quelques plaines littorales du Péloponnèse sont de dimensions trop réduites. Dès l’Antiquité, les
Grecs furent donc confrontés à la sténochoria, cette absence de terres cultivables qui les conduisit
tout naturellement à partir chercher fortune ailleurs, vers le Far West sicilien ou vers les rivages
du Pont, notre actuelle mer Noire. Tout comme la montagne, la mer est omniprésente dans le
paysage grec et aucun point du pays n’en est éloigné de plus de cent kilomètres. Les côtes sont
extraordinairement découpées, multipliant anses et baies qui furent souvent des repaires de pirates.
Le littoral se déroule sur près de 15 000 kilomètres, soit plus de quatre fois la longueur des côtes
françaises, pour un pays dont la superficie est plus de quatre fois inférieure à celle du nôtre.
L’existence d’une Grèce insulaire, formée d’innombrables îles réparties entre la mer Ionienne et la
mer Egée, accentue évidemment le caractère maritime de l’Hellade. Au nord-ouest, les îles
Ioniennes – qui deviendront l’Heptanèse, enjeu géopolitique majeur entre Angleterre, France et
Russie à la charnière des XVIIIeet XIXesiècles – comprennent, entre autres, Corfou (l’ancienne
Corcyre), Leucade, Céphalonie, Zante et Ithaque, la légendaire patrie d’Ulysse. Dans l’Egée, deux
terres plus imposantes, l’Eubée et la Crète, s’étirent respectivement sur 180 et 250 kilomètres de
longueur alors qu’une multitude d’îlots ne sont que de gros rochers affleurant à la surface de la
mer. Du côté de la Grèce continentale, on rencontre successivement, du nord au sud, les îles
proches des côtes de Thrace ou de Chalcidique – Thasos, Samothrace et Lemnos –, les Sporades –
Skiathos, Skopélos, Alonissos et Skyros – qui font face aux côtes thessaliennes, l’Eubée, séparée
du continent par le long et étroit canal de l’Euripe, enfin les Cyclades, qui doivent leur nom au
cercle qu’elles forment autour de Délos, l’île sacrée d’Apollon. On y trouve Andros, Tinos,
Mykonos, Naxos, Paros ou Santorin, île volcanique dont la destruction, au IIemillénaire avant
J.-C., a peut-être contribué à la genèse du mythe de l’Atlantide. Au sud, l’immense Crète est
dominée par le mont Ida, haut de 2 500 mètres et, lui aussi, ancien séjour des dieux. Dans la partie
orientale de l’Egée, Lesbos, Chios et Samos font directement face aux côtes de l’Asie Mineure
toute proche alors qu’au sud, Pathmos, Cos, Rhodes et Carpathos sont les terres les plus
importantes de l’archipel du Dodécanèse. Un espace insulaire qui fait ici l’objet de vives
contestations avec la Turquie voisine, mécontente des frontières nées d’une Histoire conflictuelle
qui ignore, selon le gouvernement d’Ankara, le tracé du plateau continental. Au-delà des
pittoresques maisons blanchies à la chaux auxquelles se résume l’image touristique de la Grèce
insulaire, celle-ci présente en réalité une très grande diversité. La nature rocailleuse et aride des
Cyclades contraste ainsi avec celle des îles Ioniennes mieux arrosées et beaucoup plus fertiles. Le
régime des vents crée également des conditions de navigation plus ou moins favorables selon les
régions et les saisons. La pauvreté du sol a pu être compensée, dans certains cas, par les richesses
qu’il recélait en ses entrailles, ainsi en va-t-il de l’obsidienne de Milo, du marbre de Paros, du
marbre, de l’or et de l’argent de Thasos… C’est dans ce monde insulaire dans les Cyclades et en
Crète, que se développèrent, dès le IIIemillénaire et le début du IIeavant J.-C., les premières
grandes civilisations régionales. Ces îles passèrent ensuite sous le contrôle des puissances établies
sur le continent, notamment sous celui d’Athènes à l’époque de la Ligue de Délos. Elles connurent
ultérieurement des destinées diverses : certaines, comme la Rhodes de l’époque hellénistique
parvenant à affirmer leur autonomie et à s’imposer comme des acteurs majeurs de l’Histoire du
temps, d’autres connaissant les dominations successives de Rome, de Byzance, de Venise puis de
l’Empire ottoman, avant d’être, enfin, au prix de luttes prolongées, rattachées à la Grèce,
ressuscitée au cours du douloureux XIXesiècle. Méditerranéen, le climat est marqué par un vif
contraste entre des étés torrides et des hivers doux et pluvieux, mais Hérodote a pu se féliciter que
son pays « ait reçu en partage les saisons de beaucoup les mieux tempérées. » Terre, mer et climat
ont tout naturellement déterminé les principales activités de l’homme grec. Devenu marin par
nécessité plutôt que par vocation, il est avant tout un paysan dont la vie s’inscrit dans le rythme
des saisons, le paysan auquel s’adresse Hésiode dans Les Travaux et les Jours, véritable calendrier
présentant la succession, au cours de l’année, des diverses activités agricoles. Il faut ajouter à la
culture des céréales, de la vigne et de l’olivier, la production de miel, celle de viande de mouton et
de porc et celle du lait des chèvres pour compléter le catalogue des ressources disponibles, mais
les bovins sont rares faute de pâturages suffisants et seule la Thessalie est réputée pour l’élevage
des chevaux. Les forêts montagnardes procurent le bois nécessaire à la construction des maisons