Estudis i investigacions ÉCOTOURISME et développement à Madagascar El passat 4 de març, els alumnes de la Diplomatura de Turisme del CETT van assistir a la conferència sobre l’ecoturisme i el desenvolupament a Madagascar que el professor Bruno Sarrasin, de la Universitat del Quebec, a Montreal, va impartir a les instal·lacions de l’escola. Comme le développement durable duquel il relève, l’écotourisme est un sujet à la mode. Quel gouvernement, du Nord ou du Sud, peut faire l’économie de réflexions et d’actions en matière de protection de la biodiversité et de développement local? À ce sujet, Madagascar n’est pas en reste, du moins sur le plan des énoncés de politiques. Un Plan d’action environnemental d’une durée de 15 ans est mis en œuvre depuis le début des années 1990 et l’écotourisme y est évoqué à la fois comme un moyen de mise en valeur des ressources naturelles et un catalyseur de devises. Cette stratégie pose cependant un certain nombre d’enjeux qui placent l’écotourisme davantage dans une volonté d’accélération de la croissance (macro) économique, de justification et de financement des aires protégées dans les zones rurales que d’une véritable alternative de développement pour la population concernée. Depuis quelques années, le marché du tourisme dans la région Océan Indien progresse à un rythme annuel moyen entre 9 et 13%, proche du double du rythme moyen mondial (5,5%)1. Les grandes destinations comme la Réunion, les Seychelles et l’île Maurice sont davantage visitées, mais cette dernière se taille la part du lion en captant plus de la moitié du trafic aérien régional. Quant à l’île de Madagascar, elle représente une destination encore peu explorée et réalise une modeste performance, aussi bien dans le marché mondial (0,01% de part de marché) que dans le marché océano-indien. À Madagascar, le nombre de voyageurs non-résidents a crû en moyenne de 11,7% par année au cours de la dernière décennie. Malgré cela, le nombre d’arrivées en 2000 demeurait très modeste sur la Grande île avec 160.071 touristes, alors que ses atouts –principalement naturels– lui conféreraient une demande potentielle située entre 250.000 et 450.000 touristes par an. Malgré cette faible performance, le tourisme occupe une place de première importance à Madagascar. Sa contribution économique et, plus spécifiquement mesurée en entrée de devises, dépasse celles des autres grandes industries d’exportation comme la crevette, le café ou la vanille. Pays d'une grande biodiversité, l'offre touristique de Madagascar ne peut donc pas se dissocier de l'environnement naturel sur lequel il repose. La relation difficile du tourisme et de l'environnement La dégradation des ressources naturelles est aujourd’hui un enjeu politique d’une évidence telle qu’il est devenu difficile d’en relever les nuances et les éventuelles contradictions. Qui peut, en effet, s’en prendre à l’impératif de protéger la biodiversité? Comment ne pas être interpellé par la dégradation de l’environnement dans un contexte où les médias nous décrivent une situation qui semble s’aggraver chaque jour et toucher tous les aspects de la vie humaine, particulièrement en Afrique. Pourtant, avant la fin des années 1970, on faisait peu de cas, au sein des institutions bilatérales et multilatérales de crédit, du caractère limité des ressources naturelles. Du point de vue des économistes de la Banque mondiale cependant, des «avancées considérables», sur les plans de la préoccupation environnementale, de la recherche sur l’écologie et de l’application des principes de l’économie néoclassique à «l’environnement» se sont réalisées depuis la décennie 1970. Pour eux, la Stratégie mondiale de conservation –World Conservation Strategy– publiée en 1 Évaluations du ministère du Tourisme de la République de Madagascar, 2000. 36 tion rurale» qui est peu concernée par le tourisme de masse, surtout concentré dans les villes et les sites balnéaires. Pour ou contre l'écotourisme à Madagascar? 1980 par l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles est considérée comme l’événement qui a présidé à l’émergence du «développement durable» et contribué à placer «l’environnement» sur l’agenda des décideurs politiques, autant au Nord qu’au Sud. Nous croyons que ces conditions révèlent un certain nombre d’enjeux que nous proposons d'explorer brièvement. L’écotourisme comme stratégie de conservation Le tourisme de masse est souvent perçu comme une source de dégradation du milieu culturel, social et naturel. Le principal défi repose donc sur une fréquentation qui permettra d’assurer des retombées économiques optimales (revenus, emplois) tout en conservant les ressources. Dans cet esprit, la notion de «tourisme durable» a précédé celle d’écotourisme dans la mesure où la première s’insère dans la démarche du «développement durable» qui vise à ne pas compromettre la pérennité des ressources par des actions présentes. Bien que cet objectif reste vague et général, la définition du «tourisme durable» va dans le même sens , c'est-à-dire qu'il représente un moyen de réaliser le «développement durable». Mais cette forme de tourisme ne représente pas une alternative au tourisme de masse dans la mesure où, si la capacité du milieu le permet, l’objectif demeure l’accroissement du nombre de visiteurs. Bien qu’on suggère d’éviter la dégradation, la raison d’être du «tourisme durable» n’est pas la conservation, mais le «développement», c’est-à-dire la croissance économique. Dans le cas malgache comme dans celui de plusieurs autres pays africains, l’écotourisme apparaît comme un moyen de conserver des ressources naturelles, de stimuler l’économie locale et nationale et de créer des emplois. A contrario, les effets «pervers» de l’écotourisme s’apparentent à ceux du tourisme (importation des intrants, dépendance économique), en plus d’affecter plus précisément ce qu’il est possible de nommer, malgré les risques de simplification, la «popula- L’écotourisme connaît la croissance la plus rapide de toute l’industrie du voyage à Madagascar avec un taux annuel se situant entre 10 et 30% contre une croissance globale du tourisme à 4% par an2. Sur le marché touristique malgache, on note en particulier une hausse de la demande pour les produits écotouristiques axées sur la visite d’aires protégées. Les statistiques d’entrées compilées par l’ANGAP (Association nationale pour la gestion des aires protégées) depuis 1992 traduisent un intérêt de plus en plus marqué pour les parcs et réserves naturelles de l’île. En s’appuyant sur les quelques données touristiques disponibles à Madagascar, il est possible d’évaluer de façon approximative la proportion des écotouristes en comparant le nombre total des visiteurs étrangers pénétrant dans les aires protégées par rapport au total des arrivées touristiques dans une même année. Selon ces calculs, les écotouristes constituent 43% de la demande touristique totale de Madagascar3. La grande majorité des arrivées de touristes étrangers à Madagascar provient de l’Europe (75% des écotouristes et 82% des touristes.) La proportion d’écotouristes (43%) par rapport à la demande touristique totale est appelée à croître compte tenu du potentiel de Madagascar (diversité des paysages, faune et flore, richesse éthno-culturelle, diversité de ses sites naturels: grottes, formations calcaires, aires protégées, etc.) Loin de représenter la panacée du développement, l’écotourisme a contribué de façon marginale à ralentir la dégradation des ressources naturelles à Madagascar et s’est souvent placé en dehors des intérêts de ceux qu’il prétend servir (la population rurale, notamment) au profit des groupes d’acteurs qui possèdent les moyens économiques et politiques les plus importants. De plus, le tourisme et l’écotourisme à Madagascar s’insèrent dans la perspective de l’ajustement structurel du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale. En ce sens, ils visent principalement l’accroissement des entrées de devises, ce qui ne va pas nécessairement dans le sens du développement des communautés locales. Ces conditions placent invariablement le tourisme et l'écotourisme dans une logique principalement économique qui est loin de contribuer à la protection des ressources naturelles et à l'arbitrage d'enjeux sociaux qui ne peuvent être pris en charge par l'économie. ■ Bruno Sarrasin Département d'études urbaines et touristiques. École des sciences de la gestion. Université du Québec à Montréal (Canadá) 2 3 Ministère du Tourisme / ANGAP – 2001. Idem. 37