i
Université d’Aix-Marseille
École Doctorale 356 Cognition, Langage, Éducation
Universidad de Salamanca
Departamento de Traducción e Interpretación
Doctorat en Sciences du Langage
THÈSE
Parlons de l’irréel
L’expression de la contrefactualité en français, en espagnol et en italien
et par des apprenants hispanophones et italophones de français
Présentée par
Isabel REPISO
Sous la direction de
Mme. le Professeur Danielle DUBROCA-GALIN
M. le Professeur Daniel VÉRONIQUE
Tome Ier
Membres du jury
M. Jacques BRES, Université Paul-Valéry Montpellier III
Mme. Danielle DUBROCA-GALIN, Universidad de Salamanca
M. José Luis HERRERO INGELMO, Universidad de Salamanca
Mme. Paola PIETRANDREA, Université François-Rabelais Tours
M. Daniel VÉRONIQUE, Aix-Marseille Université
Décembre 2013
ii
iii
« Aucune révolution politique n’aura lieu sans changement radical
de l’idée qu’on se fait du possible et du réel ».
Judith Butler
Trouble dans le genre
iv
v
Résumé
Le raisonnement contrefactuel est un procès cognitif universel par lequel la alité est
comparée avec ce qui aurait pu se passer autrement (Kahneman & Tversky 1982).
L'expression de la contrefactualité repose traditionnellement sur l'analyse des
constructions conditionnelles si A (alors) B (Grevisse 1986, Chevalier et al. 1964,
Riegel et al. 1994). Le but de notre étude est de décrire l’ensemble des constructions et
des moyens grammaticaux par lesquels des locuteurs natifs expriment la contrefactualité
en français, en espagnol, en italien et en français langue étrangère (FLE).
Notre étude est fondée sur des données conversationnelles auprès de deux groupes
d'apprenants FLE trente hispanophones et trente italophones et de trois groupes de
contrôle : français, espagnol et italien. Pour l'enquête, nous avons utilisé comme
stimulus un récit présentant une chaîne causale menant à un aboutissement malheureux
(Wells & Gavanski 1989). Suite à la lecture du stimulus, nous avons demandé aux
participants de proposer plusieurs alternatives afin d’éviter le dénouement malheureux
(tâche mutationnelle).
Nos résultats mettent en évidence que les noyaux mutationnels produits par le groupe de
contrôle français combinent, le plus fréquemment, un marqueur du passé et un verbe
modal (i.e., elle aurait pu choisir toute seule son plat). Les implications sémantiques de
ce type de construction rendent difficile son acquisition en FLE, puisque l'apprenant
doit produire un scenario alternatif lequel signifie sa propre subjectivité. L'emploi natif
de ce conditionnel modalisé n'émerge que dans les variétés d'apprenant les plus
avancées en termes d'immersion dans le milieu de la langue cible et d'études FLE. Nos
résultats montrent que les constructions en si- ne constituent pas le moyen le plus
fréquent pour parler de ce qui aurait pu se passer autrement ni en français, ni en
espagnol, ni en italien. La non-prééminence des constructions conditionnelles dans
l’expression de la contrefactualité devrait amener à une réflexion sur les limites de la
conditionnalité en tant que procès de conceptualisation de l’irréel.
Mots clés : contrefactualité, constructions en si-, modalité, argumentation.
1 / 266 100%