CONFÉRENCE PHILOSOPHIQUE “Plus l’être humain sera éclairé, plus il sera libre.” Voltaire ÉLOGE DU PLAISIR La vertu du plaisir pour l'épanouissement humain CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN Association ALDÉRAN Toulouse pour la promotion de la Philosophie MAISON DE LA PHILOSOPHIE 29 rue de la digue, 31300 Toulouse Tél : 05.61.42.14.40 Email : [email protected] Site : www.alderan-philo.org conférence N°1600-115 ÉLOGE DU PLAISIR La vertu du plaisir pour l'épanouissement humain Conférence d’Éric Lowen donnée le 06/06/2009 à la Maison de la philosophie à Toulouse Le plaisir est un élément constituant de l’Être Humain, participant de sa nature et du sens de sa vie. Or, en raison d’incompréhension, de croyances et de superstitions, le plaisir et les plaisirs terrestres furent longtemps rejetés et dévalorisés, notamment dans les cultures judéochrétiennes. N’est-il pas temps de réhabiliter et d’exalter le plaisir ? Une philosophie positive à l'égard de la vie et de l’existence peut-elle exister sans redonner toute sa place et sa valeur au plaisir ? Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 2 ÉLOGE DU PLAISIR La vertu du plaisir pour l'épanouissement humain PLAN DE LA CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN La nature a placé l’homme sous le gouvernement de deux souverains maîtres, le plaisir et la douleur. Le principe d’utilité reconnaît cette sujétion et la suppose comme fondement du système qui a pour objet d’ériger, avec le secours de la raison et de la loi, l’édifice de la félicité. Jérémy Bentham (1748-1832) Principes de morale et législation I L’HÉRITAGE D’UNE CULTURE QUI A DÉNIÉ LE DROIT AU PLAISIR 1 - La question atemporelle du plaisir, les réponses culturelles 2 - La pensée judéochrétienne a exclus le bonheur de ce monde-ci et a diabolisé les plaisirs 3 - Le discours religieux judéochrétien postule un salut et non un bonheur 4 - Une croyance théologique qui conditionne de manière négative le sens de l’existence 5 - La difficile et lente sortie de ces idéologies de la souffrance et du malheur II LA RÉHABILITATION DU PLAISIR, LA DÉCOUVERTE DE L’INTELLIGENCE DU PLAISIR 1 - Qu’est-ce que le plaisir ? 2 - L’origine du plaisir, la conséquence de l’interaction des sens et du cerveau 3 - La naturalité du plaisir 4 - Le plaisir est une émotion première, l’irréductibilité du plaisir 5 - La positivité du plaisir, le plaisir est plus que la fuite du déplaisir 6 - L’intelligence du plaisir 7 - L’autonomisation du plaisir, le plaisir s’élève à sa propre finalité 8 - L’unité du plaisir dans la diversité des plaisirs, l’égalité des plaisirs 9 - La nécessité physiologique, psychologique et existentielle du plaisir 10 - Le plaisir n’est pas tout, mais il est légitime et nécessaire dans l’existence 11 - Le plaisir est inscrit dans le sens de l’existence humaine, il participe du bonheur III PLAISIR ET INDIVIDUALITÉ 1 - De la réponse de la nature humaine à la réponse individualisée 2 - L’individualisation du plaisir 3 - La dépendance du plaisir avec l’individualité : plaisir et conscience 4 - La qualité de nos plaisirs est corrélée à notre état d’être intérieur 5 - L’évolution de nos plaisirs, reflet de notre évolution IV LA PHILOSOPHISATION DU PLAISIR, OU L’INTELLIGENCE DES PLAISIRS 1 - La conscience de la nature du plaisir permet de l’intégrer dans la prosophia 2 - L’amour du plaisir, attitude indispensable du vécu intelligent du plaisir 3 - S’autoriser le plaisir et se rendre apte au plaisir, une élévation de soi 4 - Cultiver le plaisir, en faire un art du plaisir 5 - L’intelligence des plaisirs, le vécu équilibré des plaisirs 6 - La qualification du plaisir 7 - Savoir prendre plaisir à la vie et aux plaisirs, sans s’oublier dans les plaisirs 8 - Le passage au plaisir des plaisirs, au plaisir de l’existence V CONCLUSION 1 - Toute véritable philosophie moderne doit être aussi une voie du plaisir 2 - Un des principes fondateurs de la philosophie aldérienne ORA ET LABORA Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 3 Document 1 : Un exemple des préjugés des philosophes antiques sur le plaisir. Tous ceux qui tirent leurs plaisirs de l'estomac et qui franchissent la limite de l'opportunité en nourriture, en boisson et en amour ne connaissent que des plaisirs fugitifs et temporaires, limités à l'instant où ils mangent et boivent, mais assortis de nombreuses peines. Car le désir se présente sans cesse pour les mêmes choses, et lorsqu'on a obtenu ce qu'on désirait, le plaisir se dissipe aussitôt, et ceux qui en ont joui n'en tirent qu'un bref instant de contentement ; après quoi le besoin des mêmes objets se fait sentir de nouveau. Démocrite d’Abdère (- 460,- 357) Document 2 : Un exemple des préjugés (tenaces !) sur le plaisir que l’on trouve dans l’antiquité, particulièrement chez les stoïciens : le plaisir est trivial, vulgaire et fugace, alors que la vertu est noble. Ajoutez encore que le plaisir s'arrange de l'existence la plus honteuse, mais que la vertu ne consent pas a une vie mauvaise ; il y a des malheureux à qui le plaisir ne fait pas défaut, et même dont le plaisir cause le malheur, ce qui n'arriverait pas si le plaisir était mélangé à la vertu, mais la vertu existe souvent sans le plaisir et n'a jamais besoin de lui. Pourquoi rapprocher des choses si dissemblables et même si opposées ? La vertu est chose élevée, sublime, royale, invincible, inépuisable ; le plaisir est chose basse, servile, faible, fragile qui s'établit et séjourne dans les mauvais lieux et les cabarets. Vous trouverez la vertu au temple, au forum, à la curie, elle tient bon devant les remparts, couverte de poussière, le teint hâlé et les mains calleuses ; le plaisir habituellement se cache et recherche les ténèbres, il est aux abords des bains, des étuves et des endroits qui redoutent la police ; il est amolli, sans force, humide de vin et de parfums, pâle ou fardé, embaumé d'onguents comme un cadavre. Le souverain bien est immortel, il ne sait point s'en aller, il ne connaît ni satiété ni regret ; en effet une âme droite ne change jamais, elle n'éprouve point de haine pour elle-même, elle n'a rien à modifier à sa vie qui est la meilleure. Mais le plaisir arrivé à son plus haut point s'évanouit ; il ne tient pas une grande place, c'est pourquoi il la remplit vite ; puis vient l'ennui, et après un premier élan le plaisir se flétrit. Ayant son essence dans le mouvement, il est toujours indéterminé. Rien ne peut exister de substantiel en ce qui vient et passe si vite, et se trouve destiné à périr de par son propre usage ; le plaisir en effet aboutit à un point où il cesse, et dès son début il regarde vers sa fin. Que dire du fait que le plaisir n'existe pas moins chez les fous que chez les méchants et que les êtres bas prennent autant de plaisir dans leurs infamies que les honnêtes gens dans leurs belles actions ? Aussi les Anciens ont prescrit de rechercher la vie la plus vertueuse et non la plus agréable, de façon que le plaisir soit non pas le guide mais le compagnon d'une volonté droite et bonne. Sénèque (4-65) De la vie heureuse Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 4 Document 3 : Un autre exemple d’ennemi du plaisir, les religions chrétiennes (voir les 7 péchés capitaux). N'aimez pas le monde, ni tout ce qui est dans le monde, parce que ce qu'il y a dans le monde est concupiscence de la chair ; un attachement à la fragile et trompeuse beauté des corps, et un amour déréglé du plaisir des sens, qui corrompt également les deux sexes. Ô Dieu, qui par un juste jugement avez livré la nature humaine coupable à ce principe d'incontinence, vous y avez préparé un remède dans l'amour conjugal : mais ce remède fait voir encore la grandeur du mal, puisqu'il se mêle tant d'excès dans l'usage de ce remède sacré. Car d'abord ce sacré remède, c'est-à-dire le mariage, est un bien et un grand bien, puisque c'est un grand sacrement en Jésus-Christ et en son Église, et le symbole de leur union indissoluble. Mais c'est un bien qui suppose un mal dont on use bien ; c'est-à-dire, qui suppose le mal de la concupiscence, dont on use bien, lorsqu'on s'en sert pour faire fructifier la nature humaine. Mais en même temps, c'est un bien qui remédie au mal, c'est-à-dire à l'intempérance ; un remède de ses excès, et un frein à sa licence. Que de peine n'a pas la faiblesse humaine à se tenir dans les bornes de la liaison conjugale, exprimées dans le contrat même du mariage ? C'est ce qui fait dire à saint Augustin, qu'il s'en trouve plus qui gardent une perpétuelle et inviolable continence, qu'il ne s'en trouve qui demeurent dans les lois de la chasteté conjugale ; un amour désordonné pour sa propre femme étant souvent, selon le même Père, un attrait secret à en aimer d'autres. Ô faiblesse de la misérable humanité, qu'on ne peut assez déplorer ! Ce désordre a fait dire à saint Paul même, que ceux qui sont mariés doivent vivre comme n'ayant pas de femmes ; les femmes par conséquent comme n'ayant pas de maris : c'est-à-dire, les uns et les autres sans être trop attachés les uns aux autres, et sans se livrer aux sens, sans y mettre leur félicité, sans les rendre maîtres. C'est ce qui fait la louange de la sainte virginité ; et sur ce fondement, saint Augustin distingue trois états de la vie humaine par rapport à la concupiscence de la chair. Les chastes mariés usent bien de ce mal ; les intempérants en usent mal ; les continents perpétuels n'en usent point du tout, et ne donnent rien à l'amour du plaisir des sens. Bossuet (1627-1704) Traité de la concupiscence Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 5 Document 4 : Un autre exemple des ennemis du plaisir, ceux qui font de la souffrance l’horizon de la vie, pour qui la souffrance est l'essence même de la vie. C’est par exemple le cas de Schopenhauer. Mais le plus souvent nous nous détournons, comme d'une médecine amère, de cette vérité, que souffrir, c'est l'essence même de la vie ; que dès lors la souffrance ne s'infiltre pas en nous du dehors, que nous portons en nous-mêmes l'intarissable source d'où elle sort. Cette peine qui est inséparable de nous, au contraire nous sommes toujours à lui chercher quelque cause étrangère, et comme un prétexte ; semblables à l'homme libre qui se fait une idole, pour ne rester pas sans maître. Sans nous lasser, nous courons de désir en désir ; en vain chaque satisfaction obtenue, en dépit de ce qu'elle promettait, ne nous satisfait point, le plus souvent ne nous laisse que le souvenir d'une erreur honteuse ; nous continuons à ne pas comprendre, nous recommençons le jeu des Danaïdes ; et nous voilà à poursuivre encore de nouveaux désirs : Tant que l'objet de nos désirs est loin, il nous semble au-dessus de tout ; l'atteignonsnous, c'est un autre objet que nous souhaitons ; et la soif de vivre qui nous tient bouche béante est toujours égale à elle-même. (LUCRÈCE, 111, V. 1080 sqq.) Et cela va toujours ainsi, à l'infini, à moins, chose plus rare, et qui déjà réclame quelque force de caractère, à moins que nous ne nous trouvions en face d'un désir que nous ne pouvons ni satisfaire ni abandonner ; alors nous avons ce que nous cherchions, un objet que nous puissions en tout instant accuser, à la place de notre propre essence, d'être la source de nos misères ; dès lors, nous sommes en querelle avec notre destinée, mais réconciliés avec notre existence même, plus éloignés que jamais de reconnaître que cette existence même a pour essence la douleur, et qu'un vrai contentement est chose impossible. De toute cette suite de réflexions naît une humeur un peu mélancolique, l'air d'un homme qui vit avec un seul grand chagrin, et qui dès lors dédaigne le reste, petites douleurs et petits plaisirs ; c'est déjà un état plus noble, que cette chasse perpétuelle à des fantômes toujours changeants, qui est l'occupation de la plupart. La satisfaction, le bonheur, comme l'appellent les hommes, n'est au propre et dans son essence rien que de négatif ; en elle, rien de positif Il n'y a pas de satisfaction qui d'ellemême et comme de son propre mouvement vienne à nous ; il faut qu'elle soit la satisfaction d'un désir. Le désir, en effet, la privation, est la condition préliminaire de toute jouissance. Or avec la satisfaction cesse le désir, et par conséquent la jouissance aussi. Donc la satisfaction, le contentement ne sauraient être qu'une délivrance à l'égard d'une douleur, d'un besoin ; sous ce nom, il ne faut pas entendre en effet seulement la souffrance effective, visible, mais toute espèce de désir qui, par son importunité, trouble notre repos, et Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 6 même cet ennui qui tue, qui nous fait de l'existence un fardeau. - Or, c'est une entreprise difficile d'obtenir, de conquérir un bien quelconque ; pas d'objet qui ne soit séparé de nous par des difficultés, des travaux sans fin ; sur la route, à chaque pas, surgissent des obstacles. Et la conquête une fois faite, l'objet atteint, qu'a-t-on gagné ? rien assurément, que de s'être délivré de quelque souffrance, de quelque désir, d'être revenu à l'état où l'on se trouvait avant l'apparition de ce désir. - Le fait immédiat pour nous, c'est le besoin tout seul, c'est-à-dire la douleur. Pour la satisfaction et la jouissance, nous ne pouvons les connaître qu'indirectement ; il nous faut faire appel au souvenir de la souffrance, de la privation passées, qu'elles ont chassées tout d'abord. Voilà pourquoi les biens, les avantages qui sont actuellement en notre possession, nous n'en avons pas une vraie conscience, nous ne les apprécions pas ; il nous semble qu'il n'en pouvait être autrement ; et en effet, tout le bonheur qu'ils nous donnent, c'est d'écarter de nous certaines souffrances. Il faut les perdre, pour en sentir le prix ; le manque, la privation, la douleur, voilà la chose positive, et qui sans intermédiaire s'offre à nous. Telle est encore la raison qui nous rend si douce la mémoire des malheurs surmontés par nous : besoin, maladie, privation, etc. : c'est en effet notre seul moyen de jouir des biens présents. Ce qu'on ne saurait méconnaître non plus, c'est qu'en raisonnant ainsi, en égoïste (l'égoïsme, au reste, est la forme même de la volonté de vivre), nous goûtons une satisfaction, un plaisir du même ordre, au spectacle ou à la peinture des douleurs d'autrui ; Lucrèce l'a dit en de beaux vers, et bien nettement, au début de son second livre : Il est doux, quand la mer est forte, quand les vents agitent l'onde, d'assister du rivage aux efforts des marins : non que la souffrance d'autrui soit pour nous une joie véritable ; mais voir de quelles peines on est à l'abri, voilà ce qui est doux. Pourtant, nous le verrons plus tard, cette sorte de joie, cette façon de se rendre sensible à soi-même son bien-être, est bien voisine du principe même de la méchanceté active. Tout bonheur est négatif, sans rien de positif ; nulle satisfaction, nul contentement, par suite, ne peut être de durée ; au fond ils ne sont que la cessation d'une douleur ou d'une privation, et, pour remplacer ces dernières, ce qui viendra sera infailliblement ou une peine nouvelle, ou bien quelque langueur, une attente sans objet, l'ennui. C'est de cette vérité qu'on trouve une trace dans ce fidèle miroir du monde, de la vie et de leur essence, je veux dire dans l'art, surtout la poésie. Un poème épique ou dramatique ne peut avoir qu'un sujet : une dispute, un effort, un combat dont le bonheur est le prix ; mais quant au bonheur lui-même, au bonheur accompli, jamais il ne nous en fait le tableau. À travers mille difficultés, mille périls, il conduit ses héros au but ; à peine l'ont-ils atteint, vite le rideau ! Et que lui resterait-il à faire, sinon de montrer que le but même, si lumineux, et où le héros croyait trouver le bonheur, était pure duperie ; qu'après l'avoir atteint, il ne s'en est pas trouvé mieux qu'auparavant. Comme il ne peut y avoir de vrai et solide bonheur, le bonheur ne peut être pour l'art un objet. À vrai dire, le but propre de l'idylle, c'est justement la peinture de ce bonheur impossible ; mais aussi, chacun le voit bien, l'idylle par elle-même n'est pas un genre qui se tienne. Toujours, entre les mains du poète, elle tourne ou à l'épopée, une toute petite épopée, avec de petits chagrins, de petits plaisirs, de petits efforts, c'est le cas ordinaire ; ou bien à la poésie descriptive ; alors elle peint la beauté de la nature, et se réduit à ce mode de connaissance pure, libre de tout vouloir, qui, à vrai dire, est le seul vrai bonheur, non plus un bonheur précédé par la souffrance et le besoin, et traînant à sa suite le regret, la douleur, le vide de l'âme, le dégoût, mais le seul qui puisse remplir, sinon la vie entière, du moins quelques moments dans la vie. - Et ce que nous voyons dans la poésie, nous le retrouvons dans la musique ; la mélodie nous offre comme une histoire très intime de la volonté arrivée à la conscience des mystères de la vie, du désir, de la souffrance et de la joie, du flux et du reflux du cœur humain. La mélodie, c'est un écart par lequel on quitte la tonique et, à travers mille merveilleux détours, on arrive à une dissonance douloureuse, pour retrouver enfin la tonique, qui exprime la satisfaction et l'apaisement de la volonté ; mais après elle, plus rien à faire, et quant à la soutenir un peu longtemps, ce serait la monotonie même, fatigante, insignifiante, et qui traduit l'ennui. Ainsi, on le voit assez par tous ces éclaircissements, nulle satisfaction possible ne peut durer, il n'est point de bonheur positif ; la raison de cela, on la comprend par ce qui a été dit à la fin du second livre ; la volonté - la vie humaine, comme tout phénomène, n'en est qu'une manifestation - se réduit à un effort sans but, sans fin. Arthur Schopenhauer (1788-1860) Le monde comme volonté et comme représentation Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 7 Document 5 : La réhabilitation du plaisir est passée par la compréhension de son rôle directorial et orientant pour le comportement humain : plaisir et douleur sont nos premières mesures du vrai et du faux. Le plaisir structure de manière première le comportement sans pour autant être un instinct. Mais contrairement à ce que pensait Bentham, sa directivité est aussi primaire, il ne remplace pas la raison, on ne peut donc pas fonder une éthique uniquement sur le plaisir. La nature a placé l'humanité sous l'autorité de deux maîtres absolus : le plaisir et la douleur. Il n'appartient qu'à eux de désigner ce que nous avons à faire comme de déterminer ce que nous ferons. Le critère du vrai et du faux comme l'enchaînement des causes et des effets sont assujettis à leur domination. Ils nous commandent dans tout ce que nous faisons, disons et pensons, et tout effort pour échapper à leur emprise ne sert qu'à en démontrer et à en confirmer la réalité. On peut prétendre en paroles se soustraire à leur empire alors qu'en fait on y reste soumis au moment même où on le prétend. Le principe d'utilité reconnaît cette sujétion et en fait le fondement du système dont l'objectif est d'élever l'édifice du Bonheur à l'aide de la raison et de la loi ( ... ). Par utilité on entend la possession de tout objet grâce auquel on tend à obtenir un profit, un avantage, un plaisir, un bien ou le bonheur (ce qui dans le cas présent revient au même) ou (ce qui revient également au même) à prévenir un échec, une peine, un mal, ou le malheur de qui que ce soit, qu'il s'agisse de la société en général ou de l'individu. ( ... ) On peut dire d'une action qu'elle est conforme au principe d'utilité ou plus simplement qu'elle est utile (relativement à la société en général) lorsque sa tendance à accroître le bonheur de la société est supérieure à ce qui le diminue. On dira d'une action gouvernementale (qui n'est qu'un cas particulier d'action accomplie par une ou plusieurs personnes) qu'elle est conforme ou commandée par le principe d'utilité, lorsque de la même façon, sa tendance à augmenter le bonheur de la société est supérieure à tout ce qui le diminue. Jérémy Bentham (1748-1832) Introduction aux principes de morale et de législation Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 8 Document 6 : La satisfaction du plaisir diffère en fonction de ce qu’on est, c’est l’individualisation du plaisir qui dépend pour beaucoup de notre individuation. Incontestablement, l'être dont les facultés de jouissance sont d'ordre inférieur a les plus grandes chances de les voir pleinement satisfaites ; tandis qu'un être d'aspirations élevées sentira toujours que le bonheur qu'il peut viser, quel qu'il soit - le monde étant fait comme il l'est - est un bonheur imparfait. Mais il peut apprendre à supporter ce qu'il y a d'imperfections dans ce bonheur, pour peu que celles-ci soient supportables ; et elles ne le rendront pas jaloux d'un être qui, à la vérité ignore ces imperfections mais ne les ignore que parce qu'il ne soupçonne aucunement le bien auquel ces imperfections sont attachées. Il vaut mieux être un homme insatisfait (dissatisfied) qu'un porc satisfait ; il vaut mieux être Socrate insatisfait qu'un imbécile satisfait. Et si l'imbécile ou le porc sont d'un avis différent, c'est qu'ils ne connaissent qu'un côté de la question : le leur. John Stuart Mill (1806-1873) L’utilitarisme, 1863 Document 7 : La complexité humaine implique différentes formes de plaisirs et d’épanouissement, qui loin de s’opposer, se complètent. Chacun est légitime, chacun est nécessaire. Noüs plaisir de lʼesprit sens et reliance à lʼuniversel, transcendance bonheur spirituel Psyché plaisir de lʼâme affectif et intellectuel bonheur psychique Soma plaisir du corps (bien-être) bonheur corporel principe hiérarchique de satisfaction et dʼépanouissement. Chaque niveau transcendante le précédant et permet au besoin de dépasser sa non-satisfaction Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 9 DÉCOUVREZ NOTRE AUDIOTHÈQUE pour télécharger cette conférence, celles de la bibliographie et des centaines d’autres Tous nos cours et conférences sont enregistrés et disponibles dans notre AUDIOTHÈQUE en CD et DVD. Des milliers d’enregistrements à disposition, notre catalogue est sur notre site : www.alderan-philo.org. Plusieurs formules sont à votre disposition pour les obtenir : 1 - PHILO UPLOAD : un abonnement annuel pour un libre accès à la totalité des enregistrements disponibles. Présentation sur notre site internet ou envoyez-nous un email avec le code PHILO UPLOAD et laissez-vous guider en quelques clics : [email protected] 2 - TÉLÉCHARGEMENT : vous commandez la conférence ou le cycle qui vous intéresse via internet. C’est rapide et économique. Envoyez-nous un email avec le code de la conférence et laissez-vous guider en quelques clics : [email protected] 3 - VENTE PAR CORRESPONDANCE : vous trouverez des bons de commande à tarif préférentiel dans notre CATALOGUE AUDIOTHÈQUE, sur notre site et à la MAISON DE LA PHILOSOPHIE. 4 - À la MAISON DE LA PHILOSOPHIE à Toulouse. 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Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 10 POUR APPROFONDIR CE SUJET, NOUS VOUS CONSEILLONS - Les cours et conférences sans nom d’auteurs sont d’Éric Lowen - Revue de philosophie “ALDÉRAN” - N°24 février 2002 : Plaidoyer pour le bonheur, par Éric Lowen - N°25 mai 2002 : Bonheur et liberté, par Nathan Deward - N°26 août 2002 : Les chemins du bonheur, par Tiana Nunki - N°27 novembre 2002 : Bonheur et philosophie, par Roman Wallis Conférences sur l’histoire de la philosophie - Démocrite et l’atomisme - La philosophie du plaisir d’Epicure - Aristote et l’éthique à Nicomaque - Sénèque et le stoïcisme romain - Montaigne et l’Humanisme - Spinoza et le bonheur, par Mickaël Dubost - Condillac et la sensation, par Mickaël Dubost 1000-130 1000-203 1000-176 1000-007 1000-040 1000-138 1000-155 Cycle de cours thématiques 1302 - Introduction à la condition humaine : La nature du Cosmos et la nature de l’Être Humain ; La complexité humaine ; La conscience ; Personnalité et individualité ; La volonté ; Le libre-arbitre ; La voie de l’éveil Conférences sur la nature humaine - Comment penser l’homme aujourd’hui ? Introduction à l’humanisme moderne - La nature humaine - le socle fondateur naturel de tous les êtres humains - La place de l’homme dans le cosmos - le roseau pensant face au Cosmos - L’être humain, un animal comme les autres : l’Homo Sapiens - Le sens spirituel des origines animales de l’humanité - Éloge du corps, réhabilitons le corps ! - La complexité humaine : corps-âme-esprit - La matière de l’esprit, l’origine matérielle, naturelle et contingente de l’esprit - La raison dans l’être humain - pour une anthropologie de la raison - La pensée magique, pensée primaire de l’homme - l’homme, animal irrationnel - Psychologie évolutionniste et nature humaine, par Alain Pintureau - La sociétalité de l’homme, sociétalité ne fait pas sociabilité - La culturalité de l’homme - rôle et implications de la culturalité de l’homme - La genèse des cultures - l’origine naturelle des cultures - L’individualité de l’homme - nécessité et valeur de l’individualisme - Universalité de l’humanité et unicité de l’individu - L’être humain, un être en devenir, l’homme créateur de lui-même - Homo praedator, l'homme est un prédateur universel - L’origine darwinienne du bien et du mal, l'origine évolutionniste de l’éthique - Ancienneté et nouveauté de l’humanité, entre héritage bioévolutif immémorial et novation comportementale - L’être humain, la femme et l’homme : l'égalité ontologique de la femme et de l'homme - La dignité de l’homosexualité - l’égalité anthropologique des sexualités - Réhabiliter le désir - la positivité ontologique du désir - Éloge du plaisir, la vertu du plaisir pour l'épanouissement humain - Éloge de la sexualité hédoniste - la positivité de la sexualité pour la condition humaine 1600-011 1600-159 1600-043 1600-111 1600-057 1600-144 1600-048 1600-233 1600-221 1600-023 1600-032 1600-260 1600-261 1600-137 1600-069 1600-119 1600-136 1600-161 1600-005 1600-132 1600-077 1600-121 1600-262 1600-115 1600-047 Conférences sur la condition humaine - La condition humaine - Le sens de la vie, de l’universel au particulier 1600-005 1600-038 Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 11 - Le besoin de sens dans la condition humaine - Le perfectionnement de l’Être Humain - Les fondements des droits humains - Individualité et norme sociale : être soi-même - Réalisation de soi et réussite sociale - La voie du bonheur, le bonheur est de ce monde - La libération de l’Humanité 1600-109 1600-102 1600-103 1600-100 1600-076 1600-128 1600-080 Conférences sur la philosophisation du plaisir - Philosophie et vie quotidienne - Philosophie et humanisme - Pour une éthique sans dieu(x), introduction aux éthiques post-théiste - Conscience et existence - La voie de l’éveil philosophique : de Somnus à Vigilare - Philosophie et voie du non-attachement - Éloge de l’impermanence 1600-001 1600-158 1600-099 1600-162 1600-093 1600-024 1600-090 Quelques livres sur le sujet - L'erreur de Descartes, La raison des émotions, Antonio R. Damasio, Odile Jacob, 2006 - Raison et plaisir, Jean-Pierre Changeux, Odile Jacob, 2006 - Spinoza avait raison - Joie et tristesse, le cerveau des émotions, Antonio Damasio, Odile Jacob, 2005 - Les liens du plaisir, Isabelle Jacob, Leprince Bruno Éds, 2005 - L'invention du plaisir - Suivi de Fragments cyrénaïques, Michel Onfray, Lgf, 2002 - Pour le plaisir, Guy Scarpetta, Gallimard, 1998 - Douleur et plaisir - étude des sensations corporelles, Monique Burke, Thomas Stephen Szasz et Claire Fischer, Payot, 1997 - Tout le plaisir des jours est dans leur matinée, Flora Groult, Plon, 1985 - Le dîner de Babette, Karen Blixen (1958), Folio, 1992 - La volonté du bonheur, Otto Rank (1929), Stock, 1975 - Propos sur le bonheur, Alain (1928), Folio, 1987 - L’utilitarisme, John Stuart Mill (1863), Flammarion, 1988 - Feuilles d’herbe, 2 Tomes, Walt Whitman (1855), Grasset, 1994 - La philosophie dans le boudoir, Sade (1795), France Loisirs, 1983 - L’anti-sénèque ou le souverain bien, La Mettrie (1750) - Pantagruel, et gargantua, de Rabelais, disponible au livre de poche - Textes sur le plaisir (Lettre à Ménécée, Maximes et Sentences), Épicure (3ème siècle av. JC), Hatier, 1984 - Éthique de Nicomaque (le plaisir, VII 11-14 et X 1-5), Aristote, Flammarion, 1992 Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 12 Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-115 : “Éloge du plaisir, pour une philosophie du plaisir” - 13/04/2002 - page 13