Ce sont les mouvements de vergence (convergence/divergence) qui permettent
-avec le phénomène de l’accomodation cristalline, bien sûr- de conserver les rayons
lumineux exactement sur le plan rétinien. Ce sont des mouvement automatiques,
et pourtant, relativement lents: 1/2 à 3/4 de seconde pour un mouvement de
convergence (plan éloigné à plan rapproché) de l’ordre de 5 degrés d’arc. Ce qui ne
veut pas dire, au contraire, que le mouvement est lent à démarrer (latence faible). Le
mouvement de divergence est encore plus lent, avec accélération progressive pour
un mouvement de longueur croissante. Mais les différences interindividuelles sont
grandes. Ces mouvements de vergence sont supportés par des mouvements de
torsion qui, comme eux, ont pour but de conserver coordonnées les deux images.
Ces mouvements sont réflexes; certains sont automatiques et liés mécaniquement
aux muscles qui orientent l’œil dans une direction donnée, d’autres sont de type
gyroscopique et compensent (jusqu’à 6 degrés d’arc) l’inclination de la tête pour
tenter de conserver l’image perçue “à la verticale”.
Evidemment, il y a aussi la possiblité de mouvements plus ou moins conscients. Le
premier est la saccade, mouvement de déplacements sporadiques de l’ordre de 1/10
de seconde pour une amplitude de 40 degrés d’arc à moins de 1/40 de seconde pour
une amplitude de 5 degrés. Cela représente tout de même 10% du temps de balayage
d’une image, selon la psycho-physiologue française Ariane Levy-Schœn (1969); en
effet, grossièrement, chaque saccade de 1/40 de seconde est suivie d’un fixation de
1/4 de seconde. Ces saccades participent soit d’une réaction réflexe à l’apparition
d’information nouvelle dans le champ périphérique, soit à la correspondance
dérivée d’un élément du champ périphérique avec la Gestalt informationnelle en
voie de structuration. Evidemment, l’initiation du mouvement saccadique exige lui
aussi un certain temps de latence: entre 150 et 300 millisecondes. Mais ce temps
varie: il est plus court -réaction plus vive- pour une direction vers le haut, de même
que vers la droite, mais surtout il est corrélatif à l’éloignement fovéal (dans ce
dernier cas, existe une différence de l’ordre de plus ou moins 40 millisecondes entre
les stimuli selon qu’ils sont à 10 ou 40 degrés du point de fixation). Pendant le temps
de la saccade, se produit un brouillage partiel de la vision.
Le deuxième mouvement conscient est le balayage volontaire continu du champ. Le
regard se déplace habituellement sur un mode saccadique. Il peut être continu dans
le cas où l’objet d’observation se déplace par rapport au regardeur -mais seulement
dans ce cas. C’est ce que l’on appelle poursuite visuelle ou “pistage visuel”. Levy-
Schœn (1969) explique: “La détermination proprement optique du mouvement
oculaire continu est essentielle. En effet, presque tous les auteurs sont d’accord pour
reconnaître la nécessité de la fixation du regard sur un objet, mobile par rapport à la
tête, pour déclencher ce type de mouvement. Il ne peut être obtenu volontairement:
lorsqu’on croit ‘suivre des yeux’ une ligne ou un cercle, le regard procède en fait par
saccades, et ce n’est que si l’on guide le regard en parcourant du doigt cette ligne ou ce
cercle que les yeux décriront un trajet continu.” L’image se regarde obligatoirement
plage par plage, à moins de suivre une “proie” en déplacement.
Le balayage du regard
Tout cela nous amène à la seule question pratique relative à l’exploration oculaire:
existe-t-il un déroulement standard de la séquence de lecture des images? Certains
opposent la lecture imagique à la lecture alphabétique. Celle-ci serait séquentielle,