
P 3
Hors agriculture, l’économie
tourne au ralenti
L’activité au cours du premier
trimestre de cette année a été
fortementԛcontrastée. D’un
côté, un redressement assez
notable de la valeur ajoutée
agricole (+16,4% au lieu de -8,3% en 2012),
de l’autre, un ralentissement des activités
hors agricoles (+3,3% au lieu de +4,4% un
an auparavant). Résultat : le PIB global
aurait progressé de 4,8% au lieu de 2,7% un
an auparavant. Au deuxième trimestre, la
croissance du PIB, porté par la dynamique
agricole, pourrait même atteindre 5,8%. Ces
estimations sont du Haut commissariat au
plan (HCP) qui vient de faire le point sur la
conjoncture au titre des trois premiers mois
de l’année 2013. C’est donc clairement
l’agriculture qui tire la croissance
économique à la hausse. Les activités hors
agricoles, elles, ont connu des fortunes
diverses: cela va du ralentissement de
certaines branches, à la baisse de certaines
autres, en passantԛparԛuneԛlégère
améliorationԛdeԛquelques-unes. Ainsi, le
secteur secondaire (qui comprend
l’industrie, l’énergie et les mines)
a contribué négativement (-0,2
point) à la croissance du PIB,
selon le HCP. Cette contribution
négative s’explique, en premier
lieu, par la poursuite de la baisse
du BTP (bâtiment et travaux publics): -6,5%
de valeur ajoutée, au lieu de -5,7% un tri-
mestre auparavant. Certains chefs
d’entreprises, en catimini, anticipent même
de fortes suppressions d’emplois dans cette
branche d’activité. Les indicateurs de cette
activité sont en tout cas assez parlants: bais-
se de 20,8% des ventes de ciment à fin mars
et petite hausse (2,3%) des crédits aux pro-
moteurs immobiliers. Et comme le BTP est
une grosse locomotive qui tire de nom-
breux secteurs, ceux-ci en sont assez logi-
quement affectés. C’est le cas de la branche
énergie. Sa valeur ajoutée s’est contractée
de 3,8% selon le HCP. En effet, les ventes
d’électricité, sur les deux premiers
mois de l’année, ont globalement baissé de
1,1%. Et la baisse touche tous les types de
clients à l’exception de ceux alimentés
en basse tension, c’est-à-dire grosso modo
le secteur résidentiel. C’est ainsi qu’on
constate que les ventes haute tension, très
haute tension et moyenne tension, soit les
ventes pour l’industrie, ont baissé de 2,9%.
Pareillement, les ventes des produits pétro-
liersԛontԛaccuséԛdes baisses allant jusqu’à
14% pour l’essence et 8% pour le gasoil. En
tout cas, la production de la Samir (car tous
les produits raffinés ne sont pas issus de la
Samir, mais importés) a accusé une baisse
de 24,6% sur les deux premiers mois de
2013. En fait, la baisse de la branche éner-
gie ne résulte pas que des contre-
performances du BTP, mais également
des difficultés de l’industrie. Car, quand les
ventes d’électricité aux clients haute et très
haute tension baissent comme c’est le cas,
cela signifie que des industries comme cel-
les du ciment, par exemple, ont réduit leur
consommation proportionnellement à la
baisse des commandes.
Les Échos (Maroc)
P 3
Analyses
Liquidités: le crédit a du mal à reprendre
Mois après mois, la croissance des créances à l’économie poursuit
son ralentissement. En l’espace d’une année, leur progression est
revenue de 7,6 à 2,1% seulement. Cette décélération significative
incombe principalement à une contraction, plus importante, des
crédits bancaires. De 8,6% en mars 2012, le rythme de progression
dépasse à peine 2% aujourd’hui. Selon les dernières statistiques
monétaires mensuelles de Bank Al
-Maghrib, l’encours des crédits distri-
bués par les banques est revenu en des-
sous de la barre de 700 milliards de DH
(699,6 milliards de DH). Deux princi-
pales raisons expliquent ce ralentis-
sement: le déficit chronique des liquidités
bancaires et surtout la baisse de la deman-
de. Cela se manifeste notamment au ni-
veau des crédits à l’équipement qui, après
une progression de 2,3% en mars 2012, se
sont contractés de 1,3% au terme des trois
premiers mois de 2013. D’ailleurs,
leur encours se réduit de près de 4 mil-
liards de DH pour se fixer à 134 milliards
de DH. La baisse des crédits à l’équipe-
ment est significative puisqu’elle indique
une réduction des investissements des entreprises dans leur outil
productif. Autre source d’inquiétude toujours pour les entrepri-
ses, la réduction de la croissance des facilités de caisse accordées
par leur banque. Justement, le rythme de progression des crédits de
trésoreries a ainsi chuté en un an de 16 à 0,9% seulement pour un
encours qui dépasse à peine 171 milliards de DH. Dans ce sillage,
les créances diverses sur la clientèle bancaire continuent leur ré-
gression (5,8%) à 92 milliards de DH. Seuls les prêts immobi-
liers maintiennent une progression convenable quoiqu’en forte
décélération par rapport aux années du boom immobilier où les
taux de croissance frôlaient les 30%. Aujourd’hui, si les ban-
ques continuent de soutenir les particuliers dans leur achat de loge-
ment, elles ont fermé les robinets pour les promoteurs. Les crédits à
l’habitat se sont améliorés de 10% à fin mars à 153,7 milliards de
DH. A l’inverse, les prêts aux promoteurs n’évoluent que de +0,9%
à près de 69 milliards de DH. Ces évolutions se sont traduites par
la décélération des crédits alloués au secteur privé à 575 milliards
de DH. Une décélération qui a recouvert un ralentissement
des crédits accordés aux entreprises non financières privées (de 6,3
à 0,7%) mais une accélération des prêts octroyés aux ménages (de
6,7 à 8,1%). Les crédits des entreprises
non financières publiques ont pour leur
part baissé de 0,9% à 30 milliards de
DH. Par branche d’activité, le ralentisse-
ment du crédit bancaire recouvre une
baisse de 2,1% pour l’industrie, de
5,6% pour le commerce et de 7,3% pour
les activités financières. A cela s’ajoute
une décélération de 9,9 à 2,8% pour le
BTP et de 18,1 à 11,2% pour l’électrici-
té, gaz et eau. Pour ce qui est des créan-
ces des autres sociétés financières sur
les agents non financiers, elles se
contractent aussi. Les prêts accordés
par les sociétés de financement se sont
réduits de 7,5 à 4,6% et ce, suite au repli
de 4% des crédits à la consommation
aux ménages et à la décélération du crédit bail aux entreprises pri-
vées, de 6,7 à 2,2%. Quant aux crédits accordés par les banques
offshores, ils ont augmenté de 6,4% après la baisse de 14,3% de
mars 2012. Cette hausse est attribuable, selon BAM, à «la progres-
sion des crédits à l’équipement aux entreprises privées, qui ont
quasiment doublé en 2013». Si les crédits bancaires ralentis-
sent, les créances en souffrance poursuivent leur hausse. Au terme
du premier trimestre 2013, leur encours se hisse à 37,3 milliards
de DH, en hausse de 9,2%, soit 2 milliards de DH de plus qu’à fin
décembre 2012.
L’Économiste
La décélération des crédits alloués au secteur
privé recouvre un ralentissement des prêts
accordés aux entreprises non financières pri-
vées (de 6,3 à 0,7%) et une accélération des
prêts octroyés aux ménages (de 6,7 à 8,1%).