«!La notion de coopérative doit être
entendue dans son sens littéral, alors qu’en
Europe celles-ci sont parfois devenues de
très grosses entreprises. »
Le groupe que vous représentez, Danone, a érigé l’Afrique
au rang des priorités en matière de développement
international, notamment par la création d’un pôle Afrique en
2014. Pourtant, le potentiel du continent africain, en
particulier pour l’industrie agroalimentaire, est connu depuis
longtemps. Qu’est-ce qui a déclenché la création de ce
pôle?
La priorité donnée à l’Afrique par Danone est une tendance de
fond, son implantation sur le continent africaine étant
ancienne. Une des premières filiales internationales du groupe
Danone a été la centrale laitière du Maroc dans les années
1950. Ce développement s’est surtout accéléré dans les
années 1990, en Afrique du Sud notamment, puis la prise de
participation de Fan Milk (Ghana) et l’entrée à l’Est avec le
groupe Brookside (Kenya). La création du pôle Afrique, c’est
une prise de conscience d’une dynamique économique et
démographique considérable en Afrique, mais aussi de tout
ce qu’on pouvait apprendre de l’Afrique, en termes de modèle
agroalimentaire et de modèle de développement.
Plus concrètement, comment se traduit ce nouveau
positionnement du groupe Danone sur le continent africain ?
En Afrique, Danone dispose d’un pôle multimétiers, tous
produits, qui pèse 1,3 milliards d’euros, compte une vingtaine
de sites industriels, des systèmes de distribution très variés,
etc.
Formation, innovation, recherche, agriculture.. Comment le
groupe Danone conçoit-il sa coopération avec le continent
africain ?
Une coopération interne au groupe existe. Au-delà, nous nous
adaptons à l’Afrique car les modèles agricoles africains ne
sont pas les mêmes qu’en Europe. Nous tâchons de
fonctionner sur la base d’une combinatoire entre nos
connaissances, les institutions locales et des instituts de
recherche européens en collaboration avec les ONG.
En 2010, Danone Egypte a lancé un projet de coopératives
laitières favorisant l’accès de 5 000 producteurs aux
marchés. Le modèle coopératif est-il de nature à sécuriser
durablement les circuits d’approvisionnement? Plus
généralement, comment structurer la chaîne de valeur
agroalimentaire en Afrique ?
La notion de coopérative doit être entendue dans son sens
littéral, alors qu’en Europe celles-ci sont parfois devenues de
très grosses entreprises. Elle comporte une base villageoise,
regroupe des petits producteurs en vue de regrouper des
compétences, des ressources et créer des synergies par
rapport au circuit de production. Nous avons de nombreux
projets de ce type, comme en Algérie avec des petits
fermiers. Je ne veux pas opposer le modèle des petits
fermiers au développement de l’Afrique par rapport à ses
besoins agricoles à moyen et long terme. Nous devons aider
la petite agriculture, car c’est un pilier et le modèle coopératif
y est important. Toutefois, il faut aussi participer au
développement d’une agriculture moyenne et de grandes
fermes. Nous essayons de parvenir à cet équilibre. En Algérie,
nous voulons doubler notre chiffre d’affaires et tripler nos
productions de lait de manière à diminuer notre dépendance à
l’importation de poudre de lait. Cette accélération de la
production passera autant par les petits fermiers, les fermes
de taille moyenne et les grandes fermes. Il s’agit d’un point
essentiel: le tissu social des petits fermiers est fondamental
sur le plan historique et culturel, mais il faut faire évoluer de
manière vertueuse ce modèle.