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Entretiens Louis le Grand
Enseignants de Sciences Economiques et Sociales- Entreprise
Jeudi 30et vendredi 31 août 2007
« Le financement de l’économie : marchés et
intermédiaires financiers »
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Le financement par LBO
ELIOR
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Présentation du groupe
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Elior , acteur majeur de la restauration sous contrat, est le N°3 en Europe avec un chiffre
d’affaires d’environ 3,2 milliards d’euros. Ses principaux concurrents sont Sodexho et
Compass.
Sa position d’oligopole détermine les différentes stratégies financières, managériales et
productives.
Activités
Le groupe se définit de la façon suivante : un métier, deux activités principales, six secteurs.
-un métier : la restauration sous contrat avec aujourd’hui des services associés
-deux activités ou segments de marché : la Restauration Collective (66% du CA d’Elior) et la
Restauration de Concession (34% du CA)
-six secteurs : l’enseignement, l’entreprise ,les établissements de soins médico-sociaux et
résidences pour seniors pour la restauration collective sous l’enseigne Avenance, les
autoroutes, les aéroports et la ville(musée, gares, parcs d’exposition…) sous l’enseigne
Eliance. Sur ce dernier secteur , Elior se situe aussi sur des grandes tables de prestige avec
notamment Le Grand Louvre ou depuis peu le CNA.
Croissance
Elior a développé son activité de restauration collective dans un contexte d’externalisation
des services en expansion depuis 20 ans, de nombreux acteurs décident de confier la
gestion de leur restauration à des groupes spécialisés. Le développement s’est effectué
autour de deux axes, une plus grande pénétration des clients cibles et un élargissement de
l’offre à des services associés ( accueil, nettoyage…facility management)
La restauration de concession s’effectue au sein d’infrastructures du domaine privé ou public
dans le cadre de contrats de concession caractérisés par une longue durée avec des
investissements de mise en place. L’offre est élargie aujourd’hui à l’ouverture de boutiques :
travel retail.
La restauration collective permet d’assurer une croissance linéaire, le volume de production
assure la pérennité du groupe, la restauration de concession engendre des marges plus
élevées mais son corollaire est une plus grande fluctuation de cette croissance organique.
2
Spécificités du groupe
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Elior, un groupe adolescent ,selon la formule consacrée , a connu une croissance rapide .
L’évolution historique du groupe reflète les stratégies menées par ses cofondateurs . Cette
dernière repose en partie sur le recours aux financements externes auprès des investisseurs
financiers et sur les acquisitions au niveau du marché européen de la restauration concédée.
Une histoire financière animée
En 1991, le groupe est fondé par Francis Markus et Robert Zolade avec 300 cadres associés
dans la prise de participation d’une partie du capital de Générale de Restauration, filiale de
restauration collective du groupe ACCOR.Il s’agit d’un rachat d’entreprise par les salariés
(RES) Le dispositif du RES s’applique aux rachats d’entreprises de plus de 10 salariés et
s’effectue au moyen d’une société holding, spécialement constituée pour prendre le contrôle
de la société cible.
Avant 1992,les salariés repreneurs devaient détenir directement ou indirectement plus de
50% des droits de vote de la société holding ainsi crée ; depuis le 1° janvier 1992, ce
montant de participation a été ramené à 33 ,33%. La holding ,qui a pour objet exclusif de
racheter tout ou partie du capital de la société à reprendre, doit détenir dès sa création plus
de 50% des droits de vote de la société reprise. La sortie des salariés ne peut avoir lieu qu’à
partir de la fin de la cinquième année avant la souscription.
En 1997,le RES est transformé en LBO pur, Elior s’associe avec des partenaires financiers
privés dont l’objectif est d’obtenir la liquidité de leur financement . Pendant cette période ,le
groupe se développe par une série de prises de participation, de partenariats ,d’acquisitions
en France comme à l’étranger. Entre 1997 et 2001, Elior se diversifie, de la restauration
collective vers la restauration de concession et opère la part la plus importante du
développement international , présent aujourd’hui dans 13 pays.
En 2000, Elior s’introduit sur le premier marché d’Euronext, les objectifs étant d’offrir de la
liquidité aux investisseurs et d’accroître la flexibilité stratégique de l’Entreprise en levant des
capitaux sur le marché. Or, le parcours boursier entre 2000 et 2005 est heurté et plutôt
décevant . L’action a fait 2/3 de son parcours en dessous du cours d’introduction. Ceci peut
s’expliquer par la chute des marchés pendant la période et une désaffection inexplicable
pour la valeur, les projets de croissance externe n’ont pas été compris.
Entre juin et décembre 2006 ,Elior sort de bourse par une opération de « Public-toPrivate »(P to P )c’est à dire une opération qui consiste à racheter le capital d’une entreprise
cotée avec la participation d’un investisseur financier et à l’aide d’une structure à effet de
levier(LBO) et à retirer cette entreprise de la cote.
ELIOR , aujourd’hui
Avec près de 60000 collaborateurs ? Elior sert chaque jour 2,4 millions de clients dans plus
de 12000 restaurants et points de vente implantés dans 13 pays. Le groupe a développé une
stratégie de marques qui conforte sa réputation auprès des clients partenaires, des
investisseurs , des collaborateurs et fournisseurs.
3
Les marques opérationnelles Avenance et Eliance ,sont des références reconnues en
France et à l’international. La relation avec les clients convives et consommateurs se
construit au travers d’un portefeuille de marques commerciales qu’Elior détient en propre
(L’Arche, Philéas, Ouishop…)ou exploite en franchise ( Paul, Pomme de Pain…)
1 : Pourquoi un P to P par LBO ?
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Le Public-to-Private
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•
Une entreprise peut vouloir quitter la bourse pour plusieurs raisons , quand elle ne
plaît plus aux boursiers, quand son activité est jugée trop traditionnelle par les
analystes financiers, quand sa croissante est lente ou bien encore quand son cours
est déprécié et qu’elle ne peut plus trouver en Bourse les capitaux nécessaires pour
relancer une stratégie de croissance interne ou externe.
•
Des investisseurs pourront alors racheter les actions en bourse, lancer une
proposition de retrait obligatoire de la cote si les conditions sont remplies et travailler
avec les dirigeants sur un nouveau Business Plan , c’est à dire un plan de
développement le projet de l’entreprise.
•
Elior se situe dans cette dernière position, c’est un groupe de taille moyenne ; 2/3 de
son CA est réalisé dans la restauration collective, 1/3 dans la restauration de
concession, Elior veut faire grandir ses deux métiers en diversifiant la base de service
et en renforçant sa présence géographique.
•
Dans le même temps , le parcours boursier de l’action Elior est plutôt heurté,
introduite à 11 euros en mars 2000, la valeur descend jusqu’à 3 euros en 2003 pour
se retrouver à 11 euros fin 2005. L’objectif de l’entreprise étant d’accélérer ses
activités à l’étranger, les marchés organisés ne permettaient pas de répondre aux
projets de croissance externe (l’action a fait 2/3 de son parcours en dessous du cours
d’introduction, difficile d’obtenir une valorisation de l’entreprise)
Le Président commandité et actionnaire à 21% lance une réflexion : « Public-to-Private » en
vue de s’associer avec des fonds intéressés . L’objectif est de saisir les opportunités avec
une réactivité plus grande sans devoir convaincre les actionnaires ou les analystes
financiers. Le principal atout des partenaires financiers ou fonds d’investissement est d’avoir
une vision à plus long terme avec l’acceptation des contraintes ( rester au capital pendant
une durée minimale de 7 ans)
Plus le cadre est privé, plus il y a de flexibilité stratégique
4
Par ailleurs les entreprises cotées ont plutôt une politique financière conservatrice, la part
des fonds propres est plus élevée d’où une plus grande dilution de ceux-ci, ce qui est
complexe pour des groupes de taille moyenne.
Le mécanisme de LBO
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Le LBO ou leverage buy out
Littéralement, une opération de LBO est une opération à effet de levier. C’est un mode de
financement de la transmission d’une entreprise lorsque celle-ci a atteint un certain niveau
de maturité.
Le capital-investissement ou private equity est le nom générique pour définir tout type
d’investissement en fonds propres dans des entreprises non cotées. Le LBO n’est qu’un des
métiers du private equity qui comprend 4 catégories :
-le Capital Amorçage qui vise à financer une entreprise avant sa création
- le Capital Création ou Post-création qui vise à financer une entreprise lors de sa
création ou au tout début de son activité
Le Capital Risque regroupe les opérations d’amorçage, de création et de post-création.
- le Capital Développement qui peut être défini comme un investissement en fonds
propres destiné à financer le développement d’une entreprise ou le rachat de positions
d’actionnaires.
-
le Capital Transmission/ LBO
Les opérations de Leverage Buy-Out ou opérations à effet de levier désignent l’achat
d’une entreprise par des investisseurs financiers, associés aux dirigeants de
l’entreprise achetée, dans le cadre d’un montage financier comportant une proportion
plus ou moins importante d’emprunts, dont le remboursement est prévu par un
prélèvement sur les cash-flows futurs.
Ce type de montage fait apparaître un effet de levier financier qui augmente la rentabilité
des capitaux investis par les actionnaires.
Cette technique repose donc sur des apports en fonds propres complétés par des emprunts
bancaires ou d’autres souscrits auprès des structures spécialisées. Toute la « science »
financière sera mise en œuvre pour estimer les montants respectifs de fonds propres et
d’endettement pour résoudre l’équation suivante : beaucoup d’endettement augmente la
rentabilité des fonds propres mais fragilise la structure financière rendant ainsi le
montage aléatoire pouvant amener à une crise financière.
L’objectif prioritaire des investisseurs et des dirigeants associés est de réaliser une plusvalue à moyen terme lors de la revente de la société acquise dans une fourchette de trois à
sept ans .
Les investissements de type LBO s’élèvent à 70/80% du total des concours du Capital
investissement.
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Autres leviers
- le levier fiscal :
Si la holding de reprise détient au moins 95% du capital et des droits de vote de la société
acquise, cela permet de déduire les frais financiers de la dette d’acquisition du bénéfice
imposable de la société rachetée en application du régime d’intégration fiscale. Il y adonc
une économie d’impôt équivalente au taux d’IS multiplié par le montant des intérêts payés
sur les dettes d’acquisition.
Un LBO avec une détention inférieure à 95% est toutefois envisageable, mais dans ce cas,
le montage n’est pas optimisé, car il n’est pas possible de bénéficier du régime d’intégration
fiscale d’une part ,et d’autre part la holding de reprise ne reçoit pas l’intégralité des
dividendes distribués par la société rachetée , une partie de ceux-ci étant perçus par les
actionnaires minoritaires.
- le levier juridique :
Les dirigeants repreneurs de la société acquise sont étroitement associés au montage de
l’opération et détiennent une part significative du capital de la holding de reprise. Ils peuvent
apporter à la holding les actions de la société acquise qu’ils pouvaient détenir . Cela leur
permet de garder le contrôle du management.
Entreprises concernées
Le LBO concerne des entreprises industrielles, commerciales ou de services , le cas d’Elior,
d’une certaine taille et dont la valeur excède les capacités financières d’un dirigeant
repreneur individuel.
L’entreprise doit être financièrement saine, rentable et disposer de solides atouts
concurrentiels. Il faut donc dégager des résultats de façon récurrente et disposer de
structures de management solides.
Les sociétés ne doivent pas avoir de gros programmes d’investissement en cours ou à
réaliser et dont les fonds de roulement ne sont pas trop élevés , car ce sont des crédits
bancaires à court terme qui financent ces besoins. Ces opérations concernent rarement des
affaires de technologie qui doivent consacrer des sommes importantes à la Recherche
&Développement et dont les résultats sont soumis à des aléas conjoncturels .
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Juin – décembre 2006 : P to P avec LBO mis en œuvre
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Elior se situe dans les cas de figure présentés, l’entreprise a réalisé son développement par
croissance interne et externe . La croissance interne est linéaire elle repose sur les contrats
gagnés avec les clients partenaires tandis que la croissance externe est plus fluctuante .
En ce qui concerne la croissance interne , l’objectif est de prendre les moyens nécessaires
pour assurer la pérennité du groupe en s’appuyant notamment sur le management et aussi
les innovations tel que le travel retail .
Robert Zolade se situe davantage sur la stratégie de la croissance externe, il est le dirigeant
cofondateur et premier actionnaire. Toutes décisions d’acquisition est réfléchie avec le
comité exécutif qui comprend le Président, le Directeur Général – Opérations, le Directeur
financier ,La DRH et le Directeur de la communication .
Pour réaliser de bonnes acquisitions, il faut savoir qu’un activité est sur le marché avant les
autres et disposer des ressources nécessaires au moment nécessaire.
Or, Robert Zolade estimait que les marchés organisés ne permettaient pas de répondre aux
objectifs de croissance du groupe à cause d’une moindre réactivité de l’actionnariat public.
Un élément déclencheur est apparu au cours de l’année 2005 : le groupe Compass , un des
principaux concurrents , met en vente une concession , l’acquisition par le groupe Elior n’est
alors pas envisageable dans une configuration boursière. Le Président commandité et
actionnaire à 21% alors , lance une réflexion « Public to Private » en cherchant des fonds
intéressés. Il devait s’agir de fonds importants de « Private equity » puisque l’opération
concernait environ 2,5 Milliards d’Euros . Un fractionnement de l’entreprise n’était pas
envisagé.
Une réflexion sur le gouvernement d’entreprise et le management est alors engagée avec
les partenaires potentiels, Robert Zolade voulant conserver le contrôle de l’entreprise. Il
fallait s’entendre sur le prix, le montage et la gouvernance. Un accord est établi sur ces
bases en mars 2006. In fine, le financement du capital se partage de la façon suivante :
- 73% Chartershouse (90%)
Chequers (10%)
- 25% Robert Zolade
2% Management
Au cours de l’année 2006 HBI (Holding Bercy Investissement ) déjà existante, lance une
OPA(offre publique d’achat) sur le capital d’Elior pour obtenir deux tiers des actions au
minimum. L’OPA a rencontré un succès important, elle a été réalisée en deux temps. A
l’issue de la deuxième période, HBI détient 94% des titres. Il fallait obtenir 95% des titres
pour bénéficier de l’intégration fiscale et pour faire une OPR(Offre Publique de Retrait ) pour
obtenir 100% des titres.
HBI a cherché d’autres partenaires , un des actionnaires detenant les 6% restant s’est
montré intéressé en souhaitant entrer u capital d’HBI. Plus tard HBI achetait à cet
investisseur ses parts pour acquérir l’essentiel de sa participation dans Elior.
Fin 2006 Elior,était détenue à 100% par HBI avec un financement privé , il n’y avait plus
d’appel à l’épargne publique.
Il s’agit là d’un opération rapide réussie(mars- décembre 2006) habituellement ces
opérations prennent deux à trois ans.
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2 : Le déroulement du LBO
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Eléments techniques du montage d’un LBO
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Les montages de LBO recourent à la création d’une structure intermédiaire la holding
de reprise.
C’est cette société holding qui sera financée, qui rachètera les actions de la société acquise
et sur laquelle seront montés les financements fonds propres et endettements
complémentaires.
La création d’une entreprise holding ou New Co n’a pas été nécessaire chez Elior, HBI déjà
existante permettait d’abriter la nouvelle structure de financement.
La structure juridique
Conformément aux proportions de l’ensemble des LBO, HBI est détenue pour 25% par le
dirigeant actionnaire , le reste par les nouveaux partenaires financiers. La holding détient
100% des titres d’Elior.
La dette bancaire de la holding est remboursée grâce aux dividendes versés par la société
acquise. Si celle-ci est détenue à plus de 95%, la holding et la cible peuvent être intégrées
fiscalement, cet avantage permet de déduire les frais financiers de la holding du bénéfice
imposable de la société acquise.
Mais la détention de ces 95% n’est pas obligatoire, le principal étant d’avoir le contrôle de la
société rachetée. En même temps, c’est la cible qui par la distribution des dividendes à la
société mère holding va permettre le remboursement des emprunts et le paiement des frais
financiers. La multiplication des actions extérieures au montage réduirait par la distribution
de dividendes les flux financiers de remboursement de la dette.
La structure de financement
L’opération de cession s’évalue à 2,63 Milliards d’euros ;le financement se partage de la
façon suivante :
- Fonds propres : 930 millions euros
dont
- Robert Zolade : 25%
- Investisseurs : 73%
- Management : 2%
- Dettes
: 1,7 milliard euros
dont
-1.06 milliard euros dette senior (Elior + HBI )
- 640 millions euros dette mezzanine et subordonnée (HBI)
Les fonds propres représentent environ 35% du prix d’acquisition, ce qui est une proportion
classique, de la même manière, la proportion de financement entre les investisseurs et les
personnes physiques est aussi classique, puisqu’elle se situe traditionnellement dans cette
fourchette .
L’endettement mis en place est constitué de deux lignes principales :
8
-
la dette senior qui sera garantie en totalité ou partiellement par un
nantissement de premier rang des titres de la société acquise.
La dette mezzanine qui sera garantie par un nantissement de second rang sur
les titres de la cible, plus risquée, elle sera rémunérée par un taux d’intérêt plus
élevé.
L’endettement est déterminé par les investisseurs financiers , au cas par cas, en fonction
des caractéristiques financières de la société acquise. Dans le cas d’Elior l’endettement
représente 6,5 fois le résultat, il y a une évolution dans ce domaine, historiquement, la dette
représentait 5 fois l’EBE, aujourd’hui la proportion d’endettement devient plus élevée. Dans
le même temps, il y a de moins en moins de dette amortissable et de plus en plus de dette in
fine.
Déterminer la structure du LBO
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La valorisation et la structure du financement doivent tenir compte de la
rentabilité de l’entreprise…
Il existe diverses méthodes d’évaluation des entreprises : la méthode des comparables, la
méthode des cash-flows actualisés, celle de l’actif net réévalué…
Cependant , la méthode d’évaluation la plus communément utilisée par les professionnels du
LBO est le multiple de l’excédent brut d’exploitation , c’est à dire bénéfices avant charges
financières et impôts.
L’EBIT ( Earnings Before Interest and Taxes ) exprime la capacité de l’entreprise à dégager
des bénéfices sur son activité propre hors éléments financiers.
Le multiple qui est appliqué à l’EBIT exprime quant à lui le potentiel de croissance du marché
et de l’entreprise sur un marché (Elior a des prévisions de croissance autour de 10% ),la
solidité de l’entreprise, son absence de vulnérabilité aux aléas , aux concurrents , l’existence
d’un management structuré , la récurrence de sa rentabilité et enfin , l’attractivité du marché
et de l’entreprise, matérialisée par la reconnaissance de la marque et de l’enseigne.
C’est ainsi que les politiques de Ressources Humaines et de Communication recouvrent
toute leur importance.
Plus ces critères sont élevés, plus le multiple sera lui même élevé. C’est le cas d’ Elior, en
phase de croissance, acteur majeur du secteur et disposant de marques reconnues.
Evaluer une entreprise , c’est tenir compte du passé en prenant en compte la situation
patrimoniale et aussi de l’avenir à travers sa rentabilité et son potentiel.
…et plus généralement de la capacité de l’entreprise à générer des liquidités
Les cash-flows prévisionnels sont fonction de l’EBITDA , c’est à dire de son activité propre,
de l’évolution des BFR (Besoins en Fonds de Roulement ) et des investissements
d’exploitation. Ceux-ci ne doivent pas entamer les capacités de remboursement de la dette
(paiement des intérêts et remboursement du principal) En revanche, le développement de la
société risque d’être affecté au niveau des investissements revus à la baisse ou au niveau
de la croissance par un fonds de roulement insuffisant pou la soutenir. Il faudra alors assurer
une gestion au « millimètre »
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Le niveau de levier financier doit donc tenir compte des cash-flows prévisionnels de la
société acquise . Mais pour fonctionner , ce levier financier doit être accompagné de leviers
opérationnels.
Le choix de la structure financière
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Structure de l’endettement
Le LBO de transmission est en réalité assimilé à un LBO de développement.
L’anticipation d’un accroissement de la valeur de l’entreprise à la suite d’une opération de
LBO est une condition nécessaire pour le montage de l’opération afin que sa valeur finale
excède celle des capitaux mobilisés pour son achat .Les investisseurs doivent donc
s’assurer des perspectives de rentabilité future, toujours selon le principe que les cash-flow
générés par l’activité rembourseront les emprunts contractés pour financer l’acquisition. En
ce sens, les opérations de rachat d’entreprises sont assimilables à des financements de
projets (principe de l’effet de levier). Le problème majeur de ce mode de financement est
l’incertitude inhérente à tout projet d’investissement.
Il faut donc obtenir un taux de rentabilité satisfaisant donc de disposer de liquidités
suffisantes pour accompagner la croissance interne et externe. Il faut pouvoir accompagner
les stratégies de développement avec un objectif de création de valeurs et de liquidité à
moyen terme.
Ainsi, la dette est de moins en moins amortissable et devient une dette in fine pour se
donner les moyens d’accompagner le développement.
Cette évolution est concomitante avec l’augmentation de l’endettement possible, il
représente aujourd’hui 6,5 fois l’EBITDA contre 5 fois le résultat auparavant dans l’ensemble
des situations.
Couvertures des risques par des covenants
L’endettement global de la holding et de la société acquise doivent rester compatibles avec
certains ratios prudentiels de référence de façon à ce que l’entreprise puisse distribuer des
dividendes pour rembourser les emprunts de la holding (en général pas plus des 2/3 du
résultat net de l’entreprise)
Les banques se servent de 4 ratios pour évaluer un montage et les contractualisent
( covenants) dans les contrats de prêts. Leur respect engage une gestion appropriée de
l’entreprise.
-
le levier ou taux d’endettement : Dettes bancaires et financières / EBITDA
la couverture des intérêts
: EBITDA / Intérêts
le capex ratio
: Investissements / CA
le cash cover
: Cash - flow net positif (EBITDA +/- variation de
BFR > Investissements + Impôts + Services de la dette )
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Ces ratios peuvent évoluer dans le temps ou être réajustés en fonction d’événements
nouveaux ( croissance externe, cessions d’actifs…)La tendance a été d’assouplir ces
contraintes, cela n’assouplit pas pour autant la gestion.
Finalité du LBO : la création de valeur
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Moteurs de cash-flow d’une entreprise
Ce sont les moteurs du cash-flow qui démultiplieront l’effet de levier : l’amélioration de la
rentabilité , la maîtrise des investissements et l’amélioration du BFR.
Dynamique de l’effet de levier
Les leviers de la création de valeur doivent être articulés les uns avec les autres pour être
efficaces. Leur mise en œuvre met en évidence le rôle des managers.
-
Amélioration de la rentabilité : augmentation de la marge : il peut s’agir d’une
augmentation de la productivité des facteurs de production ou de la croissance
du volume de production…
-
Maîtrise des investissements : après LBO, l’investissement peut être plus
rationnel , plus économique , ex : Pomme de Pain
-
Amélioration du BFR : c’est le levier le plus puissant des trois , il consiste à
procéder à un encaissement rapide des clients, négocier les délais de
paiement avec les fournisseurs et à être vigilant sur la gestion des stocks
(cette mesure ne concerne pas Elior)
La mise en œuvre de ces leviers est prévue par le business plan
Ce document établi par l’équipe de reprise est un plan de développement de l’entreprise, il
est la pièce maîtresse de la décision Tous les aspects y sont détaillés mais une partie
importante est celle des analyses financières de manière à s’assurer que la l’entreprise
pourra faire face à ses paiements de dividendes. C’est aussi un document de référence tout
au long de l’investissement
Il contient notamment le diagnostic de l’entreprise au moment de la transmission, la situation
financière très détaillée, les équipes de management, les gains de rentabilité
possibles…Autrement dit, une explication de l’intérêt de l’équipe de reprise pour la
société(atouts, opportunités mais aussi contraintes…), une explication des grandes
orientations pour les années à venir (croissance anticipée, politique commerciale…) et une
simulation chiffrée sur 5 ans formalisant les hypothèses retenues du compte de résultat du
tableau de financement et du bilan.
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C’est à partir des hypothèses du business plan que les investisseurs financiers élaboreront
et proposeront un montage financier (part des fonds propres de l’endettement et de la forme
de celui-ci).
3 : Impacts de ce mode de financement
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Maîtrise des coûts et de la génération de liquidités
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Disparition des coûts des entreprises cotées et une attention particulière à la
rentabilité des opérations
Les principaux coûts liés à l’obligation d’information de la kyrielle d’actionnaires
disparaissent. Par ailleurs, la maîtrise de la rentabilité porte à la fois sur l’augmentation des
marges et de la croissance du volume de la production. La création de valeur repose chez
Elior sur la croissance interne avec la diversification de services et sur la croissance externe,
il faut se donner les moyens de « pousser les murs ».
Les résultats de la croissance organique provenant des divisions opérationnelles vont
permettre de réaliser de futures acquisitions.
Pour autant, les entreprises qui rejoindront le groupe devront offrir une rentabilité
prévisionnelle suffisante par rapport à l’investissement engagé.
Ces acquisitions doivent s’inscrire dans les éléments quantitatifs et qualitatifs du business
plan.
Ces mêmes orientations conditionnent l’optimisation de l’investissement, ainsi on peut
réaliser jusqu’à 20% d’économie pour obtenir un investissement plus rationnel.
Quant à la maîtrise de BFR cela se traduit par un encaissement rapide des clients
(facturation rapide, factures justes sans retour et enfin des relances rapides ) par une
vigilance sur les stocks (rationaliser la logistique , la ligne de produit )cette vigilance ne
concerne pas Elior puisque par définition dans une activité de restauration, il n’y a pas ou
très peu de stock ; et enfin une négociation des délais de paiement fournisseurs (même si la
montée des prix obère les capacités de négociation .
Modèle dynamique d’association du management
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Le management met en œuvre les différents leviers
Aujourd’hui, le levier financier est moins opérant que dans les années 80 où le financement
par LBO a été introduit en Europe puisque son succès a fait monter le prix des actifs. Par
conséquent, les dettes aussi ont augmenté. Il est donc nécessaire de mettre en œuvre les
autres leviers et de les articuler ensemble.
Les managers jouent alors un rôle primordial dans cette perspective. Ce sont eux qui vont
être à l’origine de la création de valeur en mettant en œuvre différents leviers. Parmi ces
leviers de création de valeur, on pourrait citer les stratégies de croissance (innovation
produits , implantation sur de nouveaux marchés…)la croissance externe , l’amélioration de
la productivité opérationnelle (maîtrise des coûts…) et l’amélioration du fonctionnement
interne (corporate governance…)
Elior a pour objectif de se développer en créant de la valeur, la gestion par la création de
valeur devient dés lors un outil de management.
Historiquement Elior a été financé par LBO, il s’agit d’un groupe avec un héritage de LBO, il
n’y a donc pas de révolution profonde dans les méthodes de gestion.
Dans le LBO Elior , 170 managers sont actionnaires de HBI
Il s’agissait d’associer les managers les plus sensibles aux coûts c’est à dire ceux qui sont
intéressés au résultat .
170 managers sont actionnaires de HBI puisqu’ils sont associés à la création de valeur chez
Elior, ce nombre est supérieur à la moyenne des entreprises sous LBO, et est la
conséquence de la configuration structurelle du groupe qui comprend une multitude de
relais opérationnels.
Pour ceux-là , il y a un mécanisme d’association aux plus-values des investisseurs en
complément de la valorisation de l’action
Synergie avec les actionnaires
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Dans une opération de montage LBO les dirigeants assurent la gestion opérationnelle de la
société reprise, les investisseurs financiers jouent normalement un rôle d’actionnaire de
référence et de contrôle : ils participent à la réflexion sur la stratégie de développement,
assurent le suivi financier , conseillent les dirigeants lors des opérations de croissance
externe et organisent le processus de sortie.
L’investisseur apporte une contribution en ce qui concerne :
- les apports de capitaux qui permettent aux repreneurs de diriger avec une
large autonomie une entreprise correspondant à leurs expériences professionnelles
antérieures .
- un niveau de relation complémentaire de celui du dirigeant de l’entreprise
- une ingénierie financière pour la réalisation de l’opération
- une association d’intérêts convergents
L’objectif des investisseurs et des dirigeants repreneurs est de développer l’entreprise pour
réaliser ensemble une plus-value significative à moyen terme. L’association implique un
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« intuitu personae » fort entre le dirigeant et les investisseurs , elle repose sur la confiance
réciproque que l’opération sera un succès.
Plus particulièrement pour Elior, l’association se traduit par les résultats suivants :
Dialogue plus professionnel avec les actionnaires
Elior est amené à revoir certains critères. La compréhension des résultats opérationnels est
plus fine et plus régulière notamment en ce qui concerne la maîtrise du BFR et de
l’investissement (ex : réponse à un appel d’offre pour une concession sur autoroute)Il en
découle une rentabilité accrue.
Les actionnaires acquièrent de nouvelles compétences dans le métier de l’entreprise, les
débats sont dés lors plus enrichissants , plus stratégiques.
Leur connaissance du monde financier apportent des évolutions avec notamment une veille
stratégique plus soutenue en terme d’acquisitions.
Le bénéfice de partenaires puissants
L’association avec des partenaires puissants tel que Chartershouse permet de réaliser des
acquisitions significatives dans un temps restreint.
Il en résulte une démultiplication de la capacité de négociation et d’action.
Ces bénéfices ont une contrepartie, s’il n’y a pas de performance , les investisseurs ont un
droit de regard sur le management voire même une action sur la gouvernance de l’entreprise
en cas de manquement grave . Elior semble présenter une particularité dans ce domaine
compte tenu de la personnalité du Président et de l’association étroite avec les partenaires
où l’intuitu personae est très fort .
Si on retient que le LBO est un modèle dynamique d’association du management et
qu’il présente des synergies avec les actionnaires, c’est alors un pari sur un
management . Les logiques managériales et actionnariales ne sont pas
contradictoires mais alignées ; cela constitue le levier du levier.
4 : Les débats relatifs au private equity
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De nombreux débats voient le jour en ce qui concerne le développement du capitalisme
financier au détriment du capitalisme patrimonial .
Qui gouverne le capitalisme ?
Les stratégies financières jouent-elles un rôle déterminant pour les stratégies de
développement ?
Les exigences des actionnaires sont souvent supérieures aux exigences des prêteurs
financiers du moins en ce qui concerne la durée . Pour certains, la logique du LBO ne
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semble pas rompre avec le capitalisme managérial , on assisterait plutôt à une réemergence
du capitalisme dirigé par les hommes.
les débats sur le partage des fruits de la création de valeur
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LBO et emploi
Les entreprises sous LBO subissent des contraintes plus fortes, liées à la réalisation du
business plan , elles sont donc moins consensuelles puisqu’elles ont une vision des coûts
plus tendue. Cela présente des risques pour l’emploi à court terme puisqu’une partie du
profit est destiné au désendettement de la holding.
Le risque est accru si la seule source de création de valeurs est l’effet de levier financier,
toutefois si d’autres leviers de création de valeurs qui reposent sur des stratégies de
croissance sont mis en oeuvre , ils peuvent permettre alors à l’entreprise de devenir plus
efficace et de gagner des parts de marché, ce qui se traduirait à long terme par des
créations nettes d’emploi.
Débat sociétal
La sortie d’un LBO peut s’effectuer par la revente à d’autres fonds d’investissement : LBO
secondaire ou LBO sur LBO. C’est donc le rachat par un groupe d’investisseurs par la
procédure LBO, d’une société qui a déjà fait l’objet d’un LBO et que les investisseurs
précédents sont prêts à céder.
Les dirigeants peuvent rester les mêmes ou changer .Dans les discussions jusqu’à
aujourd’hui, ce sont les dirigeants qui ont pris l’ascendant sur les actionnaires compte tenu
de la rareté des entreprises éligibles à un rachat et de l’abondance des liquidités disponibles
.Ils ont pu engranger des plus-values supérieures à celles des investisseurs.
Il se pourrait que cette position évolue avec les remous actuels et la restriction des liquidités
sur le marché.
Il n’en reste pas moins qu’il y a un enrichissement rapide des managers dirigeants.
Cela pourrait être la rémunération d’un esprit entrepreneurial et de la création de valeur (
cf : Schumpeter) La réalisation d’une plus- value permettant des stratégies de croissance
externe et donc de « pousser les murs »
En réinvestissant leur plus-value dans le capital la part des dirigeants augmente dans les
nouvelles opérations.
Par ailleurs , le « middle » management est plus souvent associé aujourd’hui .
Bulle spéculative
La succession de LBO fait augmenter mécaniquement la valeur des actifs de l’entreprise, on
peut dés lors être face à un risque de bulle spéculative. La bulle peut être consécutive à
l’afflux massif des capitaux à la recherche d’opportunités d’investissement.
Dans ce cas , vu l’importance du prix des actifs , l’effet financier est moindre et les
contraintes sont alors plus fortes.
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Modèle pérenne de capitalisme entrepreneurial
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Aujourd’hui, les procédures de montage d’un LBO sont inévitables par conséquent utilisées.
C’est une alternative durablement établie au modèle traditionnel ( sociétés familiales ou
cotées ) , et pouvant être mise en œuvre « en alternance » avec ce modèle traditionnel.
Il n’y a pas que la possibilité : opération « PtoP » suivie d’un LBO mais aussi la situation où
la sortie d’un LBO se fait par une cotation en Bourse , c’est le cas de Legrand ou Rexel deux
entreprises de matériel électrique cotées récemment en Bourse.
On assisterait alors à une dynamique de croissance prouvée des sociétés sous LBO grâce
notamment au passage progressif du « LBO de remboursement de dette » au « LBO de
développement » . Le plus important pour un investisseur en capital n’est pas de rembourser
la dette d’acquisition (dette amortissable) mais d’avoir le levier financier maximum.
L’investisseur préfère rembourser le minimum de dette pendant le LBO pour conserver le
levier maximum (dette remboursable in fine) la majeure partie de la dette LBO n’étant
remboursée que lors de la sortie du LBO
Ainsi le private equity ne semble pas être une mode passagère, les fonds d’investissement
étant de plus en plus nombreux et faisant des émules auprès des entreprises candidates.
Le cas d’Elior est significatif dans ce domaine, son Président Robert Zolade, a développé
son entreprise par croissance interne et externe grâce à l’appui d’investisseurs en capital. Il
est le principal actionnaire d’une entreprise qui est devenue un acteur incontournable de
son secteur. Pas étonnant alors que l’histoire se renouvelle…
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