
Dans cette approche, les agents économiques, ménages ou entreprises, sont supposés
« rationnels », c’est-à-dire qu'ils sont censés disposer de capacités cognitives et
d'informations suffisantes pour pouvoir, d'une part, construire des critères de choix entre
différentes actions possibles et identifier les contraintes pesant sur ces choix, contraintes tant
« internes » (leurs capacités technologiques s'il s'agit d'entreprises, par exemple),
« qu'externes » (c’est-à-dire résultant de leur environnement économique), et, d'autre part
déterminer le choix qui satisfait au mieux ces critères en respectant ces contraintes. On parle
de comportement « d'optimisation sous contraintes » pour désigner cette notion de
« rationalité ». C'est le paradigme de l'Homo œconomicus qui n'implique pas a priori que les
critères de choix des individus soient purement égoïstes, ces derniers pouvant parfaitement
être « rationnellement » altruistes.
Quelques remarques s'imposent à ce stade. Ce qui intéresse la microéconomie, c'est tout
d'abord l'étude des choix des agents économiques, c’est-à-dire de la manière dont ils
procèdent à des arbitrages entre différentes options possibles, en comparant leurs avantages
et leurs inconvénients pour la poursuite de leurs objectifs ou la satisfaction de leurs intérêts.
Cette démarche opère donc par scission des moyens (les options possibles) et des fins (les
intérêts ou aspirations des agents). Elle peut parfaitement s'appliquer à une grande variété
de moyens (le vol plutôt que l'échange par exemple) comme de buts : on trouve en
microéconomie néoclassique des analyses de firmes autogérées, dont l'objectif n'est pas de
maximiser les profits des actionnaires mais l'utilité du revenu salarial de leurs employés-
propriétaires, ou de ménages « dynastiques », dont l'objectif est de maximiser non seulement
le bien-être de leurs membres mais aussi celui de leurs descendants, des descendants de
leurs descendants, et ainsi de suite.
L'approche conceptuelle utilisée est de nature "conventionnelle", c’est-à-dire qu'elle procède
par appariemment d'un ensemble d'objectifs et de moyens disponibles pour les atteindre à
une "unité" abstraite de décision. Cette abstraction n'a pas pour but de décrire le
comportement d'agents "réels" particuliers, mais de produire des prédictions générales sur le
résultat de leur mise en interaction. La microéconomie traditionnelle mobilise trois grandes
catégories de "conventions" de ce type :
■une convention "d'agents", les ménages et les entreprises, vus comme des "boîtes
noires", alors qu'il s'agit en fait de collectifs d'individus, pouvant être de très grande
taille (une firme multinationale par exemple). Mais rien n'interdit d'ouvrir ces "boîtes
noires" pour conduire des analyses micro-économiques à l'échelle intra-familiale ou
intra-entreprises.
■Une convention de "biens", qui désigne les objets "centres d'intérêt" des agents
économiques. Mais ces biens sont toujours définis avec un certain degré d'arbitraire :
ils peuvent différer en "nature" comme en "qualité", ils peuvent être produits
intentionnellement ou non (cas de la "pollution" par exemple), ils peuvent être "légaux"
ou "illégaux", c’est-à-dire que leur production, consommation ou échange peut être
socialement licite ou pas (cas des drogues par exemple).
■Une convention "d'espace social" d'interaction, qui dans le modèle microéconomique
traditionnel s'identifie aux "marchés" en tant qu'espace de transaction. Mais il est
parfaitement possible d'appliquer l'analyse microéconomique néoclassique à toutes
sortes d'espace sociaux de transaction, comme les "marchés internes" aux
entreprises, ou les réseaux formels et informels de communication d'informations entre
agents économiques.
La microéconomie néoclassique traditionnelle se présente généralement sous une forme
extrêmement mathématisée, d'un abord difficile et souvent abscons pour les non spécialistes,
surtout s'ils ne disposent pas d'une bonne formation préalable en mathématiques. Cette
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