Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress Les services dans l’économie verte au Maroc: Opportunités de création d’emplois et défis d’innovation Fatima ARIB Groupe de recherche « Innovation, Responsabilités et Développement Durable INREDD», Faculté de Droit, Université Cadi Ayyad- Marrakech [email protected] Résumé : Le Maroc est confronté à des défis complexes. L’économie verte pourrait lui offrir un nouveau cadre pour repenser son développement économique de manière stratégique et durable. Cette économie incite à utiliser la contrainte environnementale comme levier pour le développement durable, à travers notamment la relance de l'activité économique et de l'emploi, l'amélioration du bien-être des individus et la réduction des inégalités sociales. Cet article s’appuie sur le cas du Maroc, pour analyser les opportunités des éco-activités en général, et des éco services en particulier en termes de création d’emploi. Nous discutons également les différentes opportunités d’innovation qu’offrent ces services, pour promouvoir les interactions sociales, écologiques et économiques, dont l’objectif est le développement d’une économie verte. Nous nous attardons sur les conditions de mobilisation de ces opportunités pour en tirer profit dans la création de richesses et d’emplois au Maroc. Mots clés : Maroc, économie verte, services, environnement, emploi, innovation. Services in the green economy in Morocco: Opportunities for job creation and innovation challenges Abstract Morocco is facing complex challenges. The green economy could provide a new framework to rethink its economic development strategic and sustainable manner. This economy encouraged to use environmental stress as a lever for sustainable development, particularly through the revival of economic activity and employment, improving the well - being of individuals and the reduction of social inequalities. This article is based on the case of Morocco, to analyze the opportunities of eco- activities in general, and ecosystem services in particular in terms of job creation. We also discuss the various opportunities offered by these innovative services to promote the social, ecological and economic interactions, whose objective is the development of a green economy. We focus on the conditions for mobilizing these opportunities for profit in the creation of wealth and employment in Morocco. Key words Morocco, green economy, services, environment, employment, innovation. Introduction Le développement durable et la protection de l’environnement sont devenus ces dernières années, des thèmes incontournables de tous les débats, politique, économique et social. La définition de référence a été donnée par le rapport « Notre avenir à tous », publié par la Commission des Nations Unies pour l’Environnement en 1987. Il s’agit d’un «développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 601 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress répondre aux leurs». Trois composantes, intimement liées, ont été ainsi relevées: la préservation de l’environnement, la croissance économique et l’équité sociale. Le développement durable a été donc présenté comme un nouveau principe directeur destiné à guider la croissance (Flam, 2011). C’est ainsi que la croissance économique n'est plus une valeur en soi, que si elle respecte l'environnement, et que si elle est socialement équitable. Malgré les nombreux travaux, rencontres et recommandations d’envergure mondiale, la mise en pratique du développement durable, ainsi que son opérationnalisation se sont toutefois révélées une tâche très complexe. Cette complexité est due essentiellement, selon le (PNUE, 2011), au caractère inapproprié du modèle de développement économique régnant, en regard des objectifs du développement durable. L'économie verte s’est présentée alors comme l’une des voies pour réaliser et promouvoir le développement durable, avec ses trois dimensions économique, environnementale et sociale, une voie axée sur les priorités et spécificités nationales et locales. Le développement de cette économie a été spécialement suscité par les crises mondiales, financières, économiques et sociales durant ces dernières années et surtout entre 2007 et 2010, mais aussi par la crise environnementale permanente, avec plusieurs préoccupations presque communes à tous les pays: croissance, création d’emploi, réduction de la pauvreté, sécurité alimentaire et énergétique. Le Groupe des 2O le reconnait clairement dans sa déclaration lors du sommet de Londres, « l’économie de demain sera inclusive, verte et soutenable (...) La crise est une opportunité pour accélérer la nécessaire transition vers cette économie.», (G20, 2009). L’économie verte, telle qu’elle est abordée par plusieurs instances internationales, entend donc répondre à de nombreux défis contemporains, qui se déclinent à plusieurs niveaux global, régional et local. Elle conduit à ce que la majorité des agents économiques considèrent le respect de l’environnement comme une donne incontournable. Cette économie se présente également comme un secteur où le potentiel de croissance et de création d’emploi, est le plus prometteur. D’importants investissements sont en effet engagés à l’échelle internationale dans les secteurs clés de l’économie verte. Ce nouveau modèle de croissance recèle d’un grand potentiel en matière d’emplois et de contribution au produit intérieur brut PIB. Dans son rapport publié en 2010, le PNUE estime que plus de 25 millions d’emplois à l’horizon 2050, seront créés dans l’économie verte, pour un investissement de 2% du PIB mondial, (PNUE, 2010). D’autres rapports le confirment, et estiment qu’au moins la moitié de la main d’œuvre mondiale, sera touchée par la transition vers une économie plus respectueuse de l’environnement (OIT, PNUE (2012)). Les pays méditerranéens sont de plus en plus confrontés à de nombreux défis économiques, environnementaux et sociaux qui sont globalement, étroitement liés. Leur performance économique est critique, et la plus part de ces pays ne sont plus compétitifs face à la rapide expansion des nouvelles puissances industrielles surtout asiatiques. Au Maroc, ces défis sont pluriels et diversifiés. Le chômage, les difficultés de création d’emplois et la gestion des ressources naturelles sont des exemples des défis les plus complexes, auxquels est confronté le pays. Les décideurs publics doivent faire face à un taux de chômage très élevé surtout chez les jeunes, souvent très pessimistes, au regard du manque de perspectives qui leur sont offertes. L’environnement et les ressources naturelles surtout, sont également en dégradation constante: pollution de l’air et des eaux, érosion éolienne et hydrique des sols, désertification, déforestation, biodiversité menacée, etc. Le coût de cette dégradation, a été évalué par le Secrétariat d’Etat à l’Environnement, en 2010, à 8,2 % du P.I.B. du Maroc. Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 602 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress Ces défis doivent donc être considérés comme l’occasion de s’engager résolument sur la voie d’une économie plus verte, pouvant offrir ainsi un nouveau cadre pour repenser le développement économique du pays de manière stratégique et durable, permettant d’utiliser la contrainte environnementale comme levier pour le développement durable, à travers notamment une croissance soutenue; une croissance qui permet de relancer l'activité économique et la création d'emploi, l'amélioration du bien-être des individus et la réduction des inégalités sociales. Cet article s’appuie sur le cas du Maroc, pour analyser les opportunités des éco-activités en général, et des éco services en particulier en termes de création d’emploi. Nous développons ensuite les principales opportunités d’innovation qu’offrent ces services, pour promouvoir les interactions sociales, écologiques et économiques, pour le développement d’une économie verte. Nous nous attardons sur les conditions de mobilisation de ces opportunités pour en tirer profit dans la création de richesses et d’emplois au Maroc. C’est ainsi que nous commençons par une exploration de la notion de l’économie verte et de ses différents enjeux en général, et dans le cas du Maroc en particulier (1). Nous essayerons d’analyser les opportunités qu’offrent les éco activités et surtout les éco services en matière de création d’emplois (2), pour enfin poser la question du rôle de l’innovation et de l’éco innovation, dans ce processus de transition écologique (3). 1- Economie verte : Définitions et enjeux pour le Maroc Le modèle de l’économie verte a été dicté par les crises à la fois économique et environnementale au niveau mondial. Le concept a été évoqué dès 1989 dans "Blue print for a Green Economy" de David Pearce et all. Plusieurs institutions internationales ont ensuite intégré le thème de l’économie verte dans leurs agendas, ce qui a déjà donné lieu à plusieurs rapports. Le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) est le principale organisme qui a popularisé l’économie verte, grâce notamment à ses deux publications "The Green Economy Report" de 2010 et " Towards a Green Economy " de 2011, qui ont analysé les enjeux de l’économie verte et surtout les grandes opportunités qu’elle offre à l’économie mondiale, en démontrant qu'investir dans les secteurs clés, permettrait de faire progresser la croissance économique, objectif principal, mais tout en limitant les risques environnementaux, et tout en réduisant la pauvreté, première priorité de plusieurs pays, dont le Maroc. 1.1- Définition de l’économie verte L’économie verte a été développée d’abord dans le contexte global du développement durable. Le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) a publié en 2011 une définition, largement reprise au niveau mondial: "… une économie qui engendre une amélioration du bien-être humain et de la justice sociale, tout en réduisant sensiblement les risques environnementaux et les pénuries écologiques.», PNUE (2011). Plusieurs autres définitions ont été développées, présentant l’économie verte comme un ensemble d’activités marquées par les faibles émissions de carbone, des rejets réduits de déchets et l'utilisation rationnelle des ressources naturelles. Il s’agit d’activités basées sur une approche du développement, visant à stimuler l’économie mondiale grâce à des politiques qui accordent la priorité à des énergies propres et à des modes de consommation et de production durables et responsables. A travers la création d’emplois dans les nouveaux secteurs « verts », cette Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 603 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress économie vise une répartition plus équitable des retombées positives de la croissance, pour une amélioration des conditions de vie des populations pauvres. De manière générale, l’économie verte tend à assurer la viabilité économique, lutter contre la pauvreté par la création d’emplois dans de nouveaux secteurs et préserver le capital naturel qui soutient les activités humaines (PNUE, 2010). L’économie verte est donc conçue pour être inscrite dans une stratégie globale de développement durable, conciliant les aspects sociaux, écologiques et économiques tout en veillant à la répartition des richesses créées et à l'équité intra et intergénérationnelle. L'impact global sur le développement durable dépendra de la capacité de cette économie à transformer les comportements des agents économiques, et à imposer l’adoption de nouveaux modes de vie, d'organisation, de production et de consommation, des modes responsables qui tendent à préserver les ressources naturelles et faire converger les trois piliers du développement durable. Sur le plan de financement, le PNUE (2011) explique qu’il est possible de « considérer que, dans une économie verte, la croissance des recettes et la création d'emplois proviennent des investissements publics et privés qui conduisent à une amélioration des ressources, à une réduction des émissions de carbone, des déchets et de la pollution, et à la prévention de la perte de biodiversité et de la dégradation des écosystèmes ». Ce rapport ajoute que ces différents investissements sont à leur tour soutenus par la hausse de la demande en faveur de produits et services préservant l'environnement, par l'innovation technologique et, « très souvent, par les mesures fiscales et sectorielles correctives adoptées à plusieurs niveaux, pour garantir que les prix reflètent correctement les coûts environnementaux et sociaux. » 1.2- Enjeux de l’économie verte au Maroc Chaque pays dispose, en fonction de ses circonstances et ses priorités d'une diversité d'approches, de visions, de modèles et d'outils pour parvenir au développement durable dans les trois dimensions (Déclaration de Rio, 1992, article 56). Il s’avère que plusieurs pays envisagent de faire la transition vers une économie verte, dans l’espoir de sortir de la crise financière puis économique, en investissant massivement dans les secteurs de l’économie verte. Le Maroc, comme la plupart des pays méditerranéens, est maintenant engagé dans cette transition, afin de réduire la dégradation environnementale, affectant notamment les populations pauvres, et d’augmenter la productivité des actifs naturels pour atteindre les objectifs nationaux en termes de développement économique. La mise en place au Maroc d'une économie verte a été dictée par le contexte international et régional, mais aussi national au regard de l'importance des initiatives et stratégies lancées ces dernières années, ayant pour principal objectif, la réponse aux besoins socio-économiques et environnementaux pressants, et principalement la réduction des importations des énergies fossiles, la rationalisation de la consommation d'énergie et l'atténuation de la dégradation des écosystèmes naturels du pays. Pour illustrer ces propos, l’économie marocaine dépend à plus de 97% des importations des énergies fossiles. La facture énergétique du Maroc, a dépassé la barre de 100 milliards de dirhams en 2012, alors que les sources des énergies renouvelables: solaire, éolienne et de biomasse, sont très abondantes au Maroc, et des gisements importants d’économie en énergie existent, grâce à l’efficacité énergétique dans de nombreux secteurs: industrie, bâtiment, transport et agriculture. En plus des nombreux engagements et accords signés par le Maroc, l’Union Européenne lui a accordé en 2008, le Statut Avancé, l’obligeant ainsi à une convergence réglementaire à terme, et une meilleure intégration des paramètres environnementaux dans la gestion des entreprises, Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 604 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress et à la structuration d’un appareil de contrôle et d’accompagnement aux meilleurs pratiques. Tout cela met le Maroc devant la nécessité d’une action réfléchie face à cette problématique, aussi importante, pour s’engager dans une nouvelle politique environnementale, entendant faire de la protection de l'environnement un facteur clé du développement économique et social du pays. Une dynamique environnementale a été ainsi enclenchée ces dernières années, dans les différents secteurs économiques, par des programmes d’opérationnalisation de la Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable. Plusieurs stratégies et plans ont été élaborés: la stratégie d’économie d’eau et la rationalisation de l’utilisation de l’eau dans l’agriculture, la protection des forêts et de la biodiversité, les plans de développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, les programmes de renforcement de l’assainissement et l’épuration des rejets liquides, la gestion durable des déchets solides, le tourisme, la pêche … Le contexte est relativement favorable à une transition de l’économie marocaine vers une économie verte. Le Maroc est un des pays dont le positionnement géographique est stratégique, ce qui pourrait aider le pays à devenir un hub économique entre l’Afrique et l’Europe. Le grand potentiel en énergies renouvelables, son statut de faible émetteur en émission de CO2 (2,5T/hab /an seulement en 2004), lui permettent de se positionner sur le marché des crédits carbone. Les dernières approches sectorielles qui donnent une certaine visibilité à moyen et long terme, les initiatives importantes lancées dans les différents secteurs économiques et environnementaux, confirment cette dynamique. Malgré que cette transition à une économie verte constitue une bonne occasion pour positionner le Maroc dans des secteurs industriels nouveaux, renforcer ainsi sa compétitivité et contribuer à la réduction des externalités environnementales et sociales, notamment dans certaines régions défavorisées, il s’avère que le Maroc a développé plusieurs programmes sectoriels verts, mais sans la mise en place d'une stratégie globale structurante de l'économie verte. En plus, ces programmes ne sont pas suffisamment intégrés au niveau régional et local et souffrent d’une très faible mobilisation de financements privés. En plus de ces programmes, l’économie verte suppose également l’intégration de la dimension environnementale dans les programmes d’éducation et d’enseignement à tous les niveaux pour influencer les comportements et les futurs modes de consommation, et la mise en place d’une stratégie de communication et de sensibilisation environnementale ciblée pour une meilleure mobilisation et responsabilisation des différents acteurs. 2- Les services dans l’économie verte: Opportunités de création d’emploi Plusieurs études comparatives ont montré que le concept de l'économie verte recèle un potentiel de croissance durable et de création d'emplois beaucoup plus important que le modèle conventionnel (CES, 2012). Avant de développer ces opportunités, il convient de définir d’abord les activités de l’économie verte. Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 605 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress 2.1- Les activités de l’économie verte ou éco activités Les activités de l'économie verte ou les éco-activités s'inscrivent dans un objectif de croissance verte, et favorisent le développement durable et donc soutenable pour l'environnement sur le long terme. En général, ces activités sont des métiers qui produisent des biens ou services concourant à la protection de l’environnement, à la gestion des ressources naturelles, à l’efficacité énergétique et la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elles résultent pour l’essentiel d’entreprises marchandes, mais aussi des administrations publiques, et incluent des activités de protection de l’environnement internes aux entreprises, activités dites auxiliaires et qui ne font pas l’objet d’une vente, mais d’une dépense. Elles sont facteurs d'une croissance économique soutenable. Pour bien comprendre l’apport de l’économie verte, il faut distinguer entre les activités directement liées à l’environnement, ou encore appelées professions vertes, consistant par exemple à la production et la distribution d’énergie et d’eau, l’assainissement et le traitement des déchets, le traitement des pollutions, la protection des espaces naturels…, et les autres activités pouvant nécessiter de nouvelles compétences pour répondre aux enjeux de l’économie verte, celles appelées professions verdissantes. Les premières sont analysées en termes d’impact, ainsi, une activité est considérée comme verte quand elle est moins polluante et moins consommatrice de ressources. Les secondes s’analysent par rapport à leur finalité, elles visent à contribuer à la protection de l’environnement. A partir de là, un emploi de l’économie verte ou éco emploi, pourrait être défini comme une fonction nouvelle ou déjà existante, occupée dans le but de protéger, directement ou indirectement, l’environnement. Cette fonction peut être ainsi issue, de la mutation et/ou de la création de certains métiers. Elle peut donc se retrouver dans de nombreux secteurs d’activités et correspondre à de divers profils professionnels, de compétences et de contextes éducatifs différents. Les services auront en conséquence, une place importante dans cette économie verte, car ils devront répondre aux besoins soutenus des autres secteurs. Un service est défini comme une activité fournissant des biens immatériels. Souvent assimilés au secteur tertiaire ou considérés comme une de ses sous-parties, les services engloberaient les activités ne pouvant être classées dans l’industrie ou dans l’agriculture (INSEE, 1999). Gadrey (1996) propose une définition plus large: « Un service est une opération visant la transformation d'une réalité C possédée ou utilisée par un client ou un usager B, et réalisée par un prestataire A à la demande de B (et souvent en interaction avec B), mais n'aboutissant pas à un produit final susceptible de circuler économiquement indépendamment de C... Ce support C peut être un objet, un bien, un individu (qui peut être confondu avec l'usager ou distinct de lui), un flux ou un stock d'informations ou encore une organisation, mais il reste toujours indissociable de la prestation de service.» Nous déduisons de ces deux définitions, qu’un service environnemental est une opération visant le maintien, l’entretien ou l’amélioration d'un bien support C, réalisée par un prestataire A à la demande d’un usager final B, mais n'aboutissant pas à un produit final susceptible de circuler économiquement indépendamment du bien support. Les analyses de cycle de vie et les méthodes d’éco-conception, sont des moyens de développer des services respectueux de l’environnement. Dans ce contexte, les services à l'environnement se doivent d’apporter leur contribution à l’économie verte et de proposer à l'ensemble des acteurs de l'économie des solutions opérationnelles nécessaires à cette transition écologique et permettant de rendre l’économie Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 606 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress plus propre et plus soucieuse de l’environnement. C’est ainsi que les services pourraient contribuer à cette transition, aider à créer de nouveaux modèles économiques qui devront inciter incitatifs à une performance globale, et contribuer ainsi à la création de richesses et d’emploi. Ils seront de moins en moins cloisonnés et les passerelles se multiplieront entre les services. Plusieurs expériences au niveau international, nous ont montré par exemple, comment les déchets, externalités négatives, se font électricité, combustibles ou composts, ou encore comment les eaux usées d'une station d'épuration, deviennent un gisement de matière organique utilisable pour la production de bioplastiques… les exemples ne manquent pas pour montrer la place importante que revêtent les services dans l’économie verte. 2.2- Opportunités de création d’emploi: Au niveau international En plus des avantages environnementaux, l’investissement dans l’économie verte est décrit dans plusieurs rapports (PNUE, OIT, OCDE, PNUD…), comme un moyen de créer de millions de nouveaux emplois. Un taux d’emploi plus élevé est un des principaux moteurs de la croissance économique, permettant d’augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs, pour qu’ils puissent, non seulement de vivre, mais également de soutenir l’économie. Ces rapports internationaux ont montré les grandes opportunités qu’offre l’économie verte en termes de création d’emploi, ce qui constitue une source d’espoir pour les pouvoirs publics de tous les pays, surtout dans ces temps de crise et d’incertitude. Ces rapports concluent que pour les pays, à tous les stades de développement, le mouvement vers la durabilité environnementale et des économies plus vertes s’accélère, et que des dizaines de millions d’emplois verts ont été déjà. Il ressort également de ces documents que, le marché mondial des produits et services « verts » va exploser d’ici 2030 et l’économie verte va créer des dizaines de millions de nouveaux emplois, tant dans les pays développés que dans les pays en développement. Ces rapports misent particulièrement sur le développement de nouvelles technologies, des énergies renouvelables, de modes de production plus propres, ou encore sur le développement d’une agriculture plus durable, comme levier de croissance dans le monde. Selon le rapport (OIT, PNUE (2012)), « La conversion à une économie plus respectueuse de l’environnement pourrait générer de 15 à 60 millions d’emplois supplémentaires à l’échelle mondiale au cours des vingt prochaines années et sortir des dizaines de millions de travailleurs de la pauvreté", et que les gains d’emplois pourraient être plus élevés dans les pays émergents et en développement que dans nos contrées industrialisés. Il cite les exemples de la Chine, du Brésil ou de l’Inde qui peuvent plus facilement « opérer un saut vers les technologies vertes plutôt que remplacer des infrastructures hautement consommatrices de ressources devenues obsolètes ». Le marché des biens et services liés à l’environnement devrait doubler, pour passer de 1.370 milliards de dollars par an actuellement à 2.740 milliards en 2030. La moitié de ces marchés résideront dans le secteur de l’énergie et de l’efficacité énergétique, et le reste se répartira entre les transports durables, l’approvisionnement en eau, l’assainissement et la gestion des déchets, PNUE (2010). Le secteur des énergies renouvelables, a été le plus analysé au niveau international. La croissance de l’emploi a été particulièrement forte dans le secteur des énergies renouvelables, augmentant à un rythme global de 21 pour cent par an. Le potentiel de croissance de l'emploi Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 607 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress dans ce secteur est énorme. D’après de nombreux rapports, il génère davantage d'emplois que celui des énergies fossiles. Quelque 2,3 millions de personnes ont déjà trouvé en 2008, des emplois dans le seul secteur des énergies renouvelables, dans les six pays leaders en matière d’emplois verts (la Chine, le Danemark, l’Allemagne, l’Inde, l’Espagne et les États-Unis). Ces emplois devraient augmenter de 20 millions d’emplois supplémentaires, au vu des quelque 630 milliards d’investissements attendus d’ici 2030: 2,1 millions dans l’éolien, 6,3 millions dans le solaire, mais aussi 12 millions dans les centrales à biomasse. En Europe, les seules énergies renouvelables pourraient créer jusqu’à cinq millions d’emplois dans l’Union Européenne, d’ici 2020. A titre d’exemple, le secteur de l’efficacité énergétique représente déjà plus d’emplois que l’automobile en France. En Allemagne, la technologie environnementale devrait quadrupler pour atteindre 16% de la production industrielle vers 2030, l'emploi dans ce secteur surpasse aussi celui des grandes industries du pays, à savoir l'automobile et les machines-outils. L’efficacité énergétique est un autre gisement d’emplois important, en particulier dans le secteur de la construction, qui a été particulièrement frappé par la crise économique et financière. Une grande transition vers des bâtiments économes en énergie créerait des millions d‘emplois, ainsi que dans les travaux de « mise au vert » des bâtiments existants: ce secteur pourrait représenter 2 à 3,5 millions d’emplois aux Etats-Unis et en Europe et encore bien davantage dans les pays en développement, ce mouvement de transition écologique touchera également les 111 millions de personnes qui travaillent déjà dans le secteur de la construction. Une multitude d’emplois se trouve aussi dans le domaine des services éco systémiques: par exemple, dans l’Union européenne, 14,6 millions d’emplois directs et indirects protègent la biodiversité et réhabilitent les ressources naturelles et les forêts. La Chine a créé plus d’un million d’emplois dans ses programmes forestiers. Le recyclage et la gestion des déchets, qui représentent déjà environ 10 millions d‘emplois en Chine et 500.000 au Brésil, devraient croître rapidement avec la montée en puissance du recyclage due à la hausse des matières premières. Aux Etats-Unis en 2010, l’emploi dans les biens et services écologiques représentait 3,1 millions de personnes, soit 2,4%, en hausse constante. Les niveaux et les dynamiques sont comparables dans d’autres pays, comme au Brésil, où 2,9 millions d’emplois verts (6,6% de l’emploi formel) ont été recensés en 2010 dans les secteurs destinés à réduire les dommages causés à l’environnement. D’autres exemples de création massive d'emplois verts à travers le monde, ont été mis en évidence dans ce dit rapport, tels que: 600 000 personnes sont déjà employées en Chine, dans des produits de fabrication et d'installation d'énergie solaire tels que les chauffe-eau solaires; l’industrie de bio carburants au Nigeria, basée sur les récoltes de manioc et de canne à sucre pourrait se révéler durable et employer 200 000 personnes; l’exemple de l'Inde est aussi intéressant, ce pays pourrait créer 900 000 emplois d'ici 2025 grâce à la gazéification de la biomasse dont 300 000 dans la fabrication de fours et 600 000 dans des activités comme la fabrication de briquettes et de boulettes et dans la chaîne d'approvisionnement de carburant; et en Afrique du Sud, 25 000 anciens chômeurs sont employés en 2010, dans la conservation de l'eau. Dans l'agriculture, le rapport souligne que 12 millions de personnes pourraient être employées dans la biomasse utilisée pour l'énergie et les industries qui y sont liées. Dans un pays tel que le Venezuela, un mélange de 10% d'éthanol dans les carburants a généré un million d'emplois dans le secteur de la canne à sucre en 2012. Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 608 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress L’économie verte nécessite un financement à long terme important dans de multiples domaines. D’après le Rapport du PNUE (2011), d’ici à 2050, un investissement annuel totalisant 1 300 milliards $ US, l’équivalent de 2 % du PIB mondial, dans l’écologisation de dix secteurs économiques, serait requis afin d’assurer une croissance économique « verte », égale ou supérieure au scénario fondé sur le statu quo. Plusieurs emplois seront ainsi créés à moyen et long termes. L’essentiel de cette somme devrait provenir du secteur privé, par l’intermédiaire des banques et des compagnies d’assurances, (PNUE, 2011). Néanmoins, le secteur public devra y contribuer de manière importante (HSBC, 2009). Aux Etats-Unis, le flux investi dans les technologies propres constitue déjà le troisième secteur d'investissement en capital risque après l'information et les biotechnologies, pendant qu'en Chine, le capital risque investi dans les technologies propres a plus que doublé ces dernières années, atteignant 19 pour cent du total des investissements, PNUE (2011). 2.3 - Opportunités de création d’emploi au Maroc Le Maroc a adopté ces dernières années, un modèle de développement, caractérisé par une large ouverture, une libéralisation soutenue et la conduite de plusieurs réformes structurelles. Dans un contexte national et international difficile, le Maroc a enregistré des taux de croissance réel supérieur à 4%1. Malgré les bonnes performances économiques réalisées, le pays fait toujours face à d’importants défis socio-économiques: les inégalités persistent, les disparités sociales sont toujours importantes et le marché du travail souffre de plusieurs dysfonctionnements, qui se traduisent par un taux de chômage élevé, notamment chez les jeunes diplômés et les femmes. Le potentiel de développement économique futur du Maroc, est mis en grandes difficultés, à cause de la dégradation de l’environnement, du changement climatique, de la désertification, et des pénuries de ressources, qui sont induits par des facteurs internes et externes. Comme dans la majorité des pays en développement, le capital naturel, une base essentielle de création de richesses, subit une pression de plus en plus importante, au moment où le pays doit faire face à plusieurs difficultés socio-économiques, et surtout face à la nécessité de réduire la pauvreté et de stimuler l’activité économique pour créer des emplois et relever les niveaux de revenus. La création d’emplois demeure donc un défi majeur pour le développement durable du Maroc. C’est dans ce contexte que le Conseil Economique et Social (CES) a fait une étude sur l’économie verte au Maroc. Son rapport publié en 2012, considère que le concept de l’économie verte recèle un potentiel de croissance durable et de création d’emplois et qu’il constitue l’amorce d’un nouveau modèle de développement économique et humain durable. Ce rapport a analysé le potentiel national en matière de création de richesses et d’emplois dans quatre secteurs clés de l’économie verte, en raison des ambitieux plans stratégies et lancés par le Maroc. Il s’agit des secteurs des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, de l’assainissement et l’épuration des rejets liquides et de la gestion des déchets solides ménagers, qui sont générateurs d’emplois. Les investissements projetés dans ces secteurs dépassent les 200 Milliards de DH avec un potentiel identifié de création d’emplois de plus de 90000 postes à l’horizon 2020. 11 4,6% en 2011, 4,5 en 2012 et 4,8 en 2013 Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 609 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress Dans cette section, nous nous appuyons essentiellement sur le dit rapport du CES (2012), pour apprécier les efforts déployés par le Maroc dans les principaux secteurs, pour une transition écologique, favorisant la création de richesses et d’emplois. Dans le secteur de l’énergie, et afin de faire face à une demande croissante d’énergie électrique (le Maroc s’attend en effet à un doublement à l’horizon 2020 et un quadruplement à l’horizon 2030), le plan solaire et le programme éolien intégré, prévoient de mobiliser un investissement de plus de 100 milliards de DH, d’économiser 2,5 Millions de Tep et de permettre d’éviter l’émission de 9,5 millions de tonnes de CO2 par an. Le potentiel d’emplois que peut générer les filières des énergies renouvelables au Maroc est estimé à plus de 23 000 emplois à l’horizon 2020. La stratégie nationale de l’Efficacité Energétique dans le bâtiment, l’industrie et le transport prévoit de réduire la facture énergétique de 15% à l’horizon 2030. Cette stratégie nécessitera un investissement de plus de 21 milliards de DH avec un potentiel de création d’emplois dans ce secteur, estimé à plus de 40 000 emplois à l’horizon 2020. Une proportion importante des besoins en compétences concerne les techniciens et ouvriers spécialisés dans le domaine de l’efficacité énergétique et le photovoltaïque. La Maroc a mis également en place, le Plan National d’Assainissement Liquide (PNAL), d’un budget estimé à 43 milliards de DH. Ce plan vise à porter le taux de raccordement aux réseaux d’assainissement à 80% en milieu urbain et le taux d’épuration des eaux usées urbaines à 60% tout en encourageant la réutilisation de ces eaux épurées, à l’horizon 2020. Le PNAL couvre une population de 10 millions d’habitants et permettra de créer plus de 10 000 emplois directs en plus de ceux prévus par la filière industrielle de fabrication des équipements, principalement les canalisations et le matériel des stations d’épuration. Les besoins en compétences sont estimés comme suit: 600 ingénieurs en 2020 et 1000 techniciens pour les collectivités locales et bureaux d’études avec environ près 300 micro-entreprises de sous-traitance de proximité en 203O. En ce qui concerne le secteur des déchets, le Programme National des Déchets Ménagers (PNDM) a été développé pour l’amélioration de la collecte des déchets ménagers et leur élimination adéquate, la réhabilitation des décharges existantes et la création de nouvelles décharges contrôlées et la promotion des filières de tri, le recyclage et la valorisation des déchets, surtout dans les grandes villes. Les besoins en compétences sont estimés de 12 000 à 18 000 emplois sur 15 ans pour les créneaux de collecte, nettoiement, mise en décharge, le stockage des déchets ménagers et assimilés, etc. La durée du programme est 15 ans, le budget global est estimé à environ 37 milliards de DH et créera plus de 11 000 emplois directs. Par rapport aux éco services, le secteur des déchets présente un grand potentiel de création d’emploi au Maroc. C’est un des secteurs stratégiques pour le passage à une économie verte, qui devrait se développer rapidement dans de nombreux pays face à l'augmentation des prix des denrées de première nécessité. Ce secteur pose avec acuité le problème du secteur informel. Dans un rapport de 2011, le PNUE soulignait que « ce passage impliquera la formalisation du secteur informel dans de nombreux pays en développement". Les décideurs et acteurs de développement ne peuvent plus continuer à ignorer le secteur informel si l'on veut améliorer les systèmes de gestion de certains services à l’environnement, les déchets par exemple. ». Le secteur informel, est en effet le principal acteur de la collecte et du recyclage des ordures dans les pays en développement en général et au Maroc en particulier. Ce secteur, constitué généralement des citoyens les plus marginalisés, fournit un grand un service à la collectivité, en contribuant directement à la réduction des émissions des gaz à effets de serre, et tout en alimentant les filières de recyclage en matières premières souvent en bon marché. Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 610 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress Il parait donc judicieux d’intégrer ce secteur par d’abord, une reconnaissance par les décideurs publics, du rôle et de la contribution du secteur informel, et par une organisation des récupérateurs, sous forme d'associations ou de coopératives. Cette intégration aura plusieurs effets bénéfiques, en termes de sécurisation, d'amélioration des revenus, et de lutte contre le travail des enfants, par exemple. Dans le cas du Maroc, d’autres domaines notamment l’écotourisme et les métiers verts de l’agriculture, présentent un potentiel important dans le long terme, et pourraient mobiliser un nombre important de jeunes. Plusieurs petits métiers traditionnels, incarnant un savoir-faire important, peuvent être rehaussés par cette transition écologique (plombiers, maçons, etc.). Certes, des emplois seront créés, mais il faudra s'assurer que les filières métiers et formation sont bien adaptées aux différents enjeux. Ces emplois doivent être décents, pour que l’économie verte joue son rôle dans le développement durable, Ainsi, « Une économie durable ne peut plus externaliser ses coûts environnementaux et sociaux. Les conséquences de la pollution pour la société, comme la dégradation de la santé, doivent être reflétée dans les prix pratiqués sur le marché. Les emplois verts doivent donc être des emplois décents », PNUE (2011) L’économie verte représente un énorme potentiel. Plusieurs millions d’emplois sont en rapport avec l’environnement, et de nombreuses nouvelles perspectives de croissance se profilent dans ce secteur. Mais pour obtenir une réduction rapide des émissions de carbone et pour être à la pointe de la production et de la commercialisation de biens et de services verts, l’éco-innovation est indispensable. 3- Défis de l’éco innovation L’économie verte est présentée comme un modèle basé sur une approche consistant à concevoir et appliquer des solutions innovantes, pertinentes tant au point de vue de l'environnement que de l'économie et du social. Elle se fonde sur la création de nouvelles technologies et la disponibilité de travailleurs qualifiés capables d’innover et de mettre en œuvre de nouveaux procédés (OCDE, 2009). Nous revenons sur les concepts de l’innovation et de l’éco innovation, avant de discuter les grands défis que pose les éco innovations, surtout dans le cas du Maroc. 3.1 : Innovation et éco innovation L’économie verte est un véritable défi en termes d’innovation et de créativité. L’innovation est toujours présentée comme un des éléments clés de la performance économique et du bien-être social. C’est un moteur du développement durable en général et de l’économie verte en particulier, et un puissant levier pour améliorer la performance globale des entreprises. L’OCDE (2005) définit l’innovation comme « La mise en œuvre d’un produit (bien ou service) ou d’un procédé nouveau ou sensiblement amélioré, d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques de l’entreprise, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures.». Il s’agit d’introduire des produits, procédés ou méthodes entièrement nouveaux ou représentant une amélioration significative. L’innovation recouvre un large éventail d’activités qui peuvent être nouvelles. Elle recouvre par conséquent tout autant l’adoption réussie d’un procédé ou d’une méthode mis au point par d’autres entreprises ou organismes que le lancement d’un tout nouveau produit sur le marché. Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 611 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress Dans son rapport publié en 2009, l’OCDE définit ensuite les éco-innovations ou innovations vertes, comme « toute innovation qui favorise le développement économique et humain en s’assurant que les ressources naturelles continuent de produire ce dont nous avons besoin pour notre bien-être ». Il s’agit d’un type d’innovation, pouvant apporter des solutions technologiques et systémiques nouvelles face aux grands enjeux environnementaux, une innovation reconnue par son effet de diminuer l’impact environnemental ou d’optimiser l’utilisation des ressources pendant toute la durée du cycle de vie des activités concernées. C’est un des moyens de lutter contre la dégradation de l’environnement et de promouvoir une croissance verte. La Commission Européenne a publié également une autre formulation pour définit l’écoinnovation: « Production, assimilation ou exploitation de la nouveauté dans les produits, processus, services ou les méthodes managériales, avec pour objectif, tout au long du cycle de vie, de prévenir ou réduire de manière substantielle les risques environnementaux, la pollution et les autres impacts négatifs liés à l’utilisation des ressources » Le développement d’une économie verte est conditionné par la prise de mesures importantes dans les trois domaines suivants de l’innovation: société, écologie et économie. Au niveau de la société, il est important de prendre conscience des enjeux et des opportunités des activités vertes, d’encourager la formation et les compétences, de créer des emplois judicieux et adaptés et de promouvoir des activités professionnelles, notamment dans l’optique de lutter contre la pauvreté. Au niveau de l’écologie, une attention particulière doit être accordée à l’efficience des ressources pour augmenter l’utilité économique, sociale et écologique L’approche du cycle de vie est à ce niveau fort recommandée pour minimiser l’empreinte écologique. Au niveau de l’économie, l’éco innovation suppose l’existence de marchés ouverts et compétitifs, le respect des règles comptables et l’élaboration des rapports. Elle suppose également l’existence de moyens de financements et des investissements publics et privés, pour encourager l’orientation active des innovations vers le développement durable. L’éco-innovation concerne plusieurs domaines: les produits, les procédés, les méthodes de commercialisation, les organisations et les institutions. Il peut s’agir de modifier les pratiques, de les reconcevoir, de les remplacer par d’autres, ou d’en créer de nouvelles. L’éco-innovation de produits et de procédés repose généralement sur les avancées technologiques, tandis que l’éco-innovation dans le domaine de la commercialisation, de l’organisation et des institutions fait plutôt intervenir des changements non technologiques: la création de divisions environnement séparées ou de réseaux de recherche intersectoriels ou multipartenaires… Elle concerne également les méthodes et l’organisation du travail, le marketing, les ressources humaines et le secteur des services dans son ensemble. Ce type d’éco-innovation systémique dont on peut attendre des gains environnementaux substantiels, se révèle extrêmement complexe puisqu’il fait intervenir des changements non technologiques. Pour favoriser l’éco innovation, différentes mesures sont donc à prendre. Sur le plan technologique, il serait important de développer la Recherche et développement dans le secteur privé, de l’orienter vers des sujets favorisant la transition écologique de l’entreprise. Sur le plan du marché: il serait primordial de favoriser le transfert des technologies par une meilleure diffusion du savoir, pour ensuite renforcer les marchés porteurs d’innovations vertes. D’autres mesures doivent prises pour inciter les citoyens à changer leurs comportements dans leur démarche d’achat, que ce soit au travers de l’éducation, des labels ou des certifications. OCDE (2013) Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 612 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress 3.2- Défis de l’éco innovation au Maroc Le développement de l’économie verte suppose un engagement dans une transition écologique vertueuse, susceptible d'apporter des réponses à la raréfaction des ressources, à la complexification des pollutions et aux problèmes socioéconomiques, des défis qui doivent être abordés de manière globale et complémentaire. La réponse à ces défis de la transition écologique qui s'imposent aux acteurs publics et privés, passe par l'innovation et la création de nouveaux modèles économiques. Elle suppose la mise en œuvre d’un ensemble de politiques adéquates, d’un partenariat étroit entre acteurs publics et privés, et l’instauration d’un cadre propice à l’innovation pouvant contribuer à la croissance verte au Maroc. Comme c’est le cas de nombreux pays en développement, l'innovation reste l'un des domaines les plus importants et les plus problématiques au Maroc. Malgré, les efforts déployés depuis plusieurs années, le Maroc est encore en dessous de la moyenne de la région MENA (6,14) pour le pilier de l'innovation avec 3,67 en 2012. Néanmoins, certains indicateurs montrent que le Maroc a une certaine force pour intégrer des technologies au niveau des entreprises et se situe dans la moyenne (par rapport au monde) pour la disponibilité du capital-risque, les articles de revues techniques, et la collaboration université- entreprise pour la recherche. L'innovation est la fonction clé du processus de création de richesses et l'un des piliers les plus importants de la transition écologique. Elle repose souvent sur un système de recherche viable. Au Maroc, ce système comprend six instituts de recherche, 982 unités de recherche accréditées et 49 centres d’études de troisième cycle. Le Maroc consacre seulement 0,75% de son budget à la recherche scientifique, dont la majeure partie est utilisée pour le bénéfice des sciences dites «dures». Seulement 7% du budget est consacré à la recherche en sciences humaines et sociales. Les travaux des centres de recherche du Maroc, notamment le CNRST, ont fortement contribué à éclairer la politique nationale sur les secteurs stratégiques tels que la gestion de l'eau, l'agriculture, et l'énergie. Mais, « la diffusion de l'innovation au Maroc reste toujours très limitée, à cause d’une coordination inefficace, d’un manque de financement surtout privé, et d’un système d'innovation sous-optimal. » Djeflat (2012). Le Maroc essaie de promouvoir les investissements en sciences et technologies, il envisage de mettre en place un nouveau campus visant à fournir des services basés sur la connaissance pour renforcer la recherche et la formation dans les technologies propres. Le «campus du savoir», fait partie d'un plan d’investissement sur cinq ans de 3,2 milliards US$ pour les énergies renouvelables, il permettra le développement de la main-d'œuvre scientifique à travers des programmes de formation, des conférences et des séminaires, de nouveaux masters dans les énergies renouvelables et à travers des projets de recherche. Pourtant, la base formelle de la recherche-développement au Maroc, est très limitée. Une grande part du système d'innovation est fortement liée à la façon dont celui-ci peut tirer parti du stock de connaissances régionales et internationales, et diffuser des pratiques modernes et plus efficaces au plus grand nombre d’utilisateurs nationaux, Djeflat (2012). Le développement d’une économie verte au Maroc, suppose le développement de filières de formation adéquates, tout en veillant à l’implication des différents acteurs académiques, industriels et financiers, la promotion d’initiatives de recherche-développement innovantes, génératrices de brevets nationaux, la création d’entreprises dans les filières industrielles de Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 613 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress l’économie verte, et la déclinaison de programme de formation et de R&D au niveau régional via un plan de mobilisation de tous les acteurs. Le développement de l’économie verte et des éco innovations nécessitent des solutions innovantes. La qualité de ces solutions et leur mise en œuvre dépendront avant tout de la mobilisation des pouvoirs publics. L’OCDE (2013) souligne que « Compte tenu du rôle de plus en plus central de l’innovation dans l’atteinte d’un large éventail d’objectifs environnementaux, économiques et sociaux (y compris un développement plus durable), il est nécessaire d’adopter une approche gouvernementale intégrée, plus stratégique, associant une coordination horizontale et verticale, et une meilleure intégration de politiques multiples (transports, énergie, environnement, etc.). ». Les pouvoirs publics ont également la responsabilité de mettre en place des politiques environnementales nationales et locales, de mobiliser des financements et d’inciter à l’innovation. La transition vers l’économie verte nécessite en effet un effort de financement important pour soutenir l’innovation. Il faut mobiliser davantage les capitaux privés dans l’investissement de long terme et l’innovation. Les entreprises marocaines vont devoir également s’adapter à de nouvelles règles. Les pressions réglementaires, des clients et des investisseurs sont aujourd’hui plus sensibles et elles sont appelées à s’intensifier dans le futur, ce qui impose aux firmes plus d’investissement en innovation. D’où la nécessité de mettre en place des mécanismes financiers dédiés au développement de l’économie verte, via des mesures incitatives pour le développement des investissements privés dans les secteurs de l’économie verte et une fiscalité environnementale et énergétique adaptée aux nouvelles filières. La mutation vers une économie plus respectueuse de l’environnement, suppose donc l’évolution des activités existantes et l’évolution de nouvelles activités. L’innovation, la conception et la production en économie verte nécessitent des connaissances et compétences nouvelles. De nouveaux métiers vont émerger ou des métiers méconnus, vont prendre une place accrue. Cette transition écologique doit également s’accompagner de changements structurels et le passage à une économie de services plus immatérielle, rendant la croissance moins polluante par nature. Les connaissances en deviennent ainsi les moteurs principaux, entraînant une baisse significative de l’utilisation de facteurs de production polluants. Au Maroc, la mobilisation en faveur des métiers de l’économie verte doit d’abord adapter aux réalités et perspectives de l’économie verte, le marché de l’emploi et les services de la formation et de l’orientation. D’où la nécessité de renforcer les réformes déjà en cours dans les domaines de l’éducation, de l’enseignement, de la formation professionnelle et de la recherche et développement. Ces réformes, sont de nature à améliorer les compétences des ressources humaines, pour une meilleure adaptation aux principes de l’économie verte pour un développement durable. Euro-Mediterranean Services Congress. 9-11 abril de 2014 Fac. CC. Económicas, Empresariales y Turismo. Universidad de Alcalá. Madrid. España. ISBN: 978-84-695-9987-7 614 Sermed Servicios en el Área de Libre Comercio Euromediterránea. Libro de Actas Euro-Mediterranean Services Congress Conclusion Plusieurs facteurs pourraient expliquer la transition écologique. L’importante de la dégradation environnementale et la nécessité de l’atténuer, l’utilisation des investissements dans des activités vertes, comme moyen de relance de l’économie nationale, à travers la promotion de nouvelles activités industrielles vertes et des énergies alternatives, la hausse des prix des énergies fossiles importées dont les gisements sont limités, et la nécessité de mettre en place un nouveau modèle de développement basé sur le changement du comportement des agents économiques, sont les principaux moteurs de cette transition vers une économie verte. L’économie verte n’est plus un simple concept, mais une stratégie reconnue comme pertinente pour la préservation de l’environnement et la compétitivité macro et micro-économique. Elle suppose un nouveau modèle de développement durable basé sur le changement du comportement de tous les acteurs consommateurs et producteurs. L’environnement, longtemps considéré comme une contrainte, est aujourd’hui présenté comme un des facteurs de compétitivité et de création d’emploi, et en cette période de crise globale, les filières environnementales constituent une source potentielle d’emploi et d’activité. La création d’emplois en général, et verts en particulier, dépend du degré d’implication de tous les acteurs, notamment les pouvoirs publics et les entreprises. L’économie verte ne pourrait en effet, être un levier de croissance pour les territoires, un moteur de la compétitivité des entreprises et de la création de l’emploi que si elle construit avec tous les acteurs, des partenariats assurant un développement économique, socialement plus équitable et plus respectueux de l’environnement. A ce niveau, l’éco innovation a un rôle fondamental à jouer pour améliorer la durabilité de l’économie et maximiser ses apports potentiels d’un point de vue environnemental, social et culturel, dans la transition vers une économie verte. Cette innovation ne doit pas être que technologique, mais aussi socioéconomique et organisationnelle. Elle doit permettre de faire émerger un nouveau modèle de financement des services environnementaux pour remédier à la crise du modèle de développement actuel. Les exploits de l’économie verte, sont à tout à la fois porteuses de risques et de promesses pour les populations actives, mais particulièrement pour les populations les plus vulnérables. Si les emplois verts ont pour objectifs la réduction des dommages environnementaux des entreprises et des secteurs économiques, pour finalement les ramener à un niveau viable, des mesures doivent être prises pour garantir qu’ils soient des « emplois décents », contribuant à réduire la pauvreté tout en préservant l'environnement. Références bibliographiques Aznar Olivier (2002), « Une caractérisation des services environnementaux à dimension paysagère produits dans les espaces ruraux », Développement durable et territoires http://developpementdurable.revues.org/904. Campeau, Louis (2010), « L’économie verte, une industrie en développement ». 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