QUELS SONT LES POINTS COMMUNS ET LES DIFFERENCES

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QUELS SONT LES POINTS COMMUNS ET LES DIFFERENCES
ENTRE LES REGIMES TOTALITAIRES?
I. LES PROJETS TOTALITAIRES
Quels sont les points communs et les différences entre les projets des régimes totalitaires
A. Un même rejet de la démocratie libérale:
• Les idéologies totalitaires se sont construites sur la même condamnation de la démocratie et de ses valeurs de
pluralisme et de tolérance.
- Pour les bolcheviks, c'est un régime «bourgeois» qui écrase le prolétariat.
- Pour les fascistes et les nazis, c'est un régime «décadent» qui affaiblit la nation.
C'est pourquoi l'État totalitaire n'est pas un État de droit: il ne respecte ni les libertés individuelles, ni la
séparation des pouvoirs.
Ainsi, les libertés individuelles disparaissent-elles quand l'Etat totalitaire remplace l'État de droit. L'État
autoritaire devient omniprésent dans la société que l'on cherche à soumettre.
= Etat de droit: un État dans lequel tous les individus ou collectivités ont leurs activités déterminées et sanctionnées
par le droit. Un État de droit s'oppose à un État où règne l'arbitraire, le bon plaisir du prince ; bref, l'État où certaines
personnes, autorités ne voient pas leurs activités et pouvoirs encadrés, limités par le droit. Un État de droit protège les
libertés fondamentales, reconnaît l'égalité des individus devant la loi et respecte la séparation des pouvoirs (législatif,
exécutif, judiciaire).
• Forger un homme nouveau. Il s'agit, pour les régimes totalitaires de créer un «homme nouveau». Toutes les étapes
de la vie de cet « l'homme nouveau» sont désormais politisées, au service du régime. «L'individu n'est rien, l'État est
tout» proclame Mussolini. Les idéologies totalitaires prétendent soumettre l'individu au groupe. Libéré de l'ancienne
société, il doit se fondre dans la communauté nouvelle. Celle-ci est incarnée par le parti unique et guidée vers un
avenir radieux par son chef.
Néanmoins, ces ressemblances indéniables ne doivent pas masquer les différences importantes qui existent
entre le projet soviétique d'un côté, les projets fasciste et nazi de l'autre.
B. L'URSS: libérer l'homme par le communisme
• Abolir l'aliénation capitaliste. Lénine et Staline, lecteurs de Marx, pensent que la société capitaliste aliène
l'homme, en lui volant sa force de travail et en le maintenant dans la servitude. La révolution socialiste doit permettre
à l'État de supprimer le capitalisme, par la dictature du prolétariat et la socialisation des moyens de production.
L'État pourra ensuite disparaître et l'humanité vivre dans le communisme. Quiconque s'oppose à cette marche vers le
bonheur est un «ennemi du peuple»: c'est ainsi qu'est justifiée la terreur. Staline se fixe comme priorité l'abolition
des classes sociales au profit de la classe prolétaire. Ainsi, le stalinisme se veut le régime des paysans et des
ouvriers fondé sur une solidarité de classe.
= La notion d'aliénation est généralement comprise comme la dépossession de l'individu et la perte de maîtrise de ses
forces propres au profit d'un autre (individu, groupe ou société en général).
• Un projet universaliste. Ce message s'accompagne d'un fort messianisme: tous les hommes, même hors d'URSS,
ont droit au bonheur. Lénine a créé le Komintern en mars 1919 pour diffuser la révolution, et l'URSS soutient
notamment les mouvements anticolonialistes. Mais Staline privilégie ensuite le développement du «socialisme dans un
seul pays» (1925) afin de consolider la révolution bolchevik en URSS. L'uniformisation sociale se traduit aussi par
une volonté d'intégration égalitaire de tous les peuples de l'URSS mais, dans la pratique, Staline ranime le
nationalisme russe, réprime les autres nationalités de l'URSS (Ukrainiens, Caucasiens, Tatars, Sibériens, etc.) et
renforce la centralisation du pouvoir. Le caractère fédéral de l'URSS et l'autonomie des républiques non russes
deviennent donc purement fictifs.
= Messianisme: mot emprunté au vocabulaire religieux (attente du Messie) et qui désigne, en histoire politique, toute
attente utopique d'une libération.
= Komintern: nom abrégé de l'Internationale communiste (ou IIIe Internationale) fondée en 1919. Il regroupe les
partis communistes de tous les pays pour soutenir la révolution soviétique.
= Le socialisme dans un seul pays est une théorie politique avancée par Staline et adoptée par le XIVe congrès du
Parti communiste de l'Union soviétique en 1925. Cette théorie défendait la possibilité de bâtir le socialisme en URSS
sans obtenir le secours des autres pays avancés qui auraient pu connaître une révolution. Pour ses partisans, le «
socialisme dans un seul pays » se présentait comme une idée réaliste prenant acte de l'échec des mouvements
révolutionnaires en Europe quelques années plus tôt pour réclamer la consolidation interne de la révolution russe, sur
la base de l'alliance entre le prolétariat et la paysannerie.
• Cette société unique produit des modèles, des « héros du travail socialiste », comme l'ouvrier Stakhanov.
Chacun est supposé inciter les autres camarades à dépasser les normes de production.
= Le stakhanovisme était une campagne de propagande soviétique en URSS faisant l'apologie d'un travailleur très
productif et dévoué à son travail. Le terme provient du nom du mineur « de choc » Alekseï Stakhanov qui, dans la nuit
du 30 au 31 août 1935, aurait extrait 102 tonnes de charbon en six heures, soit environ quatorze fois le quota demandé
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à chaque mineur. Ces exploits reposaient en réalité sur le travail de préparation d'une équipe de soutien. Ce record
avait été décidé par le gouvernement soviétique sous Joseph Staline pour servir de modèle aux autres salariés, afin
qu'ils travaillent plus et si possible qu'ils dépassent les cadences et les quotas de travail imposés. Cette campagne de
propagande interne fut ensuite utilisée à l'extérieur pour « démontrer » l'adhésion des travailleurs au régime stalinien,
les capacités de l'« Homme Nouveau » et les extraordinaires capacités productives du régime.
C. L'Italie et l'Allemagne: régénérer l'homme au service d'un projet nationaliste
1. Retrouver la grandeur passée.
Mussolini et Hitler veulent créer un peuple de guerriers, prêts à suivre leur chef pour redonner à la nation sa
grandeur. Le fascisme et le nazisme mettent en avant l'action violente, la discipline militaire, la virilité, l'exploit
sportif. L'Italie fasciste veut renouer avec la gloire de l'Empire romain, par la conquête d'un empire colonial.
L'Allemagne nazie veut retrouver la pureté originelle de la race allemande, qui aurait été altérée par les mélanges.
2. La place centrale du racisme dans l'idéologie nazie
• Quand Hitler s'empare du pouvoir en janvier 1933, la doctrine nazie est fixée depuis 1925 avec la parution de
Mein Kampf. Ce livre contient une idée majeure: le monde s'organise autour de l'inégalité des races. Parmi celles-ci,
la race germanique est d'une supériorité évidente, par la pureté de son sang. Ce racisme biologique détermine ainsi une
hiérarchie raciale que les nazis au pouvoir doivent préserver.
=Nazisme: contraction de « national-socialisme», doctrine raciste, antisémite, nationaliste, antidémocratique et
anticommuniste, élaborée par Hitler, Forme extrême du totalitarisme par sa propagande, l'encadrement
des masses, la terreur. L'aboutissement est la guerre raciale.
• Ainsi le Volk allemand se montre sélectif et exclusif. Hitler met en place un État ouvertement fondé sur le racisme
et l'eugénisme. La propagande exalte les aryens et l'éducation est largement tournée vers le sport. Malades physiques
et mentaux sont vus comme des dégénérés et sont obligatoirement stérilisés à partir de 1933 (Hitler ira jusqu'à
autoriser leur euthanasie en 1939). Les juifs, considérés comme une race inférieure ennemie de la race aryenne, sont
victimes de discriminations et d'une ségrégation de plus en plus stricte. L'antisémitisme est légalisé en 1935 par les
lois de Nuremberg. Avant-guerre, le but est d'abord de chasser les Juifs par une persécution sans cesse plus radicale.
Leur émigration est encouragée par des actions violentes: boycott des magasins juifs en avril 1933, violent pogrom de
la « Nuit de cristal» en novembre 1938. Planifiée d'en-haut, cette dernière fait 91 morts à travers toute l'Allemagne et
entraîne l'arrestation de 30.000 Juifs conduits en camp de concentration, la dévastation de centaines de magasins et la
destruction de dizaines de synagogues.
=Volk: mot allemand signifiant « peuple », au sens de « nation », Les nazis lui donnent plutôt la signification de
communauté raciale, unie par les liens de la pureté du même sang.
= Eugénisme: méthodes censées améliorer le patrimoine génétique d'une population dont certaines sont encouragées
par les États racistes (stérilisation, interdiction des mariages).
= Aryens: nom donné par les nazis à la prétendue race germanique supérieure, d'origine nordique.
= Dégénéré: littéralement, déchu de sa race, Mot employé par les nazis pour désigner tout être qui est à leurs yeux
malade ou mélangé et qui doit être rendu inapte à la procréation par stérilisation, puis par assassinat.
= Pogrom: mot russe désignant les soulèvements violents voire meurtriers commis souvent avec la complicité des
autorités contre une communauté juive.
3. L'Italie fasciste: de l'exaltation nationaliste à la protection de la «race italienne».
• Si le projet totalitaire italien reste empirique et inachevé (maintien fictif des institutions démocratiques et de la
monarchie, persistance de maigres espaces de liberté comme l'éducation catholique, une terreur moins sanguinaire
qu'en Allemagne et en URSS), la primauté de la nation est le fil conducteur du régime. L'État tout-puissant doit
affirmer la grandeur du pays, « une troisième Rome» est à construire. Cette Italie régénérée s'incarne dans son
nouveau César: Mussolini.
• L'unité de la nation derrière son chef est donc primordiale. Elle est acquise à l'intérieur par le consensus
politique et la réconciliation avec l'Église officialisée par les accords du Latran de 1929. Au-delà des frontières, le
fascisme se veut conquérant en Méditerranée mais ne s'exprime que tardivement, en Afrique, avec l'invasion de
l'Éthiopie en 1935. L'Italie adopte à cette occasion une législation raciste (interdiction des relations sexuelles entre
Italiens et Noirs). Ce nationalisme expansionniste s'allie au nazisme en 1936 (axe Rome-Berlin) et adopte une
législation antisémite copiée sur celle de l'Allemagne en 1938. Toutefois, cette orientation raciste tardive n'obtient pas
une réelle adhésion de la population.
=Accords du Latran: accords conclus entre l'Italie et le Saint-Slège. Si le pape renonce définitivement aux États
pontificaux perdus en 1870, l'Italie reconnaît la souveraineté du pape sur le Vatican et le catholicisme comme religion
d'État.
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II. LES MOYENS DU POUVOIR TOTALITAIRE: PARTI UNIQUE, TERREUR ET PROPAGANDE
Comment les régimes totalitaires parviennent-ils à imposer leurs idées et à garder le pouvoir?
A. Le parti, clef de voûte du système totalitaire
• Le parti unique de masse (PCUS, PNF, NSDAP) est le premier outil indispensable à la transmission des idées
totalitaires sur l'ensemble de la population. Ses cadres et ses structures locales monopolisent toutes les activités
politiques, sociales et économiques. Véritable État dans l'État, le parti est l'indispensable complément de la réalisation
du totalitarisme. Il transmet, par la multitude de ses organisations sociales, économiques, culturelles, la pensée du
chef.
• Le parti contrôle l'instrument essentiel de la pensée totalitaire: la propagande. Celle-ci vise à mobiliser les
masses et diffuse le message totalitaire par la presse, la radio, le cinéma et à l'occasion des manifestations culturelles,
artistiques ou sportives.
=Propagande: action de diffuser par tous les moyens une doctrine afin d'influencer l'opinion publique.
• Le parti met aussi en œuvre la terreur, essentielle au mode de fonctionnement du régime, même s'il peut
également en être victime. Entretenue par les milices politiques, la terreur s'officialise dans chaque État totalitaire avec
un arsenal répressif grandissant.
B. Des régimes terroristes et policiers:
1. La terreur soviétique
• «Le Parti a toujours raison ». Pour Staline, le Parti communiste connaît les intérêts du peuple mieux que le peuple
lui-même. Devant les résistances paysannes à la politique de collectivisation, une première vague de terreur a lieu
entre 1929 et 1932. C'est la dékoulakisation : 1 800 000 paysans sont déportés vers des régions éloignées, tandis que la
famine fait plusieurs millions de morts, notamment en Ukraine.
• La «Grande Terreur». Elle est ordonnée par Staline, pour éliminer les dernières résistances à ses projets, de 1936 à
1938. Les «procès de Moscou» sont mis en scène pour discréditer les anciens compagnons de Lénine qui pourraient
contester le pouvoir personnel de Staline. Derrière cet événement public a lieu un crime tenu secret: près de 700 000
personnes sont exécutées par le NKVD. Tous les suspects, contestataires ou non, sont envoyés au goulag. 15 millions
de Soviétiques ont ainsi été internés dans les camps, de leur ouverture en 1917 à la mort de Staline en 1953.
= Dékoulakisation : élimination des koulaks en tant que classe. Les koulaks, paysans aisés, sont rendus responsables
des inégalités dans les campagnes et de la résistance à la collectivisation des terres.
= Goulag : abréviation de « Direction générale des camps de travail », Au sens large, désigne le système
concentrationnaire soviétique.
= NKVD : abréviation de « Commissariat du peuple aux affaires intérieures ». Cette police politique est chargée de
traquer les opposants au régime soviétique.
2. La terreur fasciste et surtout nazie
• L'État policier fasciste. En Italie, les opposants sont surveillés par l'OVRA, qui dispose d'un vaste réseau
d'informateurs. Les antifascistes les plus résolus sont assignés à résidence sans jugement: c'est le confino, l'exil
intérieur aux «confins» du pays, souvent dans des villages des régions les plus déshéritées du Sud de l'Italie ou dans
îles quasi-désertes (îles Lipari, Lampedusa...). Si la répression est implacable, elle ne constitue pas une politique de
terreur systématique comme en Allemagne.
• Les camps nazis. À leur arrivée au pouvoir, les nazis prennent le contrôle de la police, à laquelle sont incorporés SA
et SS. La Gestapo est créée pour traquer les opposants, considérés comme des éléments «impurs» qui souillent le
«corps allemand». Toutes les forces de répression sont dirigées par Heinrich Himmler, chef de la SS à partir de 1936.
Dès mars 1933, les nazis ouvrent des camps de concentration (ex: Dachau) où sont internés les ennemis politiques
(socialistes, communistes, etc.).
= Gestapo: abréviation de « Police secrète de l'État», police politique créée en 1933 pour traquer les opposants au
régime nazi.
= SS : abréviation de Schutzstaffel, « échelon de protection ». Créée en 1922 comme
garde personnelle d'Hitler, la SS devient l'élite du Parti nazi, chargée à partir de 1933
de superviser les camps et la police.
= Camp de concentration: camps ouverts par les nazis à partir de mars 1933, pour interner les ennemis du régime,
puis tout individu considéré comme socialement déviant.
C. Une propagande omniprésente
• Ce nouvel État (totalitaire) s'incarne dans un modèle, le chef charismatique. Issus du peuple, contrairement à
d'autres régimes autoritaires, Mussolini, Hitler, Staline sont des guides incontestés et infaillibles, gardiens de la
doctrine, initiateurs de la grandeur retrouvée du pays. Flattant, galvanisant les foules, le chef charismatique entretient
cette adhésion populaire lors de grandes manifestations organisées par le parti.
= Chef charismatique: personne qui exerce par ses qualités exceptionnelles une fascination sur un groupe ou un
peuple.
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• Le culte du chef. L'État totalitaire met en scène son chef infaillible. Staline est le Vojd, Hitler le Führer, Mussolini
le Duce - trois mots qui dérivent du verbe «guider».
- Staline prétend conduire le peuple soviétique vers une société sans classe, où chaque travailleur accédera au bonheur.
- Hitler veut régénérer la «race allemande» et la guider vers la grandeur.
- Mussolini montre l'exemple aux Italiens: il est présenté comme un surhomme, penseur brillant et grand sportif.
• La mise en scène de l'unanimité. Réunie autour de son chef, la communauté doit affirmer son unité. C'est pourquoi
le rassemblement de masse, lors de grandes cérémonies, est privilégié (congrès annuel du parti nazi à Nuremberg). Les
moyens techniques les plus modernes (radio, cinéma) sont utilisés pour donner à voir et à entendre une seule chose:
l'idéologie dominante. Le monologue totalitaire s'oppose au dialogue démocratique.
• L'art (sculpture, peinture, cinéma, littérature, etc...) et les moyens de communication de masse (radio) sont
également mis au service de la propagande.
- Joseph Goebbels est chargé du ministère de l'information populaire et de la propagande dans l'Allemagne nazie. Il
crée la Chambre culturelle du Reich pour contrôler étroitement toute la vie culturelle et artistique. Le sculpteur Arno
Breker est le prototype de "l'artiste officiel" qui met son art au service du régime et de l'idéologie nazis. On citera
également la cinéaste leni Riefenstahl qui filme le congrès du parti nazi à Nuremberg (Le triomphe de la volonté,
1935) et les Jeux olympiques de Berlin en 1936 (Les Dieux du stade 1938).
- L'art pendant le règne de Staline a été marqué par la volonté du gouvernement d' imposer le style du réalisme
soviétique et de sévèrement réprimer toutes les autres tendances. De nombreux écrivains ont été emprisonnés et/ou
tués. Des livres ont été retirés des bibliothèques et détruits.
• La haine de la raison? Dans ce cadre, tout ce qui relève du jugement critique est suspect. La propagande totalitaire
vise à fasciner, étourdir, voire hypnotiser les foules: elle s'adresse aux sens, aux sentiments, plus qu'à la raison. Les
intellectuels qui ne se mettent pas au service de l'État sont censurés ou persécutés. Dans la nuit du 10 mai 1933, devant
l'université de Berlin, les nazis brûlent 20 000 livres désormais interdits.
III. LES SOCIETES FACE AU TOTALITARISME:
Les régimes totalitaires parviennent-ils à contrôler totalement la société?
A. Des économies restructurées
Arrivés au pouvoir dans des conditions économiques catastrophiques, les régimes totalitaires
reconstruisent les structures productives. L'industrie est jugée prioritaire.
- En URSS, sous Staline, à partir du Grand tournant de 1928/1929, la collectivisation de l'agriculture et
l'industrialisation se font à marche forcée en ayant recours à la planification de l'économie. La priorité accordée aux
industries de base (charbon, acier, pétrole, métallurgie), considérées comme des facteurs-clés de la puissance, s'est
faite au détriment de l'agriculture et des industries de consommation.
- Les régimes fasciste et nazi mènent des politiques économiques dirigistes sans pour autant remettre en cause la
propriété privée ou le système capitaliste. Ils relancent l'emploi autour de grands travaux (bataille du blé et
bonification des terres - assèchement des marais pontins - en Italie, construction d'autoroutes en Allemagne, etc...). De
4,8 millions en 1933, le nombre de chômeurs allemands est ramené à 119.000 en 1939. Allemagne et Italie entrent
également dans la voie de l'autarcie. Cette politique économique vise à réduire la dépendance extérieure en
développant les productions nationales et éventuellement des produits de substitution (ersatz en Allemagne). Enfin,
elles initient des politiques de réarmement (Plan de quatre ans lancé par Göring en 1936) et s'orientent vers une
économie de préparation à la guerre. En 1939, l'Allemagne nazie est devenue la 2e puissance industrielle du monde.
= Dirigisme économique: forte intervention de l'Etat dans l'économie.
= Politique autarcique: système économique par lequel un pays cherche à se suffire à lui-même. L'autarcie peut
s'envisager comme une préparation à la guerre.
B. Des dynamiques sociales contrastées
• Une société soviétique transformée. Lénine et surtout Staline ont initié un changement en profondeur de la société
russe. Elle devient de plus en plus urbaine et industrielle. De nouveaux cadres (médecins, ingénieurs, professeurs)
issus du peuple sont formés dans les années 1920 et 1930. Ils se retrouveront à la tête du Parti et de l'État après la mort
de Staline en 1953, comme Khrouchtchev et Brejnev (successeurs de Staline). Cependant, la réalité soviétique est loin
de l'égalité sociale. Une nouvelle classe de privilégiés apparaît et profite des largesses du régime: cadres du parti,
officiers de l'armée rouge, cadres des entreprises d'Etat... À l'opposé, les exclus du système soviétique sont nombreux:
koulaks, ouvriers absentéistes, kolkhoziens négligents ou religieux interdits.
= Koulak: paysan « aisé », et donc ennemi de classe. En réalité, tout paysan hostile à la collectivisation.
• Le statu quo social allemand et italien. Les partis fasciste et nazi tenaient à l'origine un discours populiste, voire
socialiste. Une fois arrivés au pouvoir, ils abandonnent l'ambition de bouleverser la société et ménagent les élites
traditionnelles. Hitler entretient de bons rapports avec le patronat. qui finance le NSDAP depuis 1931, et avec l'armée.
Il se débarrasse de l'aile gauche du Parti nazi le 30 juin 1934 lors de la Nuit des longs couteaux.
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= Nuit des longs couteaux: nom donné à l'assassinat des principaux chefs de la SA aile gauche du Parti nazi, dans la
nuit du 29 au 30 juin 1934. Cette élimination est confiée en grande partie aux SS.
C. Les populations, entre consentement...
Dans les trois totalitarismes, l'encadrement de la société est prioritaire. Tous les âges de la vie et tous les
aspects de la vie sociale sont contrôlés.
• L'encadrement de la jeunesse. Les jeunes sont une cible privilégiée des régimes totalitaires, qui espèrent en faire
des hommes nouveaux.
- En Italie, les Balillas sont organisés sur le modèle des Chemises noires du Parti fasciste.
- En Allemagne, l'adhésion à la Jeunesse hitlérienne est obligatoire à partir de 1936.
- En URSS, les jeunes deviennent Pionniers à 9 ans, puis entrent au Komsomol à 14 ans.
= Balillas: nom donné aux garçons de 8 à 14 ans membres de la principale organisation de jeunesse fasciste: l'ONB
(Opera Nazionale Balilla).
= Komsomol: sigle de l'Union de la jeunesse communiste léniniste, organisation de jeunesse du Parti bolchevik,
fondée en 1918.
A cela, il faut ajouter le contrôle strict de l'école, des enseignants et des programmes scolaires qui sont censés
inculquer aux enfants l'idéologie du régime.
• L'encadrement des adultes.
Pour les adultes, le totalitarisme s'insinue dans le monde du travail avec de nouvelles structures qui
réconcilient ouvriers et patrons. Les corporations en Italie, et le Front allemand du travail en Allemagne
remplacent les syndicats désormais interdits et contribuent à l'encadrement des ouvriers. Ces organisations nient la
"lutte des classes" et entendent lui substituer la "collaboration de classe" entre ouvriers et patrons. Le dialogue social
(fixation des salaires, des conditions de travail, etc...) entre employeurs et salariés disparaît au profit d'un dialogue
entre les patrons et le parti unique, supposé représenter les ouvriers.
• La propagande et la terreur ne suffisent pas à expliquer la survie des régimes totalitaires. Les régimes
totalitaires reposent aussi pour partie sur le consentement des populations:
- En URSS, la promesse d'un monde nouveau peut sembler se réaliser pour les fils de paysans qui font carrière grâce
au Parti.
- En Allemagne et en Italie, la politique sociale vise à «acheter» le consentement de la population par des avantages
concrets. Les loisirs sont ainsi pris en charge par des organismes spécialisés: le Dopolavoro et la Kraft durch Freude.
= Dopolavoro: association du PNF créée en 1925, l'OND (Opera Nazionale Dopolavoro. Organisation nationale du
temps libre) finance les loisirs et les vacances comme une sorte de grand comité d'entreprise national.
= Kraft durch Freude : « La force par la joie », organisation créée en 1933 dans le cadre du Front du travail allemand
(syndicat unique). Elle offre aux salariés des loisirs à prix réduits.
• Ralliement et accommodement. L'image offerte par la propagande totalitaire doit être analysée avec prudence. Les
défilés d'individus heureux et fanatisés ne correspondent pas à la réalité. Il y a des convaincus enthousiastes, certes,
mais la majorité s'accommode plus qu'elle ne participe activement. En Italie, les fonctionnaires doivent être membres
du Parti national fasciste à partir de 1932 : le sigle en vient alors à signifier ironiquement «Par Nécessité Familiale».
D. ... et résistances
= Résistance: opposition volontaire, continue et organisée à une situation oppressive. Le terme désigne surtout la
résistance politique et militaire pendant la Seconde Guerre mondiale. Les historiens parlent aussi
de «résistance passive» pour désigner certaines formes de rejet du totalitarisme.
• Des formes de résistance passive.
- Dans les régions fortement catholiques d'Allemagne, comme la Bavière, le projet nazi séduit peu, L'Église dispute au
NSDAP l'encadrement des jeunes. La nouvelle morale raciste bute sur le message universaliste du christianisme.
D'autre part, certains quartiers ouvriers, fidèles à leur culture politique de gauche, restent imperméables au message
nazi.
- En URSS, les paysans, attachés aux traditions villageoises, s'opposent à la collectivisation des terres. Staline doit leur
concéder en 1935 le droit de cultiver un lopin de terre privé et d'en vendre la production sur un « marché libre ».
• Une résistance active très minoritaire.
- En Asie centrale, l'armée soviétique doit lutter contre les basmatchis, qui défendent l'islam et leur mode de vie
nomade.
= Basmatchis: «brigands», nom donné par les Russes aux combattants armés qui résistent à la soviétisation de l'Asie
centrale de 1917 à 1933.
- En Italie, les antifascistes qui veulent renverser le régime de Mussolini sont presque tous en exil. Deux de leurs
chefs, les frères Rosselli, sont assassinés en France en 1937.
- En Allemagne, quelques attentats ratés visent Hitler. Il faut attendre la Seconde Guerre mondiale pour voir apparaître
une résistance armée en Allemagne, et surtout en Italie.
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