Mondialisation, changements productifs et la question foncière

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Mondialisation, changements productifs et la question foncière dans la
vallée du colca des andes du pérou
Alicia Huamantinco
Les systèmes agraires traditionnels des pays sous-développés se transforment de façon accélérée en
s’adaptant au nouveau contexte mondial et national. La mondialisation, phase actuelle du
développement du capitalisme, comprend des transformations sociales, économiques et politiques.
Benko (1996,41)** la définit comme l’accélération planétaire de la circulation de flux d’échange, de
technologies, de cultures, d’informations et de messages.
Avec les moyens dont il dispose, le système économique acquiert un caractère global qui atteint les
lieux les plus éloignés et les plus traditionnels du monde. La vallée du Colca représente un espace
agraire traditionnel en transformation, à conséquence de processus mondiaux qui s’entrelacent avec les
spécificités locales. La période d’analyse comprend la décennie 1990-2000, période dans laquelle le
Pérou adopte le modèle néo-libéral et met en oeuvre les politiques économiques consécutives qui ont
des répercussions importantes sur le développement économique et tout particulièrement, dans le
domaine agraire.
Dans la phase historique actuelle, de nouveaux éléments s’incorporent au fonctionnement de la
structure économique et de l’espace du Pérou et conditionnent le développement agricole. À ce propos
et pour la compréhension de l’impact des processus globaux, il est important de souligner les
caractéristiques, historiquement configurées, de l’agriculture.
L’agriculture au Pérou
L’agriculture dans la société agraire préhispanique atteint de hauts niveaux de satisfaction des besoins
en aliments ainsi qu’une performance impressionnante en ce qui concerne l’aménagement du
territoire. Lors de la Colonie, l’agriculture subit des problèmes qui se sont maintenus et approfondis
pendant la République.
*
Benko,G.(1996) - Economia, Espaço e globalização na aurora do século - HUCITEC, São Paulo
L’espace rural andin présente de grandes contradictions: il concentre 50% des terres de culture et 65% de sa
population est pauvre; ses indices de rentabilité économique et de productivité, ainsi que sa capacité de générer
de l’emploi, sont faibles. Le développement productif le plus important se trouve à proximité des villes et des
axes principaux d’articulation.
Colloque international “Les frontières de la question foncière – At the frontier of land issues”, Montpellier, 2006
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En termes généraux, l’agriculture péruvienne présente les caractéristiques suivantes: un
conditionnement élevé de l’activité agraire aux facteurs naturels; une pression croissante sur la terre
compte tenu du nombre de producteurs dans une économie qui propose peu d’alternatives ; une
fragmentation importante des terrains (85% des producteurs ont moins de 10 hectares); une
prééminence de l’agriculture de subsistance.
L’actuelle structure agraire dérive de l’application de la Reforme Agraire de 1969, qui a énormément
modifié les conditions juridiques et économiques en ce qui concerne la propriété et la gestion de la
terre, en suivant des principes de redistribution et de démontage du pouvoir économique des grands
propriétaires fonciers. Cette Loi, ainsi que la constitution de 1979 ont imposé de véritables limitations
à la liberté de vente des terrains. Par la suite, les Décrets concernant l’investissement privé établis
entre les années 1980-1988 ont permis l’ouverture du marché foncier.
Le Recensement Agraire de 1994 montra la prééminence de la propriété privée individuelle ainsi que
l’existence très marquée de petites propriétés terriennes. Dans le pays il y avait 5.7 millions de
parcelles de terrain. 41.2% des agriculteurs ont déclaré qu’ils étaient des propriétaires individuels
(titulaires), 53.5% se sont déclarés possesseurs individuels (non titulaires) et 2.3%, locataires.
Seulement 17% de l’ensemble des parcelles se trouvait dans le cadre du système formel de propriété,
avec les formalités d’inscription dans les registres publiques.
En ce qui concerne les formes d’acquisitions des terres, le Recensement montra que 62% des parcelles
avaient été obtenues par héritage et que 27% avaient été obtenues par des actions d’achat - vente. Ceci
signifie que l’héritage est le responsable principal de l’extrême fragmentation de la propriété rurale et
que, malgré les restrictions légales, le marché foncier a fonctionné en tant qu’un mécanisme important
pour l’accès à la terre.
Mondialisation, Politiques Publiques et Modernisation
Si l’on considère le monde comme une totalité, chaque pays, chaque région, chaque lieu, se
comportent comme des fractions de cette totalité. Parmi les changements qui sont en rapport avec des
processus globaux, les changements du rôle de l’État se trouvent parmi les plus importants. À partir de
1990, le Pérou se réincorpore dans la communauté économique internationale, après avoir été éloigne
dans les années 80 à la suite du non-paiement de la dette extérieure. C’est dans ce cadre que vont se
mettre en œuvre un ensemble de mesures dont le but et de garantir des conditions favorables à
l’investissement privé national et international. L’Etat devient promoteur d’investissements et laisse au
marché le rôle de moteur de développement. Les mesures pour réduire les dépenses publiques ont
Colloque international “Les frontières de la question foncière – At the frontier of land issues”, Montpellier, 2006
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conduit, entre autres choses, à la réduction des fonctions du Ministère de l’Agriculture, ainsi qu’à
l’élimination de la Banque Agraire et des subsides à la production d’aliments.
Ceci a été accompagné à partir de 1991 par un Programme d’Ajustement Structurel de l’économie
péruvienne, qui a signifié une combinaison de politiques de stabilisation et de réformes
institutionnelles dans le but de redéfinir la participation de l’Etat dans l’économie, avec un modèle de
croissance reposant sur l’économie de marché.
Un autre changement important se réfère à la conformation de nouveaux fondements spatiaux pour le
développement à travers de l’élargissement des réseaux de transport, des communications, de
l’énergétique et autres services. À partir de 1993-1994, l’Etat a concentré les ressources provenant des
prêts de la Banque Interaméricaine de Développement (BID) et de la Banque Mondiale (BM) dans
l’amélioration de l’infrastructure routière au niveau national. Cette expansion des réseaux techniques
et de services a couvert toutes les régions, y inclues les plus traditionnelles et en retard. Ce qui
confirme l’affirmation dans le sens que “la tendance actuelle est que les lieux les plus éloignés
s’unissent verticalement … des crédits internationaux sont mis à disposition des pays les plus pauvres
afin de permettre que les réseaux s’établissent au service du grand capital” Santos (1994, 19)** .
En 1994 a commencé le programme national de privatisations, qui a compris d’importantes entreprises
de l’État: de télécommunications, d’énergie électrique, parmi d’autres. La privatisation du réseau
téléphonique a eu un impact important et ce service a atteint des communautés andines très éloignées.
Bien que ces réseaux techniques ne garantissent pas le développement, ils établissent – néanmoins –
des potentialités territoriales qui peuvent définir des avantages competitifs.
Mondialisation, Politiques Publiques et Marché Foncier
Dans le contexte actuel, de transformation profonde du mode de production et de circulation de la
production, la question de la terre acquiert une grande importance dans les politiques publiques. Le
cadre légal et institutionnel qui a été mis en œuvre au Pérou, entre les années 1990-2000, se caractérise
par son orientation qui tend à mettre fin à la Réforme Agraire ainsi qu’à la création du support pour la
gestion de l’agriculture dans le nouveau modèle économique.
Au début des années 90 la réalité agraire avait profondément changé par rapport aux années 70, avec
la disparition d’une grande partie de l’agriculture associative et la conformation de nouveaux acteurs
sociaux tels que les petits agriculteurs, benéficiaires de la Réforme Agraire, de nombreuses
*
Santos,M.(1994) – Território, Globalização e Fragmentação - HUCITEC, São Paulo
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entreprises d’intérêt social s’étaient dissoutes en faveur des communautés paysannes. Ainsi, la
campagne péruvienne apparaissait conformée par une masse énorme de petits propriétaires.
Dans les années 90 commence un processus de changement formel du régime juridique qui favorise
l’action totale du marché comme mécanisme pour l’assignation de la terre. À cette période, la
propriété —avec plein pouvoir sur la terre— acquiert la prééminence et l’on cherche à octroyer une
plus grande sécurité juridique aux propriétaires individuels. Ce sera aussi une période où les formes
coopératives et communautaires (communautés paysannes) encore existantes d’appropriation de la
terre seront perçues avec une méfiance croissante par le gouvernement et par les législateurs, tout
particulièrement dans les zones ayant un potentiel économique plus important, comme la côte.
La “Loi de Promotion des Investissements du Secteur Agraire” de 1991 a dérogé formellement la loi
de réforme agraire et a cherché l’élimination des restrictions à la gestion directe en arguant que
“l’autorité et la gestion de la propriété agraire peuvent être exercées par une personne naturelle ou
juridique, à égalité de conditions, et sans d’autres limitations que celles qui sont établies par cette Loi
et par la Constitution”. Cette disposition, était en contradiction avec la Constitution de 1979 qui
excluait les las sociétés commerciales de la propriété de la terre et consacrait le principe de la gestion
directe. La nouvelle Constitution de 1993 a octroyé une cohérence institutionnelle à cette loi.
La Loi de Terres (1995), allait formaliser le nouveau régime de terres du pays, en établissant un
régime libre pour la propriété des terres agraires, et en garantissant à toute personne naturelle ou
juridique, nationale ou étrangère, l’accès à la propriété de la terre, en consolidant la tendance à traiter
la terre comme un bien en égalité de conditions par rapport à n’importe quel autre. Dans le cadre néolibéral cette législation a cherché la libéralisation du marché foncier en éliminant la limite maximale
de l’extension des terrains d’un propriétaire ainsi que les limites minimums des transferts. Les
mécanismes du marché ont atteint les vastes zones gérées par les communautés au niveau national et
ont ainsi établi la fin de l’inaliénabilité de leurs terres.
Dans les années 90, la formalisation de la propriété rurale a commencé à avoir plus d’importance dans
l’agenda politique au fur et à mesure que les réformes structurelles de libre marché s’accentuaient.
Ceci représentait un défi énorme vis à vis du problème de manque de formalités dans le domaine rural
qui concernait presque 80% de l’ensemble des terrains ruraux.
En 1992, dans le cadre du programme de modernisation administrative du Ministère d’Agriculture, ont
été éliminés les bureaux de la réforme agraire et a été crée le Projet Spécial de Titularisation de Terres
et Cadastre Rural (PETT). Au début, son rôle était uniquement celui de régulariser la propriété rurale
de la surface concernée par la loi de la réforme agraire et les terrains en friche en possession de
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particuliers. À la fin de l’année 1995 et avec l’appui de la Banque Interaméricaine de Développement,
le travail de formalisation de la propriété rurale s’est élargi à partir des résultats du recensement
Agraire de 1994 par lequel l’on estimait que le nombre de domaines ruraux en situation informelle
atteignait 4.7 millions.
Un autre point de repère important concernant la question du registre des propriétés a été la création en
1992 de la Surintendance Nationale de Registres Publiques (SUNARP) en tant qu’entité chargée de
conduire les processus de registre des biens meubles e immeubles correspondant à des personnes
naturelles et juridiques.
Comme résultat, l’on estime qu’entre 1993 et 1997 le PETT-SUNARP a pu délivrer quelques 250 000
titres enregistrés de domaines ruraux, alors que 422 860 domaines étaient en voie de titularisation.
Ceci signifie que l’on est passé de 970 mil domaines enregistrés en 1994 à un total d’environ 1.2
millions en 1998 (en 2005 se seraient inscrits 1.8 millions de domaines individuels et il resterait plus
du double en situation informelle).
Les Agents Sociaux face aux Changements
Les nouveaux temps créent un nouveau tissu de rapports économiques, institutionnels et de l’espace,
qui constituent un nouveau contexte pour l’action des agents sociaux ainsi que leurs articulations.
En ce qui concerne les changements de la décennie 1990-2000, divers auteurs
ainsi que des
constatations sur le terrain signalent une expansion accélérée de l’économie de marché dans la société
rurale, qui se manifeste par une plus grande circulation de produits, d’inputs, de capital, de main
d’œuvre, ainsi que d’une plus grande participation des agents économiques ruraux dans le marché.
La différentiation entre paysans et petits producteurs agraires augmente en fonction des possibilités
d’investissement et de concurrence. La production agraire orientée au marché augmente elle aussi.
L’expansion des réseaux de circulation et de communication, ainsi que l’électrification et les services
dans l’espace rural, créent des conditions pour l’établissement d’activités non agraires qui sont
génératrices d’emploi. Ces réseaux sont aussi le support de la grande mobilité qui caractérise
actuellement la population rurale, en permettant une relation étroite entre la campagne et la ville, qui a
des effets par rapport au surgissement de nouveaux besoins de consommation ainsi que sur des
stratégies de génération de revenus.
La connaissance, en tant qu’une des grandes valeurs actuelles, devient un facteur important de la
dynamique de l’espace. La formation est perçue par le paysan andin comme le moyen qui lui permet
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une amélioration économique et sociale de ses enfants, et à cette fin s’articulent la migration, le travail
et la dépense dans la campagne et dans la ville.
Nouvelles dynamiques Agraires dans la Vallée du Colca
L’impact des changements dans la politique économique nationale en matière d’agriculture se
manifeste de façon nettement différenciée au niveau local dans un pays avec une énorme diversité
comme le Pérou.
Le cas de la vallée du Colca est un exemple représentatif des espaces ruraux andins qui sont proches
de villes et de marchés importants, qui subissent dans la décennie 1990–2000 un certain type de
changements par rapport a la question foncière.
La vallée du Colca se trouve au sud du Pérou (Graphique 1), dans la province de Caylloma,
département d’Arequipa, et représente une frange étroite de surface avec des altitudes entre 2300 à
3800 m. La vallée est connue parce qu’elle possède un attrait touristique important : le cañon du fleuve
Colca, qui est un des plus profonds du monde. Le principal centre urbain de la vallée est la ville de
Chivay qui se trouve à 151 km de la ville d’Arequipa, qui est la deuxième ville la plus importante du
Pérou.
Les changements de la vallée, à conséquence de la mondialisation, marquent un fait important dans le
processus d’évolution de ce lieu. Cette vallée se distingue par les ouvrages des anciennes cultures
andines matérialisés dans la construction des « andenes » (terrasses cultivées) qui datent du IX siècle,
construites à cause du manque de terrains pour l’agriculture et pour faire face à la pression
démographique. Son importance se traduit par la position qu’elle occupe dans le grand système de
chemins incas. Pendant la Colonie, cette vallée a eu le rôle de fournisseuse d’aliments ainsi que
d’autres produits agricoles pour l’axe minier Cusco-Potosi et pour la mine de Caylloma. Pendant la
République, cette vallée a fait partie du domaine d’exploitation de la fibre d’alpaga pour l’exportation
et les centres peuplés de la vallée ont eu un rôle important en ce qui concerne la réserve et la
commercialisation.
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GRAPHIQUE 1
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Avant les années 90, la vallée du Colca présentait les caractéristiques d’une périphérie urbaine en
grand retard, consacrée principalement à des activités agraires avec de faibles niveaux de productivité
et de maigres excédents.
La vaste gamme de changements produits par la mondialisation au niveau de l’univers se manifeste de
façon spécifique dans la vallée du Colca.
Les recherches qui ont été faites dans cette vallée nous permettent d’affirmer que l’amélioration du
réseau de circulation et de communication a été fondamental pour pouvoir mener à bien un ensemble
de changements. Dans un contexte d’amélioration du système routier, l’articulation routière entre la
ville d’Arequipa et la vallée ainsi qu’à l’intérieur même de la vallée a été améliorée. Pendant cette
décennie s’installent les services d’électricité, de téléphone, de télévision, d’Internet, d’eau et d’égouts
dans les centres peuplés de la vallée; et s’améliore de façon notable le service de transport entre
Arequipa et Chivay ainsi qu’à l’intérieur de la vallée.
À la fin de la décennie, l’expansion de ces réseaux présentait les effets suivants sur la dynamique
économique de la vallée: expansion des relations de marché; rapidité dans la circulation de
l’information concernant les prix du marché; une plus grande participation des agents en provenance
d’Arequipa: une plus grande affluence de produits industriels.
Le développement du tourisme dans le Colca est lui-même un effet de la diffusion de ces attraits
naturels et culturels (le Cañon du Colca, la flore et la faune, les énormes « andenes » ou terrasses
cultivées, l’architecture coloniale) au monde entier à travers les nouveaux réseaux. A leur tour, les flux
des grands centres touristiques du sud (Cusco et Puno) s’intensifient eux aussi.
Parallèlement à ceci, la population tend à se concentrer dans les centres urbains de la vallée. La perte
progressive des valeurs culturelles commence à se mettre en évidence.
À partir de l’année 1995 la vallée commence à présenter des caractéristiques qui manifestent son
évolution, en passant de sa condition de périphérie en retard à une situation de zone avec dynamisme
dans différents domaines. Les aspects suivants le démontrent : Une articulation croissante avec le
marché régional – la ville d’Arequipa ; une augmentation de la mobilité de la population et
l’accroissement des flux à l’intérieur de la vallée ; l’équilibre entre émigration et immigration qui fait
que le nombre d’habitants se maintienne stable ; la consolidation du tourisme en tant qu’un axe de
l’économie locale ; le développement urbain de la ville de Chivay ; la diversification des activités
productives et de services ; une plus grande participation des institutions publiques et privées.
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Changements Productifs dans l’Agriculture
D’importantes transformations ont lieu dans l’agriculture dans les années 90.
L’agriculture de la vallée s’oriente de façon croissante vers le marché, les transactions commerciales
concernant l’acquisition d’inputs et le paiement de services ou facteurs de production augmentent, la
production se diversifie et la productivité s’accroît.
Ces changements manifestent le choix en faveur de l’intensification de la production avec les
composantes de la Révolution Verte, à la quête de résultats rapides. L’incorporation de ce modèle ne
se concrétise qu’après l’ajustement structurel des années 90, quand les domaines agricoles entrent en
forte concurrence dans le marché.
Il faut souligner que les innovations dans l’agriculture qui commencent et se développent sur la marge
gauche de la vallée - qui compte avec des meilleures conditions et ressources pour l’agriculture ainsi
qu’avec des avantages dus à la localisation- s’articulent avec des espaces régionaux.. Les innovations
s’étendent progressivement à la marge droite de la vallée, traditionnellement consacrée à l’agriculture
de subsistance.
Selon les statistiques de production du Ministère d’Agriculture des années 1996 – 2002 ainsi qui selon
des recherches menées sur le terrain, l’on peut constater les aspects suivants : i) l’expansion de la
surface cultivée et le volume de production de cultures orientées vers le marché, avec prééminence de
la pomme de terre et légumineuses fraîches (Graphique 2), ii) l’augmentation de graines hybrides, des
inputs agrochimiques et l’utilisation d’arrosage pour ces cultures.
GRAPHIQUE 2
VALLÉE DU COLCA - PRODUCTION DE CULTURES ORIENTÉ
AU MARCHÉ
25000
20000
TM
15000
10000
5000
0
ORGE
Cette
19961997
19971998
19981999
19992000
20002001
20012002
876.90
629.24
687.72
687.10
432.30
376.12
PETIT POIS
581.22
1,272.20
1,537.99
971.67
721.90
1,327.90
FÈVES
1,504.20
1,970.06
1,729.98
2,370.48
1,806.91
3,365.15
MAÏS
5,651.70
3,819.85
4,412.97
4,614.40
5,439.15
3,539.90
POMME DE TERR 14,830.50 20,684.67 22,240.03 10,432.90 6,818.50
13,078.85
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intensification de la production agricole dans une perspective de résultats rapides à court terme, nous
mène à centrer l’attention sur la question foncière.
Répercussions par rapport à l’Accès à la Terre
La vallée partage la caractéristique générale de l’agriculture péruvienne: prééminence du
« minifundio» (très petite proprieté), ainsi que la dispersion des parcelles de terrain, ce qui répond en
partie à des stratégies de mise en valeur maximale de la diversité ainsi qu’à la réduction du risque
climatique dans les écosystèmes andins, tout en étant le résultat de longs processus d’héritage et de
subdivision de la terre. La terre agricole de la vallée est gérée de façon individuelle, mais la plupart
des agriculteurs ne possèdent pas des titres formels de propriété. Ce qui prédomine ce sont des
documents informels de propriété et sur cette base il existe un marché foncier à caractère nettement
local.
Actuellement, à conséquence des changements ci-dessus présentés, qui concernent une amélioration
des conditions de vie et de production, une plus grande dynamisation des activités de la vallée ainsi
que l’accroissement des demandes de production agricole, la vallée représente un attrait pour le retour
de ceux qui ont migré, contre les plus grandes restrictions pour trouver un emploi et les faibles salaires
de la main d’œuvre non qualifiée dans les villes.
A l’heure actuelle, le développement urbain et des services à Chivay permet de faire des démarches et
des opérations pour lesquelles avant il fallait voyager à la ville d’Arequipa. Ainsi, des travaux faits sur
le terrain ont permis de constater que le nombre d’avocats a augmenté à Chivay. Les changements
économiques ont fait qu’il y ait une plus grande demande de ces professionnels et ces changements
font, entre autres choses, que la formalisation de la propriété soit une condition pour l’accès au crédit
et aux transactions concernant la terre.
La pression démographique sur la terre dans la vallée du Colca représente un encouragement vis à vis
de l’opération d’un marché foncier et fait que les agents ajustent la dimension de leurs domaines en
concordance avec leurs besoins économiques et sociaux.
Zegarra (CEPAL, 1999)* signale dans des recherches à propos de cette zone, que le mécanisme
fondamental avec lequel fonctionne le marché foncier est ce que l’on appelle un « acte imparfait », qui
est un document signé par les parties contractantes et leurs témoins devant le juge de paix de chaque
district. Son importance dans la zone s’explique par son faible coût et parce que ce document peut
ensuite être transformé en acte formel d’achat – vente. De même, Zegarra remarque que ces accords
*
Zegarra, E. (1999) – El Mercado de Tierras Rurales en el Perú – CEPAL NNUU, Santiago de Chile.
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d’achat – vente devant un juge de paix se font aussi pour octroyer la terre en héritage par anticipation.
En ce qui concerne les terres communautaires (peu abondantes dans la vallée), cet auteur remarque
le cas de la communauté de Cabanaconde, dans laquelle il y a une prééminence de l’exploitation
individuelle et de la location entre ses membres. Les autorités locales de ce lieu étaient en train
de faire des démarches pour la dissolution de la communauté dans le but de pouvoir accéder à des
titularisations individuelles de propriété de la terre à travers le PETT, bien qu’ils n’étaient pas très au
clair par rapport à la procédure.
En ce qui concerne le prix de la terre, l’on a pu identifier une tendance croissance vue la plus grande
demande de produits agricoles, l’amélioration de l’infrastructure ainsi que le changement
technologique dans la production.
Rapport avec l’Environnement et le Développement Durable
Des travaux faits sur le terrain nous présentent des manifestations actuelles en ce qui concerne l’excès
dans l’utilisation de produits agrochimiques et des hormones dans la production agricole. La
spécialisation dans la production de pomme de terre dans la zone agricole orientée vers le marché est
un indicateur de ceci. Face à la détérioration progressive des sols de cette zone, les producteurs les
plus grands préfèrent de louer des terrains dans d’autres domaines de la vallée, ce qui représente un
risque pour la conservation des ressources naturelles.
Vue dans une perspective plus vaste, l’intégration au marché détermine, dès le début, une
différentiation entre les producteurs: ceux qui sont en mesure de s’adapter au marché et ce qui n’ont
pas les ressources pour le faire.
L’expansion de l’agriculture orientée vers le marché représente en même temps la réduction des zones
consacrées à la production pour la consommation de la famille et l’augmentation de la dépendance des
fluctuations du marché. La production orientée vers le marché, elle-même, par manque d’information
opportune et fiable pour organiser la production agricole est exposée à la succession de périodes de
surproduction et de chute des prix du marché.
Les changements récents dans un espace agraire traditionnel comme le Colca posent des problèmes de
sécurité alimentaire en augmentant la dépendance vis à vis du marché. De même, la spécialisation
productive et la sélection de certaines variétés est en train de limiter le nombre d’espèces cultivées, ce
qui pourrait affecter la biodiversité.
Ainsi, les temps modernes incorporent de nouveaux éléments à la problématique agraire et posent de
nouveaux défis dans la perspective d’atteindre un développement durable.
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La réponse de la vallée du Colca face aux changements économiques actuels montre la particulière
gestion des potentialités locales, avec des implications en matière d’écologie, d’environnement et des
perspectives de durabilité qui configurent des réalités complexes et contradictoires quand le
développement suit de façon prédominante les forces du marché.
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