Aspects épidémiologiques des algies pelviennes aiguës d`origine

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Aspects épidémiologiques des algies pelviennes aiguës
d’origine gynécologique à la Maternité du Centre Hospitalier
de Befelatanana Antananarivo
Randriamiarisoa NAA1, Andriamady RCL1, Ranjalahy RJ2, Rakotomanga S2
RESUME : Les Algies Pelviennes Aiguës (APA), d’origine gynécologique, provoquent bien de problèmes
socio-professionnels. Une étude rétrospective, menée durant l’année 1996 à la Maternité de Befelatanana,
a eu comme objectif de préciser le profil épidémiologique des femmes enceintes souffrant d’APA et de
rechercher les facteurs favorisants et les causes déterminantes afin de déterminer une stratégie susceptible
de réduire leur incidence et d’offrir un soin de qualité. 1 612 cas d’APA, d’origine gynécologique, ont
été enregistrés, soit une incidence de 15,5%. Les APA aiguës non périodiques ont été de loin les plus
fréquentes (99,6%). L’âge moyen a été de 26 ans. Les facteurs de risque et les causes déterminantes ont
été des infections, des troubles hormonaux, une nulliparité ou une primiparité, et un bas niveau de vie.
L’APA était associée à une hémorragie (37,4%), un état de choc (14,5%) ou une fièvre (63,5%). Il y eut
83 décès (5,1%). Les décès sont dus aux complications infectieuses des avortements, à des hémorragies,
des intoxications hépato-rénales provoquées par l’ingestion de décoctions de plantes à visée abortive. Le
meilleur traitement des APA est préventif : programme d’Information-Education-Communication orienté
sur l’éducation sexuelle et la Santé de la Reproduction, meilleure prise en charge des infections génitales.
Mots-clés : Grossesse - Complication - Algie pelvienne aiguë - Infection - Epidemiologie - Prévention -
MADAGASCAR.
ABSTRACT : “Epidemiology of acute pelvic pains of pregnancy at the Maternity of General Hospital
of Befelatanana, Antananarivo” : Acute pelvic pains of pregnancy (APPP) generate a lot of social and
professional problems to pregnants. A retrospective study was carried out in 1996 at the Maternity Hospital
of Befelatanana, Antananarivo in order to specify epidemiological feature of APPP suffering pregnants
and to search favourising factors and determinative causes of this disease so that a strategy will be
drawn up to reduce its frequency and to organize correct cares. 1 612 APPP were registered for the study
period, i.e. an annual incidence of 15.5 per cent.
Non periodic APPP were the most frequent clinical forms (99.6 per cent). The average age of pregnants
was 26 years old. Risk factors and determinative causes are infections, hormonal diseases, nulliparity
and primiparity, low standard of living. APPP had been associated to hemorrhages (37.4 per cent),
circulatory shock (14.5 per cent), and hyperthermia (63.5 per cent). 83 deaths were noted. Deaths are
provoked by abortion infectious complications, hemorrhages, hepato-nephric lesions due to abortifacient
plants. The authors conclude that prevent measures remain as the best therapy. They are based on
Information-Education-Communication program drawn towards sexual education, Reproduction Health
and improvement of genital infections cares.
Key-words : Pregnancy - Complication - Acute pelvic pains - Infection - Epidemiology - Prevention -
MADAGASCAR.
INTRODUCTION
Les algies pelviennes aiguës (APA), d’origine
gynécologique, concernent les maladies des organes
génitaux chez les femmes enceintes ayant un âge
gestationnel de 12 semaines révolues. Elles
constituent les principales sources d’abandon ou
d’absentéisme professionnel, de conflit conjugal dû
au rejet du conjoint, voire de la société, de problème
financier suite au coût onéreux des frais médicaux,
de mortalité maternelle causée surtout par
l’avortement clandestin provoqué.
Le but de cette étude est de trouver une stratégie
susceptible de rompre la chaîne de dégâts causés
Arch Inst Pasteur Madagascar 2000; 66 (1&2) : 72-74
1 Hôpital général de Befelatanana, Centre Hospitalier Universitaire d’Antananarivo,
BP 8394 - 101 Antananarivo - Madagascar.
2 Ministère de la Santé, BP 460 - 101 Antananarivo - Madagascar.
par ce fléau, en précisant le profil épidémiologique,
les facteurs favorisants et les causes déterminantes
des APA.
PATIENTS ET METHODES
Cette étude rétrospective a eu comme cadre la
Maternité de Befelatanana, CHU d’Antananarivo,
un Centre de Référence de 3ème niveau. Elle a été
faite durant l’année 1996. Elle a été basée sur le
dépouillement des registres d’entrée et des
protocoles, et sur les observations médicales des
cas d’algies pelviennes aiguës d’origine
gynécologique, périodiques ou non. L’ensemble des
informations a été recueilli sur une fiche d’enquête,
précisant les données socio-économiques, les
antécédents, les caractéristiques des infections
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manifestes, les éventuels agents pathogènes ou les
causes identifiées, les traitements reçus avant
l’admission et la prise en charge par le service.
RESULTATS
Durant l’année 1996, 1 612 cas d’APA d’origine
gynécologique sur 10 424 entrantes ont été colligés,
soit une incidence de 15,5%. Les APA aiguës non
périodiques ont été de loin les plus fréquentes
(99,6%).
Tableau I : Etiologies des APA non périodiques
Tableau II : Etiologie des APA périodiques
L’âge moyen a été de 26 ans 8 mois (extrêmes:
15-45 ans). Les APA ont touché davantage les
adolescentes et les jeunes nullipares ou primipares,
de faible niveau socio-économique (revenu annuel
inférieur au PNB évalué à 250 US$ per capita).
Les patientes, dans 82,4% des cas, provenaient de
la ville d’Antananarivo ou de sa banlieue (14,4%).
Sur le plan antécédents, il s’agit le plus souvent
(131 cas) d’un accident infectieux consécutif à un
avortement, des salpingites, des infections
sexuellement transmissibles, de fibrome utérin, de
troubles hormonaux et d’appendicectomie.
Près de 57,5% des cas ont été référés, soit par
des formations sanitaires publiques, soit par des
cabinets privés. L’état général était conservé dans
47,6% des cas. L’APA était associée à une
hémorragie (37,4%), un état de choc (14,5%) ou
une fièvre (63,5%).
Le diagnostic a été confirmé en cas d’abdomen
chirurgical, après une échographie, par une ponction
du Douglas positive dans 38,5% des cas, ramenant
du sang lysé (grossesse extra utérine - GEU -
rompue), ou du pus (péritonite). Le traitement
médical prescrit à chaque fois consistait en une
réanimation : transfusion sanguine ou de
macromolécule et/ou en une antibiothérapie, les
molécules étant prescrites d’après les données de
seigoloitEerbmoN)%(egatnecruoP
sitamohcarteaidymalhC 814,02
aehorronogairessieN 612,81
eirétcaborétnE ps 318,41
euqocolyhpatS216,31
euqocotpertS014,11
silanigavallerendraG 23,2
énimretédnoN713,91
latoT88001
seigoloitEbN%
uoénatnops(ecanemuotnemetrovA
)erialôm,éuqovorp
8597,95
,etigniplas(etuahelatinégnoitcefnI
)xniplasoyp,xniplasordyh,xniplasotaméh
4435,12
euqipotceessessorG2228,31
ecneréhdA269,3
neiravoepytednoisroT117,0
enirétunoitarofreP74,0
euqitpesaesoiborcéN21,0
seigoloitEerbmoN)%(egatnecruoP
enneiravoeihportsyD43,0
eirtémodnE21,0
l’antibiogramme (dans 9,8% des cas), mais dans le
cas où les malades ne pouvaient pas payer les frais
des analyses complémentaires, une triple
antibiothérapie était instituée d’emblée. Les anti-
inflammatoires à action antalgique et l’application
de vessie de glace complétaient ce traitement
médical. Le traitement étiologique des nécrobioses
et des endométrioses était aussi médical : hormones
stéroïdiennes, anti-inflammatoires, analogues LH-
RH. L’intervention chirurgicale a été indiquée dans
32,9% pour péritonite, GEU, kyste de l’ovaire,
adhérences. L’intervention consistait, selon le cas,
en une salpingectomie ou une hystérectomie totale
(21 cas), subtotale (34 cas), une toilette de la cavité
abdominale et résection intestinale (16 cas).
Tableau III : Germes responsables des salpingites
aiguës
Dans 40,5% des cas, la mise en route du
traitement a été retardée, l’ordonnance n’ayant pas
été honorée à temps. Les suites étaient simples dans
29,5% des cas, émaillées de signes morbides à type
de suppuration post-opératoire, de péritonite post-
opératoire dans 60,7% des cas, d’endométrite
(39,1%) et d’anémie (53,2%). Dans 17 cas, les
infections ont nécessité une hystérectomie
secondaire.
83 décès sont à déplorer (5,1% des APA),
représentant 86,4% du total des décès maternels
hospitaliers enregistrés au cours de la période
d’étude. Les décès sont dus aux complications
infectieuses des avortements (63,5%), des
hémorragies (24,3%), des intoxications hépato-
rénales provoquées par l’ingestion de décoctions
de plantes à visée abortive.
La durée moyenne de séjour a été de 9 jours et
demi (extrêmes : 3-22 jours).
DISCUSSION
L’incidence des APA trouvée est très élevée
[1,2,3,4]. Les APA non périodiques ont été les plus
fréquentes. Les résultats trouvés corroborent ceux
d’autres où les infections génitales hautes, rançon
de la liberté sexuelle, prédominent chez les
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adolescentes et les jeunes femmes [3,5,6,7,8]. La
population à risque pour la survenue des APA est
constituée par ces jeunes. Larsen et al. [9], dans
leur étude sur les facteurs de risque des APA, citent
en premier une grossesse précoce, les autres
facteurs étant des conditions de travail pénibles, le
manque d’exercice et l’existence antérieure de
douleurs lombaires et du petit bassin. Le niveau
socio-économique a-t-il un rôle dans la genèse des
APA ? Les conclusions des travaux de Bjorklund
K et Bergstrom S [10] semblent répondre non
malgré les niveaux de développement différents des
pays étudiés. Les incidences des APA trouvées en
Finlande, en Suède, au Zanzibar et en Tanzanie ne
présentent pas de grande différence. Et pourtant,
la venue d’une grossesse non désirée dans un
contexte socio-économique défavorable, pousse les
jeunes vers une IVG clandestine avec ses
complications. Un cercle vicieux se crée,
compliquant davantage les APA. Cette situation
traduit de facto l’inefficience de la Santé de la
Reproduction et est une illustration des contraintes
auxquelles un service de gynécologie est confronté.
L’APA reste la principale source de décès
maternel (86,3%) par suite des avortements et des
infections génitales [4,11].
CONCLUSION
Le meilleur traitement des APA est préventif :
programme d’Information-Education-Communi-
cation orienté sur l’éducation sexuelle et la Santé
de la Reproduction. L’objectif est de parvenir à ce
que chaque individu puisse mener une vie saine.
Une meilleure prise en charge des infections
génitales guidée par un antibiogramme est l’ultime
stratégie pour lutter contre l’APA et prévenir ses
complications. L’application des normes en matière
de soins post-abortum, avec une amélioration du
service de planification familiale, aidera sûrement
à rompre la chaîne de l’APA.
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