Maroc
Juillet 2013
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Un rebond de la croissance en trompe-l’oeil
L’économie marocaine fait preuve de résilience depuis
plusieurs années et 2013 ne dérogera pas à la règle. Grâce à
une récolte agricole qui s’annonce exceptionnelle, le taux de
croissance devrait s’établir autour de 4,5% cette année, ce qui
placera le Maroc en tête des pays importateurs de pétrole de
la région. Néanmoins, cette bonne performance d’ensemble
ne doit pas masquer les difficultés de l’économie du Royaume
liées à celles des pays de la zone euro.
En effet, alors que la croissance d’ensemble a été
relativement soutenu sur le premier trimestre (+3,8% en
glissement annuel), le PIB non-agricole n’a progressé que de
1,9%, contre 3,9% lors du trimestre précédent et 4,5% sur
l’ensemble de l’année 2012. Ce net ralentissement est en
grande partie imputable à la contre-performance du secteur
secondaire dont la valeur ajoutée s’est contractée de 2% en
glissement annuel. Les réculs dans le secteur mininer et celui
de la construction associés à l’atonie de la production
manufacturière en sont les principales raisons. De même, le
secteur des services a affiché une croissance modeste
(+3,6% contre +5,4% en T1 2012) même si toutes les
composantes sont en progression. Côté demande, la forte
décélération des recettes de TVA à fin avril indique un
fléchissement de la consommation des ménages, et ce
malgré une inflation relativement bien maîtrisée (+2,8% sur un
an en mai). Par ailleurs, l’atonie des crédits bancaires à
l’équipement traduit celui de l’investissement des entreprises.
En revanche, la contribution du commerce extérieur à la
croissance du premier trimestre est redevenue positive (+1,5
point) en raison d’une contraction supérieure du volume des
importations (-4,4%) à celui des exportations (-0,6%), ce qui
ne constitue pas une réelle amélioration.
Certains indicateurs laissent envisager un léger frémissement
de l’activité économique sur le reste de l’année. Ainsi, les
transferts financiers de la diaspora marocaine et les recettes
touristiques enregistrent de nouveau une croissance positive
depuis le mois d’avril. De même, un renforcement de la
consommation des ménages est attendu avec la hausse des
revenus agricoles. Pour autant, la progression du PIB hors-
agriculture ne devrait pas dépasser 3,5% cette année, soit
son plus bas niveau depuis 2002 l’exception de 2009). De
plus, les risques sont essentiellement baissiers au regard de
la fragilité des pays de la zone euro et des marges de
manœuvre budgétaire de plus en plus réduites.
Finances publiques : consolidation difficile
Depuis 2011, les finances publiques sont mises à rude
épreuve avec l’augmentation des dépenses sociales et
l’envolée des subventions pétrolières (6,6% du PIB en 2012)
L’aggravation du déficit budgétaire d’un peu plus de 3
milliards de dirhams sur les quatre premiers mois de cette
année illustre bien la persistance de tensions. Néanmoins, on
s’attend à ce que la dynamique de détérioration s’estompe
quelque peu en 2013 grâce à un ralentissement assez
marqué de la croissance des dépenses publiques.
En effet, la détente des cours du pétrole devrait se traduire
par une baisse des charges de compensation. Compte tenu
de son poids dans le total des dépenses, il s’agirait d’une
réelle bouffée d’oxygène. Une coupe de 15 milliards de
dirham dans le programme d’investissement public a
également été annoncée. Pour autant, le volume des
dépenses, après deux années de forte hausse, restera élevé
alors que les recettes fiscales pâtiront du ralentissement de
l’activité hors-agriculture. Dans ce contexte, le déficit
budgétaire ne se résorberait que légèrement pour s’établir à
6,9% du PIB (7,6% du PIB en 2012) et la dette du
1- Impact de la crise de la zone euro
xxxxxxx
Moyenne mobile 3 mois, variation sur un an en %
Recettes touristiques Transferts financiers des MRE Exportations
-60
-40
-20
0
20
40
60
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Sources : Office des Changes, BNP Paribas
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gouvernement continuerait de croître pour dépasser 60% du
PIB, niveau élevé pour un pays émergent. Les risques de
dérapage sont également possibles compte tenu de la fragilité
du contexte économique et social.
La situation n’est pas inquiétante sur le court terme car l’Etat
se refinance assez facilement sur le marché domestique et sa
dette en devise n’atteint que 14% du PIB. En revanche le
programme de réforme fiscale accuse toujours du retard.
Après une première hausse des prix administrés en juin 2012,
les autorités ont annoncé le retour imminent de l’indexation
sur les cours mondiaux des prix pour les produits
énergétiques et le sucre. Il ne s’agit pas d’une libéralisation
totale des prix car des plafonds vont être imposés. Compte
tenu de la baisse des cours du pétrole, cela va permettre
d’alléger quelque le peu le poids des subventions budgétaires.
Pour autant, la Caisse de compensation nécessite une refonte
plus globale qui ne sera sans doute pas mise en place cette
année au regard des tensions qui secouent actuellement la
coalition gouvernementale. Or, il s’agit d’une des conditions
primordiales pour restaurer l’équilibre des finances publiques
à moyen terme et éviter ainsi une détérioration de la
solvabilité de l’Etat.
Comptes extérieurs : perspectives mitigées
La pression sur les comptes extérieurs a également été très
forte ces dernières années avec l’envolée des importations de
pétrole et l’affaiblissement des exportations, des
« remittances » des Marocains résidant à l’étranger et des
recettes touristiques. En 2012, le déficit de la balance des
paiements courants a atteint un record de 10% du PIB. En
conséquence, les réserves de change ont diminué de plus
d’¼ entre fin 2010 et fin 2012 malgré la progression soutenue
des flux d’investissements étrangers.
Les perspectives pour cette année demeurent mitigées.
Principale bonne nouvelle, le ficit commercial s’est allégé
de 7,3% au terme des cinq premiers mois de l’année grâce à
une contraction des importations supérieure à celle des
exportations. La réduction de 16% des achats de produits
énergétiques en constitue le principal facteur. Selon toute
vraisemblance, la tendance se poursuivra sur le reste de
l’année. Le redressement des transferts financiers de la
diaspora marocaine et des recettes touristiques depuis le
mois d’avril est également encourageant mais cela reste
fragile et surtout insuffisant face à un ficit commercial
devenu abyssal (plus de 20% du PIB en 2012), même en
contraction. C’est pourquoi le déficit de la balance des
paiements courants restera encore très élevé cette année, à
7,8% du PIB.
Cependant, la stabilité de la balance des paiements est loin
d’être menacée. A ce stade, les besoins de financement
extérieur devraient être couverts grâce à un mix d’opérations
de privatisations, d’investissements étrangers et de soutiens
financiers en provenance des pays du Golfe. Ainsi, les
réserves de changes se stabiliseraient en valeur et resteraient
au dessus du seuil de confort de 3 mois d’importations de
B&S. De plus, le Maroc pourra également compter sur la ligne
de précaution d’un montant de 6,2 milliards de US$ sur deux
ans accordée par le FMI en août 2012 en cas de résurgence
de choc. Enfin, grâce à un endettement extérieur modéré
(35% du PIB) et une exposition aux flux d’investissements de
portefeuille faible, l’économie du Royaume ne devrait pas être
trop déstabilisée par le durcissement attendu sur les marchés
financiers internationaux.
Alby Stéphane
2- Légère détente de la pression sur les comptes extérieurs
xxxxxxx
Somme glissante sur 12 mois, en milliards de US$
Déficit commercial
-25
-20
-15
-10
-5
0
2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Sources : Office des Changes, BNP Paribas
Prévisions
2011 2012 2013f 2014f
PIB réel, v ariation annuelle, %
5,0 3,2 4,6 3,0
Inflation, IPC, v ar. annuelle, % 1,0 2,0 2,2 2,5
Solde budgétaire, % du PIB
-6,8 -7,6 -6,9 -5,7
Dette du gouv. central, % du PIB 53,6 59,0 61,2 62,7
Balance courante, % du PIB
-8,0 -9,9 -7,8 -6,5
Dette externe, % du PIB 31,7 34,8 34,9 33,9
Réserves de change, mds USD
19,5 16,4 16,2 16,4
Réserves de change, en mois d'imports 4,7 4,0 3,7 3,6
Taux de change MAD/USD (fin d'année)
8,6 8,5 8,7 8,7
Sources : HCP, Minefi, Office des Changes f : prévisions BNP Paribas
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