.
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Discours de M. Giacomo Saban
Sainteté,
J’ai l’honneur de vous adresser tout d’abord la bienvenue dans
cette grande synagogue sur les rives du Tibre, au nom de la plus
ancienne communauté juive de la Diaspora, communauté que j’ai
le privilège de servir. Et, en vous manifestant la satisfaction de voir
un Pontife romain franchir pour la première fois le seuil d’une
synagogue, j’estime qu’il est de mon devoir d’indiquer brièvement
l’histoire pluri-millénaire de la communauté juive dans cette ville.
Établis sur les rives du Tibre près de deux siècles avant la
destruction du second Temple, les ancêtres de ces Juifs qui
habitèrent pendant des siècles à Rome vécurent ici comme des
citoyens romains libres : ils ont pleuré, en même temps que la foule,
sur la dépouille de César ; ils ont applaudi, en même temps que le
peuple délirant, au triomphe d’Auguste. Mais, sous les règnes
d’empereurs moins glorieux, ils n’ont pas échappé aux vilenies et à
la tyrannie, dont ils subirent les assauts en même temps que tous
les autres habitants de Rome.
Leur nombre s’accrut avec l’arrivée des prisonniers des guerres
juives et, d’abord esclaves mais bien vite libérés, ils jouirent d’une
vie relativement tranquille : une borne entre le IVe et le Ve mille sur
l’ancienne voie Appienne en porte encore témoignage… Mais je
parle de la majorité, car il y eut ceux qui vinrent à Rome pour
gravir la glorieuse échelle du martyre, et les noms de certains
d’entre eux sont inscrits sur les listes de la prison Mamertine,
depuis Aristobule, fils d’Hérode le Grand, victime d’obscurs
desseins politiques, jusqu’à Simon Bar Giora, inflexible combattant
pour la liberté de notre nation.
En contradiction avec la législation de César et d’Auguste qui,
gravée sur des plaques de bronze et fixée sur les forums des principales cités de l’Empire, consacrait les droits de nos ancêtres, le
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Code de Théodose limita les libertés, les activités et le développement de ces droits. Et pourtant ces ancêtres sont restés fidèles à
l’Urbs, peut-être unique composante stable dans la mosaïque des
populations qui affluaient à Rome de toutes les parties de l’Empire.
Par ailleurs, leur vie ne fut pas seulement de commerce et
d’échanges. Nos commentateurs parlent de florissantes académies
rabbiniques, et de nombreuses inscriptions dans les catacombes
prouvent qu’elles furent un centre attractif de spiritualité et un
foyer de pure foi monothéiste au milieu d’un monde où le
paganisme s’acheminait vers sa disparition définitive.
Les siècles obscurs qui suivirent et qui virent, en même temps
que la fin de l’Empire d’Occident, le déclin de cette Cité furent
supportés avec un courage serein par cette communauté. Peu après
la fin du premier millénaire de l’ère commune, alors que le pouvoir
temporel des Papes était en train de se consolider, un fils de cette
communauté, dont la maison se trouve non loin d’ici, dans le
Transtévère, Nathan ben Yehiel Anav, écrivit à Rome l’« Arukh », le
premier résumé normatif du judaïsme de la Diaspora.
Cette communauté échappa aux massacres que Pastoureaux et
Croisés infligèrent au judaïsme au-delà des Alpes. Mais elle ne
resta pas indifférente au destin de ces frères dans la foi, comme le
prouve l’antique liturgie funéraire encore en usage chez les Juifs de
Rome1.
Les premiers siècles après l’an mille furent difficiles et pénibles,
aussi bien pour les Juifs que pour le reste de la population de
Rome. Les rapports avec le pouvoir subissaient des vicissitudes, et
des violences furent infligées à la communauté dans la personne de
leurs maîtres. Mais en ces années aussi un Dante sut manifester son
1. On appelle « Croisade des Pastoureaux » un soulèvement de paysans qui, en
1251, traversa la France sous la direction d’un chef qui se faisait appeler le
« Maître de Hongrie » et qui voulait aller délivrer saint Louis, alors prisonnier
des mulsulmans. Le mouvement dégénéra très vite en règlement de comptes
avec les féodaux et quelques ordres mendiants comme les Franciscains et les
Dominicains.
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estime à Emmanuel de Rome2 qui est entré dans la littérature
italienne en transportant ensuite les rythmes, les genres et même
les structures poétiques de celle-ci dans la langue hébraïque.
L’année 1492 vit s’accroître le nombre des membres de la communauté avec l’arrivée des réfugiés d’Espagne, et l’attitude libérale de
la papauté leur assura un port d’attache et un refuge dans cette
ville.
Vers la moitié du siècle suivant, la situation devait radicalement
changer. En septembre 1553, des centaines d’exemplaires du
Talmud furent brûlés non loin d’ici, au Campo di Fiori, et ce
bûcher, qui n’était pas le premier, devait être allumé de nouveau
dans les siècles suivants.
Après l’accession de Paul IV, avec la bulle Cum nimis absurdum
du 14 juillet 1555, fut créé le ghetto de Rome, à l’endroit précis où
nous nous trouvons aujourd’hui. Les dispositions introduites alors,
durement restrictives, soit pour l’étude et le culte, soit pour les
activités quotidiennes normales, réduisirent les habitants du ghetto
à la misère économique et culturelle, en les privant de quelquesuns des droits les plus fondamentaux.
Limitations de toute sorte et privation de liberté furent donc le
sort réservé aux Juifs de Rome pendant plus de trois siècles. Il y a
seulement cent cinquante ans que cet ensemble de restrictions,
d’asservissement et d’humiliations cessa enfin, non sans quelques
soubresauts des plus tristes, telle que l’« affaire Mortara3 ».
2. Poète et commentateur, né à Rome en 1270 et mort en 1330. Il est l’auteur de
plusieurs prières et d’ouvrages poétiques et satiriques en hébreu, parmi
lesquels l’Enfer et le Paradis, écrit sous l’influence de Dante.
3. Au XIXe siècle vivait à Bologne, dans l’État pontifical, la famille juive Mortara
qui avait à son service une servante chrétienne. Celle-ci, voyant le jeune Edgar
sur le point de mourir, décida de le baptiser secrètement. L’enfant guérit et les
autorités ecclésiastiques décident de le soustraire à sa famille pour qu’il
reçoive une éducation chrétienne. Il est enlevé en 1858 et confié au Collège des
catéchumènes, tenu par les Chanoines de Saint-Jean-de-Latran. Les milieux
israélites dénoncent le « rapt du petit Mortara », interviennent auprès de Pie
IX et fondent en 1860 l’Alliance israélite pour la défense des droits civils et de
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Il fallut plus de soixante ans pour que la communauté de Rome
commence à se recréer une existence normale, digne de la position
qu’elle occupe dans la structure du judaïsme italien, aussi bien en
ce qui concerne le nombre que la tradition historique. Ce processus
fut durement interrompu par les événements qui précédèrent
immédiatement la Seconde Guerre mondiale, avec des persécutions bien plus terribles car elles avaient pour but d’anéantir le
judaïsme mondial tout entier.
Il ne nous revient pas, car nous sommes trop proches de cette
époque, de porter un jugement sur ce qui eut lieu alors à Rome. Ce
qui se produisait sur l’une des rives du Tibre ne pouvait être ignoré
au-delà du fleuve. Néanmoins, nombreux furent nos frères qui
trouvèrent aide et refuge, grâce à de courageuses initiatives, dans
les couvents et monastères qu’ils avaient appris à craindre pendant
tant de siècles. Et un nonce qui, une quinzaine d’années plus tard,
devait être appelé à la responsabilité du pontificat n’ignorait pas
quels crimes étaient en train de se commettre en ces jours-là au
cœur de notre continent.
Ce Pape, Jean XXIII, voulut voir se développer une spiritualité
adaptée au monde éprouvé qui, enfin, voyait s’éloigner les atroces
blessures de la guerre. Avec le Concile Vatican II, il voulut donner
à l’Église la possibilité de se livrer à une nouvelle méditation sur les
valeurs fondamentales. Nostra ætate, l’un des documents du
Concile, celui qui nous touche de plus près, introduit un rapport
différent entre la foi d’Israël et celle du monde qui l’entoure, en
nous rendant non seulement tout ce qui, pendant des siècles, nous
avait été nié, mais aussi la dignité, dont la reconnaissance avait
toujours été considérée par nous comme un droit. L’œuvre de ce
« Juste » a toujours eu notre estime et notre totale approbation ; et
cette œuvre a été excellemment poursuivie par ses successeurs. Il
faut que cette œuvre continue.
la liberté religieuse des Juifs. Le jeune Mortara devint le filleul du Pape et entra
chez les Chanoines de Saint-Jean-de-Latran. En 1870, il vient en France, à
l’abbaye de Beauchesne, dans le département des Deux-Sèvres puis il passe en
Belgique. Il est ensuite professeur de théologie à Rome et meurt en Belgique
en 1940.
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Les efforts des hommes de bonne volonté doivent en effet
tendre à la plus grande compréhension entre les nations, dans le
plein respect de leur diversité. C’est dans ce contexte que je crois
devoir émettre le souhait de voir tomber certaines réticences à
l’égard de l’État d’Israël. La terre d’Israël joue un rôle qui, du point
de vue affectif et spirituel, est central dans le cœur de chaque Juif
et un changement d’attitude à son endroit serait agréable non
seulement à ceux qui sont ici présents, mais au judaïsme mondial
tout entier, et apporterait, à mon avis, une contribution effective à
la pacification d’une zone du monde qui présente aujourd’hui des
embûches et des dangers pour l’Occident tout entier. Ce serait là un
pas de plus dans le « dialogue fraternel » dont parle Nostra ætate. Je
n’hésite pas à croire que cela se réalisera. Votre visite d’aujourd’hui,
Sainteté, que vous avez regardée comme opportune, nécessaire,
dirai-je, est un vivant témoignage de l’esprit du Concile : elle nous
remplit tous de joie en tant que signe prémonitoire de temps
meilleurs, de ces temps où tous ceux qui croient au Dieu unique —
béni soit son Nom — pourront, unis, contribuer à la création d’un
monde meilleur.
Discours du Grand Rabbin Elio Toaff
Sainteté,
En tant que Grand Rabbin de cette communauté, dont l’histoire
se compte désormais en millénaires, je voudrais vous exprimer
notre satisfaction devant le geste que vous avez voulu et que vous
réalisez aujourd’hui, celui de venir pour la première fois dans l’histoire de l’Église visiter une synagogue, geste destiné à passer dans
l’histoire. Un tel geste se rattache à l’enseignement éclairé de votre
illustre prédécesseur, Jean XXIII, le premier Pape qui, un matin de
sabbat, s’arrêta pour bénir les Juifs de Rome sortant de ce lieu de
culte après la prière, et s’inscrit dans le sillage du Concile Vatican
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II qui, avec la Déclaration Nostra ætate, a introduit dans les rapports
de l’Église avec le judaïsme une révolution qui a rendu possible
votre visite aujourd’hui. Nous nous trouvons donc en face d’un
véritable tournant de la politique de l’Église qui, désormais,
regarde les Juifs avec des sentiments d’estime et d’appréciation, en
abandonnant cet enseignement du mépris dont Jules Isaac — que
son nom soit ici rappelé en bénédiction —, rappela au Pape Jean le
caractère inadmissible4.
Ma pensée — en ce moment historique que nous sommes en
train de vivre — se tourne avec admiration, reconnaissance et
tristesse vers le nombre infini des martyrs juifs qui affrontèrent
sereinement la mort pour la sanctification du Nom de Dieu. C’est
grâce à leurs mérites que notre foi n’a jamais vacillé et que la
fidélité au Seigneur et à sa Loi n’a pas sombré tout au long des
siècles. Oui, c’est grâce à leurs mérites que le peuple juif vit encore,
unique entre tous les peuples de l’antiquité.
Nous ne pouvons donc oublier, mais nous voulons aujourd’hui
amorcer avec confiance et espoir cette nouvelle période historique,
qui s’annonce féconde, d’œuvres communes réalisées enfin sur un
plan de parité, d’égalité et d’estime réciproque, dans l’intérêt de
l’humanité tout entière. Nous nous proposons de répandre l’idée
du monothéisme spirituel et moral d’Israël afin de rassembler les
hommes et l’univers dans l’amour, dans la puissance et dans la
justice de Dieu, qui est le Dieu de tous, et de porter la lumière à
l’esprit et au cœur des hommes pour faire fleurir dans le monde
l’ordre, la morale, le bien, l’harmonie et la paix. En même temps,
nous réaffirmons la paternité universelle de Dieu sur tous les
hommes, en nous inspirant des prophètes qui l’ont enseignée
comme un amour filial réunissant tous les êtres vivants dans le sein
maternel de l’infini, comme dans leur matrice naturelle. C’est donc
l’homme qui doit être pris en considération. L’homme qui a été créé
par Dieu à son image et à sa ressemblance dans le but de lui
conférer une dignité et une noblesse qui ne peuvent se maintenir
que dans la mesure où il accepte de suivre l’enseignement du Père.
4. Documentation catholique (DC) 1968, n° 1528, col. 2015-2016.
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Il est écrit dans le Deutéronome : « Vous êtes les enfants du
Seigneur votre Dieu » pour indiquer le rapport qui doit unir les
hommes à leur Créateur, un rapport de père à fils, d’amour et de
bienveillante indulgence, mais aussi un rapport de cette fraternité
qui doit régner entre tous les êtres humains. Si ce rapport existait
vraiment, nous ne devrions pas aujourd’hui lutter contre ce terrorisme et ces violences aberrantes, qui fauchent tant de victimes
innocentes, hommes, femmes, vieillards et enfants, comme cela
s’est produit récemment devant cette synagogue5.
Notre tâche commune dans la société devrait donc consister à
nous efforcer d’enseigner à nos semblables le devoir du respect de
l’homme pour l’homme, en démontrant l’iniquité des maux qui
affligent le monde comme le terrorisme, cette exaltation de la
violence aveugle et inhumaine qui frappe des gens sans défense,
parmi lesquels les juifs de tous les pays, uniquement parce qu’ils
sont juifs ; comme l’antisémitisme et le racisme, que nous pensions
vaincus à jamais après le dernier conflit.
La condamnation que le Concile a prononcée contre toute forme
d’antisémitisme devrait être strictement appliquée, comme aussi la
condamnation de toute violence, afin d’éviter que l’humanité tout
entière ne s’embourbe dans la corruption, l’immoralité et
l’injustice.
L’invitation du Lévitique, où le Seigneur affirme : « Je suis le
Seigneur votre Dieu ; sanctifiez-vous, soyez saints parce que je suis
le Seigneur votre Dieu ; sanctifiez-vous, soyez saints parce que je
suis saint » veut être une exhortation à imiter dans notre vie la
Sainteté du Seigneur.
5. Allusion à l’attentat contre la synagogue de Rome le 9 octobre 1982. Voir à ce
sujet la réaction du Pape à l’Angélus du 10 octobre et la visite aux victimes
d’évêques et de prêtres polonais anciens déportés, présents à Rome pour la
canonisation du P. Kolbe (DC 1982, n° 1840, p. 1019). Voir aussi l’échange de
messages entre Mgr Vilnet et le grand rabbin Sirat (ibid., p. 1080).
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Ainsi l’image de Dieu qui est en puissance dans l’homme depuis
sa première création devient image de Dieu en acte. Le « Kedoshim
Tiiyu » (Soyez saints) est l’imitation par les hommes de ce que l’on
appelle les « Voies du Seigneur ». C’est ainsi que les hommes, en
cherchant à soumettre à l’esprit toutes leurs actions, font prévaloir
l’esprit sur la matière. La récompense pour une telle conduite est
grande, et déjà le Seigneur l’a annoncée à Abraham en le faisant
sortir pour regarder le ciel par une nuit étoilée : « Je suis le Seigneur
qui t’a fait sortir d’Ur des Chaldéens pour te donner cette terre en
possession. » La possession de la Terre promise est obtenue parce
qu’il a suivi les voies du Seigneur, et la fin des jours adviendra
lorsque le peuple y sera retourné. Ce retour est en train de se
réaliser : les rescapés des camps d’extermination nazis ont trouvé
sur la terre d’Israël un refuge et une vie nouvelle dans la liberté et
la dignité reconquise. Pour cette raison, leur retour a été appelé par
nos Maîtres « le début de la venue de la rédemption finale »,
« Reshit tzemihat geoulatenou ».
Le retour du peuple juif dans sa terre doit être reconnu comme
un bien et une conquête auxquels le monde ne peut renoncer parce
que, selon l’enseignement des prophètes, c’est le prélude à cette
époque de fraternité universelle à laquelle nous aspirons tous et à
cette paix rédemptrice qui trouve dans la Bible sa promesse
assurée. La reconnaissance envers Israël pour une telle fonction
irremplaçable dans le plan de la rédemption finale que Dieu nous
a promise ne saurait être niée.
Nous pourrons ainsi lutter ensemble pour affirmer le droit de
l’homme à une liberté complète qui ne trouve sa propre frontière
infranchissable que lorsqu’elle empiète sur la liberté d’autrui ou la
limite. L’homme naît et est naturellement libre, et donc tous les
hommes, à quelque peuple qu’ils appartiennent, doivent être
également libres parce que tous ont la même dignité et participent
aux mêmes droits. Il n’existe pas d’hommes qui puissent se considérer comme supérieurs, alors que d’autres sont inférieurs, car en
tous il y a cette étincelle divine qui les rend égaux.
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Hélas, il y a de nos jours encore des pays dans le monde où la
limitation de la liberté, la discrimination et la marginalisation sont
pratiquées sans aucune retenue. Je pense en particulier aux noirs
en Afrique du Sud et, en ce qui concerne la liberté religieuse, aux
juifs et aux catholiques en Union soviétique. Notre commune
mission devrait être de proclamer cette liberté fondamentale de
l’homme découlant des droits humains inaliénables comme le droit
à la vie, à la liberté de pensée, de conscience, de religion.
Le droit à la vie doit être compris non seulement comme un
droit d’exister, mais aussi comme un droit de voir garantie sa
propre vie, à partir de sa naissance, de voir assurée sa propre
existence contre toute menace, contre toute violence ; il signifie la
garantie des moyens de subsistance à travers une distribution plus
égale de la richesse afin que dans le monde plus personne ne
meure de faim. Il signifie le droit de chacun de voir sauvegardés
son propre honneur, sa propre renommée contre la calomnie et le
préjugé, y compris de caractère religieux ; la condamnation de
toute atteinte à sa propre dignité, considérée par le judaïsme
comme l’équivalent de l’effusion de sang. Il signifie combattre le
mensonge en raison des conséquences désastreuses qu’il peut
occasionner à la société, et aussi la haine qui suscite la violence et
qui est considérée par le judaïsme comme une haine envers le
Seigneur dont l’homme est l’image.
La liberté de pensée comprend aussi la liberté de conscience et
la liberté religieuse. Nous devrons lutter de toutes nos forces pour
empêcher qu’un homme puisse être aujourd’hui encore persécuté
et condamné pour les idées qu’il professe et pour ses convictions
religieuses. Le concept de liberté est, comme on le voit, complexe et
si l’une de ses composantes est supprimée, il est inévitable que tôt
ou tard la liberté dans son ensemble finira par sombrer, car c’est
une unité qui possède une valeur absolue et indivisible. C’est un
idéal en soi et pour soi, l’un des objets de ce régime de justice
universelle proclamé dans la Bible, pour lequel les hommes et les
peuples ont le droit inaliénable d’être maîtres d’eux-mêmes.
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Sainteté, en ce moment si important dans l’histoire des rapports
entre nos deux religions, pendant que le cœur s’ouvre à l’espérance, Dieu fasse que les malheurs du passé soient remplacés par
un fructueux dialogue qui, dans le respect des diversités existantes,
nous donne la possibilité d’une action concordante, d’une coopération sincère et honnête, afin d’atteindre ces objectifs universels
qui sont dans nos communes racines. Permettez-moi de conclure
mes réflexions avec les paroles du prophète Isaïe : « Je veux me
réjouir pleinement en l’Éternel, que mon âme se délecte en mon Dieu car
il m’a revêtu de la livrée du salut, enveloppé du manteau de la victoire :
tel un fiancé orne sa tête d’un diadème, telle une jeune épouse se pare de
ses joyaux. Car de même que le sol développe ses plantes, de même qu’un
jardin fait germer les graines qui lui sont confiées, ainsi Dieu l’Éternel
fera éclore le salut et la gloire à la vue de toutes les nations » (61,1-11).
Allocution de Jean-Paul II
Monsieur le Grand Rabbin de la communauté israélite de Rome,
Madame la Présidente de l’union des communautés israélites
Italiennes,
Monsieur le Président des communautés de Rome,
Messieurs les Rabbins,
Chers amis et frères juifs et chrétiens qui prenez part à cette
célébration historique :
1. Je voudrais avant toute chose, avec vous, remercier et louer le
Seigneur qui a « planté les cieux et fondé la terre » (cf. Is 51,16) et
qui a choisi Abraham pour en faire le père d’une multitude de fils,
nombreuse « comme les étoiles dans le ciel » et « comme le sable
qui est sur le rivage de la mer ». (Gn 22,17 ; cf. 15,5), parce qu’il a
voulu, dans le mystère de sa Providence, que, ce soir, se rencontrent en ce « Grand Temple » qui est le vôtre la communauté juive
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qui vit dans cette ville depuis le temps des anciens Romains et
l’Évêque de Rome et Pasteur universel de l’Église catholique. Je
ressens ensuite le devoir de remercier M. le Grand Rabbin, le
professeur Elio Toaff, qui a accueilli avec joie, dès le premier
moment, le projet de cette visite et qui me reçoit maintenant avec
une grande ouverture de cœur et un vif sens de l’hospitalité ; et,
avec lui, je remercie tous ceux qui, dans la communauté juive
romaine, ont rendu possible cette rencontre et se sont, de tant de
manières, efforcés de faire qu’elle soit en même temps une réalité
et un symbole. Merci, donc, à vous tous.
Toda rabba (merci beaucoup).
Dans le sillage des Papes précédents
2. À la lumière de la Parole de Dieu qui a été proclamée et qui
« vit éternellement » (cf. Is 30,8), je voudrais que nous réfléchissions ensemble, en présence du Saint, béni soit-il ! (comme on le dit
dans votre liturgie), sur le fait et sur la signification de cette
rencontre entre l’Évêque de Rome, le Pape, et la communauté juive
qui habite et travaille en cette ville, qui vous est et qui m’est si
chère. Voici déjà quelque temps que je pensais à cette visite. En
vérité, le Grand Rabbin a eu la gentillesse de venir me rencontrer,
en février 1981, quand je me suis rendu en visite pastorale à la
paroisse voisine de San Carlo ai Catinari. En outre, certains d’entre
vous sont venus plus d’une fois au Vatican, soit à l’occasion des
nombreuses audiences que j’ai pu avoir avec des représentants du
judaïsme italien et mondial, soit encore avant, du temps de mes
prédécesseurs Paul VI, Jean XXIII et Pie XII. Je sais également que
le Grand Rabbin, dans la nuit qui a précédé la mort du Pape Jean
XXIII, n’a pas hésité à aller place Saint-Pierre, accompagné d’un
groupe de fidèles juifs, pour prier et veiller, mêlé à la foule des
catholiques et des autres chrétiens, comme pour rendre témoignage, de manière silencieuse mais efficace, à la grandeur d’âme de
ce Pontife, ouvert à tous sans distinction, et en particulier aux
frères juifs. L’héritage que je voudrais recueillir en ce moment est
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précisément celui du Pape Jean qui, une fois, passant par ici —
comme vient de le rappeler le Grand Rabbin — fit arrêter sa voiture
pour bénir la foule des juifs qui sortaient de ce même Temple. Et je
voudrais en recueillir l’héritage en ce moment, non plus en me
trouvant à l’extérieur mais bien, grâce à votre généreuse hospitalité, à l’intérieur de la Synagogue de Rome.
L’horreur du génocide
3. Cette rencontre conclut, d’une certaine manière, après le
pontificat de Jean XXIII et le Concile Vatican II, une longue période
sur laquelle il ne faut pas cesser de réfléchir pour en tirer les enseignements opportuns. Certes, on ne peut pas, et on ne doit pas,
oublier que les circonstances historiques du passé furent bien différentes de celles qui ont fini par mûrir difficilement au cours des
siècles. Nous sommes parvenus avec de grandes difficultés à la
commune acceptation d’une légitime pluralité sur le plan social,
civil et religieux. La prise en considération des conditionnements
culturels séculaires ne doit pas toutefois empêcher de reconnaître
que les actes de discrimination, de limitation injustifiée de la liberté
civile, à l’égard des juifs, ont été objectivement des manifestations
gravement déplorables. Oui, encore une fois, par mon intermédiaire, l’Église, avec les paroles du Décret bien connu Nostra ætate
(n° 4) « déplore les haines, les persécutions et toutes les manifestations d’antisémitisme qui, quels que soient leur époque et leurs
auteurs, ont été dirigées contre les juifs » ; je répète : « quels que
soient leurs auteurs ». Je voudrais encore une fois exprimer mon
horreur pour le génocide décrété au cours de la dernière guerre
contre le peuple juif, qui a mené à l’holocauste de millions de
victimes innocentes. En visitant le 7 juin 1979 le camp de concentration d’Auschwitz et en me recueillant dans la prière pour les si
nombreuses victimes de diverses nations, je me suis arrêté en particulier devant la pierre qui porte l’inscription en langue hébraïque,
manifestant ainsi les sentiments de mon esprit : « Cette inscription
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nous fait nous souvenir du Peuple dont les fils et les filles étaient
destinés à l’extermination totale. Ce Peuple tire son origine
d’Abraham, qui est le père de notre foi, comme l’a dit Paul de
Tarse. Et c’est précisément ce Peuple qui a reçu de Dieu le commandement « Tu ne tueras pas », qui a éprouvé en lui-même d’une
manière particulière ce que veut dire tuer. Devant cette pierre, il
n’est permis à personne de passer avec indifférence » (Insegnamenti
1979, p. 1484)6. La communauté juive de Rome a payé elle aussi un
lourd tribut de sang. Et ce fut certainement un geste significatif
que, dans les années sombres de la persécution raciale, les portes
de nos couvents, de nos églises, du séminaire romain, d’édifices du
Saint-Siège et même de la Cité du Vatican, se soient ouvertes toutes
grandes pour offrir refuge et salut à tant de juifs de Rome, traqués
par les persécuteurs.
Trois points essentiels de « Nostra ætate »
4. Ma visite aujourd’hui veut être une contribution décisive à la
consolidation des bons rapports entre nos deux communautés,
dans le sillage des exemples offerts par tant d’hommes et de
femmes qui se sont efforcés et s’efforcent encore, d’un côté comme
de l’autre, de faire en sorte que soient surmontés les vieux préjugés
et que l’on fasse place à la reconnaissance toujours plus profonde
de ce « lien » et de ce « patrimoine commun » qui existent entre
juifs et chrétiens.
C’est déjà le souhait qu’exprimait le paragraphe 4, que je viens
de rappeler, de la Déclaration conciliaire Nostra ætate sur les
rapports entre l’Église et les religions non-chrétiennes. Avec ce bref
mais lapidaire paragraphe, c’est un tournant décisif qui s’est
produit dans les rapports entre l’Église catholique et le judaïsme, et
tous les juifs pris individuellement. Nous sommes tous conscients
que, parmi les multiples richesses de ce numéro 4 de Nostra ætate,
6. DC 1979, n° 1767, p. 632.
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t rois points sont spécialement significatifs. Je voudrais les
souligner ici, devant vous, en cette circonstance vraiment unique.
Le premier est que l’Église du Christ découvre son « lien » avec
le judaïsme « en scrutant son propre mystère » (cf. Nostra ætate,
ibid.). La religion juive ne nous est pas « extrinsèque » mais, d’une
certaine manière, elle est « intrinsèque » à notre religion. Nous
avons donc envers elle des rapports que nous n’avons avec aucune
autre religion. Vous êtes nos frères préférés et, d’une certaine
manière, on pourrait dire nos frères aînés.
Le second point relevé par le Concile est que, aux juifs en tant
que Peuple, on ne peut imputer aucune faute ancestrale ou
collective pour « ce qui a été accompli durant la Passion de Jésus »
(cf. Nostra ætate, ibid.). Ni indistinctement aux juifs de ce temps-là,
ni à ceux qui sont venus ensuite, ni à ceux de maintenant. Est donc
dépourvue de tout fondement toute prétendue justification théologique de mesures discriminatoires, ou pire encore, de persécution.
Le Seigneur jugera chacun « selon ses œuvres », les juifs comme les
chrétiens (cf. Rm 2,6).
Le troisième point que je voudrais souligner dans la Déclaration
conciliaire est la conséquence du second : il n’est pas permis de
dire, malgré la conscience que l’Église a de son identité propre, que
les juifs sont « réprouvés ou maudits » comme si cela était enseigné
ou pouvait être déduit des Écritures saintes (cf. Nostra ætate, ibid.)
de l’Ancien ou du Nouveau Testament. Et au contraire, dans ce
même passage de Nostra ætate mais aussi dans la Constitution
dogmatique Lumen gentium (n° 6), le Concile avait déjà dit, en citant
saint Paul dans la L e t t re aux Romains (11,28) que les juifs
« demeurent très chers à Dieu » qui les a appelés d’une « vocation
irrévocable ».
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Les rapports entre juifs et catholiques
5. C’est sur ces convictions que s’appuient nos rapports actuels.
À l’occasion de cette visite en votre Synagogue, je veux les
réaffirmer et proclamer leur valeur permanente. Car telle est bien
la signification que l’on doit attribuer à ma visite parmi vous, juifs
de Rome. Ce n’est certes pas parce que les différences entre nous
sont désormais dépassées que je suis venu chez vous. Nous savons
bien qu’il n’en est pas ainsi. Avant tout, chacune de nos religions,
dans la pleine conscience des nombreux liens qui l’unissent à
l’autre, et en premier lieu de ce « lien » dont parle le Concile, veut
être reconnue et respectée dans son identité propre, au-delà de tout
syncrétisme et de toute appropriation équivoque. En outre, il faut
dire que la route que nous avons commencée n’est encore qu’à ses
débuts et que donc il faudra encore pas mal de temps, malgré les
grands efforts déjà faits d’un côté et de l’autre, pour supprimer
toute forme, même inconsciente, de préjugé pour nous exprimer de
manière adéquate et donc pour présenter, toujours et partout, à
nous-mêmes et aux autres, le vrai visage des juifs et du judaïsme,
comme aussi des chrétiens et du christianisme, et ceci à tout niveau
de mentalité, d’enseignement et de communication. À cet égard, je
voudrais rappeler à mes frères et mes sœurs de l’Église catholique,
de Rome aussi, le fait que les instruments d’application du Concile
en ce domaine précis sont déjà à la disposition de tous, dans les
deux documents publiés respectivement en 19747 et en 19858 par la
Commission du Saint-Siège pour les rapports religieux avec le
judaïsme. Il s’agit seulement de les étudier avec attention, de
s’identifier avec leur enseignement et de les mettre en pratique.
P e u t - ê t re reste-t-il encore entre nous des difficultés d’ord re
politique qui attendent d’être surmontées sur le plan des relations
fraternelles : elles sont le fruit soit de siècles d’incompréhension
mutuelle, soit également de positions différentes et d’attitudes où
l’on ne peut pas facilement composer dans des matières complexes
et importantes. Il n’échappe à personne que la divergence fonda7. DC 1975, n° 1668, p. 59-61.
8. DC 1985, n° 1900, p. 733-738.
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mentale depuis les origines est notre adhésion, à nous chrétiens, à
la personne et à l’enseignement de Jésus de Nazareth, fils de votre
Peuple, dont sont issus aussi la Vi e rge Marie, les apôtre s ,
« fondement et colonnes de l’Église » et la majorité des membres de
la première communauté chrétienne. Mais cette adhésion se pose
dans l’ordre de la foi, c’est-à-dire dans l’assentiment libre de l’intelligence et du cœur guidés par l’Esprit, et ne peut jamais être l’objet
d’une pression extérieure, dans un sens ou dans un autre ; c’est le
motif pour lequel nous sommes disposés à approfondir le dialogue
dans la loyauté et l’amitié, dans le respect des convictions intimes
des uns et des autres, en prenant comme base fondamentale les
éléments de la Révélation que nous avons en commun, comme
« un grand patrimoine spirituel » (cf. Nostra ætate, n° 4).
Les domaines de collaboration au service de la société
6. Il faut dire, ensuite, que les voies ouvertes à notre collaboration, à la lumière de l’héritage commun tiré de la Loi et des
prophètes, sont diverses et importantes. Nous voulons rappeler
avant tout une collaboration en faveur de l’homme, de sa vie
depuis sa conception jusqu’à sa mort naturelle, de sa dignité, de sa
liberté, de ses droits, de son développement dans une société non
pas hostile mais amicale et favorable, où règne la justice et où, dans
cette nation, dans les divers continents et dans le monde, ce soit la
paix qui règne, ce shalom souhaité par les législateurs, par les
prophètes et par les Sages d’Israël. Il y a, plus généralement, le
problème moral, le grand domaine de l’éthique individuelle et
sociale. Nous sommes tous conscients de l’acuité de la crise sur ce
point à l’époque où nous vivons. Dans une société souvent égarée
dans l’agnosticisme et dans l’individualisme, et qui souffre des
amères conséquences de l’égoïsme et de la violence, juifs et
chrétiens sont les dépositaires et les témoins d’une éthique
marquée par les dix commandements, dans l’observance desquels
l’homme trouve sa vérité et sa liberté. Promouvoir une réflexion
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commune et une collaboration sur ce point est un des grands
devoirs de l’homme. Et, finalement, je voudrais tourner ma pensée
vers cette ville où vivent ensemble la communauté des catholiques
avec son évêque, la communauté des juifs avec ses autorités et son
grand Rabbin. Que notre « vivre ensemble » ne soit pas seulement
une coexistence, presque une juxtaposition, ponctuée de rencontres
limitées et occasionnelles, mais qu’il soit animé par l’amour
fraternel.
7. Les problèmes de Rome sont si nombreux ! Vous le savez bien.
Chacun de nous, à la lumière de cet héritage béni auquel j’ai fait
allusion auparavant, sait qu’il est tenu de collaborer, au moins en
une certaine mesure, à leur solution. Cherchons, autant que
possible, à le faire ensemble. De ma visite, et de la concorde et de
la sérénité auxquelles nous sommes arrivés, que naisse, comme le
fleuve qu’Ézéchiel a vu sortir de la porte orientale du Temple de
Jérusalem, une source fraîche et bienfaisante qui aide à guérir les
plaies dont souffre Rome.
En faisant cela, je me permets de le dire, nous serons fidèles à
nos engagements respectifs les plus sacrés mais aussi à ce qui nous
unit et nous rassemble le plus profondément : la foi en un seul Dieu
qui « aime l’étranger » et « rend justice à l’orphelin et à la veuve »
(cf. Dt 10,18), nous efforçant nous aussi de les aimer et de les
secourir (cf. ibid et Lv 19,18-34). Les chrétiens ont appris cette
volonté du Seigneur de la Torah, que vous vénérez ici, et de Jésus
qui a porté jusqu’à ses extrêmes conséquences l’amour demandé
par la Torah.
8. Il ne me reste plus maintenant, comme au commencement de
mon allocution, qu’à tourner mes yeux et mon cœur vers le
Seigneur, pour le remercier et le louer de cette heureuse rencontre,
et pour les biens qui en découlent déjà, pour notre fraternité
retrouvée et pour l’entente nouvelle et plus profonde entre nous, ici
à Rome, et partout entre l’Église et le judaïsme, en tout pays, pour
le bénéfice de tous.
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Aussi, je voudrais dire avec le Psalmiste, dans sa langue originelle qui est aussi celle dont vous êtes les héritiers : « Hodu la
Adonai ki tob, ki le olam hasdo, yomar-na Yisrael, ki le olam hasdo,
y o m e ru-na yir’è Adonai, ki le olam hasdo. » (Ps 118,1-2.4)
« Célébrez le Seigneur, parce qu’il est bon, parce qu’éternelle est sa
miséricorde. Que le dise Israël : il est bon, éternelle est sa miséricorde. Que le dise qui craint Dieu : éternelle est sa miséricorde.
Amen. »
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Le discours que nous publions ici dans son intégralité est d’une grande importance pour saisir les enjeux les plus profonds de l’événement d’Assise. S’adressant
aux Cardinaux et aux membres de la Curie romaine, Jean-Paul II propose une
lecture théologique de l’acte par lequel l’Église catholique a invité et accueilli des
membres d’autres confessions chrétiennes et surtout d’autres religions du monde,
pour une journée de prière, de pèlerinage et de jeûne pour la paix.
On ne saisira bien la portée de ce discours qu’en le situant par rapport aux grands
documents qui le précèdent, concernant le dialogue interreligieux ; la déclaration
conciliaire « Nostra ætate » (1965) et le texte du Secrétariat pour les non-chrétiens,
« Dialogue et mission » (1984).
DISCOURS DU PAPE JEAN-PAUL II AUX CARDINAUX
ET À LA CURIE ROMAINE LE 22 DÉCEMBRE 1986*
C’est avec une joie particulière que je vous salue en cette
re n c o n t re traditionnelle qui nous voit réunis pour échanger
mutuellement les vœux de Noël et du Nouvel An. Je remercie le
nouveau Cardinal doyen du Sacré-Collège pour les nobles paroles
par lesquelles il a interprété les sentiments que suggère ce moment
d’intimité familière.
En ces jours qui précèdent immédiatement la grande fête de
Noël, au cours de laquelle nous célébrons et commémorons
ensemble le Verbe de Dieu, vie et lumière des hommes (cf. Jn 1,4),
qui pour nous « s’est fait chair et est venu habiter parmi nous »
(Jn 1,14), mon esprit revit spontanément avec vous, vénérables et
chers frères de la Curie Romaine, ce qui semble avoir été l’événement religieux le plus suivi dans le monde en cette année qui est
en train de s’achever : la Journée mondiale de prière pour la paix à
Assise, le 27 octobre dernier.
*
Texte dans l’Osservatore Romano du 30 décembre 1986 et dans la Documentation
Catholique n° 1933, 1/2/1987, p. 133-136.
CdD 20 - IX 2002 - p. 163-173
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En cette Journée, en effet, et dans la prière qui en était le motif et
l’unique contenu, semblait s’exprimer pour un instant, même de
manière visible, l’unité cachée mais radicale que le Verbe divin,
« dans lequel tout a été créé et dans lequel tout subsiste » (Col 1,16 ;
Jn 1,3), a établie entre les hommes et les femmes de ce monde, ceux
qui maintenant partagent ensemble les angoisses et les joies de
cette fin du XXe siècle, mais aussi ceux qui nous ont précédés et
ceux qui pre n d ront notre place « jusqu’à ce que vienne le
Seigneur » (cf. 1Co 11,26). Le fait d’être réunis à Assise pour prier,
jeûner et cheminer en silence, et cela pour la paix toujours fragile et
toujours menacée, peut-être aujourd’hui plus que jamais, a été
comme un signe clair de l’unité profonde de ceux qui cherchent
dans la religion des valeurs spirituelles et transcendantes en
réponse aux grandes interrogations du cœur humain, malgré les
divisions concrètes (cf. Nostra ætate, 1).
Cet événement me paraît d’une si grande portée qu’il nous
invite par lui-même à une réflexion pour en éclairer toujours mieux
la signification à la lumière de la commémoration désormais
imminente de l’Incarnation du Fils éternel de Dieu.
Il est en effet évident que nous ne pouvons nous contenter du
fait lui-même et de la réussite de sa réalisation. Certes, la Journée
d’Assise encourage tous ceux dont la vie personnelle et communautaire est guidée par une conviction de foi à en tirer les conséquences sur le plan d’une conception approfondie de la paix et,
d’une nouvelle manière, à s’engager pour elle. Mais en outre et
peut-être principalement, cette Journée nous invite à une « lecture »
de ce qui est arrivé à Assise et de son intime signification, à la
lumière de notre foi chrétienne et catholique. La clé appropriée de
lecture pour un si grand événement jaillit en effet de l’enseignement du Concile Vatican II qui associe de manière admirable la
fidélité rigoureuse à la révélation biblique et à la tradition de
l’Église avec la conscience des besoins et des inquiétudes de notre
temps, exprimés dans tant de « signes éloquents » (cf. Gaudium et
spes, 4 s.).
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Discours aux Cardinaux et à la Curie romaine
Plus d’une fois, le Concile a mis en relation l’identité même et
la mission de l’Église avec l’unité du genre humain, spécialement
lorsqu’il a voulu définir l’Église « comme sacrement, c’est-à-dire
comme signe et instrument de l’union intime avec Dieu et de
l’unité de tout le genre humain » (Lumen gentium 1, 9 ; cf. Gaudium
et spes, 42).
Cette unité radicale qui appartient à l’identité même de l’être
humain se fonde sur le mystère de la création divine. Le Dieu un
dans lequel nous croyons, Père, Fils et Saint-Esprit, Trinité très
sainte, a créé l’homme et la femme avec une attention particulière,
selon le récit de la Genèse (cf. Gn 1,26 s. ; 2,7.18-24). Cette affirmation contient et communique une profonde vérité : l’unité de
l’origine divine de toute la famille humaine, de tout homme et de
toute femme, qui se reflète dans l’unité de l’image divine que
chacun porte en lui (cf. Gn 1,26) et oriente par elle-même à une fin
commune (cf. Nostra ætate, 1). « Tu nous as faits pour toi, Seigneur,
s’exclame saint Augustin dans la plénitude de sa maturité de
penseur, et notre cœur est inquiet tant qu’il ne repose pas en toi »
(Conf. 1). La constitution dogmatique Dei verbum déclare que
« Dieu, qui crée et conserve toutes choses par son Verbe, offre aux
hommes dans les choses créées un témoignage incessant sur luimême… et il a pris un soin constant du genre humain pour donner
la vie éternelle à tous ceux qui, par la fidélité dans le bien, recherchaient le salut » (Dei verbum, 3).
C’est pourquoi il n’y a qu’un seul dessein divin pour tout être
humain qui vient en ce monde (cf. Jn 1,9), un principe et une fin
uniques, quels que soient la couleur de sa peau, l’horizon historique et géographique dans lequel il vit et agit, la culture dans
laquelle il a grandi et dans laquelle il s’exprime. Les différences
sont un élément moins important par rapport à l’unité qui, au
contraire, est radicale, fondamentale et déterminante.
Le dessein divin, unique et définitif, a son centre en Jésus
Christ, Dieu et homme « dans lequel les hommes trouvent la
plénitude de la vie religieuse et en qui Dieu s’est réconcilié toutes
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Chemins de Dialogue
choses » (Nostra ætate, 2). Comme il n’y a pas d’homme ou de
femme qui ne portent en eux le signe de leur origine divine, de
même il n’y a personne qui ne puisse demeurer en dehors et en
marge de l’œuvre de Jésus Christ, « mort pour tous », et donc
« sauveur du monde » (cf. Jn 4,42). « Nous devons en effet retenir
que l’Esprit Saint donne à tous, d’une façon que Dieu connaît, la
possibilité d’être associés au mystère pascal » (Gaudium et spes, 22).
Comme on le lit dans la première Épître à Timothée, Dieu « veut
que tous les hommes soient sauvés et arrivent à la connaissance de
la vérité. Car Dieu est unique, unique aussi est le médiateur entre
Dieu et les hommes » (2,4-6).
Ce mystère éclairant de l’unité du genre humain dans sa
création et de l’unité de l’œuvre salvifique du Christ qui porte avec
lui la naissance de l’Église, comme ministre et instrument, s’est
manifesté clairement à Assise, malgré les différences des professions religieuses, en rien cachées ou atténuées.
À la lumière de ce mystère, les différences de tout genre, et en
premier lieu les différences religieuses, dans la mesure où elles sont
réductrices du dessein de Dieu, se révèlent en effet comme appartenant à un autre ordre. Si l’ordre de l’unité est celui qui remonte à
la création et à la rédemption et s’il est donc, en ce sens, « divin »,
ces différences et ces divergences, même religieuses, remontent
plutôt à un « fait humain » et doivent être dépassées dans le
progrès vers la réalisation du grandiose dessein d’unité qui préside
à la création. Il y a certes des différences dans lesquelles se reflètent
le génie et les « richesses » spirituelles donnés par Dieu aux nations
(cf. Ad gentes, 11). Ce n’est pas à elles que je me réfère. J’entends ici
faire allusion aux différences dans lesquelles se manifestent les
limites, les évolutions et les chutes de l’esprit humain tenté par
l’esprit du mal dans l’histoire (Lumen gentium, 16).
Les hommes peuvent souvent ne pas être conscients de leur
unité radicale d’origine, de destin et d’insertion dans le plan même
de Dieu et, lorsqu’ils professent des religions diff é rentes et
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Discours aux Cardinaux et à la Curie romaine
incompatibles entre elles, ils peuvent même ressentir leurs
divisions comme insurmontables. Mais, malgré cela, ils sont inclus
dans le grand et unique dessein de Dieu, en Jésus Christ qui « s’est
uni d’une certaine manière à tous les hommes » (Gaudium et spes,
22), même si ceux-ci n’en sont pas conscients.
Dans ce grand dessein de Dieu sur l’humanité, l’Église trouve
son identité et sa tâche de « sacrement universel de salut » en
étant précisément « signe et instrument de l’union intime avec
Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (Lumen gentium, 1).
Cela signifie que l’Église est appelée à travailler de toutes ses forces
(l’évangélisation, la prière, le dialogue) pour que disparaissent
entre les hommes les fractures et les divisions qui les éloignent de
leur principe et fin et qui les rendent hostiles les uns aux autres.
Cela signifie aussi que le genre humain tout entier, dans l’infinie
complexité de son histoire, avec ses cultures différentes, est
« appelé à former le nouveau Peuple de Dieu » (Lumen gentium, 13)
dans lequel se guérit, se consolident et s’élèvent l’union bénie de
Dieu avec l’homme et l’unité de la famille humaine : « Tous les
hommes sont donc appelés à cette unité catholique du Peuple de
Dieu qui préfigure et promeut la paix universelle et à laquelle
appartiennent sous diverses formes ou sont ordonnés et les fidèles
catholiques et ceux qui, par ailleurs, ont foi dans le Christ, et
finalement tous les hommes sans exception que la grâce de Dieu
appelle au salut » (ibid.).
L’unité universelle fondée sur l’événement de la création et de la
rédemption ne peut pas ne pas laisser une trace dans la vie réelle
des hommes, même de ceux qui appartiennent à des religions différentes. C’est pourquoi le Concile a invité l’Église à respecter les
semences du Verbe présentes dans ces religions (Ad gentes, 11) et il
affirme que tous ceux qui n’ont pas encore reçu l’Évangile sont
« ordonnés » à l’unité suprême de l’unique Peuple de Dieu à
laquelle appartiennent déjà par la grâce de Dieu et par le don de la
foi et du baptême tous les chrétiens avec qui les catholiques « qui
conservent l’unité de la communion sous le Successeur de Pierre »,
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Chemins de Dialogue
savent qu’ils « sont unis pour de multiples raisons » (cf. Lumen
gentium, 15).
C’est précisément la valeur réelle et objective de cette
« ordination » à l’unité de l’unique Peuple de Dieu, souvent
cachée à nos yeux, qui a pu être reconnue dans la Journée d’Assise,
et dans la prière avec les représentants chrétiens, c’est la profonde
communion qui existe déjà entre nous dans le Christ et dans
l’Esprit, vivante et agissante, même si elle est encore incomplète,
qui a eu l’une de ses manifestations particulières.
L’événement d’Assise peut ainsi être considéré comme une
illustration visible, une leçon de choses, une catéchèse intelligible à
tous de ce que présuppose et signifie l’engagement œcuménique et
pour le dialogue interreligieux recommandé et promu par le
Concile Vatican II.
Comme source inspiratrice et comme orientation fondamentale
pour un tel engagement, il y a toujours le mystère de l’unité, aussi
bien celle qui est déjà atteinte dans le Christ par la foi et le baptême
que celle qui s’exprime dans « l’ordination » au Peuple de Dieu et
donc encore à atteindre pleinement.
Tandis que la première trouve son expression adéquate et
toujours valable dans le Décret Unitatis redintegratio sur l’œcuménisme, la seconde se trouve formulée, sur le plan de la relation et
du dialogue interreligieux, dans la Déclaration Nostra ætate, et tous
les deux sont à lire dans le contexte de la Constitution Lumen
gentium.
C’est dans cette seconde dimension, encore assez nouvelle par
rapport à la première, que la Journée d’Assise nous fournit de
précieux éléments de réflexion qui se trouvent éclairés par une
lecture attentive de la Déclaration en question sur les religions nonchrétiennes.
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Discours aux Cardinaux et à la Curie romaine
Ici aussi on parle de « l’unique communauté » que forment les
hommes en ce monde (n° 1), et cette communauté s’explique
comme le fruit de « l’unique origine » commune, « puisque Dieu a
fait habiter le genre humain tout entier sur toute la face de la terre »
(ibid.) pour qu’il s’achemine vers « une seule fin dernière, Dieu,
dont la Providence, les témoignages de bonté et les desseins de
salut s’étendent à tous, jusqu’à ce que les élus soient réunis dans la
Cité sainte que la gloire de Dieu illuminera et où tous les peuples
marcheront dans sa lumière » (ibid.).
Dans les paragraphes suivants, la Déclaration nous enseigne à
apprécier les différentes religions non-chrétiennes à l’intérieur de
ce cadre général où s’enracine notre unité, mais aussi en soulignant
les valeurs authentiques qui les caractérisent dans leur effort pour
répondre « aux énigmes obscures de la condition humaine » (ibid.)
et en voulant voir dans cet effort « un rayon de la vérité qui
illumine tous les hommes » (n° 2). Ainsi « l’Église catholique ne
rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions et elle
exhorte même ses fils pour que, avec prudence et charité…, tout en
témoignant de la foi et de la vie chrétiennes, ils reconnaissent,
préservent et fassent progresser les valeurs spirituelles, morales et
socioculturelles qui se trouvent en elles » (ibid.).
Ce faisant, l’Église se propose avant tout de reconnaître et de
respecter cette « ordination » au Peuple de Dieu dont parle la
Constitution Lumen gentium (n° 16) et à laquelle je viens de me
référer. Quand elle agit de cette manière, elle est donc consciente de
suivre une indication divine parce que c’est le Créateur et
Rédempteur qui, dans son dessein d’amour, a disposé cette mystérieuse relation entre les hommes et les femmes religieux et l’unité
du Peuple de Dieu.
Il y a avant tout une relation avec le peuple juif, « ce peuple qui
reçut les alliances et les promesses, et dont le Christ est issu selon
la chair » (Lumen gentium, 16), qui nous est uni par un « lien »
spirituel (cf. Nostra ætate, 2). Mais il y a également une relation avec
« ceux qui reconnaissent le Créateur et, parmi ceux-ci, en premier
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lieu les musulmans qui professent avoir la foi d’Abraham et qui
adorent avec nous un Dieu unique, miséricordieux, futur juge des
hommes au dernier jour » (Lumen gentium, 16). Et il y a encore une
relation avec ceux qui « cherchent un Dieu inconnu dans les
ombres et sous des images » et dont « Dieu lui-même n’est pas
loin » (cf. Lumen gentium, 19).
En présentant l’Église catholique qui tient par la main ses frères
chrétiens et ceux-ci tous ensemble qui donnent la main aux frères
des autres religions, la Journée d’Assise a été comme une
expression visible de ces affirmations du Concile Vatican II. Avec
elle et par elle, nous avons réussi, grâce à Dieu, à mettre en
pratique, sans aucune ombre de confusion ni de syncrétisme, cette
conviction qui est la nôtre, inculquée par le Concile, sur l’unité de
principe et de fin de la famille humaine et sur le sens et la valeur
des religions non-chrétiennes.
La Journée ne nous a-t-elle pas enseigné à relire, à notre tour,
avec des yeux plus ouverts et plus pénétrants, le riche enseignement conciliaire sur le dessein salvifique de Dieu, le caractère
central de ce dessein en Jésus Christ et la profonde unité dont il
part et vers laquelle il tend à travers la diaconie de l’Église ?
L’Église catholique s’est manifestée à ses fils et au monde dans
l’exercice de sa fonction de « promouvoir l’unité et la charité entre
les hommes, et même entre les peuples » (Nostra ætate, 1).
En ce sens, on doit encore dire que l’identité même de l’Église
catholique et la conscience qu’elle a d’elle-même ont été renforcées
à Assise. L’Église, en effet, c’est-à-dire nous-mêmes, nous avons
mieux compris, à la lumière de l’événement, quel est le vrai sens du
mystère d’unité et de réconciliation que le Seigneur nous a confié
et qu’il a exercé en premier lorsqu’il a offert sa vie « non seulement
pour le peuple mais aussi pour réunir les fils de Dieu qui étaient
dispersés » (Jn 11,52).
L’Église exerce ce ministère essentiel qui est le sien de différentes manières : par l’évangélisation, l’administration des
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Discours aux Cardinaux et à la Curie romaine
sacrements et la conduite pastorale par le Successeur de Pierre et
les évêques, par le service quotidien des prêtres, des diacres,
des religieux et des religieuses, par l’effort et le témoignage des
missionnaires et des catéchistes, par la prière silencieuse
des contemplatifs et la souffrance des malades, des pauvres et des
opprimés, et par tant de formes de dialogue et de collaboration
des chrétiens pour réaliser l’idéal des Béatitudes et promouvoir les
valeurs du Royaume de Dieu.
L’Église a également exercé ce ministère à Assise d’une manière
inédite si l’on veut, mais qui n’est pas moins efficace et moins
engageante pour cela, comme cela a été reconnu par nos hôtes qui
ont exprimé leur joie et exhorté à continuer sur la ro u t e
commencée.
Par ailleurs, comme nous le voyons, la situation du monde en
cette veille de Noël est en elle-même un appel pressant à retrouver
et à maintenir toujours vivant l’esprit d’Assise comme motif
d’espérance pour l’avenir.
Là, on a découvert, de manière extraordinaire, la valeur
unique qu’a la prière pour la paix et même que l’on ne peut
obtenir la paix sans la prière, et la prière de tous, chacun dans sa
propre identité et dans la recherche de la vérité. C’est en cela qu’il
faut voir, à la suite de ce que nous venons de dire, une autre
manifestation admirable de cette unité qui nous lie au-delà des
différences et des divisions de toutes sortes. Toute prière authentique se trouve sous l’influence de l’Esprit « qui intercède avec
insistance pour nous car nous ne savons que demander pour prier
comme il faut », mais Lui prie en nous « avec des gémissements
inexprimables et Celui qui scrute les cœurs sait quels sont les désirs
de l’Esprit » (Rm 8,26-27). Nous pouvons en effet retenir que toute
prière authentique est suscitée par l’Esprit Saint qui est mystérieusement présent dans le cœur de tout homme.
C’est ce que l’on a également vu à Assise : l’unité qui provient
du fait que tout homme et toute femme sont capables de prier,
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c’est-à-dire de se soumettre totalement à Dieu et de se reconnaître
pauvre devant lui. La prière est un des moyens pour réaliser le
dessein de Dieu parmi les hommes (cf. Ad gentes, 3).
Il a été rendu manifeste de cette manière que le monde ne peut
pas donner la paix (cf. Jn 14,27), mais qu’elle est un don de Dieu et
qu’il faut l’obtenir de lui par la prière de tous.
En vous proposant à vous, messieurs les Card i n a u x ,
Archevêques, Évêques et membres de la Curie Romaine, ces
réflexions sur l’extraordinaire événement qui s’est déroulé à Assise
le 27 octobre dernier, je voudrais avant tout que cela soit une aide
pour mieux nous préparer à recevoir encore une fois ce Verbe en
qui « toutes choses ont été créées » (cf. Jn 1,3) et par qui tous les
hommes sont appelés à « avoir la vie et à l’avoir en abondance »
(Jn 10,10), ce Verbe divin qui « a voulu habiter parmi nous » (cf.
Jn 1,14) et qui, par sa venue, sa mort et sa résurrection a voulu
« récapituler en lui toutes choses, celles du ciel et celles de la terre »
(cf. He 1,10).
À lui qui, « par l’Incarnation s’est uni d’une certaine manière à
tout homme » (Gaudium et spes, 22), je voudrais encore confier la
suite à donner à la Journée d’Assise et aux engagements que, dans
ce but, tous, dans l’Église, nous devrons assumer ou que nous
sommes déjà en train d’assumer pour répondre à la vocation
fondamentale de l’Église parmi les hommes qui est d’être
« sacrement de rédemption universelle » et « germe incorruptible
d’unité et d’espérance pour toute l’humanité » (Lumen gentium, 9).
Je suis certain que vous tous, collaborateurs de la Curie
Romaine, vous êtes profondément conscients de cette mission. Je
vous remercie de tout cela et aussi pour l’aide irremplaçable que
vous m’offrez, jour après jour, dans le service de l’Église universelle, avec les représentants pontificaux dans les différents pays du
monde.
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Discours aux Cardinaux et à la Curie romaine
Et tandis que je présente à tous mes vœux les plus fervents de
Noël, je voudrais renouveler l’expression de ma reconnaissance à
tous ceux qui, acceptant mon invitation, non sans difficultés et
incommodités, nous ont, par leur exemple, poussés non seulement
à rendre témoignage devant le monde de l’engagement commun
pour la paix, mais aussi à réfléchir sur le mystère de l’œuvre de
Dieu dans le monde, à laquelle nous voulons tous collaborer et
dont nous nous apprêtons à célébrer dans la nuit de Noël, sous le
regard maternel de Marie, le sommet dans la plénitude des temps.
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PRIÈRE DU PAPE JEAN-PAUL II
AU MUR OCCIDENTAL DE JÉRUSALEM
Dieu de nos pères,
tu as choisi Abraham et sa descendance
pour que ton Nom soit apporté aux peuples :
nous sommes profondément attristés
par le comportement de ceux qui,
au cours de l'histoire, les ont fait souffrir, eux qui sont tes fils,
et, en te demandant pardon, nous voulons nous engager
à vivre une fraternité authentique
avec le peuple de l'alliance.
Par Jésus, le Christ, notre Seigneur.
Amen.
Dimanche, 26 mars 2000.
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Jean-Paul II
DISCOURS LORS DE LA RENCONTRE
AVEC LA COMMUNAUTÉ MUSULMANE
DANS LA COUR DE LA GRANDE MOSQUÉE
OMEYYADE
Damas le Dimanche 6 mai 2001
Chers Amis Musulmans,
As-salámu ‘aláikum !
1. Du fond de mon cœur, je loue Dieu le Tout-Puissant pour la
grâce de cette rencontre. Je vous suis très reconnaissant de
m’accueillir chaleureusement, dans la tradition d’hospitalité si
chère au peuple de cette région. Je remercie particulièrement le
Ministre des Waqfs et le Grand Mufti pour leurs vœux courtois,
traduisant la grande aspiration à la paix qui emplit les cœurs de
tout peuple de bonne volonté. Mon pèlerinage jubilaire a été
marqué par d’importantes rencontres avec des chefs musulmans
au Caire et à Jérusalem, et je suis maintenant profondément touché
d’être votre hôte ici-même dans la grande Mosquée Omeyyade, si
riche en histoire religieuse. Votre terre est chère aux chrétiens : ici
notre religion a connu des périodes vitales pour sa croissance et
son développement doctrinal. Ici se trouvent des communautés
chrétiennes qui ont vécu en paix et en harmonie avec leurs voisins
musulmans pendant des siècles.
2. Notre rencontre se tient tout près du lieu que les Chrétiens et
les Musulmans vénèrent comme la tombe de Jean le Baptiste,
connu sous le nom de Yahya dans la tradition musulmane. Le fils
de Zacharie est une figure de première importance dans l’histoire
de la chrétienté, car il était le Précurseur qui a préparé le chemin
pour le Christ. Le vie de Jean, toute consacrée à Dieu, fut
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Chemins de Dialogue
couronnée par le martyre. Que tous ceux qui vénèrent sa mémoire
ici soient illuminés par son témoignage, afin qu’ils puissent
comprendre - et nous aussi - que la grande tâche de la vie est de
chercher la vérité de Dieu et sa justice !
Notre rencontre dans ce lieu renommé nous rappelle que
l’homme est un être spirituel, appelé à reconnaître et à respecter le
primat absolu de Dieu sur toutes choses. Pour nous, Chrétiens et
Musulmans, la rencontre avec Dieu dans la prière est la nourriture
nécessaire de nos âmes, sans laquelle nos cœurs se flétrissent et
notre volonté ne lutte plus pour le bien, mais succombe au mal.
3. Les Musulmans et les Chrétiens honorent pareillement leurs
lieux de prière, oasis où ils rencontrent le Dieu Miséricordieux dans
leur voyage vers la vie éternelle, et où ils rencontrent leurs frères et
leurs sœurs en religion. Lorsqu’à l’occasion de mariages, de
funérailles ou d’autres célébrations, Chrétiens et Musulmans
demeurent dans un silence respectueux de la prière de l’autre, ils
portent témoignage de ce qui les unit, sans masquer ou nier ce qui
les séparent.
C’est dans les mosquées ou les églises que les communautés
musulmanes et chrétiennes ont façonné leur identité religieuse, et
c’est en leur sein que les jeunes reçoivent une part importante de
leur éducation religieuse. Quel sens de l’identité insuffle-t-on chez
les jeunes Chrétiens et chez les jeunes Musulmans dans nos églises
et nos mosquées ? Je souhaite ardemment que les responsables
religieux et les professeurs de religion, musulmans et chrétiens,
présentent nos deux importantes communautés religieuses comme
des communautés engagées dans un dialogue respectueux, et plus
jamais comme des communautés en conflit. Il est capital
d’enseigner aux jeunes les chemins du respect et de la compréhension, afin qu’ils ne soient pas conduits à faire un mauvais usage
de la religion elle-même pour promouvoir ou pour justifier la haine
et la violence. La violence détruit l’image du Créateur dans ses
créatures, et elle ne devrait jamais être considérée comme le fruit de
convictions religieuses.
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Discours de Jean-Paul II à la grande mosquée Omeyyade
4. J’espère vraiment que notre rencontre d’aujourd’hui à la
Mosquée Omeyyade sera le signe de notre détermination à faire
progresser le dialogue interreligieux de l’Église catholique et de
l’Islam. Ce dialogue s’est accru lors des récentes décennies ; et nous
pouvons aujourd’hui manifester notre reconnaissance pour la
route qu’aussi loin nous avons parcourue ensemble. Au plus haut
niveau, le Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux représente l’Église catholique dans cet effort. Depuis plus de trente ans,
le Conseil envoie un message aux Musulmans à l’occasion de l’Aïd
al-Fitr à la clôture du Ramadan, et je suis très heureux que ce geste
ait été bien accueilli par de nombreux musulmans comme un signe
d’amitié croissante entre nous. Ces dernières années, le Conseil a
mis en place un comité de liaison avec des Org a n i s a t i o n s
islamiques internationales, et aussi avec l’Université al-Azhar en
Égypte, que j’ai eu le plaisir de visiter l’an dernier.
Il est important que Musulmans et Chrétiens continuent à
explorer ensemble les questions philosophiques et théologiques,
afin de parvenir à une connaissance plus objective et plus approfondie de leurs convictions religieuses respectives. Une meilleure
compréhension mutuelle conduira sûrement, sur le plan pratique,
à une nouvelle manière de présenter nos deux religions non pas en
opposition, comme cela est advenu trop souvent par le passé, mais
en partenariat pour le bien de la famille humaine.
Le dialogue interreligieux est plus efficace lorsqu’il jaillit de
l’expérience d’une « vie partagée avec l’autre » au quotidien, à
l’intérieur d’une même communauté et d’une même culture. En
Syrie, Chrétiens et Musulmans ont vécu côte à côte pendant des
siècles, et le riche dialogue de vie s’est poursuivi sans interruption.
Chaque personne et chaque famille connaissent des moments
d’harmonie, et d’autres moments où le dialogue s’interrompt. Les
expériences positives doivent fortifier nos communautés dans
l’espérance de la paix ; et les expériences négatives ne devraient pas
ruiner cette espérance. Chaque fois que les Musulmans et les
Chrétiens se sont offensés les uns les autres, nous avons besoin de
rechercher le pardon qui vient du Tout-Puissant et de nous offrir
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Chemins de Dialogue
mutuellement ce pardon. Jésus nous enseigne qu’il nous faut
pardonner les offenses des autres pour que Dieu puisse nous
pardonner nos péchés (cf. Mt 6,14).
Comme membres de l’unique famille humaine et comme
croyants, nous avons des obligations quant au bien commun, à la
justice et à la solidarité. Le dialogue interreligieux conduira à des
formes variées de coopération, particulièrement en répondant à
notre devoir de prendre soin du pauvre et du faible. Tels sont les
signes que notre adoration de Dieu est véritable.
5. Alors que nous nous frayons un chemin à travers l’existence
vers notre destinée céleste, nous, Chrétiens, nous sentons la
présence de Marie, la Mère de Jésus ; l’islam aussi rend hommage à
Marie et l’honore, elle qui est « choisie de préférence à toutes les
femmes de l’univers » (Coran, III,42). La Vierge de Nazareth, la
Dame de Saïdnaya, nous a enseigné que Dieu protège les humbles
et « disperse les superbes » (Lc 1,51). Puisse les cœurs des
Musulmans et des Chrétiens se tourner les uns vers les autres avec
des sentiments de fraternité et d’amitié, pour que le Tout-Puissant
nous bénisse avec la paix que seul le Ciel peut donner ! Au Dieu Un
et Tout-Puissant, louange et gloire pour l’éternité.
Amen.
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Jean-Paul II
MESSAGE POUR LA CÉLÉBRATION DE LA
JOURNÉE MONDIALE DE LA PAIX, LE 1 JANVIER 2002
ER
« Il n'y a pas de paix sans justice
Il n'y a pas de justice sans pardon »
1. Cette année, la Journée mondiale de la Paix est célébrée sur
l'arrière-plan des événements dramatiques du 11 septembre
dernier. Ce jour-là fut perpétré un crime d'une extrême gravité : en
l'espace de quelques minutes, des milliers de personnes
innocentes, de différentes provenances ethniques, furent horriblement massacrées. Depuis lors, dans le monde entier l'humanité
a pris conscience, avec une intensité nouvelle, de la vulnérabilité de
chacun et elle a commencé à envisager l'avenir avec un sentiment
jusqu'alors inconnu de peur profonde. Face à ce sentiment, l'Église
désire témoigner de son espérance, fondée sur la conviction que le
mal, le mysterium iniquitatis, n'a pas le dernier mot dans les vicissitudes humaines. L'histoire du salut, racontée dans la sainte
Écriture, projette une lumière intense sur toute l'histoire du monde,
montrant que celle-ci est toujours accompagnée par la sollicitude
miséricordieuse et providentielle de Dieu, qui connaît les chemins
permettant d'atteindre les cœurs les plus endurcis et de tirer de
bons fruits même d'une terre aride et inféconde.
Telle est l'espérance qui soutient l'Église au début de l'an 2002 :
avec la grâce de Dieu, le monde, où le pouvoir du mal semble une
fois encore l'emporter, sera réellement transformé en un monde où
les aspirations les plus nobles du cœur humain pourront être satisfaites, un monde où prévaudra la vraie paix.
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Chemins de Dialogue
La paix, œuvre de justice et d'amour
2. Ce qui est récemment advenu, avec les sanglants épisodes
rappelés ci-dessus, m'a poussé à reprendre une réflexion qui bien
souvent jaillit du plus profond de mon cœur au souvenir d'événements historiques qui ont marqué ma vie, spécialement au cours de
mes jeunes années.
Les souffrances indicibles des peuples et des individus, et parmi
eux beaucoup de mes amis et de personnes que je connaissais,
causées par les totalitarismes nazi et communiste, ont toujours
suscité en moi des interrogations et ont stimulé ma prière. Bien des
fois, je me suis attardé à réfléchir à la question : quel est le chemin
qui conduit au plein rétablissement de l'ordre moral et social qui
est violé de manière aussi barbare ? La conviction à laquelle je suis
parvenu en réfléchissant et en me référant à la Révélation biblique
est qu'on ne rétablit pleinement l'ordre brisé qu'en harmonisant
entre eux la justice et le pardon. Les piliers de la véritable paix sont
la justice et cette forme particulière de l'amour qu'est le pardon.
3. Mais comment, dans les circonstances actuelles, parler de
justice et en même temps de pardon comme sources et conditions
de la paix ? Ma réponse est celle-ci : on peut et on doit en parler,
malgré les difficultés que comporte ce sujet, parce que, entre autres,
on a tendance à penser à la justice et au pardon en termes antithétiques. Mais le pardon s'oppose à la rancune et à la vengeance, et
non à la justice. La véritable paix est en réalité « œuvre de la
justice » (Is 32,17). Comme l'a affirmé le Concile Vatican II, la paix
est « le fruit d'un ordre qui a été implanté dans la société humaine
par son divin Fondateur, et qui doit être mené à la réalisation par
des hommes aspirant sans cesse à une justice plus parfaite »
(Constitution pastorale Gaudium et spes, n° 78). Depuis plus de
quinze siècles, dans l'Église catholique retentit l'enseignement
d'Augustin d'Hippone, qui nous a rappelé que la paix qu'il faut
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Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix
viser avec la coopération de tous consiste dans la tranquillitas
ordinis, dans la tranquillité de l'ordre (cf. De civitate Dei, 19, 13).
La vraie paix est donc le fruit de la justice, vertu morale et
garantie légale qui veille sur le plein respect des droits et des
devoirs, et sur la répartition équitable des profits et des charges.
Mais parce que la justice humaine est toujours fragile et imparfaite,
exposée qu'elle est aux limites et aux égoïsmes des personnes et des
groupes, elle doit s'exercer et, en un sens, être complétée par le
pardon qui guérit les blessures et qui rétablit en profondeur les
rapports humains perturbés. Cela vaut aussi bien pour les tensions
qui concernent les individus que pour celles qui ont une portée
plus générale et même internationale. Le pardon ne s'oppose
d'aucune manière à la justice, car il ne consiste pas à surseoir aux
exigences légitimes de réparation de l'ordre lésé. Le pardon vise
plutôt cette plénitude de justice qui mène à la tranquillité de
l'ordre, celle-ci étant bien plus qu'une cessation fragile et temporaire des hostilités : c'est la guérison en profondeur des blessures
qui ensanglantent les esprits. Pour cette guérison, la justice et le
pardon sont tous les deux essentiels.
Telles sont les deux dimensions de la paix que je désire approfondir dans ce message. La Journée mondiale offre cette année à
toute l'humanité, mais tout particulièrement aux Chefs des
Nations, l'occasion de réfléchir aux exigences de la justice et à
l'appel au pardon face aux graves problèmes qui continuent
d'affliger le monde, aux premiers rangs desquels il y a le nouveau
degré de violence introduit par le terrorisme organisé.
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Chemins de Dialogue
Le phénomène du terrorisme
4. C'est précisément la paix fondée sur la justice et sur le pardon
qui est attaquée aujourd'hui par le terrorisme international. Ces
dernières années, spécialement après la fin de la guerre froide, le
terrorisme s'est transformé en un réseau sophistiqué de connivences politiques, techniques et économiques qui dépasse les
frontières nationales et s'élargit jusqu'à englober le monde entier. Il
s'agit de véritables organisations dotées bien souvent d'immenses
ressources financières, qui élaborent des stratégies sur une vaste
échelle, frappant des personnes innocentes qui n'ont rien à voir
avec les visées poursuivies par les terroristes.
Utilisant leurs adeptes comme armes à lancer contre des
personnes sans défense et ignorantes du danger, ces organisations
terroristes manifestent d'une manière déconcertante l'instinct de
mort qui les nourrit. Le terrorisme naît de la haine et il engendre
l'isolement, la méfiance et le repli sur soi. La violence s'ajoute à la
violence, en une spirale tragique qui entraîne même les nouvelles
générations, celles-ci héritant ainsi de la haine qui a divisé les
générations précédentes. Le terrorisme est fondé sur le mépris de
la vie humaine. Voilà précisément pourquoi non seulement il est à
l'origine de crimes intolérables, mais il constitue en lui-même, en
tant que recours à la terreur comme stratégie politique et économique, un véritable crime contre l'humanité.
5. De ce fait, il existe un droit de se défendre contre le terrorisme.
C'est un droit qui, comme tout autre droit, doit répondre à des
règles morales et juridiques tant dans le choix des objectifs que
dans celui des moyens. L'identification des coupables doit être
dûment prouvée, car la responsabilité pénale est toujours personnelle et on ne peut donc l'étendre aux nations, aux ethnies, aux
religions, auxquelles appartiennent les terroristes. La collaboration
internationale dans la lutte contre l'activité terroriste doit
comporter aussi un engagement particulier sur les plans politiques,
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Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix
diplomatique et économique pour résoudre avec courage et détermination les éventuelles situations d'oppression et de marginalisation qui seraient à l'origine des desseins terroristes. Le recrutement des terroristes est en effet plus facile dans les contextes
sociaux où les droits sont foulés au pied et où les injustices sont
trop longtemps tolérées.
Il faut toutefois affirmer clairement que l'on ne peut jamais
prendre prétexte des injustices qui existent dans le monde pour
justifier les attentats terroristes. De plus, on doit noter que, parmi
les victimes de l'écroulement radical de l'ordre que cherchent les
terroristes, il faut compter en premier lieu les millions d'hommes et
de femmes moins équipés pour résister à l'affaissement de la
solidarité internationale. Je fais allusion ici d'une manière spécifique aux peuples du monde en voie de développement, qui vivent
déjà avec une marge étroite de survie et qui seraient les plus
douloureusement atteints par le chaos économique et politique
généralisé. La prétention qu'a le terrorisme d'agir au nom des
pauvres est une flagrante imposture.
On ne tue pas au nom de Dieu !
6. Celui qui tue par des actes terroristes nourrit des sentiments
de mépris envers l'humanité, faisant preuve de désespérance face à
la vie et à l'avenir : dans cette perspective, tout peut être haï et
détruit. Le terroriste pense que la vérité à laquelle il croit ou la
souffrance endurée sont tellement absolues qu'il lui est légitime de
réagir en détruisant même des vies humaines innocentes. Le terrorisme est parfois engendré par un fondamentalisme fanatique, qui
naît de la conviction de pouvoir imposer à tous d'accepter sa
propre conception de la vérité. Au contraire, même à supposer que
l'on ait atteint la vérité — et c'est toujours d'une manière limitée et
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Chemins de Dialogue
perfectible —, on ne peut jamais l'imposer. Le respect de la
conscience d'autrui, dans laquelle se reflète l'image même de Dieu
(cf. Gn 1,26-27), permet seulement de proposer la vérité aux autres,
auxquels appartient ensuite la responsabilité de l'accueillir.
Prétendre imposer à d'autres par la violence ce que l'on considère
comme la vérité signifie violer la dignité de l'être humain et, en
définitive, outrager Dieu dont il est l'image. C'est pourquoi le
fanatisme fondamentaliste est une attitude radicalement contraire
à la foi en Dieu. À y regarder de près, le terrorisme exploite non
seulement l'homme, mais Dieu lui-même, dont il finit par faire une
idole qu'il utilise à ses propres fins.
7. Aucun responsable religieux ne peut donc user d'indulgence
à l'égard du terrorisme et moins encore le préconiser. C'est une
profanation de la religion que de se proclamer terroriste au nom de
Dieu, d'user de violence sur les hommes au nom de Dieu. La
violence terroriste est contraire à la foi en Dieu Créateur de
l'homme, en Dieu qui prend soin de l'homme et qui l'aime. En
particulier, elle est totalement contraire à la foi dans le Christ
Seigneur, qui a montré à ses disciples comment prier : « Remetsnous nos dettes, comme nous les avons remises nous-mêmes à
ceux qui nous devaient » (Mt 6,12).
Suivant l'enseignement et l'exemple de Jésus, les chrétiens sont
convaincus que faire preuve de miséricorde signifie vivre
pleinement la vérité de notre vie : nous pouvons et nous devons
être miséricordieux parce que nous avons bénéficié de la miséricorde d'un Dieu qui est Amour miséricordieux (cf. 1Jn 4,7-12). Le
Dieu qui nous rachète par son entrée dans l'histoire et qui, à travers
le drame du Vendredi saint, prépare la victoire du jour de Pâques
est un Dieu de miséricorde et de pardon (cf. Ps 103[102],3-4.10-13).
Devant ceux qui le critiquaient parce qu'il mangeait avec les
pécheurs, Jésus s'est exprimé ainsi : « Allez apprendre ce que veut
dire cette parole : C'est la miséricorde que je désire, et non les sacrifices. Car je suis venu appeler non pas les justes, mais les
pécheurs » (Mt 9,13). Les disciples du Christ, baptisés dans sa mort
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et dans sa résurrection, doivent toujours être des hommes et des
femmes de miséricorde et de pardon.
La nécessité du pardon
8. Mais que signifie concrètement pardonner ? Et pourquoi
pardonner ? Quand on parle du pardon, on ne peut éluder ces
interrogations. Reprenant une réflexion que j'ai déjà eu l'occasion
d'exposer pour la Journée mondiale de la Paix de 1997 (« Offre le
pardon, reçois la paix »), je voudrais rappeler que le pardon réside
dans le cœur de chacun avant d'être un fait social. C'est seulement
dans la mesure où l'on proclame une éthique et une culture du
pardon que l'on peut aussi espérer en une « politique du pardon »,
qui s'exprime dans des comportements sociaux et des institutions
juridiques dans lesquels la justice elle-même puisse prendre un
visage plus humain.
En réalité, le pardon est avant tout un choix personnel, une
option du cœur qui va contre l'instinct spontané de rendre le mal
pour le mal. Cette option trouve son élément de comparaison dans
l'amour de Dieu, qui nous accueille malgré nos péchés, et son
modèle suprême est le pardon du Christ qui a prié ainsi sur la
Croix : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu'ils font »
(Lc 23,34).
Le pardon a donc une racine et une mesure divines. Mais cela
n'exclut pas que l'on puisse aussi en saisir la valeur à la lumière de
considérations fondées sur le bon sens humain. La première de ces
considérations concerne l'expérience vécue intérieurement par tout
être humain quand il commet le mal. Il se rend compte alors de sa
fragilité et il désire que les autres soient indulgents avec lui.
Pourquoi donc ne pas agir envers les autres comme chacun
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Chemins de Dialogue
voudrait que l'on agisse envers lui-même ? Tout être humain
nourrit en lui-même l'espérance de pouvoir recommencer une
période de sa vie, et de ne pas demeurer à jamais prisonnier de ses
erreurs et de ses fautes. Il rêve de pouvoir à nouveau lever les yeux
vers l'avenir, pour découvrir qu'il a encore la possibilité de faire
confiance et de s'engager.
9. En tant qu'acte humain, le pardon est avant tout une initiative
du sujet singulier dans ses relations avec ses semblables. Toutefois,
la personne a une dimension sociale essentielle qui fait qu'elle tisse
un réseau de relations où elle exprime ce qu'elle est : non seulement
dans le bien, mais aussi malheureusement dans le mal. De ce fait,
le pardon devient nécessaire également au niveau social. Les
familles, les groupes, les États, la Communauté internationale ellemême, ont besoin de s'ouvrir au pardon pour renouer les liens
rompus, pour dépasser les situations stériles de condamnations
réciproques, pour vaincre la tentation d'exclure les autres en leur
refusant toute possibilité d'appel. La capacité de pardonner est à la
base de tout projet d'une société à venir plus juste et plus solidaire.
Le refus du pardon, au contraire, surtout s'il entretient la
poursuite de conflits, a des répercussions incalculables pour le
développement des peuples. Les ressources sont consacrées à
soutenir la course aux armements, les dépenses de guerre, ou à
faire face aux conséquences des rétorsions économiques. C'est ainsi
que font défaut les disponibilités financières nécessaires au
développement, à la paix, à la justice. De quelles souffrances
l'humanité n'est-elle pas affligée parce qu'elle ne sait pas se réconcilier, quels retards ne subit-elle pas parce qu'elle ne sait pas
pardonner ! La paix est la condition du développement, mais une
paix véritable n'est possible qu'à travers le pardon.
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Le pardon, voie royale
10. La proposition du pardon n'est pas une chose que l'on admet
comme une évidence ou que l'on accepte facilement ; par certains
aspects, c'est un message paradoxal. En effet, le pardon comporte
toujours, à court terme, une perte apparente, tandis qu'à long
terme, il assure un gain réel. La violence est exactement le
contraire : elle opte pour un gain à brève échéance, mais se prépare
pour l'avenir lointain une perte réelle et permanente. Le pardon
pourrait sembler une faiblesse ; en réalité, aussi bien pour
l'accorder que pour le recevoir, il faut une grande force spirituelle
et un courage moral à toute épreuve. Loin de diminuer la
personne, le pardon l'amène à une humanité plus profonde et plus
riche, il la rend capable de refléter en elle un rayon de la splendeur
du Créateur.
Le ministère que j'accomplis au service de l'Évangile me fait
vivement sentir le devoir d'insister, en même temps qu'il m'en
donne la force, sur la nécessité du pardon. Je le fais aujourd'hui
encore, soutenu par l'espérance de pouvoir susciter des réflexions
sereines et longuement mûries en faveur d'un renouveau général
dans le cœur des personnes et dans les relations entre les peuples
de la terre.
11. En méditant sur le thème du pardon, on ne peut pas ne pas
évoquer quelques situations tragiques de conflits qui, depuis trop
longtemps, entretiennent des haines profondes et destructrices,
avec la spirale sans fin de tragédies personnelles et collectives qui
s'ensuit. Je pense en particulier à ce qui se passe en Terre sainte, lieu
béni et sacré de la rencontre de Dieu avec les hommes, lieu de la
vie, de la mort et de la résurrection de Jésus, Prince de la Paix.
La délicate situation internationale invite à souligner une fois
encore avec force combien il est urgent d'apporter une solution au
conflit arabo-israélien, qui dure depuis plus de cinquante ans, avec
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des alternances de phases plus ou moins aiguës. Le recours
continuel à des actes de terrorisme ou de guerre, qui aggravent la
situation pour tous et qui assombrissent les perspectives, doit enfin
céder le pas à une négociation qui résolve les problèmes. Les droits
et les exigences de chacun ne pourront être dûment pris en compte
et pondérées de manière équitable que dans la mesure où
prévaudra chez tous la volonté de justice et de réconciliation. Une
fois de plus, j'adresse à ces peuples bien-aimés l'invitation
pressante à s'engager dans une nouvelle ère de respect mutuel et
d'accord constructif.
Compréhension et coopération interreligieuses
12. Dans cette grande entreprise, les responsables religieux ont
une responsabilité spécifique. Les confessions chrétiennes et les
grandes religions de l'humanité doivent collaborer entre elles pour
éliminer les causes sociales et culturelles du terrorisme, en enseignant la grandeur et la dignité de la personne, et en favorisant une
conscience plus grande de l'unité du genre humain. Il s'agit là d'un
domaine précis de dialogue et de collaboration œcuméniques et
interreligieux, pour que les religions se mettent d'urgence au
service de la paix entre les peuples.
Je suis en particulier convaincu que les responsables religieux
juifs, chrétiens et musulmans doivent prendre l'initiative par une
condamnation publique du terrorisme, refusant à ceux qui s'y
engagent toute forme de légitimation religieuse ou morale.
13. En donnant un témoignage commun à la vérité morale selon
laquelle l'assassinat délibéré de l'innocent est toujours et partout,
sans exception, un grave péché, les responsables religieux du
monde favoriseront la formation d'une opinion publique
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moralement correcte. C'est là le présupposé nécessaire à l'édification d'une société internationale capable de re c h e rcher la
tranquillité de l'ordre dans la justice et dans la liberté.
Un tel engagement de la part des religions ne peut pas ne pas
conduire à la voie du pardon, qui débouche sur la compréhension
réciproque, sur le respect et la confiance. Le service que les
religions peuvent rendre à la cause de la paix et contre le terrorisme
consiste justement dans la pédagogie du pardon, car l'homme qui
pardonne ou qui demande pardon comprend qu'il y a une Vérité
plus grande que lui, et qu'en l'accueillant il peut se dépasser luimême.
La prière pour la paix
14. C'est bien pour cela que la prière pour la paix n'est pas un
élément qui « vient après » l'engagement en faveur de la paix. Au
contraire, elle est au cœur de l'effort pour l'édification d'une paix
dans l'ordre, la justice et la liberté. Prier pour la paix veut dire
ouvrir le cœur humain à l'irruption de la puissance rénovatrice de
Dieu. Par la force vivifiante de sa grâce, Dieu peut créer des ouvertures vers la paix là où il semble qu'il n'y ait qu'obstacles et repli sur
soi ; il peut consolider et élargir la solidarité entre les membres de
la famille humaine, malgré les longs épisodes de divisions et de
luttes. Prier pour la paix signifie prier pour la justice, pour un
ordonnancement approprié à l'intérieur des nations et dans leurs
relations mutuelles. Cela veut dire aussi prier pour la liberté,
spécialement pour la liberté religieuse, qui est un droit humain et
civil fondamental pour tout individu. Prier pour la paix signifie
prier pour obtenir le pardon de Dieu et en même temps pour
croître dans le courage nécessaire pour être capable à son tour de
pardonner les offenses subies. Pour toutes ces raisons, j'ai invité les
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représentants des religions du monde à venir à Assise, la ville de
saint François, le 24 janvier prochain, afin de prier pour la paix.
Nous voulons montrer de cette façon que le sentiment religieux
authentique est une source inépuisable de respect mutuel et d'harmonie entre les peuples : bien plus, en lui réside le principal
antidote contre la violence et les conflits. En ce temps de grave
préoccupation, la famille humaine a besoin de s'entendre rappeler
les motifs certains de notre espérance. C'est bien pourquoi nous
entendons proclamer à Assise, en priant le Dieu tout-puissant —
selon l'expression suggestive attribuée à saint François lui-même
— de faire de nous un instrument de sa paix.
15. Il n'y a pas de paix sans justice, il n'y a pas de justice sans
pardon : voilà ce que je veux annoncer dans ce Message aux
croyants et aux non-croyants, aux hommes et aux femmes de
bonne volonté, qui ont à cœur le bien de la famille humaine et son
avenir.
Il n'y a pas de paix sans justice, il n'y a pas de justice sans
pardon : voilà ce que je veux rappeler à ceux qui ont entre leurs
mains le sort des communautés humaines, afin qu'ils se laissent
toujours guider, dans les choix graves et difficiles qu'ils doivent
faire, par la lumière du bien véritable de l'homme, dans la
perspective du bien commun.
Il n'y a pas de paix sans justice, il n'y a pas de justice sans
pardon : je ne me lasserai pas de répéter cet avertissement à ceux
qui, pour un motif ou un autre, nourrissent en eux la haine, des
désirs de vengeance, des instincts destructeurs.
En cette Journée de la Paix, que s'élève du cœur de tout croyant
une prière plus intense pour toutes les victimes du terrorisme, pour
leurs familles tragiquement frappées, et pour tous les peuples qui
continuent à être meurtris et bouleversés par le terrorisme et la
guerre ! Que ne soient pas exclus du rayon de lumière de notre
prière ceux-là mêmes qui offensent gravement Dieu et l'homme par
ces actes impitoyables : qu'il leur soit accordé de rentrer en eux-
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mêmes et de se rendre compte du mal qu'ils accomplissent ; qu'ils
soient ainsi poussés à renoncer à toute volonté de violence et à
demander pardon ! En ces temps tumultueux, que la famille
humaine puisse trouver la paix véritable et durable, cette paix qui
peut naître seulement de la rencontre entre la justice et la miséricorde !
Du Vatican, le 8 décembre 2001.
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LE DÉCALOGUE D'ASSISE POUR LA PAIX
1. Nous nous engageons à proclamer notre ferme conviction que
la violence et le terrorisme s’opposent au véritable esprit religieux
et, en condamnant tout recours à la violence et à la guerre au nom
de Dieu ou de la religion, nous nous engageons à faire tout ce qui
est possible pour éradiquer les causes du terrorisme.
2. Nous nous engageons à éduquer les personnes au respect et à
l’estime mutuels, afin que l’on puisse parvenir à une coexistence
pacifique et solidaire entre les membres d’ethnies, de cultures et de
religions différentes.
3. Nous nous engageons à promouvoir la culture du dialogue,
afin que se développent la compréhension et la confiance
réciproques entre les individus et entre les peuples, car telles sont
les conditions d’une paix authentique.
4. Nous nous engageons à défendre le droit de toute personne
humaine à mener une existence digne, conforme à son identité
culturelle, et à fonder librement une famille qui lui soit propre.
5. Nous nous engageons à dialoguer avec sincérité et patience,
ne considérant pas ce qui nous sépare comme un mur insurmontable, mais, au contraire, reconnaissant que la confrontation avec la
diversité des autres peut devenir une occasion de plus grande
compréhension réciproque.
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6. Nous nous engageons à nous pardonner mutuellement les
erreurs et les préjudices du passé et du présent, et à nous soutenir
dans l’effort commun pour vaincre l’égoïsme et l’abus, la haine et
la violence, et pour apprendre du passé que la paix sans la justice
n’est pas une paix véritable.
7. Nous nous engageons à être du côté de ceux qui souffrent de
la misère et de l’abandon, nous faisant la voix des sans-voix et
œuvrant concrètement pour surmonter de telles situations,
convaincus que personne ne peut être heureux seul.
8. Nous nous engageons à faire nôtre le cri de ceux qui ne se
résignent pas à la violence et au mal, et nous désirons contribuer de
toutes nos forces à donner à l’humanité de notre temps une réelle
espérance de justice et de paix.
9. Nous nous engageons à encourager toute initiative qui
promeut l’amitié entre les peuples, convaincus que, s’il manque
une entente solide entre les peuples, le progrès technologique
expose le monde à des risques croissants de destruction et de mort.
10. Nous nous engageons à demander aux responsables des
nations de faire tous les efforts possibles pour que, aux niveaux
national et international, soit édifié et consolidé un monde de
solidarité et de paix fondé sur la justice.
24 janvier 2002.
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Tables générales
des numéros 1 à 20
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Sommaire des tables
Table thématique
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1. Les religions en dialogue
1.1. Histoire du dialogue interreligieux
1.2. Les religions
1.2.1. Islam
1.2.2. Judaïsme
1.2.3. Religions orientales
1.2.4. Religions traditionnelles
1.2.5. Nouveaux mouvements religieux
1.3. Thèmes croisés
1.3.1. Expériences religieuses
1.3.2. Société, laïcité et religions
200
200
201
201
203
204
205
206
206
206
208
2. Théologie chrétienne
2.1. Textes de référence
2.2. Théologie du dialogue interreligieux
2.3. Les incidences du dialogue interreligieux sur la théologie
2.3.1. Exégèse biblique
2.3.2. Théologie fondamentale et dogmatique
2.3.3. Vie ecclésiale
2.3.4. Théologie de la mission
209
209
210
212
212
212
213
213
3. Sciences des religions
3.1. Anthropologie
3.2. Ethnologie
3.3. Histoire
3.4. Sociologie
213
213
214
214
214
4. Compte-rendus d’expériences
215
5. Bulletins bibliographiques et recensions
5.1. Bulletins bibliographiques
5.2. Recensions
216
216
217
Table des numéros
220
Table des auteurs
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Chemins de Dialogue
Table thématique
1. Les religions en dialogue
1.1. Histoire du dialogue interreligieux
Mgr. Michaël Fitzgerald, L’Église catholique dans le dialogue interreligieux :
bilans et perspectives,
CdD2, p. 55-70.
Jean Chelini, Paul VI et la mission de l’Église,
CdD4, p. 25-47.
Jean Comby, À travers l’histoire : intolérance ou dialogue ?,
CdD4, p. 113-126.
Card. Roger Etchegaray, L’esprit d’Assise,
CdD7, p. 7-9.
Christian Salenson, Histoire et enjeux de la rencontre d’Assise,
CdD7, p. 15-28.
Card. Francis Arinze, L’engagement de l’Église catholique dans le dialogue
interreligieux depuis Assise 1986,
CdD9, p. 81-95.
Marie-Jeanne Coutagne, Averroès, Maïmonide, Bernard, Thomas et les
autres…,
CdD12, p. 143-156.
Bernard Lucchesi, Henri Bouillard et l’I.S.T.R. de Paris,
CdD15, p. 189-199.
Joseph Doré, Aspects de la réception de Nostra ætate dans l’Église de France,
CdD16, p. 125-144.
François Jourdan, Les Sept Dormants, au seuil du XXIe siècle : un héritage
d’avenir exigeant ?,
CdD18, p. 73-88.
Gwénolé Jeusset, François d’Assise et les musulmans,
CdD18, p. 89-103.
Jean-François Berjonneau, Charles de Foucauld, frère universel, dans sa
relation avec l’étranger et sa rencontre avec les musulmans,
CdD18, p. 105-128.
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Page 201
Tables générales
Christian Salenson, Assise, de 1986 à 2002,
CdD19, p. 7-12.
Henri Teissier, L’Émir, homme de dialogue,
CdD19, p. 29-47.
Roger Michel, Le Pape Jean-Paul II et les musulmans,
CdD20, p. 57-65.
1.2. Les religions
Dennis Gira, Présentation des diverses religions,
CdD7, p. 145-166.
1.2.1. Islam
Maurice Gloton, Réflexion sur la traduction et l’interprétation du Coran,
CdD1, p. 87-94.
Michel Reeber, Le Coran du point de vue chrétien,
CdD2, p. 139-166.
Mgr. Pierre Claverie, Le dialogue entre chrétiens et musulmans dans les
Églises du Maghreb,
CdD3, p. 105-126.
Maurice Borrmans, Chrétiens et musulmans : quelles exigences pour un
dialogue ?,
CdD3, p. 129-150.
Gilles Couvreur, Perspectives pastorales,
CdD3, p. 153-159.
Dalil Boubakeur, De la violence et de la tolérance dans l’islam,
CdD4, p. 151-160.
Jean Landousies, Réflexions sur la rencontre de l’autre,
CdD4, p. 209-221.
Christian Chessel, Pour une théologie chrétienne de l’islam,
CdD5, p. 205-218.
Abd-Al-Haqq Guiderdoni, Aperçus sur l’ascèse vers Dieu en islam,
CdD6, p. 57-70.
Jean-Marc Aveline, L’Algérie blessée,
CdD8, p. 7-21.
Soheib Ben Cheikh, Islam et laïcité,
CdD8, p. 63-74.
Jean Legastelois, Qui ne risquera rien n’aura rien,
CdD8, p. 213-220.
201
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Chemins de Dialogue
Mgr Henri Teissier, Réflexion sur la relation islamo-chrétienne dans la crise
algérienne,
CdD9, p. 97-105.
Gilles Couvreur, En France, aujourd’hui, le dialogue interreligieux,
CdD9, p. 131-135.
Roger Michel, Le groupe des foyers islamo-chrétiens,
CdD10, p. 179-181.
Alain Feuvrier, Notes sur la révélation coranique,
CdD11, p. 169-178.
Joseph Doré, Foi islamique et pastorale chrétienne,
CdD12, p. 73-100.
Éric Geoffroy, À propos de la notion de qurb en islam - Introduction à l’étude
de Roger Michel,
CdD12, p. 103-108.
Roger Michel, La notion de qurb en islam,
CdD12, p. 109-135.
Gwenolé Jeusset, Un chemin de rencontre et de dialogue,
CdD13, p. 97-112.
Assemblée plénière des évêques de France, Catholiques et musulmans : un
chemin de rencontre et de dialogue,
CdD13, p. 113-130.
Roger Michel, La notion de qurb en islam (2e partie),
CdD13, p. 131-169.
Michel Guillaud, Faire France avec les jeunes musulmans,
CdD14, p. 109-124.
Franck Frégosi, Tariq Ramadan ou les habits neufs d’une vieille rhétorique !,
CdD14, p. 125-151.
Bénédicte du Chaffaut, Engagement pour la justice sociale de jeunes
musulmans en France,
CdD14, p. 153-172.
Gilbert Jouberjean, De la philosophie occidentale des droits de l’homme à leur
conception islamique,
CdD14, p. 223-246.
Jean-Louis Déclais, Les histoires prophétiques musulmanes - Libres propos
d’un lecteur,
CdD14, p. 247-261.
Mgr Bernard Panafieu, Chrétiens et musulmans face à l’avenir du monde,
CdD15, p. 99-105.
202
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Page 203
Tables générales
Roger Michel, La notion de qurb en islam (3e partie),
CdD15, p. 107-132.
Joseph Maalouf, Pour une collaboration éthique entre chrétiens et musulmans
au Liban : de la polémique au dialogue,
CdD15, p. 133-167.
Abd-al-Haqq Guiderdoni, Éléments d’une christologie coranique,
CdD17, p. 47-56.
Claude Geffré, La modernité : un défi pour le christianisme et l’islam,
CdD18, p. 23-46.
Luc Moreau, Chrétiens et musulmans - Dialogue « monothéiste » ?,
CdD18, p. 47-72.
François Jourdan, Les Sept Dormants, au seuil du XXIe siècle : un héritage
d’avenir exigeant ?,
CdD18, p. 73-88.
Gwénolé Jeusset, François d’Assise et les musulmans,
CdD18, p. 89-103.
Jean-François Berjonneau, Charles de Foucauld, frère universel, dans sa
relation avec l’étranger et sa rencontre avec les musulmans,
CdD18, p. 105-128.
Roger Michel, L’islam en dialogue avec ses mystiques,
CdD18, p. 181-189.
Éric Geoffroy, L’universalisme de l’islam : unité et multiplicité,
CdD19, p. 19-27.
Henri Teissier, L’Émir, homme de dialogue,
CdD19, p. 29-47.
Jean-Marie Gaudeul, Vers une nouvelle exégèse coranique ?,
CdD19, p. 49-83.
Jacques Jomier, Les attentats du 11 septembre 2001 et les questions sur l’islam
soulevées dans les médias,
CdD19, p. 135-154.
1.2.2. Judaïsme
Dominique Cerbelaud, L’indicible - Méditation sur la Shoah,
CdD1, p. 99-107.
Jean-Marc Chouraqui, Les paroles de l’un et les paroles de l’autre sont paroles
du Dieu vivant,
CdD4, p. 129-139.
203
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Chemins de Dialogue
Dominique Cerbelaud, Le regard de l’Église sur le judaïsme comme clé de son
dialogue avec les autres religions,
CdD5, p. 21-35.
Jean Dujardin, Terre promise - Terre due - Terre à partager ?,
CdD5, p. 37-61.
Claude Vigée, Borges devant la kabbale juive : de l’Écriture du Dieu au silence
de l’Aleph,
CdD6, p. 35-56.
Claude Tassin, L’orientation sapientielle de la prédication synagogale
ancienne,
CdD8, p. 181-205.
Jean Dujardin, Où en est le dialogue entre juifs et chrétiens aujourd’hui ?,
CdD9, p. 125-130.
Jean Landier, Antijudaïsme de l’Évangile de Jean ?,
CdD10, p. 113-128.
Card. Roger Etchegaray, Est-ce que le christianisme a besoin du judaïsme ?,
CdD11, p. 17-26.
Geneviève Comeau, Le dialogue avec le judaïsme aujourd’hui,
CdD11, p. 27-51.
Jean Richard, La personnalité messianique, une voie de dialogue judéochrétien,
CdD14, p. 179-204.
Geneviève Comeau, Loi et liberté dans le judaïsme et le christianisme,
CdD14, p. 205-216.
Charles Perrot, Jésus, le juif,
CdD17, p. 15-34.
1.2.3. Religions orientales
André Couture, Altérité et religions dans l’expérience de Dom Henri Le Saux,
CdD2, p. 27-53.
Dennis Gira, Peut-on parler d’« expérience religieuse » dans le bouddhisme ?,
CdD3, p. 89-97.
Pierre-François de Béthune, Le silence, chemin de dialogue. Réflexion sur
l’expérience des moines en dialogue,
CdD6, p. 201-207.
Dennis Gira, Une mystique bouddhique des pauvres,
CdD6, p. 109-127.
Günther Gebhardt, Ramakrishna, porteur d’un message pour notre temps ?,
CdD6, p. 129-140.
204
CdD-20
3/07/06
16:01
Page 205
Tables générales
Edmond Tang, La pertinence du confucianisme aujourd’hui,
CdD9, p. 143-149.
Michel Amaladoss, Quelqu’un peut-il être hindou-chrétien ?,
CdD9, p. 151-162.
Claude Geffré, Le thème de la sagesse comme lieu de rencontre entre le chris tianisme et la religion chinoise,
CdD10, p. 65-84.
Christine Barbier-Kontler, La figure du sage dans l’œuvre du maître taoïste
Zhuangzi,
CdD10, p. 85-103.
Daniel Pont, Dans les monastères zen du Japon,
CdD13, p. 53-65.
André Couture, L’énigme de la vie du Bouddha,
CdD16, p. 61-82.
Paul Magnin, Le bouddhisme en France,
CdD16, p. 83-100.
Henri Bourgeois, Amour et compassion selon le christianisme et le
bouddhisme,
CdD16, p. 101-116.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux (C.P.D.I.) et Conseil des
conférences épiscopales d’Europe (C.C.E.E.), La présence du bouddhisme
en Europe,
CdD16, p. 117-124.
Michaël Amaladoss, Comment les Hindous considèrent-ils Jésus Christ ?,
CdD17, p. 35-46.
Jean-Pierre Schnetzler, Non-dualité dans le bouddhisme - Ressources et résis tances,
CdD17, p. 89-108.
Michel Fédou, Le christianisme face au thème bouddhique de la non-dualité,
CdD17, p. 109-119.
Éric Rommeluère, L’expérience corporelle de la non-dualité chez Maître
Døgen,
CdD17, p. 121-133.
Dennis Gira, La non violence dans le bouddhisme : entre rêve et réalité,
CdD19, p. 95-112.
1.2.4. Religions traditionnelles
Bruno Chenu, Enjeux du synode africain,
CdD5, p. 103-125.
205
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16:01
Page 206
Chemins de Dialogue
Bertrand Evelin, Les religions traditionnelles africaines, lieu d’un question nement missionnaire,
CdD5, p. 127-152.
Abel Pasquier, Soâmba, Lièvre, maître de sagesse,
CdD10, p. 23-49.
Jean-Marie Mathieu, Dialogue imaginaire entre le vieux sage peul Amadou
Hampâté Bâ et un jeune blanc-bec,
CdD15, p. 169-185.
1.2.5. Nouveaux mouvements religieux
Michel Rondet, Nouvel Âge et foi chrétienne,
CdD3, p. 175-196.
Bertrand Ouellet, Le Centre d’information sur les nouvelles religions de
Montréal,
CdD3, p. 199-213.
Bernard Ugeux, Sectes - Malaise social et questionnement religieux,
CdD9, p. 195-212.
1.3. Thèmes croisés
1.3.1. Expériences religieuses
André Couture, Altérité et religions dans l’expérience de Dom Henri Le Saux,
CdD2, p. 27-53.
Marcel Neusch, L’expérience chrétienne de Dieu,
CdD3, p. 67-87.
Dennis Gira, Peut-on parler d’« expérience religieuse » dans le bouddhisme ?,
CdD3, p. 89-97.
Jean Abiven, Approche de la mystique selon les maîtres du Carmel,
CdD6, p. 19-33.
Abd-Al-Haqq Guiderdoni, Aperçus sur l’ascèse vers Dieu en islam,
CdD6, p. 57-70.
Vladimir Zielinsky, Le cœur dans la vision orthodoxe. Un lieu de la présence
réelle et du combat invisible,
CdD6, p. 71-101.
Dennis Gira, Une mystique bouddhique des pauvres,
CdD6, p. 109-127.
Jean-Marie Ploux, Dialogue mystique et religion,
CdD6, p. 141-175.
206
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16:01
Page 207
Tables générales
Pierre-François de Béthune, Le silence, chemin de dialogue. Réflexion sur
l’expérience des moines en dialogue,
CdD6, p. 201-207.
Claude Tassin, L’orientation sapientielle de la prédication synagogale
ancienne,
CdD8, p. 181-205.
André Gence, L’art, lieu épiphanique,
CdD8, p. 223-225.
Abel Pasquier, Soâmba, Lièvre, maître de sagesse,
CdD10, p. 23-49.
Claude Geffré, Le thème de la sagesse comme lieu de rencontre entre le chris tianisme et la religion chinoise,
CdD10, p. 65-84.
Daniel Pont, Dans les monastères zen du Japon,
CdD13, p. 53-65.
Pierre-François de Béthune, Le dialogue des spiritualités,
CdD13, p. 67-79.
Patrick Hart, Thomas Merton : un moine œcuménique,
CdD13, p. 81-91.
Thomas Merton, L’expérience intérieure. Notes sur la contemplation,
CdD15, p. 17-75.
Michel Rondet, L’expérience chrétienne,
CdD15, p. 77-81.
Gwendoline Jarczyk & Pierre-Jean Labarrière, L’expérience intérieure selon
Maître Eckhart,
CdD15, p. 83-94.
Henri Bourgeois, La non-dualité, qu’est-ce à dire dans le christianisme ?,
CdD17, p. 63-87.
Éric Rommeluère, L’expérience corporelle de la non-dualité chez Maître
Døgen,
CdD17, p. 121-133.
Marie-Anne Vannier, L’expérience spirituelle de la non-dualité chez Eckhart,
CdD17, p. 135-157.
Pierre Gire, Le christianisme en dialogue avec ses mystiques,
CdD18, p. 139-155.
Gérard Bailhache, Michel de Certeau, témoin de la mystique - Échos d’une
lecture buissonnière,
CdD18, p. 157-179.
207
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16:01
Page 208
Chemins de Dialogue
Roger Michel, L’islam en dialogue avec ses mystiques,
CdD18, p. 181-189.
Michel Rondet, Expérience mystique et discernement,
CdD18, p. 191-199.
Françoise Durand, La belle ténèbre de François Malaval,
CdD18, p. 201-219.
Jean-Marie Ploux, Mystiques et dialogue interreligieux,
CdD18, p. 221-259.
1.3.2. Société, laïcité et religions
Mgr Michel Sabbah, Les relations entre les religions : tolérance ou violence ?,
CdD4, p. 141-149.
Dalil Boubakeur, De la violence et de la tolérance dans l’islam,
CdD4, p. 151-160.
Bruno Chenu, Enjeux du synode africain,
CdD5, p. 103-125.
Jean Joncheray, La religion comme facteur possible de construction de l’identi fication dans la société française contemporaine,
CdD5, p. 159-188.
Jean-Marc Aveline, L’Algérie blessée,
CdD8, p. 7-21.
Emile Poulat, Histoire de la laïcité en France,
CdD8, p. 29-44.
Jean Boussinesq, Laïcité, démocratie et pluralisme,
CdD8, p. 45-62.
Soheib Ben Cheikh, Islam et laïcité,
CdD8, p. 63-74.
Alain Boyer, Le droit des religions en France,
CdD8, p. 75-98.
Henri Madelin, Christianisme et laïcité,
CdD8, p. 99-117.
Loi de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État,
CdD8, p. 119-132.
Jésus Asurmendi, Les deux sagesses du livre de Daniel,
CdD8, p. 169-179.
Mgr Henri Teissier, Réflexion sur la relation islamo-chrétienne dans la crise
algérienne,
CdD9, p. 97-105.
208
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16:01
Page 209
Tables générales
Mgr Mato Zovkic, L’importance de la collaboration interreligieuse en vue
d’une paix juste et durable en Bosnie-Herzegovine,
CdD9, p. 107-111.
Émir Harés Chéhab, La coexistence au Liban - Le dialogue continu,
CdD9, p. 113-123.
Jean Joncheray, Diversité de la référence au religieux,
CdD9, p. 163-173.
Christopher Lamb, Les Églises de Grande-Bretagne et le dialogue interreli gieux,
CdD9, p. 175-184.
Bernard Ugeux, Sectes - Malaise social et questionnement religieux,
CdD9, p. 195-212.
Pierre Gire, La gestion du fait religieux dans un établissement catholique
d’enseignement,
CdD14, p. 17-26.
Joseph Decoopman, Enseigner l’histoire des religions,
CdD14, p. 27-63.
Jean-Marc Aveline, L’école catholique et la rencontre des monothéismes en
France aujourd’hui,
CdD14, p. 65-86.
Christian Salenson, L’école catholique au seuil du troisième millénaire,
CdD14, p. 87-108.
Gilbert Jouberjean, De la philosophie occidentale des droits de l’homme à leur
conception islamique,
CdD14, p. 223-246.
Joseph Maalouf, Pour une collaboration éthique entre chrétiens et musulmans
au Liban : de la polémique au dialogue,
CdD15, p. 133-167.
Claude Geffré, La modernité : un défi pour le christianisme et l’islam,
CdD18, p. 23-46.
2. Théologie chrétienne
2.1. Textes de référence
Jean-Paul II, Discours aux cardinaux et à la Curie romaine le 22 décembre
1986,
CdD7, p. 29-39. CdD20, p. 163-173.
Concile Vatican II, Nostra ætate,
CdD7, p. 53-61. CdD20, p. 69-75.
209
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16:01
Page 210
Chemins de Dialogue
Paul VI, Ecclesiam suam (extraits),
CdD7, p. 62-63. CdD20, p. 79-81.
Secrétariat pour les non-chrétiens, Dialogue et mission,
CdD7, p. 65-85. CdD20, p. 91-97.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux & Congrégation pour
l’évangélisation des peuples, Dialogue et annonce,
CdD7, p. 87-132. CdD20, p. 99-110.
Jean-Paul II, Redemptoris missio (extraits),
CdD7, p. 133-136. CdD20, p. 83-90.
Fédération protestante de France, Enjeux du dialogue avec les juifs et les
musulmans,
CdD7, p. 167-181.
Dominique Cerbelaud, L’Église catholique et le judaïsme - Les principaux
textes du Magistère (1965-1998),
CdD12, p. 13-68.
Congrégation pour la doctrine de la foi, Dominus Iesus (extraits),
CdD20, p. 111-127.
Jean-Paul II, Chrétiens et musulmans sous le regard de Dieu,
CdD20, p. 129-142.
Jean-Paul II, Visite à la Synagogue de Rome,
CdD20, p. 143-161.
Jean-Paul II, Discours à la grande mosquée Omeyyade de Damas,
CdD20, p. 177-180.
Jean-Paul II, Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix,
CdD20, p. 181-193.
2.2. Théologie du dialogue interreligieux
Card. Robert Coffy, Enjeux théologiques et pastoraux du dialogue interreli gieux,
CdD1, p. 27-45.
André Gounelle, Théologies chrétiennes des religions du monde,
CdD1, p. 47-65.
Maurice Pivot, La foi chrétienne au défi du pluralisme religieux,
CdD1, p. 67-82.
Claude Geffré, Le fondement théologique du dialogue interreligieux,
CdD2, p. 73-103.
Dominique Cerbelaud, Pour une sophiologie des religions non-chrétiennes,
CdD3, p. 219-228.
210
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16:01
Page 211
Tables générales
Maurice Vidal, Dialogue au cœur de la mission, perspectives ecclésiologiques
d’Ecclesiam suam,
CdD4, p. 49-63.
Card. Jozef Tomko, Le dialogue, chemin de la mission,
CdD4, p. 65-105.
Jean-Marc Aveline, Penser la foi au cœur de la rencontre,
CdD4, p. 183-206.
Dominique Cerbelaud, Le regard de l’Église sur le judaïsme comme clé
de son dialogue avec les autres religions,
CdD5, p. 21-35.
Christian Chessel, Pour une théologie chrétienne de l’islam,
CdD5, p. 205-218.
Jean-Marie Ploux, Dialogue mystique et religion,
CdD6, p. 141-175.
Card. Robert Coffy, Le dialogue interreligieux,
CdD6, p. 183-199.
Christoph Théobald, L’Unique et ses témoins - Jalons pour une théologie
de la rencontre entre juifs, chrétiens et musulmans,
CdD7, p. 183-205.
Joseph Doré, La présence du Christ dans les religions non-chrétiennes,
CdD9, p. 13-50.
Michel Amaladoss, Quelqu’un peut-il être hindou-chrétien ?,
CdD9, p. 151-162.
Paul Bony, L’urgence de la mission chez saint Paul,
CdD10, p. 129-144.
Jean-Paul Gabus, Foi, culture et religion chez Paul Tillich,
CdD10, p. 147-160.
Pierre Gisel, Quelle place et quelle fonction de la théologie dans l’approche du
religieux et des religions ?,
CdD11, p. 59-110
André Gounelle, Les religions du monde selon Albert Schweitzer,
CdD12, p. 157-177.
Jean-Marc Aveline, L’engagement de Dieu et la mission de l’Église,
CdD16, p. 17-58.
Claude Geffré, Le paradoxe christologique comme clé herméneutique du
dialogue interreligieux,
CdD19, p. 161-182.
Jean Richard, Thèses pour une théologie pluraliste des religions,
CdD19, p. 183-206.
211
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16:01
Page 212
Chemins de Dialogue
Jean-Marc Aveline, Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux,
CdD20, p. 17-37.
2.3. Les incidences du dialogue interreligieux sur la théologie
2.3.1. Exégèse biblique
Pierre Gibert, Enseignement de la Bible et connaissance des religions,
CdD4, p. 169-180.
Paul Bony, Les prophètes d’Israël, instance critique du « religieux »,
CdD5, p. 63-87.
Jean Landier, Antijudaïsme de l’Évangile de Jean ?,
CdD10, p. 113-128.
Bernard Bidaut, Les paraboles dans les religions,
CdD11, p. 117-134.
Charles Perrot, Jésus, le juif,
CdD17, p. 15-34.
2.3.2. Théologie fondamentale et dogmatique
Maurice Pivot, Théologie fondamentale et rencontre des religions,
CdD5, p. 191-203.
André Couture, L’histoire des religions : discipline partenaire de la théologie ?,
CdD8, p. 139-161.
Jean-Marc Aveline, Pluralisme et vérité,
CdD10, p. 7-13.
Marcel Neusch, La sagesse chez saint Augustin,
CdD11, p. 147-167.
Jean-Marc Aveline, L’engagement de Dieu et la mission de l’Église,
CdD16, p. 17-58.
Claude Geffré, Le paradoxe christologique comme clé herméneutique du
dialogue interreligieux,
CdD19, p. 161-182.
Jean Richard, Thèses pour une théologie pluraliste des religions,
CdD19, p. 183-206.
Cardinal Francis Arinze, La Bienheureuse Vierge Marie, un signe pour les
croyants,
CdD19, p. 209-226.
212
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16:01
Page 213
Tables générales
2.3.3. Vie ecclésiale
Christian Salenson, La théologie des religions et la formation initiale des
prêtres,
CdD3, p. 231-240.
Mgr Bernard Panafieu, Le Comité épiscopal pour les relations interreligieuses,
CdD8, p. 209-211.
2.3.4. Théologie de la mission
André Couture, Altérité et religions dans l’expérience de Dom Henri Le Saux,
CdD2, p. 27-53.
Jean Landousies, Réflexions sur la rencontre de l’autre,
CdD4, p. 209-221.
Bertrand Evelin, Les religions traditionnelles africaines, lieu d’un question nement missionnaire,
CdD5, p. 127-152.
Paul Bony, L’urgence de la mission chez saint Paul,
CdD10, p. 129-144.
Henri-Jérôme Gagey, Bultmann et la théologie de la mission,
CdD12, p. 179-203.
Jean-Marc Aveline, L’engagement de Dieu et la mission de l’Église,
CdD16, p. 17-58.
Christian Delorme, Le sacrement de l’amitié - Compagnon de route de l’Islam,
CdD16, p. 167-184.
3. Sciences des religions
3.1. Anthropologie
Michel Meslin, Le champ de l’anthropologie religieuse,
CdD3, p. 23-42.
Michel Meslin, Expérience humaine du divin et traditions religieuses,
CdD3, p. 45-64.
Marcel Neusch, L’expérience chrétienne de Dieu,
CdD3, p. 67-87.
Pierre Titi Nwel, Questions relatives à l’inculturation,
CdD11, p. 135-145.
Pierre Gauzy, Quelques notes autour de la figure du diable,
CdD11, p. 179-186.
213
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16:01
Page 214
Chemins de Dialogue
Christian Salenson, La montagne, symbole sacré,
CdD16, p. 145-166.
Éric Rommeluère, L’expérience corporelle de la non-dualité chez Maître
Døgen,
CdD17, p. 121-133.
Marie-Anne Vannier, L’expérience spirituelle de la non-dualité chez Eckhart,
CdD17, p. 135-157.
Bernard de Give, La non-dualité vécue aujourd’hui à travers l’expérience
monastique,
CdD17, p. 159-173.
Pierre-Jean Labarrière, Hegel et le traitement de la dualité,
CdD17, p. 175-188.
3.2. Ethnologie
Abel Pasquier, Soâmba, Lièvre, maître de sagesse,
CdD10, p. 23-49.
3.3. Histoire
Emile Poulat, Histoire de la laïcité en France,
CdD8, p. 29-44.
André Couture, L’histoire des religions : discipline partenaire de la théologie ?,
CdD8, p. 139-161.
3.4. Sociologie
Jean Joncheray, La religion comme facteur possible de construction de l’identi fication dans la société française contemporaine,
CdD5, p. 159-188.
Jean Boussinesq, Laïcité, démocratie et pluralisme,
CdD8, p. 45-62.
Alain Boyer, Le droit des religions en France,
CdD8, p. 75-98.
Jean Joncheray, Diversité de la référence au religieux,
CdD9, p. 163-173.
Dominique de Courcelles, La sagesse dans l’Espagne du XIIIe siècle : le Livre
de Calila e Dimna,
CdD10, p. 51-64.
Bruno-Marie Duffé, Religion et politique - Un rapport paradoxal,
CdD13, p. 185-198.
214
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16:01
Page 215
Tables générales
Gérard Siegwalt, Le dialogue interreligieux - Qu’en est-il de l’absoluité du
christianisme dans une société sécularisée et plurireligieuse ?,
CdD13, p. 199-220.
François Chirpaz, La violence dans les religions,
CdD19, p. 113-134.
4. Compte rendus d’expériences
Jean-Marc Aveline & Paul Bony, A l’origine de l’I.S.T.R. de Marseille,
CdD1, p. 13-18.
Rencontre avec Jean-Michel Passenal, Le dialogue interreligieux dans la
pastorale du diocèse de Marseille,
CdD1, p. 19-22.
Rencontre avec Jean-Luc Thirion, Du « Comité Maghreb » au « Relais
Maghreb-Méditerranée », pôle de la pastorale des migrants : situation et
enjeux,
CdD2, p. 169-178.
Gilles Couvreur, Perspectives pastorales,
CdD3, p. 153-159.
Pierre-François de Béthune, Le silence, chemin de dialogue. Réflexion sur
l’expérience des moines en dialogue,
CdD6, p. 201-207.
Christian Salenson, Entretien avec Mgr Sabbah,
CdD7, p. 41-44.
Christopher Lamb, Les Églises de Grande-Bretagne et le dialogue interreli gieux,
CdD9, p. 175-184.
Robert Pousseur, Une expérience originale de dialogue interreligieux entre
jeunes,
CdD10, p. 163-177.
Roger Michel, Le groupe des foyers islamo-chrétiens,
CdD10, p. 179-181.
Marie-Christine Ray, Le témoignage de Tibhirine - Un chemin de rencontre
entre chrétiens et musulmans,
CdD13, p. 17-29.
André Barbeau, Tibhirine dans la vie de notre Ordre,
CdD13, p. 31-39.
Christian de Chergé (†), Tu es l’Autre que nous attendons !,
CdD13, p. 41-44.
215
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Page 216
Chemins de Dialogue
Christian de Chergé (†), En situation d’Église, hic et nunc,
CdD13, p. 45-51.
Jacques Levrat, La Source, à Rabat : un lieu de rencontre islamo-chrétien,
CdD13, p. 221-229.
Jean-Michel Passenal, Marseille-Espérance,
CdD15, p. 201-205.
Michel Serain, Le Groupe de recherches islamo-chrétien (G.R.I.C.),
CdD15, p. 207-209.
Frères et prêtres du diocèse de Rabat, Vivre la rencontre au quotidien,
CdD16, p. 185-192.
Jean-Pierre Ricard, Allocution lors de la visite du Dalaï Lama,
CdD16, p. 193-200.
Henri Sanson, L’Église d’Algérie,
CdD17, p. 191-204.
Jacques Levrat, Dialoguer, pourquoi ?,
CdD20, p. 39-55.
5. Bulletins bibliographiques et recensions
5.1. Bulletins bibliographiques
Roger Michel, Note sur l’islamisme,
CdD1, p. 95-97.
Gérard Grange, À propos de quelques livres d’introduction au judaïsme,
CdD1, p. 109-110.
Roger Michel, Un document pour les relations islamo-chrétiennes,
CdD2, p. 181-183.
Gérard Grange, Trois propositions pour éclairer un dialogue juifs-chrétiens,
CdD2, p. 185-187.
Pierre Gauzy, Quelques notes à propos du « Nouvel Âge »,
CdD2, p. 189-193.
Secrétariat pour les relations avec l’islam, À propos de quelques livres
concernant l’islam,
CdD3, p. 161-167.
Dennis Gira, Quelques livres de base sur le bouddhisme,
CdD4, p. 225-229.
Gérard Grange, Quelques livres pour une meilleure approche du judaïsme,
CdD4, p. 231-233.
216
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Tables générales
Gérard Grange, Quelques éléments pour constituer une bibliothèque élémen taire en vue d’une approche du judaïsme par des chrétiens,
CdD5, p. 89-96.
Maurice Pivot, Bulletin de théologie du dialogue interreligieux,
CdD10, p. 185-197.
Maurice Pivot, Bulletin de théologie du dialogue interreligieux,
CdD11, p. 189-203.
Pierre Fournier, La rencontre des religions au Liban,
CdD11, p. 205-224.
Dom Miquel, La rencontre des religions,
CdD12, p. 207-211.
Jean-Luc Brunin, Chronique islamologique,
CdD13, p. 171-180.
Jean-Luc Brunin, À propos d’un livre de Tariq Ramadan,
CdD16, p. 215-220.
Maurice Pivot, Rencontre du bouddhisme et de l’Occident. Bibliographie,
CdD16, p. 201-213.
Jean-Luc Brunin, À propos d’un livre de Tariq Ramadan,
CdD16, p. 215-220.
Jordi Llambrich, Dialogue islamo-chrétien en Tunisie,
CdD18, p. 263-273.
Michel-Marie du Merle, À propos du livre « Le moine et le lama »,
CdD19, p. 229-235.
5.2. Recensions
Christian Aurenche, Tokombéré au pays des Grands-Prêtres - Religions
Africaines et Évangile peuvent-ils inventer l’avenir ?,
[recensé par Bertrand Evelin dans CdD10 p. 199-202]
Joseph Doré (Dir.), Perspectives actuelles sur la tolérance,
[recensé par Jean-Marc Aveline dans CdD10 p. 203-206]
André Gence, Sur la terre comme au ciel,
[recensé par Stéphane Ligier dans CdD11 p. 225-227]
Marie-Madeleine Davy, Henri Le Saux, le passeur entre deux rives,
[recensé par Christian Salenson dans CdD11 p. 228]
Collectif sous la direction de Joseph Doré, Le christianisme vis-à-vis des
religions,
[recensé par Christian Salenson dans CdD11 p. 229-230]
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Chemins de Dialogue
Farid Esack, Qur'an, Liberation & Pluralisme - An Islamic Perspective of
Interreligious Solidarity against Oppression,
[recensé par Michel Guillaud dans CdD12 p. 213-215]
Gilles Couvreur, Musulmans de France - Diversité, mutation et perspectives
de l'islam français,
[recensé par Gilles Barrette dans CdD12 p. 216-217]
Jean-Luc Brunin, L'Église des banlieues - L'urbanité : quel défi pour les
chrétiens ?,
[Recensé par Michel Giraud dans CdD12 p. 218-221]
Katrin Amell, Contemplation et dialogue - Quelques exemples de dialogue
entre spiritualité après le concile Vatican II,
[Recensé par Christian Salenson dans CdD12 p. 222]
Joseph card. Ratzinger, « L'Unique Alliance » de Dieu et le pluralisme des
religions,
[recensé par Jean-Marc Aveline dans CdD13 p. 233-234]
Dom Pierre Miquel, Le Père. Le Fils. L'Esprit,
[recensé par Jean-Marc Aveline dans CdD13 p. 234-235]
Jean-Marie Ploux, Le christianisme a-t-il fait son temps ?,
[recensé par Bertrand Évelin dans CdD13 p. 235-237]
Groupe d'amitié islamo-chrétienne, Musulmans et chrétiens - Politique
d'accueil dans les terres d'origine ou d'immigration,
[recensé par Jean-Marc Aveline dans CdD13 p. 238]
Groupe de recherche islamo-chrétienne, Péché et responsabilité éthique dans
le monde contemporain,
[recensé par Roger Michel dans CdD15 p. 213]
Bernard Ugeux, Guérir à tout prix ?,
[recensé par Gérard Reynal dans CdD15 p. 214-215]
Roberto Gallinaro, La cristosofia di Simone Weil fra religione, filosofia ed
etica,
[recensé par Bernard Lucchési dans CdD17 p. 207-208]
Jean-Jacques Pérennès, Pierre Claverie. Un algérien par alliance,
[recensé par Christiane Passelac dans CdD17 p. 208]
Gilles Dorival, Didier Pralon et collab., Prières méditerranéennes hier et
aujourd'hui,
[recensé par Pierre Fournier dans CdD17 p. 209-201]
Jean-Marie Tillard, Je crois en dépit de tout,
[recensé par Christian Salenson dans CdD17 p. 211-212]
Dom Pierre Miquel, L’expérience spirituelle dans la tradition chrétienne,
[recensé par Françoise Durand dans CdD17 p. 213]
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Tables générales
Jean-Marie Ploux, Lettres à Sébastien - Un jeune peut-il encore croire en Dieu
aujourd’hui ?,
[recensé par Olivier Passelac dans CdD17 p. 214-215]
Dennis Gira et Jacques Scheuer, Vivre de plusieurs religions. Promesse ou
illusion ?,
[recensé par Bertrand Évelin dans CdD17, p. 215-216]
Dennis Gira, Au-delà de la tolérance, la rencontre des religions,
[recensé par Roger Michel dans CdD18, p. 275-276]
Albert Rouet, La chance d’un christianisme fragile,
[recensé par Françoise Durand dans CdD18, p. 277-278]
Danielle Hervieu-léger, La religion en miettes ou la question des sectes,
[recensé par Christian Salenson dans CdD18, p. 279-280]
Philippe Gaudin (dir.), La mort - Ce qu’en disent les religions,
[recensé par Gudrun Steiss dans CdD19, p. 237-238]
Paul Balta, L’Islam,
[recensé par Gilles Barrette dans CdD19, p. 239-242]
Geneviève Comeau (dir.), Le corps - Ce qu’en disent les religions,
[recensé par Olivier Passelac dans CdD19, p. 243-244]
Alfred-Louis de Prémare, Les Fondations de l’islam. Entre écriture et
histoire,
[recensé par Jean-Louis Déclais dans CdD19, p. 245-246]
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Chemins de Dialogue
Table des numéros
Chemins de Dialogue 1 - 1993
Paul Bony & Jean-Marc Aveline, A l’origine de l’I.S.T.R. de Marseille,
p. 13-18.
Rencontre avec Jean-Michel Passenal, Le dialogue interreligieux dans la
pastorale du diocèse de Marseille, p. 19-22.
Card. Robert Coffy, Enjeux théologiques et pastoraux du dialogue
interreligieux, p. 27-45.
André Gounelle, Théologies chrétiennes des religions du monde, p. 47-65.
Maurice Pivot, La foi chrétienne au défi du pluralisme religieux, p. 67-82.
Maurice Gloton, Réflexion sur la traduction et l’interprétation du Coran,
p. 87-94.
Roger Michel, Note sur l’islamisme, p. 95-97 (recension).
Dominique Cerbelaud, L’indicible - Méditation sur la Shoah, p. 99-107.
Gérard Grange, À propos de quelques livres d’introduction au judaïsme,
p. 109-110 (recension).
Chemins de Dialogue 2 - 1993
André Couture, Altérité et religions dans l’expérience de Dom Henri Le Saux,
p. 27-53.
Mgr. Michaël Fitzgerald, L’Église catholique dans le dialogue interreligieux :
bilans et perspectives, p. 55-70.
Claude Geffré, Le fondement théologique du dialogue interreligieux,
p. 73-103.
Michel Reeber, Le Coran du point de vue chrétien, p. 139-166.
Rencontre avec Jean-Luc Thirion, Du « Comité Maghreb » au « Relais
Maghreb-Méditerranée », pôle de la pastorale des migrants : situation et
enjeux, p. 169-178.
Roger Michel, Un document pour les relations islamo-chrétiennes,
p. 181-183 (recension).
Gérard Grange, Trois propositions pour éclairer un dialogue juifs-chrétiens,
p. 185-187 (recension).
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Tables générales
Pierre Gauzy, Quelques notes à propos du « Nouvel Âge »,
p. 189-193 (recension).
Chemins de Dialogue 3 - 1994 - L’expérience religieuse
Michel Meslin, Le champ de l’anthropologie religieuse, p. 23-42.
Michel Meslin, Expérience humaine du divin et traditions religieuses,
p. 45-64.
Marcel Neusch, L’expérience chrétienne de Dieu, p. 67-87.
Dennis Gira, Peut-on parler d’« expérience religieuse » dans le bouddhisme ?,
p. 89-97.
Mgr. Pierre Claverie, Le dialogue entre chrétiens et musulmans dans les
Églises du Maghreb, p. 105-126.
Maurice Borrmans, Chrétiens et musulmans : quelles exigences pour un
dialogue ?, p. 129-150.
Gilles Couvreur, Perspectives pastorales, p. 153-159.
S.R.I. (Secrétariat pour les relations avec l’islam), À propos de quelques
livres concernant l’islam, p. 161-167 (recension).
Michel Rondet, Nouvel Âge et foi chrétienne, p. 175-196.
Bertrand Ouellet, Le Centre d’information sur les nouvelles religions de
Montréal, p. 199-213.
Dominique Cerbelaud, Pour une sophiologie des religions non-chrétiennes,
p. 219-228.
Christian Salenson, La théologie des religions et la formation initiale des
prêtres, p. 231-240.
Chemins de Dialogue 4 - 1994 - Dialogue et mission
Jean Chelini, Paul VI et la mission de l’Église, p. 25-47.
Maurice Vidal, Dialogue au cœur de la mission, perspectives ecclésiologiques
d’Ecclesiam suam, p. 49-63.
Card. Jozef Tomko, Le dialogue, chemin de la mission, p. 65-105.
Jean Comby, À travers l’histoire : intolérance ou dialogue ?, p. 113-126.
Jean-Marc Chouraqui, Les paroles de l’un et les paroles de l’autre sont paroles
du Dieu vivant, p. 129-139.
Mgr Michel Sabbah, Les relations entre les religions : tolérance ou violence ?,
p. 141-149.
Dalil Boubakeur, De la violence et de la tolérance dans l’islam, p. 151-160.
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Chemins de Dialogue
Pierre Gibert, Enseignement de la Bible et connaissance des religions,
p. 169-180.
Jean-Marc Aveline, Penser la foi au cœur de la rencontre, p. 183-206.
Jean Landousies, Réflexions sur la rencontre de l’autre, p. 209-221.
Dennis Gira, Quelques livres de base sur le bouddhisme,
p. 225-229 (recension).
Gérard Grange, Quelques livres pour une meilleure approche du judaïsme,
p. 231-233 (recension).
Chemins de Dialogue 5 - 1995 - « Quitte ton pays… »
Dominique Cerbelaud, Le regard de l’Église sur le judaïsme comme clé de son
dialogue avec les autres religions, p. 21-35.
Jean Dujardin, Terre promise - Terre due - Terre à partager ?, p. 37-61.
Paul Bony, Les prophètes d’Israël, instance critique du « religieux », p. 63-87.
Gérard Grange, Quelques éléments pour constituer une bibliothèque élémen taire en vue d’une approche du judaïsme par des chrétiens,
p. 89-96 (recension).
Bruno Chenu, Enjeux du synode africain, p. 103-125.
Bertrand Evelin, Les religions traditionnelles africaines, lieu d’un question nement missionnaire, p. 127-152.
Jean Joncheray, La religion comme facteur possible de construction de l’identi fication dans la société française contemporaine, p. 159-188.
Maurice Pivot, Théologie fondamentale et rencontre des religions, p. 191-203.
Christian Chessel, Pour une théologie chrétienne de l’islam, p. 205-218.
Chemins de Dialogue 6 - 1995 - La mystique dans les religions
Jean Abiven, Approche de la mystique selon les maîtres du Carmel, p. 19-33.
Claude Vigée, Borges devant la kabbale juive : de l’Écriture du Dieu au silence
de l’Aleph, p. 35-56.
Abd-Al-Haqq Guiderdoni, Aperçus sur l’ascèse vers Dieu en islam, p. 57-70
Vladimir Zielinsky, Le cœur dans la vision orthodoxe. Un lieu de la présence
réelle et du combat invisible, p. 71-101.
Dennis Gira, Une mystique bouddhique des pauvres, p. 109-127.
Günther Gebhardt, Ramakrishna, porteur d’un message pour notre temps ?,
p. 129-140.
Jean-Marie Ploux, Dialogue mystique et religion, p. 141-175.
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Tables générales
Card. Robert Coffy, Le dialogue interreligieux, p. 183-199.
Pierre-François de Béthune, Le silence, chemin de dialogue. Réflexion sur
l’expérience des moines en dialogue, p. 201-207.
Chemins de Dialogue 7 - 1996 - L’esprit d’Assise
Card. Roger Etchegaray, L’esprit d’Assise, p. 7-9.
Christian Salenson, Histoire et enjeux de la rencontre d’Assise, p. 15-28.
Jean-Paul II, Discours aux cardinaux et à la Curie romaine le 22 décembre
1986, p. 29-39.
Christian Salenson, Entretien avec Mgr Sabbah, p. 41-44.
Concile Vatican II, Nostra ætate, p. 53-61.
Paul VI, Ecclesiam suam (extraits), p. 62-63.
Secrétariat pour les non-chrétiens, Dialogue et mission, p. 65-85.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux & Congrégation pour
l’évangélisation des peuples, Dialogue et annonce, p. 87-132.
Jean-Paul II, Redemptoris missio (extraits), p. 133-136.
Dennis Gira, Présentation des diverses religions, p. 145-166.
Fédération protestante de France, Enjeux du dialogue avec les juifs et les
musulmans, p. 167-181.
Christoph Théobald, L’Unique et ses témoins. Jalons pour une théologie de la
rencontre entre juifs, chrétiens et musulmans, p. 183-205.
Chemins de Dialogue 8 - 1996 - Laïcité et religions
Jean-Marc Aveline, L’Algérie blessée, p. 7-21.
Emile Poulat, Histoire de la laïcité en France, p. 29-44.
Jean Boussinesq, Laïcité, démocratie et pluralisme, p. 45-62.
Soheib Ben Cheikh, Islam et laïcité, p. 63-74.
Alain Boyer, Le droit des religions en France, p. 75-98.
Henri Madelin, Christianisme et laïcité, p. 99-117.
Loi de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, p. 119-132.
André Couture, L’histoire des religions : discipline partenaire de la théologie ?,
p. 139-161.
Jésus Asurmendi, Les deux sagesses du livre de Daniel, p. 169-179.
Claude Tassin, L’orientation sapientielle de la prédication synagogale
ancienne, p. 181-205.
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Chemins de Dialogue
Mgr Bernard Panafieu, Le Comité épiscopal pour les relations interreligieuses,
p. 209-211.
Jean Legastelois, Qui ne risquera rien n’aura rien, p. 213-220.
Jean-Claude Basset, Le dialogue dans l’esprit des Béatitudes, p. 221.
André Gence, L’art, lieu épiphanique, p. 223-225.
Chemins de Dialogue 9 - 1997 - Artisans de paix
Joseph Doré, La présence du Christ dans les religions non-chrétiennes,
p. 13-50.
Card. Francis Arinze, L’engagement de l’Église catholique dans le dialogue
interreligieux depuis Assise 1986, p. 81-95.
Mgr Henri Teissier, Réflexion sur la relation islamo-chrétienne dans la crise
algérienne, p. 97-105.
Mgr Mato Zovkic, L’importance de la collaboration interreligieuse en vue
d’une paix juste et durable en Bosnie-Herzegovine, p. 107-111.
Émir Harés Chéhab, La coexistence au Liban - Le dialogue continu,
p. 113-123.
Jean Dujardin, Où en est le dialogue entre juifs et chrétiens aujourd’hui ?,
p. 125-130.
Gilles Couvreur, En France, aujourd’hui, le dialogue interreligieux, p. 131135.
Edmond Tang, La pertinence du confucianisme aujourd’hui, p. 143-149.
Michel Amaladoss, Quelqu’un peut-il être hindou-chrétien ?, p. 151-162.
Jean Joncheray, Diversité de la référence au religieux, p. 163-173.
Christopher Lamb, Les Églises de Grande-Bretagne et le dialogue interreli gieux, p. 175-184.
Bernard Ugeux, Sectes - Malaise social et questionnement religieux,
p. 195-212.
Chemins de Dialogue 10 - 1997 - Voies de sagesse
Jean-Marc Aveline, Pluralisme et vérité, p. 7-13.
Abel Pasquier, Soâmba, Lièvre, maître de sagesse, p. 23-49.
Dominique de Courcelles, La sagesse dans l’Espagne du XIIIe siècle : le Livre
de Calila e Dimna, p. 51-64.
Claude Geffré, Le thème de la sagesse comme lieu de rencontre entre le chris tianisme et la religion chinoise, p. 65-84.
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Page 225
Tables générales
Christine Barbier-Kontler, La figure du sage dans l’œuvre du maître taoïste
Zhuangzi, p. 85-103.
Jean Landier, Antijudaïsme de l’Évangile de Jean ?, p. 113-128.
Paul Bony, L’urgence de la mission chez saint Paul, p. 129-144.
Jean-Paul Gabus, Foi, culture et religion chez Paul Tillich, p. 147-160.
Robert Pousseur, Une expérience originale de dialogue interreligieux entre
jeunes, p. 163-177.
Roger Michel, Le groupe des foyers islamo-chrétiens, p. 179-181.
Maurice Pivot, Bulletin de théologie du dialogue interreligieux, p. 185-197.
Chemins de Dialogue 11 - 1998 - Juifs et chrétiens : témoins de la promesse
Card. Roger Etchegaray, Est-ce que le christianisme a besoin du judaïsme ?,
p. 17-26.
Geneviève Comeau, Le dialogue avec le judaïsme aujourd’hui, p. 27-51.
Pierre Gisel, Quelle place et quelle fonction de la théologie dans l’approche du
religieux et des religions ?, p. 59-110
Bernard Bidaut, Les paraboles dans les religions, p. 117-134.
Pierre Titi Nwel, Questions relatives à l’inculturation, p. 135-145.
Marcel Neusch, La sagesse chez saint Augustin, p. 147-167.
Alain Feuvrier, Notes sur la révélation coranique, p. 169-178.
Pierre Gauzy, Quelques notes autour de la figure du diable, p. 179-186.
Maurice Pivot, Bulletin de théologie du dialogue interreligieux, p. 189-203.
Pierre Fournier, La rencontre des religions au Liban, p. 205-224.
Chemins de Dialogue 12 - 1998 - Contributions à la théologie du dialogue
Dominique Cerbelaud, L’Église catholique et le judaïsme - Les principaux
textes du Magistère (1965-1998), p. 13-68.
Joseph Doré, Foi islamique et pastorale chrétienne, p. 73-100.
Éric Geoffroy, À propos de la notion de qurb en islam - Introduction à l’étude
de Roger Michel, p. 103-108.
Roger Michel, La notion de qurb en islam, p. 109-135.
Marie-Jeanne Coutagne, Averroès, Maïmonide, Bernard, Thomas et les
autres…, p. 143-156.
André Gounelle, Les religions du monde selon Albert Schweitzer, p. 157-177.
Henri-Jérôme Gagey, Bultmann et la théologie de la mission, p. 179-203.
Dom Miquel, La rencontre des religions, p. 207-211.
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Page 226
Chemins de Dialogue
Chemins de Dialogue 13 - 1999 - L'Autre que nous attendons
Marie-Christine Ray, Le témoignage de Tibhirine - Un chemin de rencontre
entre chrétiens et musulmans, p. 17-29.
André Barbeau, Tibhirine dans la vie de notre Ordre, p. 31-39.
Christian de Chergé (†), Tu es l’Autre que nous attendons !, p. 41-44.
Christian de Chergé (†), En situation d’Église, hic et nunc, p. 45-51.
Daniel Pont, Dans les monastères zen du Japon, p. 53-65.
Pierre-François de Béthune, Le dialogue des spiritualités, p. 67-79.
Patrick Hart, Thomas Merton : un moine œcuménique, p. 81-91.
Gwenolé Jeusset, Un chemin de rencontre et de dialogue, p. 97-112.
Assemblée plénière des évêques de France, Catholiques et musulmans : un
chemin de rencontre et de dialogue, p. 113-130.
Roger Michel, La notion de qurb en islam (2e partie), p. 131-169.
Jean-Luc Brunin, Chronique islamologique, p. 171-180.
Bruno-Marie Duffé, Religion et politique - Un rapport paradoxal, p. 185-198.
Gérard Siegwalt, Le dialogue interreligieux - Qu’en est-il de l’absoluité du
christianisme dans une société sécularisée et plurireligieuse ?, p. 199-220.
Jacques Levrat, La Source, à Rabat : un lieu de rencontre islamo-chrétien,
p. 221-229.
Chemins de Dialogue 14 - 1999 - Le fait religieux à l'école
Pierre Gire, La gestion du fait religieux dans un établissement catholique
d’enseignement, p. 17-26.
Joseph Decoopman, Enseigner l’histoire des religions, p. 27-63.
Jean-Marc Aveline, L’école catholique et la rencontre des monothéismes en
France aujourd’hui, p. 65-86.
Christian Salenson, L’école catholique au seuil du troisième millénaire,
p. 87-108.
Michel Guillaud, Faire France avec les jeunes musulmans, p. 109-124.
Franck Frégosi, Tariq Ramadan ou les habits neufs d’une vieille rhétorique !,
p. 125-151.
Bénédicte du Chaffaut, Engagement pour la justice sociale de jeunes
musulmans en France, p. 153-172.
Jean Richard, La personnalité messianique, une voie de dialogue judéochrétien, p. 179-204.
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Tables générales
Geneviève Comeau, Loi et liberté dans le judaïsme et le christianisme,
p. 205-216.
Gilbert Jouberjean, De la philosophie occidentale des droits de l’homme à leur
conception islamique, p. 223-246.
Jean-Louis Déclais, Les histoires prophétiques musulmanes - Libres propos
d’un lecteur, p. 247-261.
Chemins de Dialogue 15 - 2000 - L'expérience religieuse chrétienne
Thomas Merton, L’expérience intérieure. Notes sur la contemplation,
p. 17-75.
Michel Rondet, L’expérience chrétienne, p. 77-81.
Gwendoline Jarczyk & Pierre-Jean Labarrière, L’expérience intérieure selon
Maître Eckhart, p. 83-94.
Mgr Bernard Panafieu, Chrétiens et musulmans face à l’avenir du monde,
p. 99-105.
Roger Michel, La notion de qurb en islam (3e partie), p. 107-132.
Joseph Maalouf, Pour une collaboration éthique entre chrétiens et musulmans
au Liban : de la polémique au dialogue, p. 133-167.
Jean-Marie Mathieu, Dialogue imaginaire entre le vieux sage peul Amadou
Hampâté Bâ et un jeune blanc-bec, p. 169-185.
Bernard Lucchesi, Henri Bouillard et l’I.S.T.R. de Paris, p. 189-199.
Jean-Michel Passenal, Marseille-Espérance, p. 201-205.
Michel Serain, Le Groupe de recherches islamo-chrétien (G.R.I.C.), p. 207-209.
Chemins de Dialogue 16 - 2000 - Traditions bouddhistes et Occident
Jean-Marc Aveline, L’engagement de Dieu et la mission de l’Église, p. 17-58.
André Couture, L’énigme de la vie du Bouddha, p. 61-82.
Paul Magnin, Le bouddhisme en France, p. 83-100.
Henri Bourgeois, Amour et compassion selon le christianisme et le
bouddhisme, p. 101-116.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux (C.P.D.I.) et Conseil des
conférences épiscopales d’Europe (C.C.E.E.), La présence du bouddhisme
en Europe, p. 117-124.
Joseph Doré, Aspects de la réception de Nostra ætate dans l’Église de France,
p. 125-144.
Christian Salenson, La montagne, symbole sacré, p. 145166.
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Page 228
Chemins de Dialogue
Christian Delorme, Le sacrement de l’amitié - Compagnon de route de l’Islam,
p. 167-184.
Frères et prêtres du diocèse de Rabat, Vivre la rencontre au quotidien,
p. 185-192.
Jean-Pierre Ricard, Allocution lors de la visite du Dalaï Lama, p. 193-200.
Maurice Pivot, Rencontre du bouddhisme et de l’Occident. Bibliographie, p.
201-213.
Jean-Luc Brunin, À propos d’un livre de Tariq Ramadan, p. 215-220.
Chemins de Dialogue 17 - 2001 La non-dualité : bouddhisme et christianisme
Charles Perrot, Jésus, le juif, p. 15-34.
Michaël Amaladoss, Comment les Hindous considèrent-ils Jésus Christ ?,
p. 35-46.
Abd-al-Haqq Guiderdoni, Éléments d’une christologie coranique, p. 47-56.
Henri Bourgeois, La non-dualité, qu’est-ce à dire dans le christianisme ?,
p. 63-87.
Jean-Pierre Schnetzler, Non-dualité dans le bouddhisme - Ressources et résis tances, p. 89-108.
Michel Fédou, Le christianisme face au thème bouddhique de la non-dualité,
p. 109-119.
Éric Rommeluère, L’expérience corporelle de la non-dualité chez Maître
Døgen, p. 121-133.
Marie-Anne Vannier, L’expérience spirituelle de la non-dualité chez Eckhart,
p. 135-157.
Bernard de Give, La non-dualité vécue aujourd’hui à travers l’expérience
monastique, p. 159-173.
Pierre-Jean Labarrière, Hegel et le traitement de la dualité, p. 175-188.
Henri Sanson, L’Église d’Algérie, p. 191-204.
Chemins de Dialogue 18 - 2001 - La religion et la mystique
Claude Geffré, La modernité : un défi pour le christianisme et l’islam,
p. 23-46.
Luc Moreau, Chrétiens et musulmans - Dialogue « monothéiste » ?, p. 47-72.
François Jourdan, Les Sept Dormants, au seuil du XXIe siècle : un héritage
d’avenir exigeant ?, p. 73-88.
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Tables générales
Gwénolé Jeusset, François d’Assise et les musulmans, p. 89-103.
Jean-François Berjonneau, Charles de Foucauld, frère universel, dans sa
relation avec l’étranger et sa rencontre avec les musulmans, p. 105-128.
Pierre Gire, Le christianisme en dialogue avec ses mystiques, p. 139-155.
Gérard Bailhache, Michel de Certeau, témoin de la mystique - Échos d’une
lecture buissonnière, p. 157-179.
Roger Michel, L’islam en dialogue avec ses mystiques, p. 181-189.
Michel Rondet, Expérience mystique et discernement, p. 191-199.
Françoise Durand, La belle ténèbre de François Malaval, p. 201-219.
Jean-Marie Ploux, Mystiques et dialogue interreligieux, p. 221-259.
Jordi Llambrich, Dialogue islamo-chrétien en Tunisie, p. 263-273.
Chemins de Dialogue 19 - 2002 - Religions, paix et violence
Christian Salenson, Assise, de 1986 à 2002, p. 7-12.
Éric Geoffroy, L’universalisme de l’islam : unité et multiplicité, p. 19-27.
Henri Teissier, L’Émir, homme de dialogue, p. 29-47.
Jean-Marie Gaudeul, Vers une nouvelle exégèse coranique ?, p. 49-83.
Dennis Gira, La non violence dans le bouddhisme : entre rêve et réalité,
p. 95-112.
François Chirpaz, La violence dans les religions, p. 113-134.
Jacques Jomier, Les attentats du 11 septembre 2001 et les questions sur l’islam
soulevées dans les médias, p. 135-154.
Claude Geffré, Le paradoxe christologique comme clé herméneutique du
dialogue interreligieux, p. 161-182.
Jean Richard, Thèses pour une théologie pluraliste des religions, p. 183-206.
Cardinal Francis Arinze, La Bienheureuse Vierge Marie, un signe pour les
croyants, p. 209-226.
Michel-Marie du Merle, À propos du livre « Le moine et le lama »,
p. 229-235.
Chemins de Dialogue 20 - 2002 - L’Église et les religions
Jean-Marc Aveline, Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux,
p. 17-37.
Jacques Levrat, Dialoguer, pourquoi ?, p. 39-55.
Roger Michel, Le Pape Jean-Paul II et les musulmans, p. 57-65.
Concile Vatican II, Nostra ætate, p. 69-75.
229
CdD-20
3/07/06
16:01
Page 230
Chemins de Dialogue
Paul VI, Ecclesiam suam (extraits), p. 79-81.
Jean-Paul II, Redemptoris missio (extraits), p. 83-90.
Secrétariat pour les non-chrétiens, Dialogue et mission (extraits), p. 91-97.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et Congrégation pour
l’évangélisation des peuples, Dialogue et annonce (extraits), p. 99-110.
Congrégation pour la doctrine de la foi, Dominus Iesus (extraits),
p. 111-127.
Jean-Paul II, Chrétiens et musulmans sous le regard de Dieu, p. 129-142.
Jean-Paul II, Visite à la Synagogue de Rome, p. 143-161.
Jean-Paul II, Discours aux Cardinaux et à la Curie Romaine, p. 163-173.
Jean-Paul II, Discours à la grande mosquée Omeyyade de Damas, p. 177-180.
Jean-Paul II, Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix,
p. 181-193.
230
CdD-20
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16:01
Page 231
Tables générales
Table des auteurs
A
Jean Abiven, Approche de la mystique selon les maîtres du Carmel,
CdD6, p. 19-33.
Michel Amaladoss, Quelqu’un peut-il être hindou-chrétien ?,
CdD9, p. 151-162.
Michaël Amaladoss, Comment les Hindous considèrent-ils Jésus Christ ?,
CdD17, p. 35-46.
Cardinal Francis Arinze, L’engagement de l’Église catholique dans le dialogue
interreligieux depuis Assise 1986,
CdD9, p. 81-95.
Cardinal Francis Arinze, La Bienheureuse Vierge Marie, un signe pour les
croyants,
CdD19, p. 209-226.
Assemblée plénière des évêques de France, Catholiques et musulmans : un
chemin de rencontre et de dialogue,
CdD13, p. 113-130.
Jésus Asurmendi, Les deux sagesses du livre de Daniel,
CdD8, p. 169-179.
Jean-Marc Aveline & Paul Bony, À l’origine de l’I.S.T.R. de Marseille,
CdD1, p. 13-18.
Jean-Marc Aveline, Penser la foi au cœur de la rencontre,
CdD4, p. 183-206.
Jean-Marc Aveline, L’Algérie blessée,
CdD8, p. 7-21.
Jean-Marc Aveline, Pluralisme et vérité,
CdD10, p. 7-13.
Jean-Marc Aveline, L’école catholique et la rencontre des monothéismes en
France aujourd’hui,
CdD14, p. 65-86.
Jean-Marc Aveline, L’engagement de Dieu et la mission de l’Église,
CdD16, p. 17-36.
Jean-Marc Aveline, Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux,
CdD20, p. 17-37.
231
CdD-20
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16:01
Page 232
Chemins de Dialogue
B
Gérard Bailhache, Michel de Certeau, témoin de la mystique - Échos d’une
lecture buissonnière,
CdD18, p. 157-179.
André Barbeau, Tibhirine dans la vie de notre Ordre,
CdD13, p. 31-39.
Christine Barbier-Kontler, La figure du sage dans l’œuvre du maître taoïste
Zhuangzi,
CdD10, p. 85-103.
Jean-Claude Basset, Le dialogue dans l’esprit des Béatitudes,
CdD8, p. 221.
Jean-François Berjonneau, Charles de Foucauld, frère universel, dans sa rela tion avec l’étranger et sa rencontre avec les musulmans,
CdD18, p. 105-128.
Pierre-François de Béthune, Le silence, chemin de dialogue. Réflexion sur
l’expérience des moines en dialogue,
CdD6, p. 201-207.
Pierre-François de Béthune, Le dialogue des spiritualités,
CdD13, p. 67-79.
Bernard Bidaut, Les paraboles dans les religions,
CdD11, p. 117-134.
Paul Bony & Jean-Marc Aveline, À l’origine de l’I.S.T.R. de Marseille,
CdD1, p. 13-18.
Paul Bony, Les prophètes d’Israël, instance critique du « religieux »,
CdD5, p. 63-87.
Paul Bony, L’urgence de la mission chez saint Paul,
CdD10, p. 129-144.
Maurice Borrmans, Chrétiens et musulmans : quelles exigences pour un
dialogue ?,
CdD3, p. 129-150.
Dalil Boubakeur, De la violence et de la tolérance dans l’islam,
CdD4, p. 151-160.
Henri Bourgeois, Amour et compassion selon le christianisme et le boud dhisme,
CdD16, p. 101-116.
Henri Bourgeois, La non-dualité, qu’est-ce à dire dans le christianisme ?,
CdD17, p. 63-87.
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16:01
Page 233
Tables générales
Jean Boussinesq, Laïcité, démocratie et pluralisme,
CdD8, p. 45-62.
Alain Boyer, Le droit des religions en France,
CdD8, p. 75-98.
Jean-Luc Brunin, Chronique islamologique,
CdD13, p. 171-180.
Jean-Luc Brunin, À propos d’un livre de Tariq Ramadan,
CdD16, p. 215-220.
C
Dominique Cerbelaud, L’indicible - Méditation sur la Shoah,
CdD1, p. 99-107.
Dominique Cerbelaud, Pour une sophiologie des religions non-chrétiennes,
CdD3, p. 219-228.
Dominique Cerbelaud, Le regard de l’Église sur le judaïsme comme clé
de son dialogue avec les autres religions,
CdD5, p. 21-35.
Dominique Cerbelaud, L’Église catholique et le judaïsme - Les principaux
textes du Magistère (1965-1998),
CdD12, p. 13-68.
Bénédicte du Chaffaut, Engagement pour la justice sociale de jeunes musul mans en France,
CdD14, p. 153-172.
Émir Harés Chéhab, La coexistence au Liban - Le dialogue continu,
CdD9, p. 113-123.
Soheib Ben Cheikh, Islam et laïcité,
CdD8, p. 63-74.
Jean Chelini, Paul VI et la mission de l’Église,
CdD4, p. 25-47.
Bruno Chenu, Enjeux du synode africain,
CdD5, p. 103-125.
Christian de Chergé (†), Tu es l’Autre que nous attendons !,
CdD13, p. 41-44.
Christian de Chergé (†), En situation d’Église, hic et nunc,
CdD13, p. 45-51.
Christian Chessel, Pour une théologie chrétienne de l’islam,
CdD5, p. 205-218.
François Chirpaz, La violence dans les religions,
CdD19, p. 113-134.
233
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Page 234
Chemins de Dialogue
Jean-Marc Chouraqui, Les paroles de l’un et les paroles de l’autre sont paroles
du Dieu vivant,
CdD4, p. 129-139.
Pierre Claverie, Le dialogue entre chrétiens et musulmans dans les Églises du
Maghreb,
CdD3, p. 105-126.
Cardinal Robert Coffy, Enjeux théologiques et pastoraux du dialogue interre ligieux,
CdD1, p. 27-45.
Cardinal Robert Coffy, Le dialogue interreligieux,
CdD6, p. 183-199.
Jean Comby, À travers l’histoire : intolérance ou dialogue ?,
CdD4, p. 113-126.
Geneviève Comeau, Le dialogue avec le judaïsme aujourd’hui,
CdD11, p. 27-51.
Geneviève Comeau, Loi et liberté dans le judaïsme et le christianisme,
CdD14, p. 205-216.
Congrégation pour la doctrine de la foi, Dominus Iesus (extraits),
CdD20, p. 111-127.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux (C.P.D.I.) et Conseil des
conférences épiscopales d’Europe (C.C.E.E.), La présence du bouddhisme
en Europe,
CdD16, p. 117-124.
Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et Congrégation pour
l’évangélisation des peuples, Dialogue et annonce (extraits),
CdD20, p. 99-110.
Dominique de Courcelles, La sagesse dans l’Espagne du XIIIe siècle : le Livre
de Calila e Dimna,
CdD10, p. 51-64.
Marie-Jeanne Coutagne, Averroès, Maïmonide, Bernard, Thomas et les
autres…,
CdD12, p. 143-156.
André Couture, Altérité et religions dans l’expérience de Dom Henri Le Saux,
CdD2, p. 27-53.
André Couture, L’histoire des religions : discipline partenaire de la théologie ?,
CdD8, p. 139-161.
André Couture, L’énigme de la vie du Bouddha,
CdD16, p. 61-82.
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16:01
Page 235
Tables générales
Gilles Couvreur, Perspectives pastorales,
CdD3, p. 153-159.
Gilles Couvreur, En France, aujourd’hui, le dialogue interreligieux,
CdD9, p. 131-135.
D
Jean-Louis Déclais, Les histoires prophétiques musulmanes - Libres propos
d’un lecteur,
CdD14, p. 247-261.
Joseph Decoopman, Enseigner l’histoire des religions,
CdD14, p. 27-63.
Christian Delorme, Le sacrement de l’amitié - Compagnon de route de l’Islam,
CdD16, p. 167-184.
Joseph Doré, La présence du Christ dans les religions non-chrétiennes,
CdD9, p. 13-50.
Joseph Doré, Foi islamique et pastorale chrétienne,
CdD12, p. 73-100.
Joseph Doré, Aspects de la réception de Nostra ætate dans l’Église de France,
CdD16, p. 125-144.
Bruno-Marie Duffé, Religion et politique - Un rapport paradoxal,
CdD13, p. 185-198.
Jean Dujardin, Terre promise - Terre due - Terre à partager ?,
CdD5, p. 37-61.
Jean Dujardin, Où en est le dialogue entre juifs et chrétiens aujourd’hui ?,
CdD9, p. 125-130.
Michel-Marie du Merle, À propos du livre « Le moine et le lama »,
CdD19, p. 229-235.
Françoise Durand, La belle ténèbre de François Malaval,
CdD18, p. 201-219.
E
Cardinal Roger Etchegaray, L’esprit d’Assise,
CdD7, p. 7-9.
Cardinal Roger Etchegaray, Est-ce que le christianisme a besoin du
judaïsme ?,
CdD11, p. 17-26.
Bertrand Evelin, Les religions traditionnelles africaines, lieu d’un questionne ment missionnaire,
CdD5, p. 127-152.
235
CdD-20
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16:01
Page 236
Chemins de Dialogue
F
Fédération protestante de France, Enjeux du dialogue avec les juifs et les
musulmans,
CdD7, p. 167-181.
Michel Fédou, Le christianisme face au thème bouddhique de la non-dualité,
CdD17, p. 109-119.
Alain Feuvrier, Notes sur la révélation coranique,
CdD11, p. 169-178.
Michaël Fitzgerald, L’Église catholique dans le dialogue interreligieux : bilans
et perspectives,
CdD2, p. 55-70.
Pierre Fournier, La rencontre des religions au Liban,
CdD11, p. 205-224.
Franck Frégosi, Tariq Ramadan ou les habits neufs d’une vieille rhétorique !,
CdD14, p. 125-151.
Frères et prêtres du diocèse de Rabat, Vivre la rencontre au quotidien,
CdD16, p. 185-192.
G
Jean-Paul Gabus, Foi, culture et religion chez Paul Tillich,
CdD10, p. 147-160.
Henri-Jérôme Gagey, Bultmann et la théologie de la mission,
CdD12, p. 179-203.
Jean-Marie Gaudeul, Vers une nouvelle exégèse coranique ?,
CdD19, p. 49-83.
Pierre Gauzy, Quelques notes à propos du « Nouvel Âge »,
CdD2, p. 189-193 (recension).
Pierre Gauzy, Quelques notes autour de la figure du diable,
CdD11, p. 179-186.
Günther Gebhardt, Ramakrishna, porteur d’un message pour notre temps ?,
CdD6, p. 129-140.
Claude Geffré, Le fondement théologique du dialogue interreligieux,
CdD2, p. 73-103.
Claude Geffré, Le thème de la sagesse comme lieu de rencontre entre le chris tianisme et la religion chinoise,
CdD10, p. 65-84.
Claude Geffré, La modernité : un défi pour le christianisme et l’islam,
CdD18, p. 23-46.
236
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16:01
Page 237
Tables générales
Claude Geffré, Le paradoxe christologique comme clé herméneutique du
dialogue interreligieux,
CdD19, p. 161-182.
André Gence, L’art, lieu épiphanique,
CdD8, p. 223-225.
Éric Geoffroy, À propos de la notion de qurb en islam - Introduction à l’étude
de Roger Michel,
CdD12, p. 103-108.
Éric Geoffroy, L’universalisme de l’islam : unité et multiplicité,
CdD19, p. 19-27.
Pierre Gibert, Enseignement de la Bible et connaissance des religions,
CdD4, p. 169-180.
Dennis Gira, Peut-on parler d’« expérience religieuse » dans le bouddhisme ?,
CdD3, p. 89-97.
Dennis Gira, Quelques livres de base sur le bouddhisme,
CdD4, p. 225-229 (recension).
Dennis Gira, Une mystique bouddhique des pauvres,
CdD6, p. 109-127.
Dennis Gira, Présentation des diverses religions,
CdD7, p. 145-166.
Dennis Gira, La non violence dans le bouddhisme : entre rêve et réalité,
CdD19, p. 95-112.
Pierre Gire, La gestion du fait religieux dans un établissement catholique d’en seignement,
CdD14, p. 17-26.
Pierre Gire, Le christianisme en dialogue avec ses mystiques,
CdD18, p. 139-155.
Pierre Gisel, Quelle place et quelle fonction de la théologie dans l’approche du
religieux et des religions ?,
CdD11, p. 59-110.
Bernard de Give, La non-dualité vécue aujourd’hui à travers l’expérience
monastique,
CdD17, p. 159-173.
Maurice Gloton, Réflexion sur la traduction et l’interprétation du Coran,
CdD1, p. 87-94.
André Gounelle, Théologies chrétiennes des religions du monde,
CdD1, p. 47-65.
André Gounelle, Les religions du monde selon Albert Schweitzer,
CdD12, p. 157-177.
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Page 238
Chemins de Dialogue
Gérard Grange, À propos de quelques livres d’introduction au judaïsme,
CdD1, p. 109-110 (recension).
Gérard Grange, Trois propositions pour éclairer un dialogue Juifs-Chrétiens,
CdD2, p. 185-187 (recension).
Gérard Grange, Quelques livres pour une meilleure approche du judaïsme,
CdD4, p. 231-233 (recension).
Gérard Grange, Quelques éléments pour constituer une bibliothèque élémen taire en vue d’une approche du judaïsme par des chrétiens,
CdD5, p. 89-96 (recension).
Abd-Al-Haqq Guiderdoni, Aperçus sur l’ascèse vers Dieu en islam,
CdD6, p. 57-70.
Abd-al-Haqq Guiderdoni, Éléments d’une christologie coranique,
CdD17, p. 47-56.
Michel Guillaud, Faire France avec les jeunes musulmans,
CdD14, p. 109-124.
H
Patrick Hart, Thomas Merton : un moine œcuménique,
CdD13, p. 81-91.
J
Gwendoline Jarczyk & Pierre-Jean Labarrière, L’expérience intérieure selon
Maître Eckhart,
CdD15, p. 83-94.
Jean-Paul II, Redemptoris missio (extraits),
CdD20, p. 83-90.
Jean-Paul II, Chrétiens et musulmans sous le regard de Dieu,
CdD20, p. 129-142.
Jean-Paul II, Visite à la Synagogue de Rome,
CdD20, p. 143-161.
Jean-Paul II, Discours aux Cardinaux et à la Curie Romaine,
CdD20, p. 163-173.
Jean-Paul II, Discours à la grande mosquée Omeyyade de Damas,
CdD20, p. 177-180.
Jean-Paul II, Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix,
CdD20, p. 181-193.
Gwenolé Jeusset, Un chemin de rencontre et de dialogue,
CdD13, p. 97-112.
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16:01
Page 239
Tables générales
Gwénolé Jeusset, François d’Assise et les musulmans,
CdD18, p. 89-103.
Jacques Jomier, Les attentats du 11 septembre 2001 et les questions sur l’islam
soulevées dans les médias,
CdD19, p. 135-154.
Jean Joncheray, La religion comme facteur possible de construction de l’identi fication dans la société française contemporaine,
CdD5, p. 159-188.
Jean Joncheray, Diversité de la référence au religieux,
CdD9, p. 163-173.
Gilbert Jouberjean, De la philosophie occidentale des droits de l’homme à leur
conception islamique,
CdD14, p. 223-246.
François Jourdan, Les Sept Dormants, au seuil du XXIe siècle : un héritage
d’avenir exigeant ?,
CdD18, p. 73-88.
L
Pierre-Jean Labarrière & Gwendoline Jarczyk, L’expérience intérieure selon
Maître Eckhart,
CdD15, p. 83-94.
Pierre-Jean Labarrière, Hegel et le traitement de la dualité,
CdD17, p. 175-188.
Christopher Lamb, Les Églises de Grande-Bretagne et le dialogue interreli gieux,
CdD9, p. 175-184.
Jordi Llambrich, Dialogue islamo-chrétien en Tunisie,
CdD18, p. 263-273.
Jean Landier, Antijudaïsme de l’Évangile de Jean ?,
CdD10, p. 113-128.
Jean Landousies, Réflexions sur la rencontre de l’autre,
CdD4, p. 209-221.
Jean Legastelois, Qui ne risquera rien n’aura rien,
CdD8, p. 213-220.
Jacques Levrat, La Source, à Rabat : un lieu de rencontre islamo-chrétien,
CdD13, p. 221-229.
Jacques Levrat, Dialoguer, pourquoi ?,
CdD20, p. 39-55.
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16:01
Page 240
Chemins de Dialogue
Bernard Lucchesi, Henri Bouillard et l’I.S.T.R. de Paris,
CdD15, p. 189-199.
M
Joseph Maalouf, Pour une collaboration éthique entre chrétiens et musulmans
au Liban : de la polémique au dialogue,
CdD15, p. 133-167.
Henri Madelin, Christianisme et laïcité,
CdD8, p. 99-117.
Paul Magnin, Le bouddhisme en France,
CdD16, p. 83-100.
Jean-Marie Mathieu, Dialogue imaginaire entre le vieux sage peul Amadou
Hampâté Bâ et un jeune blanc-bec,
CdD15, p. 169-185.
Thomas Merton, L’expérience intérieure. Notes sur la contemplation,
CdD15, p. 17-75.
Michel Meslin, Le champ de l’anthropologie religieuse,
CdD3, p. 23-42.
Michel Meslin, Expérience humaine du divin et traditions religieuses,
CdD3, p. 45-64.
Roger Michel, Note sur l’islamisme,
CdD1, p. 95-97 (recension).
Roger Michel, Un document pour les relations islamo-chrétiennes,
CdD2, p. 181-183 (recension).
Roger Michel, Le groupe des foyers islamo-chrétiens,
CdD10, p. 179-181.
Roger Michel, La notion de qurb en islam,
CdD12, p. 109-135.
Roger Michel, La notion de qurb en islam (2e partie),
CdD13, p. 131-169.
Roger Michel, La notion de qurb en islam (3e partie),
CdD15, p. 107-132.
Roger Michel, L’islam en dialogue avec ses mystiques,
CdD18, p. 181-189.
Roger Michel, Le Pape Jean-Paul II et les musulmans,
CdD20, p. 57-65.
Dom Miquel, La rencontre des religions,
CdD12, p. 207-211.
240
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Page 241
Tables générales
Luc Moreau, Chrétiens et musulmans - Dialogue « monothéiste » ?,
CdD18, p. 47-72.
N
Marcel Neusch, L’expérience chrétienne de Dieu,
CdD3, p. 67-87.
Marcel Neusch, La sagesse chez saint Augustin,
CdD11, p. 147-167.
O
Bertrand Ouellet, Le Centre d’information sur les nouvelles religions de
Montréal,
CdD3, p. 199-213.
P
Bernard Panafieu, Le Comité épiscopal pour les relations interreligieuses,
CdD8, p. 209-211.
Bernard Panafieu, Chrétiens et musulmans face à l’avenir du monde,
CdD15, p. 99-105.
Abel Pasquier, Soâmba, Lièvre, maître de sagesse,
CdD10, p. 23-49.
Rencontre avec Jean-Michel Passenal, Le dialogue interreligieux dans la
pastorale du diocèse de Marseille,
CdD1, p. 19-22.
Jean-Michel Passenal, Marseille-Espérance,
CdD15, p. 201-205.
Paul VI, Ecclesiam suam (extraits),
CdD20, p. 79-81.
Charles Perrot, Jésus, le juif,
CdD 17, p. 15-34.
Maurice Pivot, La foi chrétienne au défi du pluralisme religieux,
CdD1, p. 67-82.
Maurice Pivot, Théologie fondamentale et rencontre des religions,
CdD5, p. 191-203.
Maurice Pivot, Bulletin de théologie du dialogue interreligieux,
CdD10, p. 185-197.
Maurice Pivot, Bulletin de théologie du dialogue interreligieux,
CdD11, p. 189-203.
241
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Page 242
Chemins de Dialogue
Maurice Pivot, Rencontre du bouddhisme et de l’Occident. Bibliographie,
CdD16, p. 201-213.
Jean-Marie Ploux, Dialogue mystique et religion,
CdD6, p. 141-175.
Jean-Marie Ploux, Mystiques et dialogue interreligieux,
CdD18, p. 221-259.
Daniel Pont, Dans les monastères zen du Japon,
CdD13, p. 53-65.
Emile Poulat, Histoire de la laïcité en France,
CdD8, p. 29-44.
Robert Pousseur, Une expérience originale de dialogue interreligieux entre
jeunes,
CdD10, p. 163-177.
R
Marie-Christine Ray, Le témoignage de Tibhirine - Un chemin de rencontre
entre chrétiens et musulmans,
CdD13, p. 17-29.
Michel Reeber, Le Coran du point de vue chrétien,
CdD2, p. 139-166.
Jean-Pierre Ricard, Allocution lors de la visite du Dalaï Lama,
CdD16, p. 193-200.
Jean Richard, La personnalité messianique, une voie de dialogue judéochrétien,
CdD14, p. 179-204.
Jean Richard, Thèses pour une théologie pluraliste des religions,
CdD19, p. 183-206.
Éric Rommeluère, L’expérience corporelle de la non-dualité chez Maître
Døgen,
CdD17, p. 121-133.
Michel Rondet, Nouvel Âge et foi chrétienne,
CdD3, p. 175-196.
Michel Rondet, L’expérience chrétienne,
CdD15, p. 77-81.
Michel Rondet, Expérience mystique et discernement,
CdD18, p. 191-199.
242
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Page 243
Tables générales
S
Mgr Michel Sabbah, Les relations entre les religions : tolérance ou violence ?,
CdD4, p. 141-149.
Christian Salenson, La théologie des religions et la formation initiale des
prêtres,
CdD3, p. 231-240.
Christian Salenson, Histoire et enjeux de la rencontre d’Assise,
CdD7, p. 15-28.
Christian Salenson, Entretien avec Mgr Sabbah,
CdD7, p. 41-44.
Christian Salenson, L’école catholique au seuil du troisième millénaire,
CdD14, p. 87-108.
Christian Salenson, La montagne, symbole sacré,
CdD16, p. 145166.
Christian Salenson, Assise, de 1986 à 2002,
CdD19, p. 7-12.
Henri Sanson, L’Église d’Algérie,
CdD17, p. 191-204.
Jean-Pierre Schnetzler, Non-dualité dans le bouddhisme - Ressources et résis tances,
CdD17, p. 89-108.
Michel Serain, Le Groupe de recherches islamo-chrétien (G.R.I.C.)
CdD15, p. 207-209.
Gérard Siegwalt, Le dialogue interreligieux - Qu’en est-il de l’absoluité du
christianisme dans une société sécularisée et plurireligieuse ?
CdD13, p. 199-220.
Secrétariat pour les non-chrétiens, Dialogue et mission (extraits),
CdD20, p. 91-97.
S.R.I. (Secrétariat pour les relations avec l’islam), À propos de quelques
livres concernant l’islam,
CdD3, p. 161-167 (recension).
T
Edmond Tang, La pertinence du confucianisme aujourd’hui,
CdD9, p. 143-149.
Claude Tassin, L’orientation sapientielle de la prédication synagogale
ancienne,
CdD8, p. 181-205.
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Page 244
Chemins de Dialogue
Henri Teissier, Réflexion sur la relation islamo-chrétienne dans la crise algé rienne,
CdD9, p. 97-105.
Henri Teissier, L’Émir, homme de dialogue,
CdD19, p. 29-47.
Christoph Théobald, L’Unique et ses témoins - Jalons pour une théologie de la
rencontre entre juifs, chrétiens et musulmans,
CdD7, p. 183-205.
Rencontre avec Jean-Luc Thirion, Du « Comité Maghreb » au « Relais
Maghreb-Méditerranée » pôle de la pastorale des migrants : situation et
enjeux,
CdD2, p. 169-178.
Pierre Titi Nwel, Questions relatives à l’inculturation,
CdD11, p. 135-145.
Cardinal Jozef Tomko, Le dialogue, chemin de la mission,
CdD4, p. 65-105.
U
Bernard Ugeux, Sectes - Malaise social et questionnement religieux,
CdD9, p. 195-212.
V
Marie-Anne Vannier, L’expérience spirituelle de la non-dualité chez Eckhart,
CdD17, p. 135-157.
Maurice Vidal, Dialogue au cœur de la mission, perspectives ecclésiologiques
d’Ecclesiam suam,
CdD4, p. 49-63.
Claude Vigée, Borges devant la kabbale juive : de l’Écriture du Dieu au silence
de l’Aleph,
CdD6, p. 35-56.
Z
Vladimir Zielinsky, Le cœur dans la vision orthodoxe. Un lieu de la présence
réelle et du combat invisible,
CdD6, p. 71-101.
Mato Zovkic, L’importance de la collaboration interreligieuse en vue d’une
paix juste et durable en Bosnie-Herzegovine,
CdD9, p. 107-111.
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TABLE DES MATIÈRES
Sommaire
5
Liminaire
[auteur]
7
L’Église et les religions
Les enjeux théologiques du dialogue interreligieux
[Jean-Marc Aveline]
1. L’engagement dans le dialogue interreligieux
Premières étapes
Le concile Vatican II et l’esprit d’Assise
2. Les fondements théologiques du dialogue interreligieux
La position du magistère
3. Le débat contemporain en théologie des religions
Conclusion
Dialoguer, pourquoi ?
[Jacques Levrat]
1. Le lieu d’où je parle : trois expériences
1.1. La bibliothèque de La Source à Rabat
1.2. Le complexe culturel de Beni Mellal
1.3. Le GRIC (Groupe de recherche islamo-chrétien)
2. Quelques convictions personnelles
qui se dégagent de ces expériences
2.1. Des lieux de rencontre
2.2. Écouter et interroger
2.3. Le travail intellectuel
2.4. Se libérer de ses idoles
2.5. La réciprocité
2.6. Tous, créatures de Dieu
15
17
20
20
22
26
27
29
35
39
39
39
41
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44
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45
45
47
47
48
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2.7. Créés à l’image de Dieu
2.8. La kénose, le vide en soi
2.9. Compagnonnage spirituel
2.10. Le pardon
2.11. Un Dieu relationnel, une communion
En fin
Le Pape Jean-Paul II et les musulmans
[Roger Michel]
Textes de référence
248
50
51
52
53
54
55
57
67
Nostra ætate
[Concile Vatican II - 28 octobre 1965]
Préambule
Les diverses religions non-chrétiennes
La religion musulmane
La religion juive
La fraternité universelle excluant toute discrimination
69
69
70
72
72
75
La conférence de Seelisberg
[1947]
77
Ecclesiam suam (extraits)
[Paul VI - 6 août 1964]
79
Redemptoris missio (extraits)
[Jean-Paul II - décembre 1990]
83
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Dialogue et mission (extraits)
[Secrétariat pour les non-chrétiens - 10 juin 1984]
1. Mission
2. Le dialogue
A) Fondements
B) Formes du dialogue
3. Dialogue et mission
B) Le dialogue pour la construction du Royaume
91
91
93
93
95
97
97
Dialogue et annonce (extraits)
[Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et
Congrégation pour l’évangélisation des peuples - 19 mai 1991]
Introduction
1. Dialogue interreligieux
A) Une approche chrétienne des traditions religieuses
C) Formes de dialogue
2. Annonce de Jésus Christ
B) Le rôle de l’Église
F) Les modalités de l’annonce
3. Dialogue interreligieux et annonce
B) L’Église et les religions
D) Engagement dans l’unique mission
99
101
103
103
104
107
107
108
109
109
109
Déclaration « Dominus Iesus » sur l’unicité et l’universalité
salvifique de Jésus Christ et de l’Église (extraits)
[Congrégation pour la doctrine de la foi] - 6 août 2000]
Introduction
1. La révélation de Jésus Christ complète et définitive
2. Le logos incarné et le Saint-Esprit dans l’œuvre du salut
3. Unicité et universalité du mystère salvifique de Jésus Christ
4. Unicité et unité de l’Église
6. L'Église et les religions face au salut
111
111
113
117
122
124
126
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Chrétiens et musulmans sous le regard de Dieu
Rencontre avec la jeunesse musulmane au stade de Casablanca
[Jean-Paul II - 19 août 1985]
129
Allocution du roi Hassan II
129
Discours de Jean-Paul II
130
Croire en Dieu
132
Appel au témoignage commun sur le sens de Dieu
133
Appel au témoignage commun sur la dignité de l’homme
134
Responsabilités et travail en commun des jeunes
pour un monde plus humain
135
Un monde pluraliste et solidaire
137
Des conditions de vie dignes pour tous
138
Une réflexion intellectuelle de qualité
139
Une croissance dans la vie spirituelle
139
Remerciements et prière
141
Visite du Pape Jean-Paul II à la Synagogue de Rome
[13 avril 1986]
Discours de M. Giacomo Saban
Discours du Grand Rabbin Elio Toaff
Allocution de Jean-Paul II
Dans le sillage des Papes précédents
L’horreur du génocide
Trois points essentiels de « Nostra ætate »
Les rapports entre juifs et catholiques
Les domaines de collaboration au service de la société
143
144
148
153
154
155
156
158
159
Discours aux Cardinaux et à la Curie Romaine
[Jean-Paul II - 22 décembre 1986]
163
Prière au mur occidental de Jérusalem
[Jean-Paul II - 26 mars 2000]
175
Discours lors de la rencontre avec la communauté
musulmane dans la cour de la grande mosquée Omeyyade
[Jean-Paul II - 6 mai 2001]
177
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Message pour la célébration de la journée mondiale de la paix,
le 1er janvier 2002
[Jean-Paul II - 1er janvier 2002]
1. La paix, œuvre de justice et d'amour
2. Le phénomène du terrorisme
3. On ne tue pas au nom de Dieu !
4. La nécessité du pardon
5. Le pardon, voie royale
6. Compréhension et coopération interreligieuses
7. La prière pour la paix
181
182
184
185
187
189
190
191
Le Décalogue d'Assise 2002 pour la Paix
[24 janvier 2002]
195
Tables générales de Chemins de Dialogue 1 à 20
Sommaire des tables
Table thématique
Table des numéros
Table des auteurs
197
199
200
220
231
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Chemins de Dialogue
Revue théologique et pastorale sur le dialogue interreligieux,
fondée par l’Institut de sciences et théologie des religions de Marseille,
éditée par l’association « Chemins de Dialogue »
publiée avec le concours du Centre National du Livre
ABONNEMENTS & COMMANDES
Chemins de Dialogue
Service diffusion
11, impasse Flammarion
13001 Marseille
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Tél. : 04 91 50 35 50
Fax : 04 91 50 35 55
SITE INTERNET DE L’ISTR
http://istr-marseille.cef.fr
Présentation de l’ISTR
Programme de l’année en cours
Contacts
[email protected]
Présentation de l’association Chemins de dialogue
Présentation de la revue Chemins de dialogue
Tables générales, thématiques et par auteurs
Recensions et bulletins bibliographiques
Intégrale des numéros 2 à 7 de la revue
[email protected]
[email protected]
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© 2002, Chemins de Dialogue 20
Revue bisannuelle
IX 2002 - 18 €
I.S.S.N. 1244-8869
Directeur de l’édition :
Christian Salenson
Responsables de la rédaction :
Jean-Marc Aveline,
Roger Michel,
Christian Salenson
Association Chemins de Dialogue
11, impasse Flammarion – 13001 Marseille
✆ 04 91 50 35 50 – Fax 04 91 50 35 55
[email protected]
Conseil d’administration :
Jean-Marc Aveline (Président)
René Carré
Christiane Passelac
Christian Salenson
Achevé d’imprimer en septembre 2002
sur les presses de l’imprimerie Robert
Groupe Horizon
Parc d’activités de la plaine de Jouques
200, avenue de Coulins – 13420 Gémenos
Dépôt légal septembre 2002
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