
 
INTRODUCTION 
 
L‟université française a connu ces dernières années nombre de mouvements étudiants, 
dont les plus récents Ŕ en 2007  et en 2009 Ŕ ont, à  maints  égards, tenu  lieu  de  « douche 
froide » pour les groupes de jeunesse ayant connu la mobilisation victorieuse de 2006 contre 
le Contrat Première Embauche (CPE). Pour ceux qui avaient été les acteurs de cette dernière 
dans  l‟enceinte  universitaire,  le  vécu  différencié  entre les  mobilisations n‟en a  été que  plus 
détonant. « Contre un gouvernement autoritaire, nous avons gagné en nous organisant de 
manière  à  atteindre  un  niveau  de  démocratie  rarement  connu  auparavant.  Nous  avons 
construit  l’unité  étudiante, impulsé  l’unité syndicale, gagné le retrait du CPE et enrayé la 
machine libérale », écrivait le journal syndical  de  l‟UNEF2-Amiens en mai 2006, révélant 
l‟état d‟esprit de certaines franges dirigeantes de la lutte étudiante. Les mobilisations qui ont 
suivi  n‟ont  pas  connu  le  même  destin,  mais  ont  au  contraire  été  le  lieu  de  défaites 
revendicatives.  Une  première  explication  de  cette  évolution  pourrait  être  trouvée  dans 
l‟isolement  des  milieux  étudiants  (2007)  ou universitaires  (2009),  isolement  renforcé  par  la 
faiblesse  des  relais  médiatiques  nationaux  (2007)  et  par  l‟accroissement  de  la  répression 
policière  (2007-2009).  Entre  la  mobilisation  de  2006  en  celles  de  2007-2009,  les 
« coordonnées de la situation », pour reprendre un langage militant, avaient changées. Sans 
avancer  l‟existence  d‟un  changement  majeur  dans  la  « structure  des  opportunités 
politiques3 », le concept étant trop flou par bien des aspects4, force est de constater que la 
prise  de  pouvoir  politique  de  l‟oligarchie  financière  française  en  20075 a considérablement 
modifié l‟état du rapport des forces sociale et politique du pays. L‟adoption par les urnes d‟un 
programme  néolibéral  affiché,  la  stratégie  politique  d‟inspiration  néoconservatrice  qui  l‟a 
                                                 
2 Union Nationale des Etudiant de France, première organisation étudiante représentative.  
3 « Le concept de structure des opportunités politiques (SOP) rend compte de l‟environnement politique auquel 
sont confrontés  les  mouvements  sociaux,  et  qui  peut  selon la  conjoncture  exercer une influence positive ou 
négative  sur  leur  émergence  et  leur  développement ».  FILLEULE  O.  &  MATHIEU  L.,  « Structure  des 
opportunités  politiques »  in  FILLEULE  O.,  MATHIEU  L.  PECHU  C.  (dir.),  Dictionnaire  des  mouvements 
sociaux, SciencesPo.- Les Presses, coll. Références / Sociétés en mouvement, 2009.    
4  Si  son  premier  modèle,  mis  au  point  par D.  Mc  Adam,  est  difficilement  utilisable  en  raison  des  facteurs 
quasiment indéfinis rendant possible un changement dans la SOP, les tentatives de modélisation systématique 
ultérieure (S. Tarrow, H. Kriesi, C. Tilly, J. Mc Carthy, M. Zald) semblent souffrir une vision trop structuraliste 
et  idéaliste.  Avec  H.  Fram,  nous  considérerons  plutôt  que  « chaque  moment  de  confrontation  se  définit  de 
manière propre, voire unique », le défi analytique revenant alors à « identifier une série de déterminants qui, dans 
une  séquence  temporelle,  peut  expliquer  les  dynamiques  de  l‟interaction  entre  l‟état  et  les  mouvements 
d‟opposition, aussi bien que les effets institutionnels de cette dynamique ». Concernant toutes ces références voir 
FILLEULE O., MATHIEU L. PECHU C., Ibid.     
5 Voir PINCON-CHARLOT M. & M.,  Le  Président  des  Riches,  Enquête  sur  l’oligarchie  dans  la  France  de 
Nicolas Sarkozy, Editions Broché, Zones, 2010.