2 - La philosophie du 17ème siècle

publicité
QUINZIÈME SUJET
LIBERTINS ET SCEPTIQUES AU 17ÈME SIÈCLE
Par le mot de libertin, je n’entends ni un huguenot, ni un athée,
ni un catholique, ni un hérétique, ni un politique,
mais un certain composé de toutes ces qualités.
François Garasse (1585-1631)
La Doctrine curieuse des beaux esprits
de ce temps, ou prétendus tels, 1623
I
PRÉSENTATION
1 - Une nouveauté philosophique au 17ème, la montée de l’incroyance et de l’irreligiosité
personnelle
2 - L’existence d’une nébuleuse d’auteurs et de personnages qualifiés de libertins, de sceptiques
et d’athées
3 - Mais de grandes difficultés pour étudier ces courants d’idées
II
PRÉSENTATION DES LIBERTINS ET SCEPTIQUES DU 17ÈME SIÈCLE
1 - Des termes fourre-tout, équivalents à ceux d’hérétiques ou de sorciers à d’autres époques
2 - Le 17ème siècle, un temps de restauration des hiérarchies chrétiennes
3 - En contrepoint, l’existence de contre-courants qualifiés de libertins et de sceptiques
4 - Un terme d’opposition péjoratif, sans unité philosophique
5 - Deux catégories : les contestataires de l’ordre moral et les contestataires de la pensée
6 - Les libertins philosophiques ne forment pas un mouvement philosophique cohérent et unitaire
7 - C’est la convergence de tendances plurielles, souvent contradictoires et antagonistes
8 - Une pluralité de libertinages qui ont surtout en commun leur anti-christianisme
9 - Des milieux fonctionnant en cercles fermés
10 - Attention à ne pas en faire une “franc-maçonnerie” ou à fantasmer sur des société secrètes
athées
11 - Un libertinage philosophique se distinguant fortement du libertinage de mœurs
12 - Un phénomène social qui touche plus particulièrement la France
13 - Après la mort de Louis XIV, l’évolution du terme vers un registre amoureux et érotique
III
LA PHILOSOPHIE DU 17ÈME SIÈCLE, PHILOSOPHIE LIBERTINE ?
1 - Le paradoxe de la philosophique du 17ème
2 - La plupart de nos philosophes du 17ème peuvent être qualifiés de libertins
3 - S’ils correspondent à l’attitude, ils s’en distinguent philosophiquement pour la plupart
4 - Une grande partie de leurs développements sont mêmes anti-libertins et sceptiques
5 - Il y a donc autonomie des philosophes “libertins” au sein de la philosophie du 17ème siècle
6 - Mais dont de nombreux développements philosophiques serviront aux libertins et sceptiques
IV
LE LIBERTINAGE DE MŒURS, UN LIBERTINAGE D’IRRELIGIOSITÉ
1 - Le premier libertinage : le libertinage de mœurs (libertinage non-philosophique)
2 - L’irreligiosité aristocratique, de l’impiété plus que de l’athéisme
3 - Les deux faces de ce libertinage à l’exemple du Tartuffe et du Dom Juan de Molière
4 - Quelques uns de ses représentants :
A - Théophile de Viau (1590-1626), proche des thèses des aristotéliciens padouans
B -François Le Métel de Boisrobert (1592-1662)
C - Marc-Antoine Girard de Saint-Amant (1594-1661)
D - Jacques Vallée Des Barreaux (1599-1673)
E - Tristan L'Hermite (1601-1655)
5 - Plus des attitudes qu’une conviction ou des positions philosophiques
6 - Plus une non-adhésion aux croyances du corps social qu’une adhésion positive
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 297
V
LE LIBERTINAGE SCEPTIQUE
1 - Le premier libertinage philosophique, celui du scepticisme
2 - Un phénomène qui touche surtout la bourgeoisie et les milieux parlementaires
3 - Ce n’est pas plus un libertinage subversif, qui ne conteste pas les valeurs morales
4 - Un libertinage sceptique touchant sur la religion terrestre plus que sur dieu
5 - La conséquences de la réforme, des guerres de religion autant que des grandes découvertes
maritimes, de la science nouvelle et la redécouverte de l’Antiquité
6 - Une tradition nourrie de scepticisme montaignien
7 - Une tendance au doute sceptique et relativiste face aux affirmations dogmatiques
8 - Qui évoluera vers un doute sceptique rationaliste, sous l’effet du développement de la science
9 - Quelques auteurs représentatifs
A - Pierre Charon (1541-1603)
B - François de La Mothe Le vayer (1588-1672)
C - Saint-Evremond (1616-1703)
VI
LE LIBERTINAGE ARISTOTÉLICIEN, NATURALISTE, ANIMISTE ET “MATÉRIALISTE”
1 - Un deuxième libertinage philosophique, naturaliste et “matérialiste”
2 - Un libertinage aussi qualifié de libertinage érudit
3 - Un courant nourri des aristotéliciens padouans, notamment de Pomponazzi
4 - Ainsi que du néoplatonisme ficéen et paracelsien de la Renaissance
5 - Quelques uns des représentants du courant padouan
A - Lucilio Vanini (1585-1619)
B - Cesare Crémonini (1550 env.-1631)
C - Gabriel Naudé (1600-1653)
D - Théophile de Viau (1590-1626)
E - Cyrano de Bergerac (1619-1655) ?
6 - Dans l’aristotélicisme padouan, des conceptions proches d’un naturalisme animiste
7 - Le cas du Theophrastus redivivus, ou Théophraste résuscité de 1659
8 - D’aristotélicien, ce libertinage deviendra de plus en plus matérialiste au sens du 17ème siècle
9 - L’influence des thèses de Descartes, Hobbes et Spinoza
10 - Un naturalisme matérialiste ouvrant la voie à l’athéisme
VII
LE LIBERTINAGE DÉISTE
1 - Le troisième libertinage philosophique, un libertinage d’inspiration déiste
2 - La critique déiste du christianisme, au nom d’une religion naturelle
3 - Le dieu de la nature contre le dieu de La Bible
4 - Une tradition nourrie d’auteurs antiques, comme Celses
5 - Le cas des Quatrains du déiste
6 - Quelques uns des représentants de ce courant
A - Herbert de Cherbury (1583-1648)
B - John Locke (1632-1704)
C - Guillaume Amfrye de Chaulieu (1639-1720)
D - Fontenelle (1657-1757)
E - John Toland (1670-1722)
VIII
LE LIBERTINAGE ÉPICURIEN POST-GASSENDI
1 - Le quatrième libertinage philosophique, celui de l’épicurisme post-Gassendi
2 - Une double lecture possible de l’atomisme de Gassendi
3 - Une sorte de retour à l’épicurisme au sens moral et éthique
4 - La lecture matérialiste de l’atomisme de Gassendi
5 - Quelques uns de ses représentants
A - François Bernier (1625-1688)
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 298
B - Mme Deshoulières (1637-1694)
C - G.B. de Saint Romain
D - Guillaume Lamy (1644-1683)
E - Nicolas de Blégny (1652-1722)
IX
LE LIBERTINAGE CRITIQUE
1 - Le cinquième libertinage philosophique, celui de la critique des religions positives
2 - Un point commun de tous les libertinages, ainsi que du côté des philosophes classiques
3 - On parle parfois de libertinage critique pour désigner cette attitude
4 - Les éléments de cette critique
A - La critique des miracles
B - Les contradictions de La Bible
C - L’illusion de l’apologétique
D - Les contradictions rationnelles et naturalistes
E - La réfutation que tous les peuples croient en dieu, ce n’est pas une croyance innée
F - Il n’y a pas forcement de valeurs communes dans les religions
G - La religion n’est pas le fondement de la morale
5 - Quelques uns des ses représentants les plus éminents
A - Gabriel Naudé (1600-1653)
B - François de La Mothe Le Vayer (1588-1672)
C - Isaac de La Peyrère (1594-1676)
6 - Une critique rationaliste et non plus métaphysique
7 - Une attitude nourrie du scepticisme montaignien et de l’empirisme baconien
8 - Un mouvement important en Angleterre, contribuant au développement du déisme
9 - En France, un sommet de cela sera le Dictionnaire historique et critique de Bayle, de 1695
X
CONCLUSION
1 - Une postérité philosophique plurielle en fonction de chaque courant
2 - Mais une postérité générale, celle d’une libre pensée annonciatrice des Lumières
3 - Une des ailes radicales de la critique de la religion traditionnelle et de la croyance
4 - Ils contribueront à l’autonomisation morale de l’homme face aux autorités religieuses
5 - La disparition de leur étiquette de libertin au début du 18ème siècle
ORA ET LABORA
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 299
Document 1 : Historiquement, les libertins et les sceptiques du XVIIème nous sont d’abord connus par leurs
adversaires religieux, comme Marin Mersenne (avec L’Impiété des déistes, athées et libertins de ce temps,
combattue et renversée de point en point par des raisons tirées de la philosophie et de la théologie, de
1624, et La vérité des sciences contre les septiques ou Pyrrhoniens, de 1625), et surtout en France le très
redouté jésuite François Garasse (1585-1631). Celui-ci déploya une extraordinaire énergie pour lutter contre
les protestants, les hérétiques et les libertins, croisade dans laquelle l’ardeur de sa foi n’avait d’autre
équivalent que sa mauvaise foi ! Dans sa lutte contre les libertins, il manqua de peu d’envoyer Théophile de
Viau au bûcher. Il mena aussi de violentes querelles contre l’Université de Paris (de tradition gallicane, donc
très opposée aux jésuites d’allégeance romaine).
J’appelle libertins nos ivrognets, moucherons de tavernes, esprits insensibles à la piété,
qui n’ont d’autre Dieu que le ventre, qui sont enrôlés en cette maudite confrérie que
s’appelle la Confrérie des Bouteilles. Il est vrai que ces gens ne croient aucunement en
Dieu, haïssent les huguenots et toutes sortes d’hérésies, ont quelquefois des intervalles
luisants, et quelque petite clarté qui leur fait voir le misérable état de leur âme ; craignent
et appréhendent la mort, ne sont pas du tout abrutis dans le vice, s’imaginent qu’il y a un
enfer, mais au reste ils vivent licencieusement, jettant la gourme comme jeunes poulains,
jouissant du bénéfice de l’âge, s’imaginant que sur leurs vieux jours Dieu les recevra à
miséricorde, et pour cela sont bien nommés quand on les appelle Libertins, c’est comme
qui dirait apprentis de l’athéisme.
François Garasse (1585-1631)
La Doctrine curieuse des beaux esprits de ce temps, ou prétendus tels, 1623
Document 2 : Proche des thèses des aristotéliciens padouans, Théophile de Viau est né en 1590 et mort en
1626 à Paris. Protégé du roi Louis XIII, il fut cependant chassé de France à cause de ses mœurs indignes.
Après un voyage en Angleterre, il revint en France où des poèmes licencieux sont publiés sous son nom.
Sur dénonciation des Jésuites, il est condamné à apparaître pieds nus devant Notre Dame de Paris pour y
être brûlé vif. Il se cache et tente de fuir en Angleterre mais est rattrapé et enfermé à la Conciergerie. Il y
reste deux ans ; deux ans durant lesquels de nombreux prêtres s’évertuent grâce à des dizaines d’analyses
de textes de trouver des allusions à la sodomie dans ses textes. Sa condamnation à mort est commuée en
exil perpétuel, et Théophile finira ses jours à Chantilly, sous la protection du Duc de Montmorency. Il fut un
des poètes les plus lus au XVIIème siècle mais fut ensuite oublié. Il fut redécouvert par un autre Théophile,
Théophile Gautier.
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 300
Document 3 : Autre libertin, à la fois de mœurs et d’érudition, Jacques Vallée Des Barreaux (1599-1673).
Ses contemporains l’ont appelé le "très philosophe des Barreaux", mais aussi "l'illustre débauché". Il fut l’ami
de Molière et de Boileau. À travers sa poésie, on trouve des thématiques matérialistes et athées. Pour lui, la
vie est une souffrance et aboutit à la mort, au retour au néant.
La vie est un songe
Tout n'est plein ici bas que de vaine apparence,
Ce qu'on donne à sagesse est conduit par le sort,
L'on monte et l'on descend avec pareil effort,
Sans jamais rencontrer l'état de consistance.
Que veiller et dormir ont peu de différence,
Grand maître en l'art d'aimer, tu te trompes bien fort
En nommant le sommeil l'image de la mort,
La vie et le sommeil ont plus de ressemblance.
Comme on rêve en son lit, rêver en la maison,
Espérer sans succès, et craindre sans raison,
Passer et repasser d'une à une autre envie,
Travailler avec peine et travailler sans fruit,
Le dirai-je, mortels, qu'est-ce que cette vie ?
C'est un songe qui dure un peu plus qu'une nuit.
Jacques Vallée Des Barreaux (1599-1673)
Document 4 : François dit Tristan L'Hermitte (1601-1655), fut célèbre pour ses poésies, ses pièces de
théâtre et ses écrits romanesques divers. Il fréquentait l’entourage du duc d’Orléans, Gaston d’Orléans,
troisième fils d’Henri IV et de Marie de Médicis. Il est élu à l’Académie française en 1649.
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 301
Document 5 : Un autre célèbre libertin de mœurs du 17ème siècle fut l’écrivain et musicien Charles
Coypeau d’Assoucy (1605-1677). Amant pour un temps de Cyrano de Bergerac dans les années 1640, il fut
souvent emprisonné pour grivèlerie, dettes de jeu ou propos outrageants, mais surtout pour ses mœurs,
notamment homosexuelles. Il fut arrêté en 1655 à Montpellier où la dénonciation de ses mœurs faillit le
mener au bûcher. Il fut emprisonné à plusieurs reprises pour sodomie en 1652, 1655 et 1673, et à Rome en
1667, il dut faire face à un procès pour athéisme, dont il sorti vainqueur au début de l’année 1669 après
quinze mois de prison et quitta Rome, muni d’une médaille en or à son effigie offerte par le pape Clément IX.
D’Assoucy raconta ses errances dans les Avantures burlesques de Dassoucy qui fut publié en 1677, dans
lequel il tourne en ridicule la critique contre les libertins et les sceptiques.
Cette maladie dans l'homme est un regorgement de Sciences... C'est pourquoy ceux qui
en sont atteints sont ordinairement éclairez de belles Lettres, très sçavans dans les
affaires de ce monde-cy, mais très ignorans de ce qui se fait en l'autre. Comme ils ne
croyent ny Dieu ny Diable, ils ne croyent point aussi d'immortalité de l'Âme ; et ce qui est
de plaisant en eux, c'est que, bien qu'il n'y ait point d'homme si vil ny si sot qui ne se
croye au-dessus du plus parfait de tous les animaux; ceux-cy, avec toute leur superbe et
leur esprit, ne font aucune différence entre leur Âme et celle de leur cheval. Ils ne
connoissent d'autre bien dans la vie que les Voluptez qu'ils prennent sans scrupule, mais
avec réserve, et se servent de la tempérance pour en attirer la convoitise, et en
augmenter le plaisir. Ils ne laissent pas de fuir les crimes et de suivre la vertu, pource que
leur impiété n'empesche pas que leur sagesse ne s'étende sur les choses humaines: au
contraire selon le monde; ceux-cy ont passé dans l'antiquité pour les plus sages de tous
les temps et nous en avons veu du nostre, qu'il ne faut pas nommer, qui ont bien montré
ce qu'ils sçavoient faire [...] On dit que l'Astrologie et la Médecine portent en eux les
monstrueuses semences de cette pitoyable erreur. Il en pourroit bien estre quelque
chose, parce que la pluspart de ceux qui en font profession donnent beaucoup à la
Nature. Voilà ce que je sçay des Athées parfaits, et dont je ne parle que par oüy dire, car
si j'en ay fréquenté je ne m'en suis point apperçù. Ce sont des gens abstraits et parlans
peu, qui ne se découvrent point, et qui gardent pour eux ce qu'ils sçavent, comme la
pierre philosophale, enflez de superbe et de la vanité des Sciences, qui ne font cas que
d'eux-mesmes, et méprisent le reste des hommes.
Les pensées de Monsieur Dassoucy dans le saint-office de Rome
Aventures burlesques de Dassoucy, 1677
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 302
Document 6 : Deux symboles des libertins de mœurs, les personnages de Tartuffe (à gauche) et de Dom
Juan (à droite) de Molière.
Ah ! pour être dévot, je n'en suis pas moins homme.
Tartuffe, Acte III, scène 3, vers 144 ou 965
LA STATUE : Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi.
DOM JUAN : Oui. Où faut-il aller ?
Dom Juan ou le Festin de Pierre, Acte V, scène 5
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 303
Document 7 : Portrait de Gabriel Naudé (1600-1653) par Nicolas Régnier (1591-1667), vers 1633. En 1639,
il publia son livre le plus célèbre, Considérations politiques sur les Coups d’État. Ce petit traité de
machiavélisme appliqué fut publié de manière confidentielle à Rome, dans lequel, en plus de ses réflexions
sur les coups d’états, Gabriel Naudé explique le rôle des "inventions et supercheries" grâce auxquelles les
religieux et les politiques manipulent le peuple pour assurer leur pouvoir, profitant de sa stupidité et de ses
croyances.
Document 8 : Portrait de François La Mothe Le Vayer.
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 304
Document 9 : Portrait de Charles de Marguetel de Saint-Denis de Saint-Évremond (1614-1703), circa 1690,
portrait par Sir Godfrey Kneller (1646-1723). Entre autres-choses, on lui doit en 1684, un Discours sur
Épicure (1684)
Document 10 : Portrait du médecin Nicolas de Blegny (1652-1722), il s’inspira de l’atomisme gassendien
dans un sens matérialiste.
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 305
Document 11 : Un des précurseurs du déisme fut en Angleterre Edward Herbert (1583-1648), 1er baron de
Cherbury. Ci-dessous à gauche, portrait par William Larkin, ca 1609-1610. Cet ami de Grotius et de
Mersenne, qui fut un correspondant de Gassendi et de Descartes, publia en 1624 sur les conseils de
Grotius, son livre le plus célèbre, le De Veritate. Inspiré du stoïcisme, il rejette dans ce livre la révélation et
soutient que par la raison éclairée, l’homme peut atteindre par lui-même les vérités religieuses
fondamentales, qu’il réduit à cinq, innées dans l'esprit de l'homme : la croyance en un Être suprême, celle
de la nécessité de lui vouer un culte, celle de la vie pieuse et vertueuse comme meilleure forme de culte,
celle de la repentance, et celle de la récompense et du châtiment dans l'autre monde. Rejetant toute
herméneutique biblique, il préconisa une religion du laïc, facilement accessible au commun des mortels
(Religio laici, and Ad sacerdotes de religione laici, 1645). En 1639, Mersenne traduisit de façon anonyme, et
assez libre le De veritate ou théorie de la vérité.
Document 12 : Ci-dessus à droite, le seul portrait connu de John Toland, tel qu'il apparaît dans le troisième
volume de l’écrivain allemand U.G. Thorschmid, Versuch einer Vollständige Engländische (1766). John
Toland (1670-1722) eut une influence majeure sur toutes les Lumières européennes, notamment sur La
Mettrie, Voltaire, le baron d'Holbach, Buffon et Diderot, lequel puisa dans sa pensée une bonne partie de
son matérialisme. En 1696, il publie son célèbre Christianity Not Mysterious (Le Christianisme sans
mystères), dans lequel il s'efforce de montrer qu'il n'est pas nécessaire de croire dans certaines doctrines
bibliques pour les comprendre mais qu'au contraire elles sont parfaitement intelligibles pour la raison
humaine sans l'aide d'aucune révélation divine. L'ouvrage déclenche un flot de protestations. Mais le livre le
plus célèbre de Toland est le Pantheisticon, tiré à seulement cinquante exemplaires,à Londres en 1720. Il fut
distribué, de la main à la main, par son auteur à ses amis de l’Europe des Lumières (libres-penseurs, francsmaçons, déistes, matérialistes ou libertins anglais). C’est l’ouvrage le plus engagé de Toland, mettant en
scène un banquet philosophique à la façon des Anciens et des agapes maçonniques, le Pantheisticon
développe les idées scientifiques, morales, politiques et métaphysiques les plus avancées de son époque,
s’inspirant tout à la fois de Newton, Locke et Spinoza.
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 306
POUR APPROFONDIR CE SUJET, NOUS VOUS CONSEILLONS
Livres généraux sur les libertins et sceptiques du 17ème siècle
- Le rire des libertins dans la première moitié du XVIIe siècle, Bruno Roche, Éditions H. Champion, 2011
- Descartes et le libertinage, Anne Staquet, Éditions Hermann, 2009
- Skepsis. Le Débat des modernes sur le scepticisme, Gianni Paganini, Vrin, 2008
- Prudence et subversion libertines, la critique de la raison d’État chez François de La Mothe Le Vayer,
Gabriel Naudé et Samuel Sorbière, Sophie Gouverneur, Éditions Honoré Champion, 2005
- Les philosophies clandestines à l’Âge classique, Gianni Paganini, PUF, 2005
- Scepticisme, clandestinité et libre pensée, sous la direction de G. Paganini, M. Benitez et J. Dybikowski,
Éditions Honoré Champion, 2002
- Dis/simulations. Jules-César Vanini, François La Mothe Le Vayer, Gabriel Naudé, Louis Machon et
Torquato Accetto, Jean-Pierre Cavaillé, Éditions Honoré Champion, 2002
- Libertins du XVIIème siècle (4 tomes), anthologie de Jacques Prévot, Gallimard , 1998
- La légende de Don Juan : son évolution dans la littérature des origines au romantisme, Georges
Gendarme de Bévotte, Slatkine, 1993
- Les libertins érudits en France au XVIIe siècle, Françoise Charles-Daubert, PUF 1988
- L'âge libertin, Claude Reichler, Éditions de Minuit, 1987
- Dom Juan de Molière : une dramaturgie de rupture, Robert Horville, Larousse, 1972
- La libre pensée française de Gassendi à Voltaire, John Stephenson Spink, Éditions sociales, 1966
- Les libertins du XVIIème siècle, Antoine Adam, Buchet-Chastel, 1964
- Le libertinage érudit dans la première moitié du XVIIème siècle, René Pintard (1943), Slatkin, 2000
- L’impiété des déistes, Mersenne Marin, éd. D. Descotes - Champion, 2005
Livres sur quelques libertins du 17ème siècle
- Dassoucy et les garçons, Jean-Luc Hennig, Fayard, 2011
- John Toland (1670-1722). Un des modernes, Régis Blanchet, Éditions du Prieuré, 1996
- Saint-Amant et la Normandie littéraire, Jacques Bailbé, Champion, 1995
- Saint-Évremond, ou le bon usage des plaisirs, Claude Taittinger, Perrin, 1990
- La vie et l'œuvre de J.C. Vanini, Émile Namer, Librairie Philosophique Vrin, 1980
- La libre pensée dans l’œuvre de Tristan l’Hermite, Doris Guillemette, Nizet, 1972
- Théophile de Viau et la libre pensée française en 1620, Antoine Adam (1935), Slatkine Reprints, 2008
Association ALDÉRAN © - cycle de cours “La philosophie du 17ème siècle” - Code 4311 - 09/01/2012 - page 307
Téléchargement