Document 1 : Vision globale sur la vie de George Sand.
GEORGE SAND (1804-1876)
I PRISE DE VUE
Renan écrivait au lendemain des obsèques de George Sand , morte à Nohant: «Une
corde est brisée dans la lyre du siècle [...]. Mme Sand traversa tous les rêves; elle sourit
à tous, crut un moment à tous; son jugement pratique put parfois s’égarer, mais, comme
artiste, elle ne s’est jamais trompée. Ses œuvres sont vraiment l’écho de notre siècle.» Et
pourtant la fortune posthume de Sand a été aussi perturbée que sa vie. Une partie de
l’œuvre demeura longtemps dans un purgatoire immérité. Mais, depuis la publication de
la Correspondance, on assiste à un vif regain d’intérêt et les rééditions se succèdent.
II UNE ENFANT FRUSTRÉE
L’enfant Aurore Dupin qui voit le jour à Paris sera pendant toute sa jeunesse en porte à
faux. Le lieutenant Maurice Dupin, descendant (de la main gauche) de Maurice de Saxe,
lui-même bâtard de roi, vient tout juste d’épouser en cachette de sa mère, Sophie
Delaborde, fille du peuple, rencontrée à l’armée d’Italie où elle suivait un adjudant-
général. À peine née, Aurore est au centre d’un conflit sans fin, qu’aggravera la mort
accidentelle de l’officier, en 1808. La grand-mère paternelle, qui détient la fortune, élèvera
l’enfant, mais exige que Sophie se tienne à l’écart. Frustration déchirante, qui inspirera à
Aurore ses premières rébellions. Elle aura pour compensation dix années d’enfance
campagnarde, à Nohant, au fond du Berry dont elle s’imprègne et qu’elle décrira si
poétiquement plus tard. Pensionnaire de 1818 à 1820 dans un couvent parisien, elle y
traverse une crise de mysticisme. Revenue à Nohant avec sa grand-mère dont la santé
et l’esprit déclinent, Aurore, presque livrée à elle-même, complète son instruction par la
lecture, en particulier se prend de passion pour J.-J. Rousseau. Mue par son aversion
pour sa belle-fille, Mme Dupin de Francueil révèle à l’adolescente bouleversée la vie peu
édifiante de Sophie: ce choc brutal aura de profondes répercussions.
Sa grand-mère meurt à la fin de 1821, et Aurore reste peu de temps sous la coupe de sa
mère: elle se marie en septembre 1822 avec Casimir Dudevant, bâtard (reconnu) d’un
colonel. Deux enfants naissent: Maurice, puis Solange. Mais la mésintelligence n’a pas
tardé. Où sont les torts? Des deux côtés, pour être juste. Si Casimir est chasseur, buveur,
coureur, d’esprit lourd, Aurore n’est pas irréprochable. On peut inscrire à son passif
plusieurs amoureux platoniques, dont Aurélien de Sèze, et deux amants indéniables:
Stéphane Ajasson de Grandsagne et Jules Sandeau.
À ce mariage succède une demi-rupture, par consentement mutuel: Mme Dudevant,
dûment autorisée, va passer une partie de l’année à Paris. Elle y mène une vie assez
libre, s’essaie au journalisme à Figaro (Le Canard enchaîné de l’époque) et à la
littérature.
III NAISSANCE DE GEORGE SAND
Premier roman en collaboration avec son amant Jules Sandeau: Rose et Blanche,
maladroit mais intéressant début. Les suivants, elle les signera seule, du pseudonyme
George Sand: c’est Indiana (1832), qu’une rumeur admirative accueille, Valentine (1832),
dont les descriptions enchantent Chateaubriand. George Sand fait bien froncer quelques
sourcils, car elle se pose en défenseur de la femme, plaide pour le droit à la passion,
attaque le mariage et la société opprimante. Mais, dans l’ensemble, la critique est très
favorable, vantant le style, le don d’observation, l’analyse psychologique. Sainte-Beuve
remarque le premier un souci de réalisme qui place les personnages dans «un monde
vrai, vivant, nôtre». Ainsi commence une carrière féconde de romancière.
Dans le cadre beaucoup trop restreint qui nous est imposé, il n’est possible, ni de donner
un résumé autre que squelettique d’une vie très remplie, ni de faire le tour d’une
production gigantesque (soixante-dix romans, cinquante volumes d’œuvres diverses).
Nous devons nous contenter de pointer quelques sommets de la biographie et de
l’œuvre. L’année 1833 marque à la fois l’apparition de Lélia, qui s’attache pour toujours
Association ALDÉRAN © - Conférence 1000-110 : “ George Sand“ - 20/11/2003 - page 4