CONFÉRENCE DU FORUM DES SAVOIRS
“Plus l’être humain sera éclairé, plus il sera libre.”
Voltaire
GEORGE SAND
Entre littérature et philosophie
CONFÉRENCE PAR LÉNA MONERO
Association ALDÉRAN Toulouse
pour la promotion de la Philosophie
MAISON DE LA PHILOSOPHIE
29 rue de la digue, 31300 Toulouse
Tél : 05.61.42.14.40
Site : www.alderan-philo.org conférence N°1000-110
GEORGES SAND, ENTRE LITTÉRATURE ET PHILOSOPHIE
conférence de Léna Monnerot donnée le 20/11/2004
à la Maison de la philosophie à Toulouse
C’est le bicentenaire de la naissance de George Sand, madame Jourdain de la philosophie,
qui essayera, sa vie durant, d’être vraie, et prônera l’authenticité comme vertu première.
Aristocrate par l’intelligence, démocrate par le cœur, universelle par le génie, à la fois
littéraire et comportemental, elle a été une des grandes consciences de son siècle. Une
immersion dans ses écrits politiques et sa correspondance éclairera cet aspect méconnu de
son oeuvre et certaines grandes questions d’actualité.
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2004, ANNÉE GEORGE SAND (1804 - 1876)
Par ses choix, son engagement, sa capaci à dépasser les conventions, grâce à la puissance de son
écriture et de sa réflexion, George Sand est non seulement l'écho de son siècle, mais également une voix
qui nous parvient aujourd'hui éclatante de modernité;
L'année 2004 a été déclarée année George Sand par le Ministère de la Culture. À cette occasion, le Comité
du bicentenaire vous propose de découvrir la femme passionnée au sein de son univers d'inspiration, le
pays de Nohant. Rencontres littéraires, balades contées, soirées romanesques sont au rendez-vous pour
commémorer la femme autant que l'écrivain.
"Si j’ai accepté la présidence du Comité du Bicentenaire, c’est d’abord parce que George
Sand est ma voisine : elle habitait le sud du Berry, j’habite le nord du Limousin. Depuis
l’enfance, je croise et recroise sans cesse les chemins qui furent les siens, dans sa
« Vallée Noire » du Boischaut, dans nos vallées de la Gartempe, de la Gargilesse, de la
Creuse. Des paysages qu’elle évoque, pas un qui ne me soit familier ; quant à la maison
de Nohant, je l’ai si souvent visitée que j’ai l’impression, parfois, de m’y trouver chez
moi…
Grâce à cette proximité de « payse », j’ai connu la personne avant de découvrir le
personnage, et fréquenté la femme avant d’être en âge de lire l’écrivain. Il en résulte que
George Sand ne m’a jamais intimidée. Au contraire, dans le milieu peu littéraire qui était
le mien, son exemple a probablement nourri ma vocation d’écrivain : habituée à mettre,
jour après jour, mes pas dans les siens, comment n’aurais-je pas éprouvé l’envie de
« marcher sur ses traces » ?
Voilà pour les lieux. Mais il faut aussi parler de l’époque. Pour les femmes de ma
génération, les petites filles du « Baby Boom », George Sand fut un idéal, le modèle de
l’être accompli dans toutes ses dimensions : capable d’exercer son métier et de conduire
sa vie aussi fermement qu’un homme, sans pour autant renoncer à être une mère, une
amante, une maîtresse de la maison.
Certains prétendent qu’elle a mis plus de génie dans sa vie que dans son œuvre. Quand
cela serait, mon admiration pour elle ne s’en trouverait pas diminuée ; dans l’histoire des
femmes, George Sand est bien mieux qu’un grand écrivain : un rêve en marche… "
Françoise Chandernagor de l’Académie Goncourt
présidente d'honneur du Comité du Bicentenaire
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Document 1 : Vision globale sur la vie de George Sand.
GEORGE SAND (1804-1876)
I PRISE DE VUE
Renan écrivait au lendemain des obsèques de George Sand , morte à Nohant: «Une
corde est brisée dans la lyre du siècle [...]. Mme Sand traversa tous les rêves; elle sourit
à tous, crut un moment à tous; son jugement pratique put parfois s’égarer, mais, comme
artiste, elle ne s’est jamais trompée. Ses œuvres sont vraiment l’écho de notre siècle.» Et
pourtant la fortune posthume de Sand a été aussi perturbée que sa vie. Une partie de
l’œuvre demeura longtemps dans un purgatoire immérité. Mais, depuis la publication de
la Correspondance, on assiste à un vif regain d’intérêt et les rééditions se succèdent.
II UNE ENFANT FRUSTRÉE
L’enfant Aurore Dupin qui voit le jour à Paris sera pendant toute sa jeunesse en porte à
faux. Le lieutenant Maurice Dupin, descendant (de la main gauche) de Maurice de Saxe,
lui-même bâtard de roi, vient tout juste d’épouser en cachette de sa mère, Sophie
Delaborde, fille du peuple, rencontrée à l’armée d’Italie elle suivait un adjudant-
général. À peine née, Aurore est au centre d’un conflit sans fin, qu’aggravera la mort
accidentelle de l’officier, en 1808. La grand-mère paternelle, qui détient la fortune, élèvera
l’enfant, mais exige que Sophie se tienne à l’écart. Frustration déchirante, qui inspirera à
Aurore ses premières rébellions. Elle aura pour compensation dix années d’enfance
campagnarde, à Nohant, au fond du Berry dont elle s’imprègne et qu’elle décrira si
poétiquement plus tard. Pensionnaire de 1818 à 1820 dans un couvent parisien, elle y
traverse une crise de mysticisme. Revenue à Nohant avec sa grand-mère dont la santé
et l’esprit déclinent, Aurore, presque livrée à elle-même, complète son instruction par la
lecture, en particulier se prend de passion pour J.-J. Rousseau. Mue par son aversion
pour sa belle-fille, Mme Dupin de Francueil révèle à l’adolescente bouleversée la vie peu
édifiante de Sophie: ce choc brutal aura de profondes répercussions.
Sa grand-mère meurt à la fin de 1821, et Aurore reste peu de temps sous la coupe de sa
mère: elle se marie en septembre 1822 avec Casimir Dudevant, bâtard (reconnu) d’un
colonel. Deux enfants naissent: Maurice, puis Solange. Mais la mésintelligence n’a pas
tardé. sont les torts? Des deux côtés, pour être juste. Si Casimir est chasseur, buveur,
coureur, d’esprit lourd, Aurore n’est pas irréprochable. On peut inscrire à son passif
plusieurs amoureux platoniques, dont Aurélien de Sèze, et deux amants indéniables:
Stéphane Ajasson de Grandsagne et Jules Sandeau.
À ce mariage succède une demi-rupture, par consentement mutuel: Mme Dudevant,
dûment autorisée, va passer une partie de l’année à Paris. Elle y mène une vie assez
libre, s’essaie au journalisme à Figaro (Le Canard enchaîné de l’époque) et à la
littérature.
III NAISSANCE DE GEORGE SAND
Premier roman en collaboration avec son amant Jules Sandeau: Rose et Blanche,
maladroit mais intéressant début. Les suivants, elle les signera seule, du pseudonyme
George Sand: c’est Indiana (1832), qu’une rumeur admirative accueille, Valentine (1832),
dont les descriptions enchantent Chateaubriand. George Sand fait bien froncer quelques
sourcils, car elle se pose en défenseur de la femme, plaide pour le droit à la passion,
attaque le mariage et la société opprimante. Mais, dans l’ensemble, la critique est très
favorable, vantant le style, le don d’observation, l’analyse psychologique. Sainte-Beuve
remarque le premier un souci de réalisme qui place les personnages dans «un monde
vrai, vivant, nôtre». Ainsi commence une carrière féconde de romancière.
Dans le cadre beaucoup trop restreint qui nous est imposé, il n’est possible, ni de donner
un résumé autre que squelettique d’une vie très remplie, ni de faire le tour d’une
production gigantesque (soixante-dix romans, cinquante volumes d’œuvres diverses).
Nous devons nous contenter de pointer quelques sommets de la biographie et de
l’œuvre. L’année 1833 marque à la fois l’apparition de Lélia, qui s’attache pour toujours
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au nom de l’auteur, œuvre étrange, lyrique à la fois et philosophique, roman-poème, «la
pensée du siècle sur lui-même, la plainte d’une société à l’agonie» (G. Planche), qui
déchaîne l’admiration des uns, l’invective des autres; l’entrée de Sand à la Revue des
Deux Mondes, à laquelle elle va collaborer assidûment; la liaison mouvementée avec
Musset, leur départ pour le très fameux voyage de Venise, tant de fois romancé, raconté,
commenté, qui fera date dans l’histoire du romantisme, et d’où Sand ramène trois romans
et les plus belles Lettres d’un voyageur, et Musset un cœur en écharpe.
L’heureux rival du poète, Pagello, n’a été qu’un intermède. Son successeur, le fougueux
avocat républicain Michel de Bourges, voit déjà son règne s’achever lorsque paraît en
1837, année féconde, Maupat, roman d’amour, d’action et d’atmosphère, histoire d’une
famille de hobereaux-bandits dont le plus jeune est sauvé par un grand amour.
1838-1839: George , qui est devenue la maîtresse de Chopin, entreprend avec lui et ses
enfants le voyage de Majorque, qui fera autant de bruit que celui de Venise. À
Valldemosa, elle termine le curieux roman de Spiridion, qui, inspiré par les idées de
Lamennais et de Pierre Leroux, agite les graves questions de la foi et du doute, et
influencera fortement Renan.
IV L’ENGAGEMENT POLITIQUE
Buloz prétendant limiter sa liberté d’expression, Sand se brouille avec lui, fonde La
Revue indépendante, prend une position de plus en plus engagée, affiche des opinions
ardemment démocratiques, va jusqu’à se dire «communiste». Elle publie Horace (1841),
le grand cycle de Consuelo (1842-1844), fresque immense et foisonnante, et ses romans
dits socialistes, qui posent au siècle des questions qu’il n’a pas résolues sur la propriété,
les rapports du capital et du travail, les associations de travailleurs. La grande idée du
progrès moral de l’humanité domine son œuvre. Elle est liée avec la plupart des têtes
pensantes de la démocratie (Leroux, Barbès, Blanc, Lamennais, Cavaignac), avec des
révolutionnaires étrangers (Mazzini, Bakounine). Elle patronne les écrivains prolétaires
de qui elle attend un renouvellement et un enrichissement de la littérature. Aussi
accueille-t-elle les journées de février 1848 avec enthousiasme. Elle se lance dans
l’action, fonde un journal, rédige de nombreux écrits de propagande, conseille Ledru-
Rollin dans la coulisse. Mais les journées de Juin vont casser les ailes à son beau rêve
de république «dure et pure».
Profondément désabusée, elle se réfugie à Nohant. La réaction ayant le dessus, la
presse est muselée. Sand reprend la plume pour une série de romans dans un genre
déjà abordé avec La Mare au diable (1846), qu’on groupe sous le nom de romans
champêtres, ses «Géorgiques», et poursuit la rédaction de ses Mémoires (Histoire de ma
vie, qui paraîtra en 1854-1855). Après le coup d’État, elle ne se rallie pas à l’Empire,
comme on l’a écrit un peu légèrement, mais s’emploie avec courage et obstination à
arracher des victimes à la persécution antirépublicaine. Une grande fièvre de créations
théâtrales marquera sa maturité (vingt-cinq pièces créées sur des scènes parisiennes).
Réconciliée avec Buloz, elle est revenue à la Revue des Deux Mondes, où, jusqu’au
terme d’une vie d’incessant labeur, elle donnera des romans qu’on a tort d’englober sous
l’étiquette banale de romans romanesques, car certains, comme La Daniella (1857) et
Mademoiselle la Quintinie (1863), sont assez explosifs. Georges Lubin
in Encyclopédie Universalis 7.0
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