Propositions du CISS pour le projet de loi relatif à la bioéthique

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Propositions du
CISS
pour le projet de
loi relatif à la
bioéthique
ADMD - AFD - AFH - AFM - AFPric - AFVS - AIDES - Allegro Fortissimo - Alliance du Cœur - Alliance Maladies Rares
ANDAR - APF - AVIAM - CSF - Epilepsie France - Familles Rurales - FFAAIR - FNAIR - FNAPSY - FNATH
France Alzheimer - France Parkinson - Le LIEN - Les Aînés Ruraux - Ligue Contre le Cancer - Médecins du Monde
ORGECO - SOS Hépatites - Transhépate - UNAF - UNAFAM - UNAFTC - UNAPEI - Vaincre la Mucoviscidose
Janvier 2011
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Sommaire
INTRODUCTION
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1/ DONS ET GREFFES D’ORGANES
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Proposition 1 : Elargir le don entre vivants
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Proposition 2 : Ouvrir la possibilité de dons croisés
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Proposition 3 : Mieux protéger les donneurs vivants
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Proposition 4 : Valoriser les équipes effectuant des prélèvements
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2/ LA RECHERCHE SUR LES CELLULES SOUCHES ET SUR L’EMBRYON
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Proposition 5 : Passer à une logique d’autorisation strictement encadrée en matière de
recherche sur les cellules souches embryonnaires et sur l’embryon
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3/ LA MEDECINE PREDICTIVE
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Proposition 6 : Ne pas rendre une personne responsable de la non-communication
d’un risque génétique à sa parentèle (Article 1er du projet de loi)
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Proposition 7 : Garantir l’anonymat lors de l’information de la parentèle
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Introduction
Six ans après la dernière révision des lois sur la bioéthique, les pouvoirs publics ont entrepris
de mettre en chantier un nouveau réexamen, notamment pour adapter ces textes tant à
l’évolution des sciences et des techniques qu’aux nouvelles exigences sociales et juridiques.
Les évolutions à venir ont déjà fait l’objet de discussions, parfois publiques, mettant en
présence des médecins, des juristes, des responsables politiques, des organismes chargés
de réflexions éthiques et des représentants des religions. Les associations se sont aussi
exprimées.
Les Etats généraux de la bioéthique se sont déroulés en 2009. Leurs travaux ont fait l’objet
d’une synthèse largement diffusée. Parallèlement, des avis ont été rendus par le Comité
national consultatif d’éthique, le Conseil d’Etat et l’Office parlementaire des choix
scientifiques et technologiques.
Enfin, un projet de loi a été rédigé et sera soumis à l’examen des parlementaires en 2011.
C’est dans le cadre de cet examen parlementaire que le CISS formule un certain nombre de
propositions afin d’enrichir ou de corriger ce texte.
Le CISS s’est positionné sur trois sujets qui nous ont semblé les plus en lien avec notre
approche transversale de la santé : les dons et greffes d’organes (1), les recherches sur les
cellules souches et sur l’embryon (2) ainsi que la médecine prédictive (3).
1. DONS ET GREFFES D’ORGANES
Proposition 1 : Elargir le don entre vivants
Exposé des motifs
En 2004, la révision des lois de bioéthique a élargi la possibilité de dons entre vivants : outre
le père et la mère du receveur, "peuvent être autorisés à se prêter à un prélèvement
d'organe dans l'intérêt thérapeutique direct d'un receveur son conjoint, ses frères ou sœurs,
ses fils ou filles, ses grands-parents, ses oncles ou tantes, ses cousins germains et cousines
germaines ainsi que le conjoint de son père ou de sa mère", et "toute personne apportant la
preuve d'une vie commune d'au moins deux ans avec le receveur".
Le CISS propose un élargissement complet, charge au juge ayant la responsabilité d’étudier
le consentement du donneur de vérifier qu’il n’est corrélé à aucune opération commerciale
entre le donneur et le receveur.
En effet, certains voient dans un élargissement trop large une augmentation du risque de
commercialisation. Ce risque existant y compris au sein de la cellule familiale, il convient
plutôt d’insister sur le rôle du juge en matière de vérification des liens qui unissent les deux
personnes qui peuvent tout aussi bien être familiaux qu’amicaux.
Dispositif
A l’article L1231-1 du code de la santé publique, supprimer les éléments suivants :
« Le donneur doit avoir la qualité de père ou mère du receveur.
Par dérogation au premier alinéa, peuvent être autorisés à se prêter à un prélèvement
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d'organe dans l'intérêt thérapeutique direct d'un receveur son conjoint, ses frères ou soeurs,
ses fils ou filles, ses grands-parents, ses oncles ou tantes, ses cousins germains et cousines
germaines ainsi que le conjoint de son père ou de sa mère. Le donneur peut également être
toute personne apportant la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans avec le
receveur. »
Proposition 2 : Ouvrir la possibilité de dons croisés
Lorsqu’une personne est prête à donner un organe à un proche mais que ces deux
personnes ne sont pas compatibles, le don croisé permet de rechercher deux autres proches
dans le même cas avec lesquels il pourrait y avoir compatibilité, le tout dans le respect de
l’anonymat pour les donneurs et les receveurs. Le projet de loi prévoit cette possibilité. Le
CISS s’en félicite et souhaite que l’examen parlementaire conserve cette disposition.
Proposition 3 : Protéger les donneurs vivants des discriminations
Exposé des motifs
S’il est tout à fait compréhensible que les donneurs vivants ne soient pas rémunérés pour
leur don afin d’éviter toute dérive commercial, il convient également de faire en sorte que le
donneur ne soit pas lésé autrement que par le fait de vivre avec un organe en moins. Il est
donc primordial de garantir qu’aucune restriction au niveau des assurances et des banques
ne puisse être mise en place à l’encontre d’un donneur. Le prélevé doit être considéré
comme sain, ce critère ne doit pas entrer dans les questionnaires de santé des assureurs et
il convient de spécifier dans le code pénal que la prise en compte des conséquences d’un
prélèvement d’organe doit être considérée comme une discrimination.
Dispositif
Au 1° de l’article 225-3 du code pénal, après les mots « ou une prédisposition génétique à
une maladie » ajouter les mots « ou qu’elles se fondent sur la prise en compte des
conséquences sur l’état de santé d’un prélèvement d’organe tel que défini à l’article 1231-1
du code de la santé publique ».
Proposition 4 : Valoriser les équipes effectuant des prélèvements
Exposé des motifs
Les dispositions précédentes sont indispensables pour augmenter les dons entre vivants.
Cependant, le réel frein au développement de ces dons entre vivants comme des
prélèvements sur personnes décédées se situe plutôt au niveau des équipes autorisées à
prélever. Ces équipes ne sont pas suffisamment formées et incitées à effectuer des
prélèvements. Il est donc essentiel de développer les formations spécifiques au prélèvement
vers ces équipes et de valoriser financièrement les équipes développant leur activité de
prélèvement. Il est tout aussi essentiel de mieux valoriser les équipes de coordination.
Dispositif
Il convient de déterminer le meilleur dispositif législatif permettant de valoriser et de former
ces équipes de prélèvement et de coordination.
2. LA RECHERCHE SUR LES CELLULES SOUCHES ET SUR L’EMBRYON
Les recherches sur les cellules souches embryonnaires et sur l’embryon sont interdites en
France, sauf dérogation, alors qu’elles sont autorisées dans d’autres pays de façon
encadrée, en Grande-Bretagne notamment.
Ces recherches ont permis de réelles avancées en matière d’aide médicale à la procréation
mais également de traitements de certaines maladies rares. Elles sont porteuses d’avenir
également pour des pathologies non rares, tel que le cancer.
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Ces recherches ont également permis de développer la technologie des cellules IPS
(“cellules souches pluripotentes induites”) qu’on peut qualifier de cellules adultes ayant
bénéficié d’une cure de jouvence et qui se comportent alors comme des cellules
embryonnaires. C’est un immense progrès qu’il faut poursuivre mais qui ne dispense pas de
recherches sur l’embryon dont les caractéristiques restent différentes et qui permettront de
faire de nouvelles découvertes au service des malades et des personnes.
Proposition 5 : Passer à une logique d’autorisation strictement encadrée en matière de
recherche sur les cellules souches embryonnaires et sur l’embryon. 1
Exposé des motifs
Actuellement en France, cette recherche est donc interdite, sauf dérogations. Les équipes de
recherches pâtissent de cette législation qui incitent les investisseurs internationaux à se
tourner plutôt vers des équipes de pays dont la législation autorise ces recherches avec
encadrement strict plutôt que des équipes dont la législation les interdit avec dérogations
Il nous semble qu’il conviendrait de passer à une logique d’autorisation strictement
encadrée, afin d’avoir plus de visibilité et de sécurité pour les investisseurs et les chercheurs.
En outre, si l’on préfère interdire plutôt que d’encadrer, il y a un fort risque que les choses se
fassent en dehors de la légalité, sans aucun encadrement.
Dispositif
Article L2151-5
La recherche sur l'embryon humain est interdite.
Lorsque l'homme et la femme qui forment le couple y consentent, des études sur les
cellules souches embryonnaires et l’embryon ne portant pas atteinte à ce dernier
l'embryon peuvent être sont autorisées sous réserve du respect des conditions posées aux
troisième, quatrième, cinquième et sixième et septième alinéas.
Par dérogation au premier alinéa, et pour une période limitée à cinq ans à compter de la
publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 2151-8, les Ces recherches
peuvent être sont autorisées sur l'embryon et les cellules embryonnaires lorsqu'elles sont
susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs et à la condition de ne
pouvoir être poursuivies par une méthode alternative d'efficacité comparable, en l'état des
connaissances scientifiques. Les recherches dont les protocoles ont été autorisés dans ce
délai de cinq ans et qui n'ont pu être menées à leur terme dans le cadre dudit protocole
peuvent néanmoins être poursuivies dans le respect des conditions du présent article,
notamment en ce qui concerne leur régime d'autorisation.
Une recherche ne peut être conduite que sur les embryons conçus in vitro dans le cadre
d'une assistance médicale à la procréation qui ne font plus l'objet d'un projet parental. Elle ne
peut être effectuée qu'avec le consentement écrit préalable du couple dont ils sont issus, ou
du membre survivant de ce couple, par ailleurs dûment informés des possibilités d'accueil
des embryons par un autre couple ou d'arrêt de leur conservation. A l'exception des
situations mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 2131-4 et au troisième alinéa de
l'article L. 2141-3, le consentement doit être confirmé à l'issue d'un délai de réflexion de trois
mois. Dans tous les cas, le consentement des deux membres du couple est révocable à tout
moment et sans motif.
Une recherche ne peut être entreprise que si son protocole a fait l'objet d'une autorisation
par l'Agence de la biomédecine. La décision d'autorisation est prise en fonction de la
pertinence scientifique du projet de recherche, de ses conditions de mise en œuvre au
regard des principes éthiques et de son intérêt pour la santé publique. La décision de
l'agence, assortie de l'avis du conseil d'orientation, est communiquée aux ministres chargés
de la santé et de la recherche qui peuvent, lorsque la décision autorise un protocole,
1
L’UNAF membre du CISS est favorable au maintien de l’interdiction des recherches sur les cellules
souches embryonnaires et sur l’embryon. Elle ne soutient donc pas cette proposition n° 5. Pour plus
d’information : www.unaf.fr.
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interdire ou suspendre la réalisation de ce protocole lorsque sa pertinence scientifique n'est
pas établie ou lorsque le respect des principes éthiques n'est pas assuré.
En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par
l'autorisation, l'agence suspend l'autorisation de la recherche ou la retire. Les ministres
chargés de la santé et de la recherche peuvent, en cas de refus d'un protocole de recherche
par l'agence, demander à celle-ci, dans l'intérêt de la santé publique ou de la recherche
scientifique, de procéder dans un délai de trente jours à un nouvel examen du dossier ayant
servi de fondement à la décision.
Les embryons sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des
fins de gestation.
3. LA MEDECINE PREDICTIVE
L’idée d’une « médecine prédictive », permettant d'évaluer les facteurs de risque de chaque
individu face aux maladies, est née de l’étude des nouvelles applications de la génétique
dans le domaine médical. Il s’agit de détecter dix à vingt ans avant l’apparition des premiers
symptômes cliniques, la probabilité de développer une maladie. Si cette avancée majeure de
la biologie n'a pas encore véritablement émergé dans le champ de la thérapie humaine, les
progrès de la génétique permettront peut-être bientôt à un individu de disposer d'une liste
des probabilités qu'il aurait de développer telle ou telle maladie. A l’inverse de la médecine
de diagnostic, la médecine prédictive sera essentiellement probabiliste. Elle ne peut que
mesurer un risque sans jamais l'affirmer.
Proposition 6 : Ne pas rendre une personne responsable de la non-communication
d’un risque génétique à sa parentèle (Article 1er du projet de loi)
Exposé des motifs
Les tests génétiques de plus en plus courants ont vocation à se développer en divulguant
des informations toujours plus précises. Il est nécessaire que la communication des résultats
de ces tests soit accompagnée par des professionnels dûment formés. Cet
accompagnement doit permettre à la personne d’appréhender l’ensemble des implications
de ces résultats. Si des résultats indiquent un risque de maladie génétique pour la parentèle
du testé, les personnes accompagnant la communication de ces résultats doivent informer la
personne des risques encourus par la parentèle et inciter la personne testée à informer
anonymement ou non cette parentèle.
Cependant, la personne testée doit toujours pouvoir décider en dernière analyse si elle
informe ou non sa parentèle. Ce droit de ne pas prévenir doit être garanti ; or le projet de loi
opère une modification qui pourrait rendre responsable une personne ayant décidé de ne
pas avertir sa parentèle. Une telle disposition nous semble à la fois inapplicable (comment
prouver que l’on a averti ? Que faire quand les liens avec des proches sont totalement
rompus ?) et dangereuse (la crainte d’être rendu responsable de ne pas avoir averti des
proches pourrait inciter des personnes à ne pas vouloir être testées).
Dispositif
Article L1131-1-1
Ajouter un septième alinéa ainsi rédigé :
« Le fait pour le patient de ne pas transmettre l'information relative à son anomalie génétique
dans les conditions prévues au troisième alinéa ne peut servir de fondement à une action en
responsabilité à son encontre. »
Proposition 7 : Garantir l’anonymat lors de l’information de la parentèle
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Exposé des motifs
Le projet de loi laisse la possibilité à la personne testée d’informer elle-même sa parentèle
ou de demander à un tiers de s’en occuper. Le texte indique que c’est le médecin
prescripteur du test qui est tenu d’informer la parentèle. Il nous semble qu’une telle
disposition ne garantit pas l’anonymat du testé, en effet la parentèle pourra aisément deviner
l’identité du proche concerné grâce au nom du médecin ou au cachet de la Poste. Il nous
semble donc qu’il revient à l’agence de biomédecine de prévenir la parentèle si la personne
testée choisit de l’avertir anonymement.
Dispositif
Le quatrième alinéa de l’article L1131-1-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Elle procède elle-même à cette information. Toutefois, si elle estime ne pas être en
mesure d’informer les membres de sa famille potentiellement concernés ou certains
d’entre eux, ou si elle a souhaité être tenue dans l’ignorance du diagnostic, elle peut
demander par un document écrit au médecin prescripteur, qui atteste de cette demande,
de procéder à la transmission des informations à l’agence de biomédecine qui se
charge de Le médecin porter alors à la connaissance des membres de la famille dont il
elle a reçu les coordonnées l’existence d’une information médicale à caractère familial
susceptible de les concerner et les invite à se rendre à une consultation de génétique,
sans dévoiler ni le nom de la personne ayant fait l’objet de l’examen, ni l’anomalie
génétique, ni le risque qui lui est associé. »
L’article L1131-1-2 est ainsi rédigé :
« Par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 1111-2 et à l’article L. 1111-7, seul le
médecin prescripteur de l’examen des caractéristiques génétiques est habilité à
communiquer les résultats de cet examen à l’agence de biomédecine qui informe à la
personne concernée ou, le cas échéant, aux les personnes mentionnées au second alinéa
de l’article L. 1131-1. «
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