WHERE THE RAIN FALLS (Là où TombE LA pLuIE) : cHANgEmENT

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Rapport sur la
Politique Globale
WHERE THE RAIN FALLS (Là où tombe la pluie) :
changement climatique, sécurité alimentaire
et des moyens de subsistance et migration
Un projet d’étude conduit dans 8 pays pour mieux comprendre les
précipitations, la sécurité alimentaire et les mouvements de populations.
KOKO WARNER, TAMER AFIFI, KEVIN HENRY, TONYA RAWE, CHRISTOPHER SMITH, ALEX DE SHERBININ
Soutenu par :
CARE FRANCE
L’Université des Nations Unies
Institut
de
l'Université
des
Nations
Unies
pour
l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS)
Centre pour un réseau international d’information
sur les sciences de la Terre à l’Institut de la Terre de
l’Université Columbia.
Décembre 2012
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2012 Lars Johansson
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Where the rain falls (Là où tombe la
pluie) : changement climatique, sécurité
alimentaire et des moyens de subsistance
et migration
KOKO WARNER, TAMER AFIFI, KEVIN HENRY, TONYA RAWE, CHRISTOPHER SMITH, ALEX DE SHERBININ
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Remerciements
Le présent rapport et les différentes activités du projet ont pour
(tous deux du Centre pour le changement mondial, Dhaka,
but de mieux faire comprendre l’incidence du changement
Bangladesh), M. Selim Reza Hassan (CARE Bangladesh)
climatique sur la sécurité alimentaire et la mobilité humaine
et le Dr. Benjamin Etzold (Université de Bonn), chargés du
et de renforcer les mesures pour y répondre. Il a été publié
travail de terrain au Bangladesh, ainsi qu’Andrea Milan,
dans le cadre du projet « Where The Rain Falls : Changement
pour ses apports sur le terrain, le Dr. Edward Salifu Mahama
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
(Université pour les études sur le développement, Ghana)
et migration » (« Rainfalls »), lequel a été rendu possible
et le Dr. Christina Rademacher-Schulz (UNU-EHS) qui ont
grâce à une généreuse contribution du groupe AXA et de
effectué le travail de terrain au Ghana, le Dr. Sergio Ruano
la Fondation John D. et Catherine T. MacArthur sous la
(consultant indépendant) et M. Andrea Milan pour le travail
responsabilité de Alice Steenland, John Slocum et Milena
de terrain au Guatemala, ainsi que le Dr. Emma T. Liwenga
Novy-Marx.
(Institut pour l’évaluation des ressources, Université de Dar
es-Salaam, Tanzanie). Le Dr. Koko Warner (UNU-EHS) a
Nous voudrions saluer ici les chercheurs dont les études de
collaboré en tant que directeur scientifique des recherches «
cas développé dans le cadre du projet ont inspiré ce rapport
Rainfalls ». Le Dr. Tamer Afifi (UNU-EHS) et M. Kevin Henry
de synthèse. Nous remercions les auteurs suivants pour
(CARE France) ont coordonné respectivement les recherches
leurs contributions : M. Panomsak Promburom (Centre de
et le projet.
recherche sur les systèmes de ressources agricoles) et le
Dr. Patrick Sakdapolrak (Université de Bonn) qui ont mené
Nous voudrions remercier les membres du Groupe technique
les recherches de terrain en Thaïlande, M. Raúl Ho (M.Sc
consultatif de Rainfalls pour leurs précieux apports : le
– consultant indépendant) et M. Andrea Milan (UNU-EHS)
Professeur Susan Martin (Institut pour l’étude des migrations
pour leurs recherches de terrain au Pérou, le Dr. Janakaraj
internationales de l’Université de Georgetown, États-Unis),
Murali (TERI Inde) et le Dr. Tamer Afifi (UNU-EHS) pour
le Professeur émérite Roger Zetter (Université d’Oxford),
leurs recherches en Inde, M. Nguyen Cong Thao (Institut
le Dr. Mathieu Choux (Groupe AXA), le Dr. Tara Shine
d’anthropologie, Académie vietnamienne des sciences
(Fondation Mary Robinson), Mme Agnes Otzelberger
sociales – doctorant à statut ABD de l’Université de Hawaï
(Réseau CARE International sur la pauvreté, l’environnement
à Manoa, États-Unis), le Dr. Nguyen Viet Khoa (Centre
et le changement climatique), le Dr. Youba Sokona (Centre
national d’extension agricole) et le Dr. Kees van der Geest
africain pour la politique climatique) et le Dr. Fatima Denton
(Université d’Amsterdam) pour leur travail au Viet Nam,
(CRDI).
le Dr. Ahsan Uddin Ahmed et le Dr. Sharmind Neelormi
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Nous tenons aussi à remercier les experts suivants, qui ont
nationale de l’Altiplano – Puno – Pérou), le Dr. Luis Suárez
participé à la relecture du présent document : le Dr. Saleemul
Salas (Université Alas Peruanas de Huancayo, Pérou), le Dr.
Huq (IIED et ICCCAD), M. Chipo Plaxedes Mubaya (UDSM
Juan Torres Guevara (Université nationale pour l’agriculture
– IRA, Tanzanie), M. Ced Hesse (IIED), le Dr. Marloes Mul
– La Molina – Soluciones Prácticas – ITDG, Pérou), le Dr.
(UNESCO-IHE), le Dr. Siza Tumbo (Sokoine University of
Susan Cutter (Université de Caroline du Sud, États-Unis), le
Agriculture, Tanzanie), le Dr. rer. pol. Wolfgang-Peter Zingel
Dr. Pablo Lucas (CFPM), M. Vikram Kolmannskog (Conseil
(Südasien-Institut Abteilung Internationale Wirtschafts- und
norvégien pour les réfugiés), M. David Waskow (Oxfam) et
Entwicklungspolitik), le Dr. Ainun Nishat (Université BRAC,
un relecteur anonyme travaillant pour le Fonds de recherche
Bangladesh), le Dr. Rezaur Rahman (Institut pour la gestion
AXA.
de l’eau et des inondations et Bangladesh University of
Engineering and Technology), le Dr. A.S.R.A.S. Sastri (Indira
Nous aimerions aussi remercier les experts suivants, qui ont
Gandhi Agricultural University, Inde), le Dr. Anwara Begum
participé directement à la relecture des huit études nationales
(Bangladesh Institute of Development Studies), le Dr. Osman
et dont les contributions ont permis d’améliorer la qualité
Kanton (UDS, Ghana), le Dr. Abdul-Korah (College of Saint
globale du présent rapport : le Dr. Chilanga Asmani (UNFPA),
Rose, États-Unis), Dr. Benjamin Schraven (DIE, Allemagne),
le Dr. Stephen Nindi, le Prof. Allan M. Findlay (Faculté pour
Dr. Irit Eguavoen (ZEF Bonn, Allemagne), Dr. Patrick Laux
l’environnement, Université de Dundee, Écosse), M. Tasneem
(Institut de technologie de Karlsruhe, Allemagne), Mme.
Siddiqi (The Asia Foundation), le Prof. Murari Lal (CESDAC),
Olivia Dun (Université de Sydney, Australie), Mme Jane Chun
le Dr. Bandi Venkateswarlu (CRIDA), le Dr. Anil Kumar
(PNUD), M. Nguyen Chi Quoc (OIM), M. Peter Mackay
Singh (ICAR), M. Shirish Sinha DEZA SINSH (Ambassade de
(consultant en changement climatique), NGÔ THI PHUONG
Suisse en Inde), le Prof. Stephen Kendie (Université de Cape
Lan (Université nationale du Viet Nam – Hô-Chi-Minh-
Coast, Ghana), le Dr. Issac Agyemang (FIDS, Ghana), le Dr.
Ville), le Dr. NGUYEN HIEU Trung (Université de Can Tho
Felix Asante (ISSER, Ghana), Mr. Koos Neefjes (PNUD), le
et Institut DRAGON – Mékong), le Dr. Karl Husa (Université
Dr. James Taylor (Université d’Adélaïde, Australie), le Dr.
de Vienne), M. Vitoon Panyakul (Greennet), le Dr. Jonathan
Huynh Truong Huy (Faculté des sciences économiques et
Rigg (Université de Durham, Faculté de géographie), le
Dr. Edwin Castellanos (Institut pour l’environnement et
la biodiversité, Université del Valle, Guatemala), le Prof.
Claudia Donis (Université de sciences sociales d’Amérique
latine, Guatemala), le Prof. Alipio Canahua (Université
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d’administration des entreprises, Université de Can Tho,
Brach et Mme Andrea Wendeler, sans oublier Mme Verena
Viet Nam), le Prof. Hugo Graeme (Université d’Adélaïde), le
Russo et M. Serge Birtel.
Dr. Sureeporn Punpuing (Institut d’études sur la population
et les sciences sociales, Université de Mahidol, Thaïlande),
- nos collègues du Centre pour le réseau international
Mme Hilda Rivera (Rain Forest Alliance), M. Carlos
d’information sur les sciences de la terre (CIESIN)/Université
Mansilla (Ministère de l’environnement et des ressources
Columbia, le personnel de SIG Cody Aichele, Tricia Chai-
naturelles, Guatemala), le Dr. Juventino Galvez (Institut pour
Onn, Dara Mendeloff, et Sneha Rao, le cartographe Al
l’agriculture, les ressources naturelles et l’environnement,
Pinto, Andrés Gonzalez pour le client de cartes web, Susana
Université Rafael Landívar, Guatemala), le Dr. Katrin Millock
Adamo pour son aide lors de la conception de l’enquête et
(CNRS, École supérieure des sciences économiques, Paris) et
de la stratégie d’échantillonnage et Michael Bell et John Del
le Prof. Anthony Oliver-Smith (Université de Floride, États-
Corral pour leur analyse des données climatiques (Institut de
Unis).
recherche international sur le climat et la société/Université
Columbia).
Les auteurs du présent rapport tiennent aussi à exprimer leur
reconnaissance à :
- CARE France qui s’est chargé de la gestion du projet et
en particulier Mlle Aurélie Ceinos, chargée de programme,
et Mlle Kimberly Bennett, coordinatrice des communications
externes, pour leurs nombreuses contributions à ce projet.
Ce dernier n’aurait pas vu le jour sans le soutien actif
des bureaux de pays de CARE au Bangladesh, en Inde,
en Thaïlande, au Viet Nam, au Ghana, en Tanzanie, au
Guatemala et au Pérou, ainsi que de l’équipe PECCN (Réseau
Pauvreté, Environnement et Changement climatique) de
CARE International et de CARE USA.
- UNU-EHS, en particulier le Dr. Jakob Rhyner, vice-recteur
de l’Université des Nations Unies en Europe (UNU – ViE) et
directeur de l’UNU-EHS, ainsi que l’équipe de l’information
et des communications : le Dr. Alice Fišer, Mme Katharina
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2007 Bill Dowell/CARE
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Table des Matières
Remerciements
6
Synthèse
14
1- Nature et objectif du présent rapport
25
1.1 Que sait-on de l’influence des changements environnementaux
25
sur la mobilité humaine ?
1.2 Rapports entre la variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire/
26
des moyens de subsistance et la mobilité humaine
1.3 De l’utilité de comprendre les décisions en matière de mobilité dans
27
le contexte des changements climatiques
1.4 Nouvelle approche de réflexion et contribution du présent rapport
28
1.5 Portée et limites du présent rapport
29
2- Méthodes multidisciplinaires du projet Where The Rain Falls
30
2.1 Entretiens auprès d’experts
32
2.2 Recherches participatives
33
2.3 Enquête auprès des ménages
34
2.4 Scénarios futurs des précipitations et de la migration tirés de la
35
modélisation axée sur les agents
2.5 Champs de recherche, méthodes et triangulation
35
3- Caractéristiques nationales et des sites de recherche
38
3.1 Critères pour la sélection des pays et des sites
38
3.2 Contexte national
38
3.3 Caractéristiques des sites de recherche
41
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
4- 4. Résultats des études de cas : la migration dans le contexte de la variabilité
44
pluviométrique et de la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
4.1 Thaïlande : grâce à des sources de revenus diversifiées et un accès aux biens
46
et aux services la migration est désormais un choix dans la province de Lamphun
4.2 Pérou : les options en matière de subsistance et les stratégies de migration dans
53
la province de Huancayo varient en fonction de l’altitude et de la proximité avec
les centres urbains
4.3. Viet Nam, delta du Mékong : les populations pauvres de la commune de Hung
58
Than, sans terres et peu qualifiées, n’ont guère d’options, en dépit de la croissance
économique
4.4 Inde : les ménages pauvres de Janjgir-Champa continuent d’utiliser la migration
65
saisonnière pour assurer leur sécurité alimentaire, en dépit de l’irrigation, de
l’industrialisation et des Mesures de protection sociales et économiques
4.5 Bangladesh : la migration est une stratégie d’adaptation clé pour les ménages
70
pauvres de Kurigram, mais les coûts sociaux en sont élevéss
4.6 Ghana : la forte dépendance envers l’agriculture pluviale dans le district de
76
Nadowli explique la persistance de la migration saisonnière comme stratégie
d’adaptation
83
4.7 Guatemala : le manque de diversification des moyens de subsistance et de
possibilités migratoires laisse peu d’options aux habitants de Cabricán
89
4.8 Tanzanie : la migration est une stratégie d’adaptation tant pour les petits
exploitants agricoles que pour les éleveurs qui luttent pour la sécurité alimentaire
dans le même district.t
93
5- Analyse des décisions des ménages en matière de migration à l’heure actuelle
: caractéristiques des ménages et sensibilité à la variabilité pluviométrique et à la
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
93
5.1 Caractéristiques des ménages dans les districts ciblés
98
5.2 La migration : adaptation ou échec de l’adaptation ? Quatre profils de migration
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liée à la pluviométrie
98
La migration comme facteur d’amélioration de la résilience (migration efficace)
99
La migration comme stratégie de survie, mais non de prospérité
99
La migration comme stratégie d’adaptation aggravante et utilisée en dernier recours
100
Impossibilité de migration, difficultés et survie dans les lieux d’origine
102
6-Migration dans le contexte des variabilités pluviométriques et de l’insécurité
alimentaire/des moyens de subsistance futures
102
6.1 Modélisation axée sur les agents (MAA)
104
6.2 Le modèle de migration axé sur les agents de « Rainfalls »l
106
6.3 Scénarios d’anticipation et analyse : modélisation dans le cas du district de
Same, Tanzanie
107
Résultats pour la Tanzanie : migration de 2014 à 2040 selon les scénarios de
précipitation suivants : augmentation de la sécheresse/de l’humidité, très forte
augmentation de la sécheresse/de l’humidité
112
7- Conclusions
115
8- Réflexions pour les décideurs et les praticiens : permettre des choix informés à
l’échelle mondial, national et local
116
8.1 Décideurs mondiaux
120
8.2 Gouvernements et partenaires d’exécution
124
9- Annexe technique
124
9.1 Modélisation axée sur les agents
130
9.2 Cartographie et références
134
10- Notes
141
A propos
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : ©2012 Aurélie Ceinos/CARE
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Synthèse
L’étude «Where The Rain Falls» (« Rainfalls ») explore les
Il est probable que le changement climatique aggrave la
rapports entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire
situation dans certaines régions du monde qui connaissent
et des moyens de subsistance et mobilité humaine sur des
déjà
sites de recherche très divers dans huit pays d’Asie, d’Afrique
L’augmentation de la variabilité pluviométrique et de ses
et d’Amérique latine. Même si le changement climatique a
effets (saisons moins prévisibles, précipitations plus erratiques,
des répercussions sur presque tous les aspects de la sécurité
phénomènes météorologiques inhabituels pour la saison ou
alimentaire – de la production et de la disponibilité des vivres
disparition des saisons de transition) ont des répercussions
à la stabilité de l’approvisionnement, l’accès aux denrées
non négligeables sur la sécurité alimentaire, les moyens de
et à leur consommation – nos recherches se sont limitées
subsistance de millions de personnes et la décision de migrer
aux liens entre l’instabilité des régimes pluviométriques
des ménages vulnérables. Si les décideurs et acteurs du
et de la production alimentaire d’une part et la stabilité de
développement veulent garantir une transition vers un avenir
l’approvisionnement en nourriture d’autre part . L’initiative
plus résilient aux impacts du changement climatique et des
« Rainfalls » est essentiellement axée sur l’étude des
politiques d’adaptation appropriées, ils doivent mieux saisir
circonstances dans lesquelles les habitants des huit sites
les corrélations existant entre le changement climatique,
choisis comme cas d’étude en Amérique latine, en Afrique et
les profils des ménages en terme de sécurité alimentaire
en Asie envisagent la migration comme stratégie de gestion
et des moyens de subsistance et les décisions relatives à la
des risques face à la variabilité pluviométrique et l’insécurité
migration.
des
niveaux
élevés
d’insécurité
alimentaire.
alimentaire/des moyens de subsistance.
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Juin 2013
Le présent rapport apporte six nouvelles contributions aux recherches sur le changement
climatique et la mobilité humaine :
◆ méthodes de recherche de nouvelle génération, combinant méthodes quantitatives et
qualitatives, avec notamment une enquête auprès des ménages, divers outils de recherche
participative (Participatory Research Approach ou PRA) et des entretiens auprès d’experts ;
◆ données empiriques fournies par huit études de cas détaillées menées dans trois régions, en
s’appuyant sur des travaux empiriques antérieurs sur les changements environnementaux et
la mobilité humaine (EACH-FOR, 2009) ;
◆ cartes inédites des impacts du changement climatique, avec répartition des populations et
schémas de migration, représentant certains des principaux processus associés à la variabilité
pluviométrique et certains des grands systèmes humains-écologiques où de tels changements
entraînent une migration ;
◆ cadre analytique pour harmoniser les constatations faites sur huit sites de recherche très
divers afin de répondre à la question : « Dans quelles circonstances les ménages utilisent-ils la
migration comme stratégie de gestion des risques ? » ;
◆ travail de modélisation axé sur les agents pour répondre à la question « Dans quelles
circonstances la variabilité pluviométrique influence-t-elle fortement les futures
migrations ? », mis en pratique pour la première fois sur le site de recherche tanzanien ;
◆ réflexions politiques pour les pouvoirs publics, les institutions multilatérales ou de recherche
et les organisations non gouvernementales qui travaillent directement avec certaines des
populations les plus vulnérables du monde
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Principales constatations : relations actuelles entre la
◆ Au niveau infranational, la diversité des sites de recherche
variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire et des
du projet se traduit par une série de caractéristiques
moyens de subsistance et la migration
géographiques, météorologiques et agro-écologiques. Les
De par leur diversité, les huit cas d’étude ont fourni l’occasion
d’explorer de façon nuancée la question « Dans quelles
circonstances les ménages utilisent-ils la migration comme
stratégie de gestion des risques ? » Pour répondre à cette
question, la recherche a utilisé un cadre d’analyse permettant
d’identifier les grands facteurs qui contribuent à la prise de
décision des ménages selon plusieurs niveaux :
◆ Au premier niveau, le cadre établit des distinctions entre
les huit pays en s’appuyant sur des indicateurs sociaux,
économiques
et
démographiques
qui
s’imposent
au
niveau macro. L’analyse de ces contextes nationaux, qui
présentent des caractéristiques différentes (lesquelles ont
une incidence sur les stratégies de subsistance des ménages,
et notamment sur les décisions relatives à la migration)
a permis de déduire une typologie. Le classement de ces
pays coïncide partiellement avec une typologie régionale
des contextes nationaux. Ainsi, trois des quatre cas d’étude
asiatiques entrent dans la catégorie des pays dynamiques
qui connaissent une pauvreté et une insécurité alimentaire
moyennes à élevées, la Thaïlande faisant exception étant
donné les succès engrangés ces dernières années en termes
de réduction de la pauvreté..
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plus importantes, outre des précipitations annuelles allant
de 560 mm à 1 700 mm, ont trait à : la proximité de villes
ou autres grands centres offrant des opportunités d’emploi
alternatif appréciables (p. ex. des zones industrielles) ;
l’altitude ; la saisonnalité des régimes de précipitations
; le degré de dépendance envers les cultures pluviales par
opposition aux cultures irriguées.
◆ Enfin, les principales caractéristiques qui, au niveau
individuel ou familial, semblent devoir entrer en ligne de
compte dans les prises de décision en matière de migration
ont été répertoriées en s’appuyant sur des données primaires
recueillies lors d’enquêtes auprès des ménages : taille et
composition du ménage ; propriété foncière ; patrimoine
; degré de diversité des moyens de subsistance ; niveaux
d’éducation. Ces caractéristiques mettent en lumière les
facteurs qui influent sur les décisions actuelles ou futures
relatives à la migration et permettent de mieux comprendre
quels sont les ménages qui seront sans doute incapables de
s’adapter aux changements pluviométriques soit in situ soit
par la migration ou au contraire, quels sont les facteurs qui
contribuent à la résilience ou à la vulnérabilité de certains
types de ménage face à ces perturbations.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Observations de terrain
des frontières nationales ; à prédominance masculine, mais
Les recherches de terrain dans les huit pays étudiés ont révélé
avec participation accrue des femmes dans un certain nombre
que :
de pays ; essentiellement le fait de membres individuels au
◆ Pour la grande majorité d es populations rurales des huit
lieux de recherche le changement climatique se traduit
à travers les variations pluviométriques. Ces perceptions
influent sur leurs décisions quant à la gestion des risques.
Les modifications les plus communément citées concernent
les dates, la qualité, la quantité ou la prévisibilité globale
des précipitations, y compris : l’arrivée tardive de la saison
des pluies, d’une durée réduite ; une réduction du nombre
annuel de journées de pluie ; une fréquence accrue des pluies
diluviennes ; une fréquence accrue et une prolongation des
périodes sèches pendant la saison des pluies. Dans nombre de
sein du ménage (l’Inde, où des familles entières (nucléaire)
déménagent, fait exception) ; due à des besoins liés à la
subsistance (revenus du ménage) dans la plupart des pays,
quoiqu’un nombre croissant de migrants cherchent à présent
à améliorer leurs compétences (p. ex. grâce à l’éducation)
dans des pays comme la Thaïlande, le Viet Nam et le Pérou ;
une combinaison de mouvement du type rural-rural et ruralurbain, les destinations les plus fréquentes étant les zones
agricoles plus productives (Ghana, Bangladesh, Tanzanie), les
centres urbains à proximité (Pérou, Inde), les zones minières
(Ghana) ou industrielles (Thaïlande, Viet Nam).
cas, il y a corrélation entre la perception de ces changements
◆ Les ménages ont recours à la migration pour gérer des
et une analyse des données météorologiques locales au cours
risques climatiques comme la variabilité pluviométrique. La
des dernières décennies.
migration – saisonnière, temporaire ou permanente – joue
◆ Les ménages vivant essentiellement de l’agriculture sur
les sites de recherche rapportent dans leur grande majorité
que la variabilité pluviométrique a un effet négatif sur la
production et contribue à l’insécurité alimentaire et des
moyens de subsistance. Les niveaux d’insécurité alimentaire
sur les huit sites varient fortement à cause de facteurs
comme : la quantité totale et les fluctuations saisonnières des
précipitations ; le degré d’intensification de l’agriculture ; le
degré de diversification des moyens de subsistance ; l’accès
des ménages pauvres à des mesures de protection sociale et
autres services d’appui.
un rôle important dans les efforts menés par beaucoup
de familles pour affronter la variabilité pluviométrique et
l’insécurité alimentaire et des moyens de subsistance. D’après
les informations recueillies sur un certain nombre de sites de
recherche, elle a augmenté au cours des décennies passées.
La pluviosité pèse plus directement sur les décisions relatives
à la migration là où la dépendance envers l’agriculture
pluviale est forte, où il n’y a souvent qu’une seule récolte
par an, et où il existe peu de possibilités de diversification des
revenus. En l’absence d’appui au développement de moyens
de subsistance résilient face au changement climatique, la
pression exercée sur les moyens de subsistance tributaires de
◆ L’observation de la migration, phènomène commun aux huit
la pluie influencera sans doute davantage la mobilité à long
sites de recherche, permet de dégager les tendances suivantes,
terme des ménages vulnérables dans les décennies à venir.
la migration est : presque entièrement confinée à l’intérieur
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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◆ La vulnérabilité des ménages face à la variabilité
pluviométrique a un impact sur les résultats en matière de
sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et les
choix et schémas de migration. Les ménages possédant des
biens diversifiés et un accès à des options variées en termes
d’adaptation, de diversification des revenus ou de gestion
des risques (par le biais de réseaux sociaux, de programmes
d’appui communautaires ou gouvernementaux et de
l’éducation) peuvent recourir à la migration de manière à
améliorer leur résilience. Ceux qui ont le moins accès à ce
type d’options (peu ou pas d’opportunités en matière de
diversification des revenus, pas de terres, peu d’instruction)
ont recours à la migration (en général interne) comme
stratégie de survie pendant les périodes de disette. Cette
décision, qui vient s’ajouter à d’autres mesures d’ajustement,
dommageables à long terme,, maintient ces populations en
marge d’une existence décente, ou les y accule.
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Crédit photo : © 2007 Bill Dowell/CARE
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Quatre profils distincts : la migration comme stratégie de
zones rurales de la région pendant les périodes de disette à
gestion des risques
la recherche de nourriture ou d’un emploi qui lui permette de
se la procurer. Le dernier groupe semble être composé de «
L’analyse préliminaire des données de l’enquête sur les
populations piégées » qui luttent pour survivre sur leur lieu
ménages a permis de dégager quatre profils distincts de
d’origine et n’ont pas facilement recours à la migration pour
familles pour qui la migration est une réponse possible à la
s’adapter aux impacts négatifs des facteurs de stress liés aux
variabilité pluviométrique et à l’insécurité alimentaire et des
variations pluviométriques.
moyens de subsistance.
Le premier groupe (que l’on trouve le plus couramment dans
Relation future possible entre la variabilité pluviométrique,
les pays qui sont en mesure de procurer des sources de revenus
la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et la
alternatives et une certaine sécurité alimentaire à la majorité
migration
de leur population) se sert de la migration pour améliorer sa
résilience, par exemple en investissant dans l’éducation, la
Pour mieux comprendre la forte influence que pourrait exercer
santé, les emplois résistant aux changements climatiques et
à l’avenir l’augmentation de la variabilité pluviométrique sur la
la diversification des risques. Pour ces ménages, la migration
mobilité humaine, il est important d’inventorier les différents
s’insère dans un ensemble de stratégies d’adaptation et ils
impacts que des scénarios probables pourraient avoir sur les
se déplacent de façon saisonnière ou temporaire, en général
flux migratoires. La modélisation axée sur les agents est une
pour trouver des emplois non agricoles dans les villes ou à
technique informatique de simulation sociale qui permet à
l’étranger.
l’utilisateur de modéliser le comportement d’organes de
Le deuxième groupe – que l’on trouve souvent dans les
décision individuels ainsi que leurs interactions mutuelles
pays présentant un moindre niveau de sécurité alimentaire
et avec l’environnement. L’utilisation d’un processus de
et possédant moins de possibilités de diversification des
simulation et d’analyses orientées vers l’avenir permet de
revenus – se sert de la migration non pas pour prospérer,
comprendre les circonstances dans lesquelles la variabilité
mais pour survivre. Il se déplace de façon saisonnière dans
pluviométrique risque d’influencer fortement la migration
son propre pays pour trouver du travail (souvent) agricole
vers différents environnements. Les sites qui ont servi de cas
dans d’autres zones rurales. Pour le troisième groupe, dont
d’étude « Rainfalls » sont utilisés comme exemples d’endroits
les conditions de sécurité alimentaire sont encore plus fragiles
où les modifications pluviométriques risquent de contribuer à
et pour lequel les possibilités d’adaptation sont plus rares
un accroissement de l’insécurité alimentaire et de la mobilité
ou leur recherche, peu persévérante, la migration est une
humaine.
affaire de sécurité humaine dans le cadre de ce que l’on peut
considérer comme une stratégie d’ajustement dommageable
Le modèle de migration axé sur les agents du projet «
à long terme. Ce groupe se déplace souvent vers d’autres
Rainfalls » (MMAAR) présente deux niveaux d’analyse des
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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agents, relatifs à la vulnérabilité et au processus décisionnel
produisent une légère augmentation de la migration satisfaite
intervenant lors de la migration : le ménage et l’individu. Les
alors que les deux scénarios de sécheresse montrent un léger
caractéristiques de l’un comme de l’autre proviennent des
recul.
données de l’enquête menée auprès des ménages sur chacun
des sites étudiés. Le MMAAR est conçu pour représenter le
Comme l’indiquent les études de cas et les résultats de la
degré de vulnérabilité des ménages lorsque leurs moyens
modélisation, les changements intervenus tant dans la
de subsistance et leur sécurité alimentaire subissent des
moyenne que dans la variabilité des précipitations locales
modifications due à la variabilité pluviométrique, ainsi que
influent sur des facteurs tels que le marché du travail régional
l’incidence de ces changements sur la migration des membres
et les systèmes de production alimentaire. La variabilité
de la famille. Les recherches ont mis en lumière différents
pluviométrique a aussi une incidence sur la vulnérabilité des
impacts que des scénarios probables pourraient avoir sur les
ménages, en fonction de caractéristiques comme les revenus,
flux migratoires et ont montré qu’à l’avenir, les variations
le patrimoine et la taille de la famille. Les résultats des études
pluviométriques risquaient d’influencer fortement la mobilité
de cas et de la modélisation illustrent les circonstances dans
humaine. Le modèle a été tout d’abord appliqué au site de
lesquelles interviennent les décisions relatives à la migration.
recherche tanzanien avec les résultats suivants :
Ils montrent que les ménages tant « satisfaits » que «
◆ La migration des ménages vulnérables est extrêmement
vulnérables » ont recours à la migration, mais que celle-ci
s’opère de façon très différente. Les premiers voient leur
sensible aux changements de pluviométrie. Pendant la
résilience renforcée tandis que la vulnérabilité des seconds
majeure partie de la période de simulation, le plus grand
face aux facteurs de stress, climatiques ou non, n’a de cesse
nombre normalisé de migrants modélisés destinés à quitter
de s’aggraver.
un foyer vulnérable se trouve dans le scénario 4 (sécheresse
extrême). Par contraste, le scénario 3 (humidité extrême)
présente quant à lui le nombre le plus bas de migrants quittant
un foyer vulnérable. Le nombre de migrants modélisés
destinés à quitter un foyer vulnérable dans les scénarios 1
(sécheresse) et 2 (humidité) marque une augmentation nette
par rapport aux chiffres de référence dans les deux cas, mais
pas aussi importante que dans le scénario 4.
◆ Par contraste, la migration « répondant à des aspirations »
dans les ménages satisfaits présente moins de susceptibilité
aux diverses hypothèses de variabilité concernant les futurs
régimes pluviométriques. Les deux scénarios sur l’humidité
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Réflexions pour les décideurs et praticiens
L’hésitation des États à prendre des mesures ambitieuses
d’atténuation, de financement et d’adaptation face aux
Dans le monde entier, les communautés vulnérables subissent
changements climatiques, ne fera qu’en exacerber les
déjà les impacts associés aux phénomènes météorologiques
impacts et les coûts, tant humains que financiers. Au plan
extrêmes et aux changements climatiques à évolution
mondial, les parties à la Convention-Cadre des Nations Unies
lente . Pourtant, selon des estimations récentes, le rythme
sur les changements climatiques doivent :
actuel des émissions, associé aux promesses de réduction,
pourrait conduire à une augmentation des températures
s’échelonnant de 3,5 à 6°C . Fondamentalement, la crise
climatique exige une réponse beaucoup plus forte de la
communauté internationale, des gouvernements nationaux
et des collectivités locales, tant dans les pays développés
qu’en développement, dans des domaines tels que la
◆ accepter une approche équitable pour réduire les émissions
de gaz à effets de serre conformément aux recommandations
de la communauté scientifique afin que l’augmentation de la
température mondiale moyenne ne dépasse pas 2°C, voire
1,5°C
sécurité alimentaire, l’environnement et plus largement le
◆ intensifier leur engagement et convenir de sources
développement durable.
innovantes pour assurer un financement de l’adaptation
suffisant, durable, prévisible, nouveau et supplémentaire qui
Les conclusions de l’étude permettent d‘élaborer une série
encourage la transparence, les approches participatives et la
de recommandations politiques et pratiques qui, prises
responsabilisation ;
collectivement, pourront aider les populations démunies
◆ faciliter la coordination régionale et mondiale par
à faire des choix informés en matière de migration,
l’intermédiaire du Comité d’adaptation, afin de permettre
d’adaptation et de sécurité alimentaire, choix qui leur
l’appui
permettront de préserver leur dignité et leur sécurité et
d’Adaptation ;
d’améliorer leur résistance aux changements climatiques.
Les États et les communautés les plus sévèrement touchés
ne peuvent assumer seuls l’aide aux populations vulnérables
et leur protection. Le principe d’une responsabilité commune
mais différenciée (tant pour minimiser la pression sur les
populations vulnérables que pour accroître les possibilités
aux
développements
des
Plans
Nationaux
◆ évaluer les pertes et dommages et y remédier par le biais
de la Convention-Cadre des Nations Unies et du mécanisme
et programme de travail relatifs aux pertes et dommages
de façon à répondre aux besoins des populations les plus
vulnérables.
d’adaptation) doit donc sous-tendre les négociations portant
sur les politiques à adopter et leur mise en place à tous les
niveaux.
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Le changement climatique, la sécurité alimentaire, la
◆ accompagner et favoriser la sécurité alimentaire ainsi que
pauvreté, la gestion des ressources naturelles et la mobilité
des moyens de subsistance résilients.
humaine sont inextricablement liés et on ne peut y remédier
séparément. Ceux qui décident des mesures à prendre en
matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle au plan
◆ renforcer et étendre la réduction des risques de catastrophe
et ses liens avec le développement à long terme.
◆ incorporer les questions relatives à l’égalité des sexes.
mondial doivent :
◆ appeler davantage à la lutte contre la crise climatique et
◆ impliquer les populations vulnérables et leur accorder la
incorporer des considérations relatives au changement
climatique et à l’égalité des sexes dans les initiatives
Pour les populations déjà démunies et vulnérables, le
mondiales de sécurité alimentaire et nutritive.
changement climatique est un nouveau défi majeur et
◆ décider d’objectifs qui appuient le droit de tous à un
évolutif . Et toute solution à long terme ne pourra se faire
développement durable après 2015, à la suite des Objectifs
sans elles.. Il est donc nécessaire de garantir leur autonomie
du Millénaire pour le développement..
et leur donner accès à de meilleurs outils de décision et de
gestion: informations, ressources et moyens de subsistance
Les impacts sont locaux, ce qui rend indispensable une action
qui tiennent compte du changement actuel des schémas
aux niveaux national et local. Les gouvernements des pays
pluviométriques. Mais on ne peut laisser les populations et
tant développés qu’en développement, les organisations
communautés locales relever seules ces défis : l’avènement
non gouvernementales, les institutions multilatérales et les
de solutions durables nécessitera les efforts concertés et
agences des Nations Unies doivent s’efforcer d’encourager
déterminés de la communauté internationale pour accroître
la
la résilience face aux facteurs de stress climatiques.
collaboration
intersectorielle,
entre
ministères
et
transfrontalière. Ils doivent aussi :
◆ accompagner, promouvoir et mettre en œuvre des plans
globaux participatifs, tant nationaux que locaux, afin
d’anticiper et prévoir les éventuelles questions de sécurité
alimentaire et des moyens de subsistance ou de mobilité
humaine liées aux facteurs de stress climatiques.
◆ s’attaquer aux défis et opportunités transfrontaliers liés à
l’adaptation et à la mobilité humaine.
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Crédit photo : © 2012 Lars Johansson
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1- Nature et objectif du présent rapport
1.1
Que
sait-on
de
l’influence
des
changements
environnementaux sur la mobilité humaine ?
Dès le milieu des années 1980 au moins, les scientifiques
autres, dont le mode de vie dépend des ressources naturelles
ont
changements
et des conditions climatiques) n’aient, par l’avenir, que peu
environnementaux et la mobilité humaine . C’est alors que
ou pas la possibilité de se déplacer loin de leur lieu de vie
les premiers débats sur les projections et prévisions quant
d’origine . Dans les décennies à venir, ces populations à la
au nombre de futurs « migrants environnementaux » ont
« mobilité » potentiellement « limitée » risquent de voir le
vu le jour . Plus récemment, des travaux tant conceptuels
potentiel de leurs territoires d’origine se détériorer en même
qu’empiriques ont étudié les relations plus larges existant
temps que se réduiront leurs possibilités de migrer vers des
entre les facteurs environnementaux et la migration dans
zones plus favorables tout en préservant leur sécurité et leur
diverses situations . Ces travaux ont permis de dégager
dignité. À moyen et long terme, les implications qu’aura
des schémas généraux qui ont servi de point de départ
le changement climatique sur de nombreuses questions
pour des études plus nuancées sur les interactions entre
relatives aux mouvements de population sont telles que des
facteurs climatiques et socioéconomiques . Depuis, des
chercheurs se sont mis en quête de mieux comprendre dans
études ont montré que les facteurs environnementaux
quelles circonstances les facteurs climatiques influent sur les
jouent effectivement un rôle dans la mobilité humaine et
décisions humaines : partir ou ne pas partir, où aller, quand,
souligné le fait qu’il se peut que certaines des populations
et quand revenir ?
établi
des
corrélations
entre
les
les plus exposées aux facteurs de stress environnementaux
(en particulier les agriculteurs, éleveurs, pasteurs, pêcheurs et
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1.2 Rapports entre la variabilité pluviométrique, la sécurité
En se basant sur les interactions actuelles entre variabilité
alimentaire/des moyens de subsistance et la mobilité humaine
pluviométrique, sécurité alimentaire et des moyens de
subsistance et décisions migratoires des ménages, l’étude «
L’étude « Rainfalls » tire ses informations de recherches
Rainfalls » fait appel à une modélisation axée sur les agents
empiriques et participatives menées dans huit pays d’Asie,
pour comprendre l’incidence que les modifications futures
d’Afrique et d’Amérique latine. Les données primaires
des régimes pluviométriques auront sur la migration. Pris
originales ont servi à tracer de nouvelles cartes montrant les
dans leur ensemble, les études de cas et les résultats de la
flux migratoires au sein de régions particulières dans les pays
modélisation : (1) démontrent la complexité et la diversité
choisis pour l’étude. Des recherches de terrain approfondies
de ces relations et la nécessité d’adapter les politiques et
ont eu lieu sur des sites au Guatemala, au Pérou, au Ghana,
interventions pour tenir compte de facteurs clés aux niveaux
en Tanzanie, en Inde, au Bangladesh, en Thaïlande et au
nationaux, infranationaux, communautaires, familiaux et
Viet Nam. Les huit études de cas « Rainfalls » apportent
individuels. (2) étudient en détail l’idée selon laquelle la
des éléments probants qui dévoilent une série d’interactions
variabilité pluviométrique a une incidence sur les décisions
complexes et illustrent les effets réciproques de la variabilité
migratoires des ménages dans la mesure où elle a une
pluviométrique, de l’insécurité alimentaire et des moyens de
influence négative sur leur consommation alimentaire et leurs
subsistance, et des choix migratoires (saisonniers, temporaires,
revenus, surtout sur les sites où les moyens de subsistance
permanents ou aucun) pour des ménages présentant des
dépendent largement des cultures pluviales.
caractéristiques différentes (richesse, propriété foncière,
accès à des options en termes de diversification des revenus,
Par conséquent, la question des interactions entre le
sexe, âge, éducation etc.). L’étude détaille également dans
changement climatique mondial (et local) et la migration
quelles mesures ces caractéristiques influent positivement
humaine n’est pas de savoir si les facteurs environnementaux
ou négativement sur les capacités des ménages à décider de
sont les seules causes de la mobilité mais comment de multiples
migrer ou non de manière judicieuse.
facteurs convergent pour peser sur les choix migratoires. Une
compréhension plus nuancée de la façon dont les facteurs
climatiques influencent sur ces choix permettra de formuler
des politiques d’investissements et d’adaptation pour que,
quelles que soient les stratégies adoptées par les ménages
(notamment la migration), celles-ci contribuent à améliorer
leur résilience aux changements climatiques .
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1.3 De l’utilité de comprendre les décisions en matière de
(2) permet de mieux comprendre quels types de ménages
mobilité dans le contexte des changements climatiques
peuvent se retrouver dans l’incapacité de s’adapter aux
changements pluviométriques dans certaines régions, que
L’étude «Where The Rain Falls» (« Rainfalls ») s’inspire des
ce soit in situ ou par le biais de la migration, et quels sont
recherches menées jusqu’à présent sur les changements
les facteurs qui contribuent à accroître la résilience ou la
environnementaux et la migration . Elle isole la variabilité
vulnérabilité de certains types de ménages face aux variations
pluviométrique et l’insécurité alimentaire en les identifiant
pluviométriques.
comme des facteurs clés de la migration. Ce faisant, elle
Les résultats de l’étude « Rainfalls » présentés ci-dessous
permet l’analyse des caractéristiques des ménages et, en
permettent de dégager quatre profils de ménages allant
relation avec ces deux facteurs, répond à la question de
de ceux qui sont en mesure de recourir à la migration pour
recherche : « Dans quelles circonstances les ménages ont-
améliorer leur résilience à ceux qui, disposant d’une marge
ils recours à la migration comme stratégie de gestion des
d’adaptation réduite, luttent pour survivre sur leur lieu de
risques ? ». L’étude « Rainfalls » apporte des indications sur
vie sans pouvoir envisager la migration comme stratégie de
la façon dont la mobilité humaine pourrait se développer
gestion des risques.
dans le contexte du changement climatique, où les régimes
pluviométriques devraient évoluer considérablement au
cours des prochaines décennies, notamment en termes de
dates (saisonnalité), de qualité (phénomènes extrêmes,
intensité des précipitations) et de répartition (géographique).
Jusqu’à présent, les publications portant sur la migration
environnementale se sont peu intéressées aux circonstances
entourant les décisions et processus migratoires, tels que la
durée du séjour des migrants sur le lieu de destination, les
caractéristiques des migrants et des non-migrants, les actions
et démarches entreprises par les migrants à leur arrivée, le
type d’emploi recherché et les facteurs qui encouragent ou
découragent leurs choix en matière de migration. L’étude
« Rainfalls » : (1) met en lumière les caractéristiques des
ménages migrants et non migrants et les facteurs qui influent
sur leur décision à l’heure actuelle (résultats des études de
cas) et le feront à l’avenir (résultats de la modélisation) ;
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1.4 Nouvelle approche de réflexion et contribution du
présent rapport
Une nouvelle approche de réflexion doublée d’une attitude
pragmatique sera nécessaire pour répondre aux menaces
en termes de sécurité humaine que les changements
environnementaux, dont le changement climatique,
font peser sur les schémas actuels de mobilité humaine
(notamment la migration et le déplacement) et sur la
répartition des populations à l’avenir. La mobilité humaine
est une réaction non négligeable (et de plus en plus
fréquente dans certaines régions) aux bouleversements
des régimes climatiques se produisant à travers le monde.
Or, les publications relatives au changement climatique ou
à la mobilité humaine ne traitent guère des circonstances
où la mobilité s’avère une option d’adaptation, ni de ses
impacts ni des autres options possibles. Les décideurs ont
besoin de meilleures informations, de données empiriques
et d’une analyse des problèmes et des solutions potentielles
relatives aux mouvements de population dans le contexte
du changement climatique. L’étude « Rainfalls » répond à ce
besoin et permet de combler les lacunes grâce à:
◆ Des méthodes de recherche nouvelle génération : L’approche
méthodologique développée pour le projet « Rainfalls », qui a
été publiée pour servir de ressources aux futures recherches,
associe plusieurs méthodes (enquête auprès des ménages,
divers outils pour la recherche participative, et entretiens
auprès d’experts). De plus, les données météorologiques
locales recueillies ont pu être comparées aux perceptions
locales des changements des régimes pluviométriques.
◆ Nouvelles données empiriques : Des équipes de chercheurs
nationaux et internationaux se sont déployées sur huit sites
au Guatemala, au Pérou, au Ghana, en Tanzanie, en Inde, au
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Bangladesh, en Thaïlande et au Viet Nam. Elles ont récolté
un grand nombre de données quantitatives et qualitatives
portant sur les régimes historiques de précipitations, les
conditions de sécurité alimentaire des ménages et les
schémas de mobilité humaine (n = 1 295 enquêtes auprès
des ménages et plus de 2 000 participants aux groupes de
discussion et aux entretiens auprès des experts).
◆ Cartes : De nouvelles cartes ont été dessinées pour chacun
des sites étudiés afin d’obtenir une représentation visuelle des
principales données relatives aux régimes des précipitations, à
l’agriculture et à la sécurité alimentaire, ainsi qu’aux schémas
migratoires actuels dans les villages étudiés.
◆ Cadre analytique : Afin d’harmoniser les informations
recueillies sur les huit sites de recherche, très différents,
et de répondre à la question « Dans quelles circonstances
les ménages utilisent-ils la migration comme stratégie de
gestion des risques ? », un cadre analytique a été proposé
pour mettre en évidence huit considérations clés aux niveaux
national, des sites et des ménages.
◆ Modélisation axée sur les agents : Grâce aux données
recueillies sur le terrain, le projet a commencé à développer
le modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls »
(MMAAR), qui dresse un tableau prévisionnel des décisions
migratoires des ménages dans le cadre de différents scénarios
relatifs à la variabilité pluviométrique. Le rapport présente
les résultats préliminaires obtenus sur le site de recherche
tanzanien.
◆ Réflexions politiques : Les auteurs s’inspirent des conclusions
des recherches de terrain pour proposer des réflexions sur
les politiques à adopter aux niveaux mondial et national, à
l’intention des États, des agences multilatérales, des instituts
de recherche et des organisations non gouvernementales
qui travaillent directement avec de nombreuses populations
parmi les plus vulnérables au monde
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1.5 Portée et limites du présent rapport
Les auteurs du rapport n’ont pas tenté de :
◆ Fournir des estimations mondiales sur le nombre d’individus qui pourraient se déplacer ou
y être contraints à l’avenir en réaction à la variabilité pluviométrique .
◆ Indiquer les destinations géographiques précises des futurs migrants.
◆ Établir des relations de cause à effet entre la variabilité pluviométrique ou autres phénomènes
liés au changement climatique et la mobilité humaine.
Ils se sont attachés plutôt à démontrer les relations actuelles entre la variabilité pluviométrique, la
sécurité alimentaire et des moyens de subsistance, et les circonstances dans lesquelles la migration
devient une stratégie de gestion des risques pour ces facteurs de stress dans différentes régions du
monde. Ils espèrent que le rapport s’avérera utile à ceux qui essaient de déterminer les zones de tension
actuelles en termes de migration et de sécurité alimentaire dues à la variabilité pluviométrique,
et celles susceptibles d’y être confronté à l’avenir. La modélisation axée sur les agents du projet
« Rainfalls » permet de présenter des scénarios d’anticipation plausibles qui serviront de point de
départ aux décideurs. Ainsi, ceux-ci pourront focaliser les débats sur le rôle de la mobilité humaine
dans l’adaptation.
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2- Méthodes multidisciplinaires du projet « Where The
Rain Falls »
Des recherches de terrain ont été menées dans huit pays
se complétaient ou se contredisaient. Les méthodologies
(Bangladesh, Ghana, Guatemala, Inde, Pérou, Tanzanie,
utilisées pour le projet Where The Rain Falls apportent une
Thaïlande et Viet Nam) afin de réaliser le premier objectif du
nouvelle dimension aux recherches effectuées à ce jour sur
projet Where The Rain Falls, à savoir « conceptualiser la relation
la thématique de la migration environnementale provoquée
entre le changement des régimes météorologiques (saisons
par les changements climatiques . Pour autant que les
et précipitations en particulier), la sécurité alimentaire, les
auteurs le sachent, c’est la première fois que l’on combine
inégalités sociales (notamment en termes d’égalité des sexes)
ces méthodes dans le cadre d’une recherche de terrain multi-
et les différentes formes de mobilité humaine . » La question
pays sur ce sujet.
associée à cet objectif est : « Dans quelles circonstances les
ménages ont-ils recours à la migration comme stratégie de
Même si les séances de recherche participative et l’enquête
gestion des risques en réponse à une augmentation de la
auprès des ménages concernent les mêmes communautés, il
variabilité pluviométrique et de l’insécurité alimentaire ? »
était important de recueillir des données tant quantitatives
que qualitatives et ainsi réaliser une analyse approfondie qui
Pour les recherches de terrain, trois méthodologies
non seulement permette de répondre à la première question
complémentaires ont été utilisées : recherches participatives
de recherche mais serve aussi à développer et appliquer le
(PRA), enquête auprès des ménages (HH) dans les
modèle axé sur les agents (MAA). Les trois méthodes ont
communautés étudiées et entretiens avec divers experts
été testées avant de commencer le travail sur le terrain
dans leurs pays respectifs. Les chercheurs ont également
pour garantir leur validité et vérifier leur utilité en termes
procédé à des analyses documentaires pour chacun des cas.
de contenu et de longueur ainsi que leur applicabilité dans
Le choix de ces trois méthodes s’explique par le fait qu’ils
divers contextes culturels. On trouvera une présentation de
souhaitaient recueillir des observations sur le thème étudié et
chacune de ces méthodes ci-dessous .
sur sa dynamique auprès de sources variées. Ils souhaitaient
ensuite confronter ces observations et vérifier si celles-ci
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2008 Phil Borges/CARE
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2.1 Entretiens auprès d’experts
Les experts interrogés sont essentiellement des représentants
gouvernementaux, des dirigeants locaux, des acteurs de la
société civile et des scientifiques/universitaires possédant
des connaissances ou des informations précises en rapport
avec
le
projet
(migration,
variabilité
pluviométrique,
insécurité alimentaire et des moyens de subsistance, plans
de développement nationaux ou locaux, adaptation aux
changements climatiques, vulnérabilité etc.). Dans la
mesure où le temps et le budget impartis le permettaient,
les entretiens ont été menés aux niveaux national, régional/
de district et local pour recueillir autant d’informations
utiles que possible. Le manuel pour les entretiens semistructurés comprenait des questions relatives à chacun des
trois principaux thèmes (changement climatique et variabilité
pluviométrique, insécurité alimentaire et des moyens de
subsistance, migration). Non seulement ces questions
couvraient les observations, interprétations et analyses des
experts, mais elles étaient orientées vers l’action, un espace
étant réservé pour les recommandations des personnes
interrogées.
Crédit photo : © 2007 Brendan Bannon/CARE
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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2.2 Recherches participatives (PRA)
Les séances de recherche participative proposaient une large
gamme d’outils adaptés au contexte, au type d’information
L’objectif des séances de recherche participative était
souhaitée et aux groupes invités. En voici une liste non
d’impliquer les communautés locales et certains groupes
exhaustive : transect (qui fournit une représentation
particuliers dans l’évaluation de la situation, présente et
transversale des différentes zones agro-écologiques et
antérieure, dans leur village, d’entendre de leur propre
les compare à certains paramètres intéressants pour nos
bouche quel avenir ils se souhaitaient et de recueillir des
recherches), classement par richesse (explore les perceptions
messages sur lesquels baser l’élaboration des politiques
des différences de niveaux de vie et des inégalités au sein
locales, nationales ou mondiales. Ce qu’il faut savoir des
des communautés), groupe de discussion (réunit divers
séances de recherche participative, c’est qu’elles comprennent
groupes appartenant à la communauté pour des discussions
des questions ouvertes qui permettent tant à l’enquêteur
ouvertes), cartes de mobilité (explore les schémas de mobilité
qu’aux experts interrogés d’explorer certains sujets en
des individus, des groupes et des communautés), calendriers
profondeur, sans limiter les réponses au format rigide d’un
saisonniers (perceptions qu’ont les habitants des variations
questionnaire d’enquête. Des éléments visuels comme des
saisonnières sur les sites de recherche), classement des risques
tableaux à feuilles mobiles, des cartes ou des craies ont servi
d’atteinte aux moyens de subsistance (perceptions qu’ont
d’outils pour animer les discussions en groupe. Ces séances
les habitants des risques qu’ils encourent et leur classement
ont permis de comprendre les dynamiques de groupe et les
par ordre d’importance), diagrammes de Venn (illustrent
corrélations entre les différentes questions. Cette technique
l’importance et la facilité d’accès à des institutions cruciales
a été utilisée sur les sites des huit pays. La composition des
ou aux individus qui influencent les communautés locales)
groupes variait selon les sessions, certains étant homogènes
et diagrammes d’impact (révèlent les impacts de certaines
(rien que des hommes, des femmes, des personnes âgées,
activités, interventions ou événements sur les communautés
des individus marginalisés, des jeunes, des cultivateurs ou des
et les corrélations entre tous ces facteurs).
personnes travaillant hors du secteur agricole etc.) et d’autres
mélangés, afin d’obtenir l’éventail le plus large possible de
commentaires et de dégager et inclure le vécu de groupes
sociaux précis. Cette approche s’est révélée particulièrement
importante afin de recueillir le point de vue des femmes,
des personnes âgées ou des groupes susceptibles d’être
socialement marginalisés etc.
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2.3 Enquête auprès des ménages
Les foyers ciblés dans chacune des huit études de cas étaient
au minimum 150, chaque site de recherche comprenant
L’objectif de l’enquête auprès des ménages était d’obtenir
un total de 3 ou 4 villages. Les chercheurs ont utilisé une
des indicateurs quantifiables et de dégager des tendances
technique d’échantillonnage aléatoire simple ou stratifié selon
reflétant les différents facteurs qui affectent les ménages en
les informations démographiques disponibles dans chaque
termes de variabilité pluviométrique, de sécurité alimentaire/
cas . Le répondant ciblé était le chef de famille (homme
des moyens de subsistance et de migration. Il s’agissait
ou femme). Lorsque celui-ci/celle-ci n’était pas disponible,
aussi de rendre possible une analyse statistique pour
l’entretien s’est déroulé avec le second représentant du
compléter les résultats qualitatifs. Jusqu’à présent, les études
ménage, à condition que celui-ci/celle-ci possède la maturité
multi-pays menées sur la relation entre les changements
nécessaire, et soit capable de traiter des sujets étudiés et de
environnementaux et les migrations faisaient appel soit à
participer au processus décisionnel familial.
des enquêtes soit à des groupes de discussion, mais pas aux
deux.
Les chercheurs ont dû accepter des compromis pour
garder une certaine cohérence dans l’administration et
L’enquête auprès des ménages comprenait différentes
les résultats du questionnaire, puisque les huit cas d’étude
sections, chacune représentant un aspect important de
représentaient des contextes culturels très différents. Des
l’étude : informations démographiques générales sur les
tests préalables leur ont permis de déterminer quelles
ménages, activités économiques des ménages, problèmes
portions de l’instrument ajuster en fonction du contexte local
de subsistance, sécurité alimentaire et consommation,
: de petites modifications ont été apportées, le cas échéant,
migration, stratégies d’adaptation, régimes des précipitations,
dans la formulation de certaines questions et dans les unités
patrimoine et ressources familiaux. Les sections n’étaient
de mesure afin qu’elles correspondent à celles en usage sur
pas thématiquement séparées afin de pouvoir détecter les
chaque site. L’on a également tenu compte de certaines
variables communes et explorer les corrélations mutuelles ainsi
caractéristiques démographiques (appartenance ethnique,
que leurs dynamiques au sein des ménages. Contrairement
caste, pratiques conjugales etc.) lors de l’adaptation du
à la recherche participative, la plupart des questions de
questionnaire à chacun des cas d’étude.
l’enquête étaient fermées et quantifiables. Chaque section
comprenait malgré tout quelques questions ouvertes pour
étayer l’analyse des données et servir à la modélisation.
Celles-ci ont permis de révéler davantage de détails tout en
replaçant les réponses des ménages dans leur contexte.
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2.4 Scénarios futurs des précipitations et de la migration tirés
de la modélisation axée sur les agents
Le premier objectif de l’étude « Rainfalls » était de comprendre
les relations actuelles entre variabilité pluviométrique,
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et décisions
des ménages en matière de migration. Pour ce faire, l’on
a eu recours au travail de terrain et aux méthodes décrites
ci-dessus. Le deuxième objectif impliquait d’explorer
des scénarios potentiels pour répondre à la question : «
Quels sont les scénarios où la variabilité pluviométrique
et la sécurité alimentaire seront susceptibles d’influencer
fortement la mobilité humaine dans certaines régions du
monde au cours des 20 ou 30 années à venir ? » Pour cet
objectif de recherche orienté vers l’avenir, l’on a eu recours à
une modélisation axée sur les agents. Les résultats obtenus
en Tanzanie figurent dans le présent rapport. On trouvera
également dans l’annexe technique une description plus
détaillée de la modélisation.
2.5 Champs de recherche, méthodes et triangulation
Dans le cadre conceptuel des huit études de cas (Tableau
1), l’interaction entre les aspects les plus importants pour
chaque ménage, à savoir la variabilité pluviométrique, la
sécurité alimentaire et la migration (considérée comme un
élément particulier des stratégies d’adaptation) constitue
le principal centre d’intérêt. C’est là-dessus que se fonde
l’approche globale « moyens de subsistance (sécurité) »
utilisée ici, laquelle apparaît en gris à l’arrière-plan. L’on a
fait abstraction des extensions conceptuelles. Le cadre
peut aussi être déterminé par d’autres facteurs, tels que les
développements économiques ou politiques, les conflits, etc.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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L’illustration 1 offre un aperçu des trois principaux champs de
recherche du projet « Rainfalls », des sources d’informations
utilisées ainsi que du processus de triangulation effectué
grâce aux méthodes décrites ci-dessus. Dans ce cadre, on
voit que la sécurité des moyens de subsistance des ménages
étudiés est influencée par la variabilité pluviométrique
(variable indépendante ayant un effet sur le cheptel et
les récoltes). Ces facteurs, ajoutés à celui de la propriété
foncière, aident à déterminer la situation du ménage en
termes de sécurité alimentaire, laquelle est également
structurée par des processus externes. Dans le cadre, la
notion de « degré de vulnérabilité » (qui prend en compte le
degré de diversification économique, le nombre de membres
de la famille en âge de travailler, la situation financière etc.)
sert à indiquer l’éventail de stratégies d’adaptation possibles
pour les ménages. Les conclusions de l’étude se fondent
majoritairement sur des données qualitatives et quantitatives
récoltées sur le terrain. L’utilisation de données secondaires
est signalée par des encadrés de couleur en marge de ceux
des domaines de recherche. Enfin, comme le montre le cadre,
les conditions initiales évoluent de façon dynamique étant
donné les corrélations et interactions des actions du ménage
(boucles de rétroaction).
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Illustration 1 : Champs de recherche, méthodes et sources
de données - Source : Rademacher-Schulz et Rossow, 2012
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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3- Caractéristiques nationales et des sites de
recherche
Étant donné la diversité des huit cas d’étude, la présente section propose un cadre d’interprétation des
résultats du projet qui pourra servir à de futures recherches. Les critères de sélection des pays et des sites
sont détaillés ci-dessous. On trouvera ensuite un premier niveau de catégorisation, qui fait la distinction
entre les huit pays en fonction d’indicateurs sociaux, économiques et démographiques au niveau macro.
Au niveau infranational, les différences entre les divers sites de recherche du projet sont décrites en termes
de caractéristiques géographiques, météorologiques et agro-écologiques.
3.1 Critères pour la sélection des pays et des sites
Les sites de recherche/cas d’étude des huit pays ont été sélectionnés en fonction d’une série de critères
généraux : Couvrir plusieurs régions: l’Asie du Sud et du Sud-Est, l’Afrique subsaharienne et l’Amérique
latine permet de garantir un certain équilibre. Ces sites sont représentatifs des principaux écosystèmes et
moyens de subsistance, avec des niveaux moyens de pauvreté et d’insécurité alimentaire et des moyens
de subsistance sensibles à la variabilité pluviométrique. Ils ont été choisis pour produire une représentation
diversifiée de la géographie et du lieu dans un contexte national (proximité avec des centres économiques
majeurs ou mineurs). Pour des raisons pratiques, ils ont été sélectionnés sur la base de données fiables
sur les précipitations, de leur facilité d’accès géographique, de la présence de CARE sur place et des
relations que l’organisation a pu établir au plan local, ce dernier élément permettant de bénéficier de la
confiance des communautés locales et ainsi procéder aux recherches en un court laps de temps puis au
suivi programmatique ultérieur.
3.2 Contexte national
Les huit pays où les recherches ont été effectuées présentent, au niveau macro, un large éventail de
conditions dans lesquelles les ménages prennent des décisions, dont celle de la migration, pour assurer
leur subsistance. En termes de performance économique globale, de niveaux de développement et de
sécurité alimentaire, le Pérou et la Thaïlande arrivent en tête du classement (voir Tableau 1) . À l’opposé,
le Bangladesh et la Tanzanie se situent au bas de l’échelle pour ces trois indicateurs. Les pays du groupe
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2007 Bill Dowell/CARE
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intermédiaire (Inde, Viet Nam, Ghana et Guatemala) ne sont pas homogènes en termes de développement économique et
social ou de sécurité alimentaire. On peut noter par exemple des niveaux plus élevés de malnutrition en Inde et au Guatemala.
D’autres indicateurs offrent des enseignements sur le contexte national, en perpétuel évolution, dans lequel les ménages ont
accès à diverses options en matière de subsistance, ainsi que sur la façon dont ces options influent sur les décisions migratoires
dans les familles rurales . Dans les pays où les possibilités de diversifier les sources de revenus en dehors de l’agriculture sont
limitées et où le taux de croissance de la population reste élevé, les ménages ruraux peuvent être obligés de choisir la migration
comme stratégie de gestion des risques face à l’insécurité alimentaire, en tout cas davantage que ceux qui vivent dans des pays
offrant une gamme plus large en matière de diversification des revenus, agricoles ou non. L’analyse montre que le Pérou et la
Thaïlande sont des pays caractérisés par une économie dynamique où la pauvreté et l’insécurité alimentaire sont relativement
faibles. Le Viet Nam, l’Inde et le Bangladesh appartiennent tous les trois à la catégorie des pays en pleine transition économique
et démographique, avec cependant des niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire qui restent modérés à élevés. La dernière
catégorie comprend le Ghana, la Tanzanie et le Guatemala, où les niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire sont élevés. Leur
croissance économique faible, combinée à la croissance de la population et à une forte dépendance envers l’agriculture paraît, à
des degrés divers, limiter les possibilités de diversifier les moyens de subsistance des ménages ruraux.
Transition
économique
et
démographique à un stade plus
avancé
Transition
Pauvreté et insécurité alimentaire
Pauvreté
relativement faibles
modérées à élevées
Pérou
Vietnam
Thaïlande
Inde
insécurité
alimentaire
Bangladesh
économique
et
Ghana
démographique à un stade moins
Guatemala
avancé
Tanzanie
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et
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3.3 Caractéristiques des sites de recherche
On constate aussi une grande diversité parmi les sites
sélectionnés dans les huit pays où ont été effectuées les
recherches pour le projet. L’un des critères importants pour
la sélection des sites se rapportait à la variable indépendante
de l’étude, à savoir les précipitations. Suivant les sites, leur
moyenne annuelle varient entre 560 mm et 1 700 mm (voir
Tableau 2). La saisonnalité des régimes pluviométriques et
la dépendance envers les cultures pluviales étaient aussi
des considérations importantes, même si, comme dans le
cas de l’Inde, les communautés avaient largement accès à
Tableau 1 : Contexte des huit pays étudiés : pauvreté, sécurité
l’irrigation par canaux. D’autres caractéristiques relatives
alimentaire, transition économique et démographique au
à des variables importantes ont été prises en compte :
niveau macro
sensibilité des sources locales de revenus aux modifications
Le classement de ces pays coïncide, quoique partiellement,
avec la typologie régionale des contextes nationaux. Trois des
quatre cas d’étude asiatiques s’inscrivent dans la catégorie
des pays dynamiques possédant un niveau de pauvreté et
d’insécurité alimentaire modérées à élevées, la Thaïlande
faisant exception étant donné les succès que remporte
sa politique de réduction de la pauvreté depuis quelques
dizaines d’années. Le Ghana et la Tanzanie sont tous deux les
des régimes pluviométriques, niveaux élevés de pauvreté et
d’insécurité alimentaire, migrations documentées au cours
de l’histoire, et rapport supposé entre modifications des
régimes des précipitations, insécurité alimentaire et mobilité
humaine. L’altitude (hautes et basses terres) et la proximité de
villes ou autres centres présentant des opportunités d’emploi
alternatif non négligeables (p. ex. zones industrielles) ont
également joué un rôle dans la sélection.
exemples d’une croissance économique réussie en Afrique,
mais la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la croissance de
la population y restent relativement élevées. Les deux études
de cas latino-américaines se trouvent aux deux extrémités
de l’échelle, le Pérou ayant connu d’énormes avancées ces
dernières décennies, tant en termes de croissance économique
que de réduction de la pauvreté, alors que le Guatemala fait
face à une stagnation économique et continue de présenter
des niveaux élevés de malnutrition et d’inégalité.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Site de recherche
Précipitations moyennes
annuelles approximatives (mm)
Geographie
Bangladesh, région du nord (district de Kurigram)
1,700
Plaine fluviale
Viet Nam, delta du Mékong (province de Dong Thap)
1,500
Plaine du delta
Inde centrale (district de Janjgir, Chhattisgarh)
1,229
Plaine irriguée
Guatemala, hauts plateaux orientaux (Municipalité de Cabricán)
1,150
Hauts plateaux
Ghana du nord (district de Nadowli, Haut Ghana occidental)
1,036
Savane boisée
Thaïlande, région du nord (province de Lamphun)
1,017
Région montagneuse et
fluviale
Pérou, Andes centrales (province de Huancayo)
800
Région montagneuse
Tanzanie du nord (district de Same, région du Kilimandjaro)
560
Hauts
plateaux
et
plaine fluviale
Table 2: Average annual rainfall in the research sites
Au Guatemala, au Pérou et en Thaïlande, les recherches ont été menées sur des hauts plateaux. Si le site du Guatemala est fort
éloigné des grands centres urbains, celui du Pérou se distingue par sa proximité avec une ville secondaire importante et en pleine
expansion. Les sites à faible altitude se trouvent au Ghana, en Inde, au Bangladesh et au Viet Nam. Quant aux villages étudiés
en Tanzanie, ils comprennent tant des plaines que des hautes terres. L’accès à l’irrigation est presque inexistant sur les sites du
Guatemala et du Ghana, et de 84 pour cent en Inde, ce qui n’empêche que sur ces trois sites, la plupart des agriculteurs doivent se
contenter d’une seule récolte par an. La double récolte annuelle, voire plus, est chose courante au Bangladesh, au Viet Nam et en
Thaïlande, qui disposent de ressources hydriques plus abondantes pour l’agriculture, en raison des précipitations plus importantes
et de la proximité des rivières. En Tanzanie, bien que le site soit semi-aride, le régime des précipitations est bimodal. Il est donc
possible de procéder à deux récoltes par an lorsque les pluies ne font pas défaut.
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Crédit photo : © 2011 Kees van der Geest
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4. Résultats des études de cas :
la migration dans le contexte de
la variabilité pluviométrique et
de la sécurité alimentaire / des
moyens de subsistance
On trouvera dans la présente section un résumé des conclusions des
rapports des études de cas résultant des recherches de terrain menées dans
les huit pays couverts par le projet. Ces études ne sont pas regroupées
géographiquement mais en fonction des catégories définies dans le cadre
analytique décrit ci-dessus. Chacune des synthèses comprend une carte dont
le contenu et l’objectif sont décrits dans les pages qui suivent. Les schémas
de migration que l’on abordera ci-dessous en relation avec la variabilité
pluviométrique et la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance sont
définis de la façon suivante : la migration saisonnière est définie dans la
présente étude comme un déplacement de moins de six mois, alors que la
migration temporaire se réfère à des déplacements de six mois à deux ans.
La migration permanente qualifie les déplacements de plus de deux ans.
Légende des cartes du présent rapport
Chacune des huit études de cas comprend une carte qui situe le site de
recherche en question et fournit des données contextuelles sur l’importance
des précipitations et leur variabilité, la pauvreté et l’agriculture. Les cartes
décrivent aussi les flux migratoires rapportés par les répondants pendant la
recherche de terrain. On trouvera des informations complètes sur tous les
éléments reproduits sur les cartes dans l’annexe technique.
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4.1 Thaïlande : grâce à des sources de revenus diversifiées et un
accès aux biens et aux services, la migration est désormais un choix
Moyenne des précipitations
dans la Province de Lamphun21
En Thaïlande, les recherches ont été menées dans quatre
villages de la province de Lamphun (deux de l’ethnie thaï et
deux de l’ethnie Karen) : Don-Moon, Sandonhom, MaebonTai et Huai-Ping. Ceux-ci se trouvent dans le sous-district de
Ban Puang, dans un environnement rural et montagneux
typique du nord de la Thaïlande. Les villages sont perchés
sur les pentes de collines boisées, le long de ruisseaux qui
situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres
agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations
de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 3
Terres agricoles (%)
Irriguées (%)
se jettent dans la rivière Li. (Pour les données relatives à la
ans d’un processus plus large de transformation économique
et de réponse à des niveaux assez élevés par le passé
d’insécurité alimentaire et de pauvreté. Pour les populations
rurales, c’est une stratégie courante d’adaptation à la
Pluviales (%)
ci-dessous.) En Thaïlande, la migration fait partie depuis 50
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
saisonnalité de la production agricole, la rareté des terres et la
crise économique . Une politique d’investissement destinée
à favoriser une agriculture plus productive, diversifier les
sources de revenus et promouvoir l’éducation et la sécurité
sociale a permis d’améliorer la résistance des ménages de
la province de Lamphun à des facteurs de stress comme la
variabilité pluviométrique et l’insécurité alimentaire.
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Illustration 3: Site de recherche en Thaïla
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ande
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Crédit photo : © 2011 Phalakorn Paomai
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La moyenne annuelle des précipitations dans la province de
millions d’individus défavorisés du pays vivent à la campagne.
Lamphun est de 1 017,03 mm. Les données météorologiques
Le taux national de pauvreté est passé de 57 pour cent en
locales montrent que la pluviosité annuelle a légèrement
1962/63 à 8 pour cent en 2009. Dans le nord, il était de
augmenté au cours des 30 dernières années. Six des sept
10,5 pour cent en 2010, ce qui est supérieur à la moyenne
pics dépassant la moyenne annuelle de 1 200 mm ont eu
nationale et bien plus élevé qu’à Bangkok (0,6 pour cent).
lieu au cours des deux dernières décennies. Fin 2011, la
Même si l’insécurité alimentaire a fortement décru, elle
Thaïlande a été frappée par l’une des pires inondations
demeure un problème dans certaines des poches rurales des
depuis des décennies. De fortes pluies (28 pour cent de plus
régions du nord et du nord-est . Dans la zone étudiée, les
que la normale entre janvier et octobre) ont provoqué de
deux villages thaïs possèdent deux fois plus de revenus et des
graves inondations accompagnées d’importants dégâts à
niveaux d’instruction nettement supérieurs à ceux des deux
Bangkok et dans le centre du pays. Ces crues ont recouvert
villages karen. Dans les quatre villages, seuls 2,4 pour cent des
1,6 millions d’hectares, occasionné la perte d’un quart de la
ménages ne possèdent pas de terres. Au cours des dernières
production de riz, provoqué 730 décès et contraint 9 859
décennies, le pourcentage de la population pratiquant
usines employant un total de 666 000 personnes à fermer
une agriculture de subsistance dans le nord du pays ayant
leurs portes. Selon la Banque mondiale, les dommages et
fortement diminué, les revenus des cultures commerciales,
pertes économiques ont atteint 45,7 milliards de dollars
du tissage, des transferts d’argent, des petites entreprises et
US. Les pluies exceptionnelles de 2011 ont dominé les
petits commerces et des programmes gouvernementaux de
conversations sur les contraintes climatiques parmi les
sécurité sociale (p. ex. indemnités en faveur des personnes
villageois de la zone de recherche. Les participants à l’étude
âgées) sont devenus des éléments importants d’une gamme
ont constaté une évolution des schémas climatiques au cours
plus diversifiée de moyens de subsistance pour les habitants
de la dernière décennie, dont des précipitations accrues et
des zones rurales de la province de Lamphun.
des températures plus élevées pendant la saison froide. Les
villageois disaient être régulièrement exposés au stress lié à la
La migration est une pratique courante dans les quatre
pluviosité, notamment les phénomènes de périodes sèches,
villages (67 pour cent précisent qu’un membre ou plus ont
de pluies abondantes et de crues soudaines. Quatre-vingt-
connu cette expérience). Même si près de 62 pour cent
sept pour cent des ménages interrogés ont déclaré que des
des personnes ayant fait l’expérience de la migration sont
pluies diluviennes se produisaient plus fréquemment depuis
de sexe masculin, les femmes représentent aujourd’hui une
10-20 ans.
bonne moitié des migrants internes (non internationaux). Les
La pauvreté et l’insécurité alimentaire sont d’abord des
phénomènes ruraux en Thaïlande : 88 pour cent des 5,4
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trois-quarts des migrants internes actuels sont non mariés, et
migration nécessaire pour des raisons de survie. Des activités
85,5 pour cent d’entre eux sont des migrants temporaires qui
rémunératrices diversifiées, agricoles et non agricoles (moins
ont quitté leur village pour une durée de plus de six mois sans
sensibles à la variabilité pluviométrique), l’accès à des
y revenir. La migration internationale s’était autrefois avéré
ressources financières par le biais de fonds communautaires
une stratégie de subsistance importante dans trois des quatre
et l’aide de l’administration locale contribuent à réduire la
villages étudiés. Aujourd’hui, seulement 10,7 pour cent
vulnérabilité au stress et à l’insécurité alimentaire liées à la
des migrants quittent le pays, la plupart pour Taïwan ou la
pluviométrie. En dépit de l’impact négatif du changement
Corée du Sud. D’après les résultats des séances de recherche
climatique, la majorité des ménages disait pouvoir y faire face
participative, les destinations actuelles privilégiées par les
et s’adapter sur place. Pour eux, la migration est un moyen
migrants sont toutes internes, qu’il s’agisse de Bangkok (qui
de profiter d’opportunités supplémentaires et d’améliorer
accueille 40 pour cent des migrants), de zones industrielles
encore leur subsistance. En Thaïlande, les ménages interrogés
(Lamphun, 25 pour cent) ou de centres urbains (Chiang
se disaient concernés par les agressions climatiques, mais la
Mai, 20 pour cent). Alors que moins d’un quart de ceux qui
plupart ont accès à des ressources qui leur permettent de
ont fait l’expérience de la migration citaient des raisons non
surmonter la variabilité pluviométrique. Pour eux, la migration
économiques, la migration interne est aujourd’hui motivée
représente une option supplémentaire de gestion des risques
par un désir d’éducation dans 38,6 pour cent des cas,
environnementaux ou autres, qui contribue à la résilience
indiquant que la nature même de l’émigration est en train de
familiale (transferts de fonds pour financer l’éducation, afin
changer dans ces villages.
de permettre la diversification des moyens de subsistance du
ménage et réduire sa sensibilité à la variabilité pluviométrique
Parmi les ménages interrogés, 51 pour cent considéraient que
et l’insécurité alimentaire).
les facteurs de stress environnemental liés aux précipitations
avaient un impact non négligeable sur leurs moyens de
subsistance. En outre, trois quarts des ménages indiquaient
une baisse de leurs revenus, suite à des récoltes moins
abondantes et à une baisse des revenus agricoles induites
par le stress environnemental. En dépit de contraintes
climatiques prononcées et manifestes, la diversification
des risques a permis aux ménages d’éviter la faim ou les
stratégies d’ajustement dommageables à long terme.
Une grande majorité d’entre eux, dans les quatre villages,
sont à l’abri de l’insécurité alimentaire et pour le moment,
la gravité et la fréquence des agressions climatiques ne
dépassent pas un seuil qui, de leur point de vue, rendrait la
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Crédit photo : © 2011 Phalakorn Paomai
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Moyenne des précipitations
Pluviales (%)
Irriguées (%)
Terres agricoles (%)
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Illustration 4 : Zone de recherche au Pérou
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4.2 Pérou : les options en matière de subsistance et les stratégies de migration dans
la province d’Huancayo varient en fonction de l’altitude et de la proximité avec les
centres24
Les recherches ont été menées dans trois villages du sous bassin du Rio Shullcas (et
de ses environs) qui fait partie du bassin fluvial du Mantaro : Acopalca, Paccha et
Chamisería. Ils se situent dans le département de Junín, dans les Andes centrales
péruviennes. Les villages, qui font partie de la province de Huancayo, sont perchés
à des hauteurs allant de 2 500-3 500 mètres au-dessus du niveau de la mer (zone
écologique Quechua) à 4 000-4 800 mètres (zone écologique Puna). (Pour les
données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres
agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site
de recherche, consultez l’Illustration 4 ci-dessous.) Dans cette zone de recherche,
les schémas de mobilité varient considérablement en fonction de l’altitude et de la
proximité de la ville de Huancayo.
La moyenne des précipitations annuelles dans le sous bassin du Shullcas est
actuellement de 800 mm. Les constatations faites pendant les recherches confirment
la perception de régimes pluviométriques de plus en plus imprévisibles qui, ajoutés
au gel et à des vagues de chaleur intense, ont un impact négatif sur la production
agricole. Les principaux changements rapportés dans la zone de recherche
comprennent des précipitations plus intenses mais moins fréquentes, davantage de
pluies torrentielles à des moments inattendus et des périodes sèches plus longues
pendant la saison des pluies. Inondations et sécheresses touchent respectivement
37 pour cent et 42 pour cent des ménages interrogés. La zone de recherche subit
aussi les effets du recul du glacier Huayatapallana. Les autres impacts anticipés du
changement climatique au Pérou comprennent un nombre accru de journées de gel
et une réduction de 10 à 19 pour cent des précipitations .
Le département de Junín faisait état d’un niveau de pauvreté de 32,5 pour cent
en 2010, dont 13,8 pour cent d’extrême pauvreté. La malnutrition chronique
dans les zones montagneuses les plus pauvres du Pérou concerne jusqu’à 50 pour
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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cent des habitants. Dans la zone étudiée, plus d’un tiers
de la population tire sa subsistance de l’agriculture, et les
cultivateurs se plaignent de rendements moindres qu’ils
attribuent à un sol « fatigué ». Parmi les ménages qui ont fait
l’objet de l’enquête, 43,3 pour cent ne possédaient aucune
terre, 39,3 pour cent étaient de petits cultivateurs et 8,8 pour
cent étaient de gros exploitants. Dans les endroits les plus
isolés, en haute altitude, l’économie dépend largement de
l’élevage. À des altitudes plus basses, les ménages dépendent
majoritairement de l’agriculture à petite échelle et de divers
types d’emplois réguliers ou occasionnels dans la ville voisine
de Huancayo. Les régimes fonciers ont un impact non
négligeable sur les stratégies de subsistance des ménages,
et le morcellement des terres dans les zones agricoles
des plaines ne fait que s’aggraver. Les hauts plateaux ne
connaissent pas ce problème, car on y a gardé des régimes
fonciers communaux, une façon de mutualiser les risques
pour gérer les événements climatiques extrêmes. En dépit
du rôle important qu’elles jouent, tant sur le plan familial
que productif, les femmes et les filles restent largement
exclues des processus décisionnels au niveau du ménage
et de la communauté (sans parler des niveaux décisionnels
supérieurs) et leur accès à l’éducation demeure plus limité
que celui des hommes et des garçons. Elles souffrent aussi
davantage des impacts des changements environnementaux,
car elles sont chargées, entre autres responsabilités, de
l’approvisionnement en eau et en bois pour le feu, en plus de
leurs activités dans l’élevage et l’agriculture.
La migration est une stratégie de diversification des moyens de
subsistance et des sources de revenus, de gestion des risques
et d’adaptation aux changements climatiques. Les émigrés
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Crédit photo : © 2007 Nathan Bolster/CARE
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des villages étudiés sont principalement des hommes, jeunes
la production alimentaire s’avère conséquent pour 53 pour
ou adultes, et pratiquent la migration temporaire plutôt que
cent des ménages ayant répondu. Deux tiers des ménages
saisonnière. Comme ils sont, dans leur grande majorité, de
interrogés voient leurs récoltes endommagées et leur
sexe masculin, les femmes se retrouvent avec un supplément
rendement diminuer et pour 42 pour cent d’entre eux, les
de travail et un lourd fardeau émotionnel lorsque les hommes
effets négatifs sur les revenus du ménage sont substantiels.
émigrent de façon prolongée. Les ménages qui vivent sous le
Même si les variations pluviométriques ont un impact direct
seuil de pauvreté, y compris ceux ne possédant aucune terre
sur la sécurité alimentaire des ménages, le problème est
ou un maximum de 0,5 hectare, ont deux fois plus de chances
moins aigu que par le passé dans la zone étudiée, car les
d’émigrer à la recherche de revenus non agricoles que ceux
habitants ne sont plus aussi tributaires des revenus agricoles
qui se trouvent au-dessus de ce seuil. En ce qui concerne les
et qu’ils trouvent davantage d’emplois non agricoles dans les
facteurs qui influent sur les décisions touchant à la migration,
centres urbains. La population de la ville voisine de Huancayo
les pressions induites par les précipitations et l’insécurité
a augmenté de 50 pour cent depuis les années 1980. Il est
alimentaire sont plus souvent citées que les moteurs de la
à noter cependant que les revenus non agricoles s’ajoutent
migration dite d’aspiration (comme les réseaux sociaux et
aux revenus agricoles et qu’ils ne les remplacent pas. Les
l’attrait des « lumières de la ville »). À plus basse altitude, il
modifications de la pluviométrie influent sur la capacité des
est courant qu’un ou plusieurs membres du ménage fassent
ménages à se nourrir et à assurer leur subsistance. En dépit des
le trajet quotidien vers la ville de Huancayo pour travailler
progrès importants affichés par le pays quant à la réduction
dans le bâtiment, le secteur marchand ou d’autres secteurs
de la pauvreté et l’insécurité alimentaire, la migration reste
économiques. Ces ménages pratiquent aussi la migration
une importante stratégie de diversification des revenus,
saisonnière aux confins du bassin amazonien pour la
surtout pour les ménages pauvres et sans terres. Pour éviter
cueillette du café. Par contraste, ceux qui vivent à plus haute
l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance, la moitié
altitude s’engagent dans une migration à plus long terme,
des ménages interrogés cherche à améliorer ses revenus en
notamment en se rendant aux États-Unis comme bergers
pratiquant d’autres activités (facilitées par la migration).
pour des contrats de trois ans. Là, la migration constitue une
stratégie typique de gestion des risques, car à cette altitude,
les sources de revenus sont moins nombreuses (en dehors de
l’élevage de troupeaux).
Les ménages interrogés se plaignaient d’une pluviométrie
de plus en plus imprévisible, qui ajoutée au gel et aux
vagues de chaleur, influe négativement sur la production
agricole. L’impact des modifications des précipitations sur
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Juin 2013
Crédit photo : © 2008 Phil Borges/CARE
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4.3 Viet Nam, delta du Mékong : les populations pauvres
de la commune de Hung Than, sans terres et peu qualifiées,
Moyenne des précipitations
n’ont guère d’options, en dépit de la croissance économique26
Au Viet Nam, les recherches ont été menées dans la commune
de Hung Thanh (district de Thap Muoi, province de Dong
Thap), qui se trouve à environ 135 km de la côte, dans la
région rizicole du delta du Mékong. (Pour les données relatives
à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes,
aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux
l’Illustration 5 ci-dessous.) La zone connaît des crues
annuelles, qui atteignent leur pic en octobre. À l’époque où
Terres agricoles (%)
Irriguées (%)
destinations de migration du site de recherche, consultez
novembre 2011, les crues avaient atteint leur niveau le plus
élevé depuis dix ans dans la commune de Hung Thanh,
complètement inondée mise à part une petite bande de terre
le long de la principale route surélevée. Les ménages pauvres,
qui n’ont que peu ou pas de terres, sont les plus vulnérables
Pluviales (%)
a eu lieu le travail de terrain pour cette étude, d’octobre à
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
face aux modifications des conditions climatiques locales. Ce
sont eux qui bénéficient le moins de l’agriculture intensive
qui se met en place dans la zone étudiée. La mécanisation
croissante de l’agriculture, qui profite aux gros exploitants,
fait baisser la demande de main d’œuvre pour les travailleurs
agricoles sans terres. Ces derniers ont de plus en plus recours
à la stratégie de l’émigration pour faire face aux nombreuses
menaces qui pèsent sur leur subsistance, dont la modification
des régimes de précipitation et de crues, la concentration
croissante de la propriété foncière et la réduction du nombre
d’emplois suite à la mécanisation.
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Illustration 5 : Zone de recherche au Viet
_ 58
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Nam
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Les recherches ont révélé de nombreuses modifications
du régime des précipitations depuis 20-30 ans : le volume
total des précipitations annuelles a augmenté, la saison des
pluies est plus longue, la pluviosité est moins prévisible et le
nombre de phénomènes météorologiques extrêmes, comme
les tempêtes et les pluies torrentielles, est en hausse. En
dépit du volume plus important des précipitations annuelles,
le niveau des crues a baissé au cours des 20-30 dernières
années, comme le montrent les données fournies par la
station de météorologie et d’hydrologie de Cao Lanh pour
la période 1979-2008. Ce paradoxe s’explique par le fait
que les niveaux de crue dépendent en grande partie de la
pluviométrie et de la rétention d’eau intervenant en dehors
de la zone considérée, à savoir en amont du bassin du
Mékong.
Dans la zone étudiée, les moyens de subsistance et la sécurité
alimentaire restent nettement tributaires de l’agriculture en
dépit d’une certaine diversification au cours des dernières
décennies, les transferts d’argent, l’aquaculture et les emplois
salariés gagnant en importance comme sources de revenus.
La grande majorité des répondants à l’enquête auprès
des ménages qui possèdent leur propre rizière (62 % du
total) a indiqué que les rendements ont baissé du fait des
changements intervenus dans les régimes pluviométriques et
de crue. Mais cet impact négatif est quelque peu atténué
par les modifications d’origine humaine apportées aux
cultures, notamment l’utilisation de plus en plus fréquente de
semences et d’engrais améliorés, la construction de digues
et la mécanisation, qui ont contribué à une amélioration du
rendement de la riziculture et à l’intensification des cultures.
Les ménages ne possédant que peu ou pas de terres, qui
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2005 Phil Borges/CARE
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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représentent respectivement 26 et 30,7 pour cent des 150
familles interrogées, sont les moins à même de bénéficier
de ces avancées, quand ils n’en subissent pas le contrecoup,
comme c’est le cas pour la mécanisation. La moitié des
ménages sans terres (50 %) et un quart de ceux qui en
possèdent peu (25,6 %) ont souffert de pénurie alimentaire
pendant les sept jours qui ont précédé l’enquête. Pour y
remédier, ils ont dû emprunter des vivres ou de l’argent pour
acheter à manger (83,3 %), consommer des aliments moins
chers (63,8 %), limiter les portions (50 %) ou réduire la part
des adultes en faveur des enfants (36,1 %). Pour 41,3 pour
cent des ménages sans terres, les apports alimentaires ont
été insuffisants au cours de l’année écoulée et 52,2 pour cent
d’entre eux disent avoir fait face à une situation similaire au
cours des 5 à 10 dernières années, ce qui représente plus
du double de la moyenne de l’ensemble des ménages ayant
fait l’objet de l’enquête. La situation d’insécurité alimentaire
atteint son apogée lors de la saison des crues (de septembre à
novembre), affectant principalement les ménages sans terre
employés comme ouvriers agricoles, pour lesquels le travail
fait défaut en raison de la montée des eaux.
En dépit de l’absence de chiffres officiels sur ce sujet au
niveau de la commune de Hung Thanh, l’ensemble des
informations recueillies par l’enquête auprès des ménages,
les séances de recherche participative et les entretiens auprès
d’experts suggèrent une forte augmentation de la migration
au cours des dix dernières années. Elle devient de plus en
plus fréquente à cause de la pression croissante exercée
sur les moyens de subsistance locaux, la demande accrue
de main d’œuvre industrielle en dehors de la commune et
la levée d’un certain nombre de restrictions politiques sur
Crédit photo : © 2011 Kees van der Geest
_ 62
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
la mobilité. De plus en plus de femmes et d’hommes de la
La majorité des personnes qui ont répondu au questionnaire
commune de Hung Than trouvent du travail dans les zones
notait les effets néfastes des pluies torrentielles, des
industrielles, en particulier à Hô-Chi-Minh-Ville. L’enquête
modifications saisonnières des précipitations et de la fréquence
auprès des ménages révèle que dans 90 des 150 familles
accrue des jours de pluie sur les récoltes et les sources de
interrogées (60 %), au moins un des membres actuels a fait
revenus non agricoles. À la question de savoir si les variations
l’expérience de la migration. Sur les 168 migrants cités dans
des régimes pluviométriques avaient un impact négatif
l’enquête, 106 sont de sexe masculin (63,1 %). Les migrants
sur l’économie du ménage, 89,5 pour cent des personnes
du site de recherche avaient en moyenne 22 ans au moment
interrogées ont répondu « oui », et 35,9 pour cent d’entre
de leur première migration. La migration saisonnière a lieu
elles ont répondu « oui, beaucoup ». En règle générale, les
surtout pendant la saison des crues, lorsque le travail diminue
ménages ont plus souvent tendance à recourir à la migration
au sein de la communauté. Près de la moitié des migrants
comme stratégie de gestion des risques s’ils éprouvent des
choisissent des destinations en dehors du delta du Mékong,
difficultés à assurer leur subsistance localement parce que :
mais restent dans la partie sud du Viet Nam (essentiellement
ils n’ont pas assez de terres ; la demande de main d’œuvre
Hô-Chi-Minh-Ville, Binh Duoung et Dong Nai). Les habitants
agricole n’est pas assez forte ; ils n’ont ni les compétences
de Hung Thanh qui se déplacent au sein de la province sont
ni le capital de départ pour se procurer des revenus non
surtout des migrants saisonniers qui louent leurs services en
agricoles suffisants sur place.
tant que travailleurs agricoles ou ouvriers dans des usines
Même si la migration leur permet de gérer les risques à court
locales pour des périodes de moins de six mois. En plus de
terme, l’impact sur leur résilience à long terme peut être
l’impact indirect de la variabilité pluviométrique sur la mobilité
très négatif. Pour les ménages sans terres et peu qualifiés,
humaine, les recherches de terrain ont mis en lumière un
la migration permet de parer au manque de revenus si
lien direct entre les crues et la migration. Pendant la saison
elle réussit, mais elle peut aussi interrompre le processus
des pluies, le travail diminue au sein de la communauté et
éducatif et d’acquisition de compétences nécessaires pour
beaucoup de jeunes en profitent pour pratiquer la migration
renforcer leurs capacités à surmonter les chocs et prospérer
saisonnière. Ce phénomène illustre le fait que pour ces
économiquement.
communautés, il existe un facteur récurrent non négligeable
qui influe, et continuera d’influer, sur les décisions relatives à
la migration.
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Moyenne des précipitations
Pluviales (%)
Irriguées (%)
Terres agricoles (%)
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Illustration 6 : Zone de recherche en Inde
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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4.4 Inde : les ménages pauvres de Janjgir-Champa continuent d’utiliser la migration
saisonnière pour assurer leur sécurité alimentaire, en dépit de l’irrigation, de
l’industrialisation et des mesures de protection sociales et économiques27
Les recherches menées en Inde couvraient quatre villages du district de JanjgirChampa, dans l’État du Chhattisgarh : Jullan Pakaria, Akalteri, Banahil et Silli. Les
agriculteurs dépendent presque entièrement d’une unique récolte annuelle de
riz qu’ils cultivent pendant la saison de la mousson. (Pour les données relatives
à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la
fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche,
consultez l’Illustration 6 ci-dessous.) L’insécurité alimentaire reste forte, bien que la
majorité des paysans de ces villages (84 %) aient accès à des canaux d’irrigation.
Le système d’irrigation permet une récolte par an. Il n’y a pas assez d’eau pour
une deuxième (rabi), et les agriculteurs locaux semblent avoir presque totalement
abandonné la production de légumes secs et d’autres cultures, ce qui explique le
haut niveau de chômage pendant la saison sèche. La migration devient alors une
stratégie d’ajustement, notamment pour les petits exploitants ou les ménages sans
terres.
Le projet s’est focalisé sur les problèmes liés à la pluviosité (sécheresse, moussons
tardives ou erratiques, décalage des saisons) auxquels sont confrontés les ménages
des quatre villages étudiés. Les recherches ont mis en lumière des changements
ayant un impact négatif sur la sécurité alimentaire. Même si la moyenne annuelle
des précipitations ne décroît pas de façon perceptible, les experts signalent une
baisse non négligeable du nombre annuel de jours de pluie (qui est passé de 65
à 56) et un décalage d’une semaine pour le début de la mousson (du 10 au 17
juin), ce que confirment les données météorologiques locales. Le niveau de la nappe
phréatique aurait également baissé. D’après plus d’un tiers des ménages interrogés,
la fréquence des sécheresses et des périodes sèches est en augmentation depuis 1020 ans. Près de 60 pour cent d’entre eux disent souffrir du fait que les saisons des
pluies ont raccourci.
Les habitants des villages étudiés dépendent largement de l’agriculture pour leur
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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subsistance. Les experts et les participants aux groupes
comme ayant un impact essentiel sur la sécurité alimentaire
de discussion s’accordent à dire qu’à Chhattisgarh, et en
: les Panchayat villageois (organes d’autogestion élus), les
particulier dans la zone étudiée, les principaux problèmes
centres Anganwadi (crèches/programmes de nutrition pré-
agricoles sont les suivants : moussons/saisons décalées,
scolaire), les magasins de distribution de rations (système
monoculture du riz/récolte annuelle unique, maladies
public de distribution à prix équitable) et le bureau de poste.
chroniques des cultures, agriculture intensive à haut niveau
S’il existe d’importants programmes nationaux de sécurité
d’intrants et non durable, manque de main d’œuvre au
sociale, notamment de rations alimentaires pour les familles
moment des récoltes et prix défavorables aux producteurs.
vivant sous le seuil de pauvreté et un système garantissant
Même si les quatre villages ont accès à l’irrigation par canaux,
100 jours d’emploi (MGNREGA), ceux-ci ne sont pas toujours
celle-ci reste insuffisante pour beaucoup d’agriculteurs,
administrés de manière équitable et transparente, selon les
vu le peu d’eau disponible et le manque de gestion des
participants aux groupes de discussion, si bien que certaines
systèmes. Les habitants dépendant essentiellement de la
familles pauvres ne peuvent en tirer profit.
monoculture du riz pendant la mousson, il n’est pas étonnant
que lorsqu’ils ont dû classer les menaces pesant sur leurs
L’émigration est essentiellement saisonnière sur le site de
moyens de subsistance au cours des séances de recherche
recherche (environ 66 %). L’émigration effectuée de janvier
participative, ils aient cité en premier lieu des risques liés
à mai, après la principale récolte qui a lieu en novembre et
à la pluviométrie, tels que les précipitations (en retard ou
décembre, est le schéma le plus courant. La majorité (88 %)
erratiques), le décalage des saisons, les crues soudaines et la
est constituée de migrants économiques à la recherche de
pénurie d’eau potable. La croissance rapide de la population
meilleurs moyens de subsistance et de nouvelles sources de
a des implications tout aussi importantes sur la sécurité
revenus. Ceux qui émigrent pour parfaire leur éducation ne
alimentaire des sites étudiés, étant donné le morcellement
comptent que pour 2 pour cent du total. Les émigrés des
des terres voulu par le système traditionnel d’héritage. C’est
villages étudiés cherchent du travail dans les briqueteries (34
sans doute pourquoi on observe que le nombre de ménages
%), ou des emplois occasionnels dans le secteur informel (28
qui s’engagent pour des travaux agricoles à la journée est
%) et le bâtiment (16 %). Les principales destinations sont
nettement plus élevé qu’il y a dix ans, selon les résultats de
Raipur (capitale du Chhattisgarh), Korba (mines de charbon
l’enquête. D’après les participants aux groupes de discussion,
dans la partie nord du Chhattisgarh) et les grandes villes à
les habitants cherchent à surmonter l’insécurité alimentaire
l’est de l’Inde (Calcutta), à l’ouest (Pune et Ahmedabad) et
en demandant de l’aide à leur famille ou à des institutions, en
au nord (Allahabad, Chandigarh, Amritsar, Shimla, Jammu,
réduisant leur consommation et leurs dépenses alimentaires,
Ladakh et Delhi). Ce type de migration saisonnière se fait
ou en essayant d’améliorer leurs revenus sans pour autant
d’autant plus facilement qu’il existe un réseau informel
quitter leur village. En ce qui concerne les mesures de
d’intermédiaires et de courtiers. Même si les habitants des
protection sociales ou économiques et les institutions,
villages étudiés se déplacent le plus souvent en famille (seuls
les communautés ont mentionné les organismes suivants
19 pour cent sont célibataires), la majorité des migrants
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2011 Julie Maldonado
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est de sexe masculin (62 pour cent). La migration familiale
a ceci de positif qu’elle permet de préserver l’intégrité des
ménages, mais elle perturbe l’éducation des enfants en âge
d’être scolarisés et réduit leurs contacts avec l’enseignement
scolaire ce qui, à long terme, affecte les revenus et la mobilité
sociale des ménages concernés.
La migration est l’une des plus importantes stratégies
auxquelles les habitants des villages étudiés font appel
face aux variations pluviométriques, aux changements
climatiques et à l’insécurité alimentaire. Même ceux qui
restent et obtiennent un emprunt risquent de devoir migrer
pour rembourser leurs dettes. C’est pourquoi la migration est
souvent le dernier recours des ménages sans ressources et
sans terres, surtout quand ils n’ont pas accès à ou ne peuvent
bénéficier d’autres options pour assurer leur subsistance sur
place. Pourtant, même si elle leur permet de surmonter des
obstacles, la migration n’accroît pas leur résilience pas plus
qu’elle ne leur permet de saisir de meilleures opportunités.
Dans certains cas, elle a des conséquences négatives sur les
relations entre générations, car elle nuit à l’apprentissage des
compétences et la poursuite des études qui permettraient
aux ménages d’améliorer leur qualité de vie et leur santé
et d’acquérir les qualifications nécessaires pour se procurer
des revenus stables. Des centrales électriques récemment
construites dans la région devraient, en principe, absorber
la main d’œuvre agricole qui se cherche d’autres possibilités
d’emploi, mais en réalité, d’après les groupes de discussion,
elles sont en compétition avec les communautés pour les
mêmes ressources (terres, eau, air pur) et à ce jour, elles n’ont
guère fourni d’emplois aux habitants des villages étudiés.
Au lieu de cela, elles importent une main d’œuvre qualifiée,
forçant les villageois à aller chercher leur subsistance ailleurs.
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Crédit photo : © 2011 Julie Maldonado
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4.5 Bangladesh : la migration est une stratégie d’ajustement clé pour les ménages
pauvres de Kurigram, mais les coûts sociaux en sont élevés28
Moyenne des précipitations
Des recherches ont été menées dans quatre villages du district de Kurigram, au nordouest du Bangladesh : Khanpara, Khamar Holokhana, Arazi Khodomtola, Doalipara.
Le niveau de pauvreté y est très élevé, 75 pour cent des habitants dépendant
directement de l’agriculture pour leur subsistance. La région est baignée par les
fleuves Brahmapoutre et Dharala, et les revenus agricoles des villageois fluctuent
en fonction des sécheresses, des inondations et de l’érosion des berges. (Pour les
données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres
recherche, consultez l’Illustration 7 ci-dessous.)
Terres agricoles (%)
Irriguées (%)
agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de
la taille de leur propriété foncière, sont plus « sensibles » aux sécheresses, autrement
dit à la variabilité pluviométrique, car ils dépendent, pour leur subsistance, de
l’agriculture pluviale agrémentée d’un accès limité à l’irrigation. Quant aux « plus
pauvres », qui ne possèdent que peu ou pas de terres, leur vulnérabilité est forte
notamment du fait qu’ils disposent de qualifications et d’un patrimoine plus limités
Pluviales (%)
Les ménages « pauvres » ou de la « classe moyenne », dont le statut social dépend de
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
pour surmonter les chocs. La migration rurale à la recherche d’emplois agricoles sert
de stratégie de protection contre l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance
liée entre autres aux facteurs de stress climatiques.
La quantité totale de pluies de mousson n’a diminué que de façon minime au
Kurigram, cependant la variabilité pluviométrique augmente. Les données sur les
précipitations fournies par les stations météorologiques locales révèlent que de 1979
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
à 2012, la hauteur totale des pluies de mousson (1er juin – 30 septembre) a varié de
moins de 1 000 mm à plus de 2 500 mm certaines années. Les pluies de la mousson
ont été insuffisantes en 2011 : elles n’ont fourni que 57, 75 et 87 pour cent de la
moyenne à long terme pour les mois de juin, juillet et août respectivement. À cela
se sont ajoutées 24 journées consécutives sans pluie. La majorité des habitants de la
Illustration 7 : Zone de recherche
zone étudiée a noté des changements majeurs en matière de régime pluviométrique
au Bangladesh
_ 70
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Crédit photo : © 2009 Josh Estey/CARE
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au cours des 10-30 dernières années. Cette opinion est sans
doute colorée par des vécus plus récents, comme les trois
semaines sans pluie intervenues au milieu de la mousson
2011 : 96 pour cent des personnes interrogées ont mentionné
l’augmentation des périodes sèches et des sécheresses et 84
pour cent, celle de la fréquence des phénomènes climatiques
extrêmes. Plus de 90 pour cent des participants à l’étude se
souvenaient qu’une année était auparavant constituée de
six saisons distinctes, alors qu’il n’y en a plus que quatre à
présent. Les groupes de discussion ont dit aussi constater
une diminution drastique de la période de pluviosité appelée
localement Kaitan Satao (au mois d’octobre). Enfin, le district
est très exposé aux inondations, aux sécheresses et aux pluies
torrentielles, d’après respectivement 65, 46 et 38 pour cent
des répondants. Ces inondations sont généralement dues
à de fortes précipitations locales, mais même une mousson
normale peut provoquer de graves inondations à Kurigram
si elle s’accompagne de pluies diluviennes en amont, dans le
nord de l’Inde et l’Himalaya.
Dans le district de Kurigram, les sources locales de revenus
agricoles sont saisonnières et sensibles aux changements de
régime pluviométrique. Les périodes sans pluie intervenues
pendant la cruciale saison aman (repiquage du riz), que les
participants aux séances de recherche ont décrites comme
sans précédent, nuisent gravement à la sécurité alimentaire/
des moyens de subsistance des ménages. Le taux de pauvreté
a baissé lors des dernières décennies, mais l’insécurité
alimentaire chronique reste un problème majeur à Kurigram,
surtout pendant la période de pénurie alimentaire (Monga),
qui culmine en septembre et octobre. Même si la production
agricole a augmenté dans le district grâce, en grande partie,
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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à l’introduction de variétés produisant un meilleur rendement
et à une plus grande intensité culturale, les ménages pauvres
en bénéficient très peu, étant donné le prix élevé des
intrants et la rareté des terres disponibles. La croissance de la
population est également un facteur d’insécurité alimentaire
pour les ménages locaux. Ainsi, la taille de Khanpara, qui
comptait environ 200 habitants il y a 30 ans, a presque triplé
: le village dénombre aujourd’hui 590 habitants. Les terres
auparavant cultivées par 25 familles doivent à présent faire
vivre 118 ménages.
À Kurigram, la migration est un phénomène très fréquent
depuis les années 1970. Les ménages ruraux pauvres et
sans terres y ont recours pour éviter l’insécurité alimentaire
saisonnière. Près de la moitié d’entre eux (43 pour cent des
familles interrogées) comptent sur les revenus de l’émigration.
Dans les villages étudiés, les émigrants ont en moyenne
37 ans (ils sont plus âgés que ceux qui migrent « pour
répondre à leurs aspirations ») et n’ont bénéficié que de 3,5
ans de scolarisation. Chaque migrant fait 22 déplacements
en moyenne. La migration saisonnière est le schéma le
plus courant (environ 80 pour cent des cas), et chaque
déplacement dure 5,3 mois en moyenne. Sur le site étudié, 98
pour cent des déplacements migratoires se font à l’intérieur
du Bangladesh. Dans leur grande majorité, les migrants des
villages de Kurigram se déplacent pour trouver de l’emploi
comme ouvriers agricoles dans d’autres zones rurales, car
cela ne leur demande pas d’autres qualifications que celles
qu’ils possèdent déjà. Les régions agricoles de Munshiganj
et Feni sont les deux destinations les plus courantes pour
les migrants saisonniers d’après les participants aux groupes
de discussion à Khanpara. Selon leurs dires, il y existe en
Crédit photo : © 2009 Josh Estey/CARE
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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effet une forte demande de main d’œuvre agricole, ce qui
locale (et donc sur les moyens de subsistance des habitants)
en fait une destination (rurale) de choix en particulier au
de ces deux variations climatiques sont graves. Si les
moment des récoltes, à cause de l’intensité culturale accrue
ménages les plus riches peuvent craindre les effets de la
et de l’émigration locale qui y sévit. Beaucoup de villageois
variabilité pluviométrique en raison des plus grandes surfaces
travaillent aussi temporairement dans les villes de Dhaka
agricoles dont ils disposent, ils y sont en réalité moins
et Rangpur où les salaires sont plus élevés dans le secteur
sensibles car ils possèdent davantage de biens et disposent
du prêt-à-porter ou dans l’économie informelle. Même si
de multiples sources de revenus. Les ménages pauvres,
la vaste majorité des migrants des villages étudiés sont de
sans terres et peu qualifiés, qui dépendent essentiellement
sexe masculin (97 %) et chefs de famille (89 %), ce sont
des cultures pluviales tant pour leur subsistance que pour
les femmes qui assument presque entièrement le coût social
leur sécurité alimentaire, sont plus sensibles à la variabilité
de la migration. Demeurant sur place, elles doivent souvent
pluviométrique. Ce sont eux qui émigrent le plus souvent, à
assumer la culture de la terre familiale et s’engagent parfois
cause de l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance
comme journalières occasionnelles pour nourrir leur famille
en période d’absence ou d’imprévisibilité des pluies. Les
et rembourser leurs dettes. En outre, les adolescentes et
ménages sans terre extrêmement pauvres sont sensibles à la
les jeunes femmes sont victimes de harcèlement sexuel en
variabilité pluviométrique, mais ne disposent généralement
l’absence des hommes de la famille, devenant ainsi les cibles
pas des ressources nécessaires pour émigrer vers des zones
de l’opprobre sociale ou contraintes à un mariage précoce
où la demande de main d’œuvre agricole est plus élevée.
avec des implications sociales et démographiques négatives
C’est pourquoi cette population « piégée » souffre d’une
à long terme.
insécurité alimentaire aiguë tout au long de l’année. Le cas
des ménages qui ont le degré d’éducation et les aptitudes
À Kurigram, la migration est une stratégie d’adaptation
nécessaires pour saisir des opportunités d’emploi, et dont
majeure pour surmonter des conditions économiques
un membre au moins a émigré, est différent. L’argent
défavorables
environnementales
qu’envoient les migrants travaillant de façon permanente
inattendues, notamment les implications locales de la
ou
des
conditions
dans les zones urbaines contribue à la sécurité alimentaire de
variabilité pluviométrique. 89 pour cent des répondants ont
ces familles. En revanche, les ménages qui ne possèdent que
noté que le régime climatique et la variabilité pluviométrique
peu de terres et de compétences et pratiquent la migration
actuels ont un impact sur le budget familial. Pour 39 pour
saisonnière agricole parviennent rarement à briser le cycle de
cent des ménages interrogés, l’allongement des périodes
l’insécurité alimentaire, de l’endettement et de la migration
sèches constitue une raison « très importante » d’émigrer
temporaire pour trouver du travail. Pour eux, la migration est
alors que pour 36 pour cent d’entre eux, les sécheresses plus
une stratégie d’ajustement destructive, qui à la longue nuit
fréquentes peuvent être un déclencheur « très important »
à leur bien-être.
de la migration. Les retombées sur la production agricole
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Moyenne des précipitations
Pluviales (%)
Irriguées (%)
Terres agricoles (%)
Illustration 8 : Zone de recherche au Ghana
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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4.6 Ghana : la forte dépendance envers l’agriculture pluviale dans le district de
Nadowli explique la persistance de la migration saisonnière comme stratégie
d’ajustement29
Les recherches ont été menées dans quatre villages du district de Nadowli : Mantari,
Nanville, Takpo, et Zupiri. Ceux-ci se trouvent dans le Haut Ghana occidental,
région la plus pauvre du pays. (Pour les données relatives à la situation, au paysage,
aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses
et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 8 cidessous.) Les paysans de ces villages n’ayant pas accès aux systèmes d’irrigation,
la production agricole se limite de fait à une récolte par an et est entièrement
tributaire de la pluviométrie. Cette forte dépendance à l’égard des précipitations et
le manque de moyens de subsistance alternatifs in situ accroissent la vulnérabilité
aux changements climatiques des ménages pauvres de ces villages et perpétuent le
recours à la migration (saisonnière, temporaire ou permanente ) comme stratégie de
subsistance et comme mécanisme pour surmonter l’insécurité alimentaire.
Le climat de cette région est marqué par une saison des pluies (de mai à septembre/
octobre) et une saison sèche (le reste de l’année). Au cours des 20-30 dernières
années, les changements suivants ont été observés dans le régime pluviométrique des
villages étudiés : augmentation des pluies torrentielles entraînant des inondations,
saison des pluies décalée (d’avril à mai) ainsi que des périodes sèches associées à
des températures élevées. Les résultats de l’enquête auprès des ménages montrent
que 92 pour cent des participants ont perçu des changements dans la pluviométrie
au cours de cette période : 87,3 pour cent des personnes interrogées estiment que
les sécheresses ont été plus nombreuses au cours des 10-30 dernières années et
64,8 pour cent parlent de phénomènes climatiques plus extrêmes. Cette perception
qu’ont les villageois d’un climat de plus en plus imprévisible est largement corroborée
par les données météorologiques locales et les avis d’experts, qui confirment une
hausse des températures moyennes et une plus grande fréquence de phénomènes
comprenant tant des périodes sèches plus longues que des pluies plus fortes pendant
la période des semis. L’analyse du retard de la saison des pluies n’a quant à lui pas
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Crédit photi : © 2011 Christina Rademacher-Schulz/ UNU-EHS
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été établi de façon irréfutable : l’analyse des données météorologiques de la station
de Wa ne confirment pas cette tendance mais l’analyse plus large des données
des différentes stations météorologiques du nord du Ghana montre que celle-ci a
débuté avec un décalage de plus de quinze jours entre 1961 et 2001 .
La sécurité alimentaire/des moyens de subsistance de 85 pour cent des habitants de
ce district est tributaire de l’élevage ou d’une agriculture de subsistance. Le degré
de diversification économique est minime. Les principaux aliments de base sont le
mil, le maïs, le sorgho et l’igname. La culture commerciale de l’arachide prend de
l’ampleur, car elle permet aux paysans de se procurer des vivres sur les marchés locaux
pour nourrir leur famille. Le manque d’appui aux petits exploitants, qui n’ont, par
exemple, qu’un accès limité aux intrants agricoles bon marché (engrais, pesticides)
compromet la sécurité alimentaire des ménages vivant dans la zone étudiée,
tout comme les pertes élevées dues aux ravages des nuisibles après les récoltes.
Pendant la saison sèche, la population s’adonne au commerce, à la transformation
des aliments et à la migration saisonnière. Pour la majorité des ménages interrogés
sur le site de recherche (98 %), les changements dans le régime des précipitations
ont un effet néfaste sur les récoltes, ce qui aggrave leur situation économique. Les
périodes sèches ou les fortes pluies survenant à des moments cruciaux de la saison
agricole peuvent affecter les récoltes et en réduire, voire en détruire entièrement,
le rendement, causant ainsi des pénuries alimentaires. Ces effets néfastes sur les
cultures provoquent la hausse des prix des aliments. Pour trente-sept pour cent
des ménages interrogés, la flambée des prix réduit l’accès à la nourriture pour leur
famille. Pendant la période de soudure précédant la récolte suivante (mai à août),
75 pour cent des répondants ne disposaient pas de nourriture en quantité suffisante
pour couvrir les besoins du ménage et 69 pour cent ne disposaient pas de l’argent
nécessaire à l’achat de vivres. D’après 37 pour cent des répondants, la production
animale, pourtant la « soupape de sécurité » qui, en temps de crise, leur permet de
vendre une partie de leur cheptel afin de se procurer les revenus nécessaires à l’achat
de vivres au marché, a également chuté. Pour surmonter l’insécurité alimentaire,
due en grande partie à la variabilité pluviométrique, les répondants ont mentionné
les stratégies d’ajustement suivantes, par ordre d’importance (plusieurs réponses
autorisées) : vente de biens (29 %), réduction de la consommation de nourriture
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(21 %), diversification des revenus du ménage (14 %), principalement par la
migration, et modification des cultures soit en les diversifiant, soit en semant
des variétés à maturation précoce ou en répandant plus d’engrais (11 %).
Conformément aux normes sociales et culturelles de la zone étudiée,
la migration est plus courante chez les hommes que chez les femmes. Il
n’empêche que les émigrées se font plus nombreuses depuis les années
1980 et qu’à l’heure actuelle, les femmes comptent pour 31 pour cent
des migrants. L’âge moyen des migrants lors de leur premier déplacement
est de 23 ans. Ils ont recours à cette stratégie avant tout pour des raisons
économiques (83 %). Neuf pour cent seulement le font pour étudier . Les
résultats de l’enquête auprès des ménages montrent que 39 pour cent sont
des migrants saisonniers, 36 pour cent des migrants permanents, et les
derniers 25 pour cent des migrants temporaires. Les résultats des recherches
participatives confirment que la migration saisonnière domine. Les débats
sur la mobilité et les calendriers saisonniers au sein des groupes de discussion
ont révélé que les migrants se déplacent en général pendant la saison sèche
et reviennent pour participer aux travaux agricoles dans leurs champs
lorsque la saison culturale reprend. En cas de pénurie alimentaire aiguë,
des membres de la famille sont parfois obligés d’émigrer à des moments
inhabituels, comme pendant la saison des pluies. Les principales activités
économiques des migrants sont les travaux agricoles (52 %) et miniers (14
%). Les destinations les plus courantes sont les régions de Brong Ahafo
(38 %) et Ashanti (39 %). La région de Brong Ahafo (ceinture médiane du
pays), aux terres plus fertiles que dans le nord du Ghana, produit en effet
deux récoltes par an. Les zones aurifères du pays attirent de jeunes migrants
saisonniers qui espèrent faire fortune en peu de temps. La migration vers ces
régions est facilitée à présent à la fois par les réseaux qui se sont développés
entre migrants du site de recherche et par des systèmes de transport régulier
vers ces destinations.
Les membres de la famille migrent essentiellement pour des raisons de
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance, laquelle est directement
Crédit photo : © 2009 Sarah Bones/CARE
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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liée à des facteurs climatiques et environnementaux, étant
donné la dépendance des villageois envers les cultures
pluviales. L’enquête auprès des ménages a montré que
les principales raisons de la migration sont les suivantes
: déclin de la production agricole vivrière pour leur propre
consommation ; changements relatifs à la saison des pluies
; chômage ; périodes de sécheresse plus longues, suivies de
récoltes imprévisibles ; fréquence accrue des sécheresses.
Les dix facteurs les plus importants sont exclusivement
de nature agricole (ou relatifs à l’élevage) et ont un lien
avec la sécurité alimentaire et la variabilité climatique/
pluviométrique. C’est pourquoi, pour les ménages pauvres
du site de recherche, la migration vers d’autres régions du
pays est une stratégie courante pour diversifier les revenus
et recevoir les transferts d’argent qui permettront l’achat de
vivres. La migration permet à ces ménages de remédier à
l’absence de revenus, mais elle ne sert pas à améliorer leur
bien-être à long terme. Ce type d’ajustement peut avoir des
conséquences négatives, par exemple lorsque les chefs de
famille (qui ont émigré à la recherche de nourriture ou de
revenus pour acheter des vivres) ne sont pas présents pour
venir en aide aux autres membres du foyer. En revanche,
les ménages plus aisés disposent de sources de revenus plus
diversifiées, les membres en âge de travailler y pratiquent
davantage la migration saisonnière et sont donc beaucoup
moins vulnérables face aux impacts négatifs des changements
pluviométriques. Pour eux, la migration saisonnière est
plutôt un outil concourant à leur progression sur l’échelle
sociale. Les femmes chefs de famille sont plus vulnérables
que les hommes : leurs ménages sont davantage menacés
par l’insécurité alimentaire, les personnes en âge de travailler
y sont moins nombreuses, elles possèdent moins de terres et
pratiquent un peu moins la migration que leurs homologues
masculins.
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Terres agricoles (%)
Pluviales (%)
Irriguées (%)
Moyenne des précipitations
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Illustration 9 : Zone de recherche au Guatemala
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4.7 Guatemala : le manque de diversification des moyens de subsistance et de
possibilités migratoires laisse peu d’options aux habitants de Cabricán33
Les recherches ont été menées dans quatre villages de la municipalité de Cabricán,
sur les hauts-plateaux orientaux du Guatemala : El Cerro, Buena Vista, El Durazno,
et Quiquibaj. Située à 2 625 mètres au-dessus du niveau de la mer, Cabricán est
l’une des municipalités les plus pauvres du pays. (Pour les données relatives à
la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la
fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche,
consultez l’Illustration 9 ci-dessous.) La population appartient à la communauté
autochtone Mam et dépend fortement des précipitations pour son unique récolte
annuelle.
Cabricán est située dans une région froide, avec une saison des pluies et une saison
sèche bien démarquées. Le régime pluviométrique normal est bimodal, avec des
pics en juin et en septembre. La hauteur annuelle totale des précipitations, qui
tombent majoritairement de mai à octobre, a fluctué de quelques 600 mm à plus de
1 400 mm, au cours des 35 dernières années. Les données météorologiques locales
des quatre dernières décennies montrent une tendance vers des précipitations
totales plus importantes, les périodes de hausse alternant avec des périodes de
diminution. El Niño est un déterminant important du calendrier et de la pluviosité
au Guatemala. Or, il a augmenté tant en fréquence qu’en intensité au cours des
60 dernières années : trois apparitions (toutes modérées) de 1951 à 1970, cinq
(dont deux fortes, et une très forte) de 1971 à 1990 et six (dont une très forte) de
1991 à 2010 . El Niño a un impact négatif sur la pluviométrie, surtout sur la côte
Pacifique du Guatemala et en particulier pendant les mois d’août et de septembre
. Les personnes qui ont répondu à l’enquête auprès des ménages ont mentionné
plusieurs modifications non négligeables du climat local ces dernières décennies
: la saison des pluies s’est raccourcie, les pluies sont moins fréquentes mais plus
intenses et les périodes sèches sont plus longues. Les participants aux groupes de
discussion ont confirmé ces constatations, les personnes âgées déclarant qu’il y a 30
ans, la saison des pluies commençait en mars et se terminait en octobre/novembre.
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Au fil du temps, les pluies ne sont plus arrivées qu’en mai/
juin et s’arrêtent normalement en octobre. Soixante-sept
pour cent des ménages interrogés ont mentionné une
augmentation des pluies diluviennes et soixante-cinq pour
cent, une augmentation des phénomènes climatiques
extrêmes pendant les 10-20 dernières années. Au cours des
13 dernières années, le Guatemala a été sérieusement touché
par une pluviométrie extrême associée à des ouragans et des
tempêtes tropicales : Mitch en 1998, Stan en 2005, Agatha
en 2010 et la dépression tropicale 12-E en 2011. Ces quatre
phénomènes ont produit des précipitations anormalement
élevées et les tempêtes ont provoqué des dégâts importants
dans les municipalités des hauts-plateaux de l’ouest comme
Cabricán.
Les recherches menées pour le projet ont confirmé le manque
de diversification des systèmes de subsistance locaux : 66
pour cent des ménages citent l’agriculture comme principale
activité économique. Les familles paysannes des villages
étudiés pratiquent un système d’agriculture de subsistance,
le milpa (maïs, associé à différents types de fèves), avec une
seule récolte par an. À Cabricán, les propriétés foncières
mesurent moins d’une manzana (7 000 mètres carrés) dans
90 pour cent des cas, et plus de 90 pour cent de la population
gagnent moins de deux dollars US par jour. La qualité du
logement, plus élevée pour les ménages recevant des
transferts d’argent, est ce qui les distingue principalement les
uns des autres. L’insécurité alimentaire, qui culmine pendant
les mois précédant la récolte de novembre, est très répandue
: 78 pour cent des personnes interrogées disent avoir souffert
de pénurie alimentaire au moins une fois au cours des dix
dernières années. Le manque d’accès à des aliments nutritifs
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Photo credit : © 2008 Brian Atkinson/CARE
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(peu de produits dans les marchés locaux) et de mauvaises
habitudes alimentaires (tendance prononcée à consommer
trop de maïs) rendent la situation encore plus précaire. Le
tissage est en train de devenir la deuxième source de revenus
par ordre d’importance, 22 pour cent des ménages le citant
comme leur activité principale et 30 pour cent comme leur
deuxième activité la plus importante. Ceci dit, les tisserands
ne sont payés que pour le volume de travail fourni au
propriétaire des métiers à tisser, qui contrôle tant les intrants
(fournitures) que la vente des produits finis. Cela ne permet
guère d’envisager cette activité comme une stratégie viable
de diversification des revenus à long terme.
La mobilité humaine est une stratégie courante de gestion
des risques sur le site de recherche. Au Guatemala, les
historiens la font remonter aux années 1870, lorsque le
café est devenu un important produit d’exportation et que
la population autochtone des hauts plateaux a commencé
à fournir l’essentiel de la main d’œuvre des plantations.
Aujourd’hui, les données de l’enquête auprès des ménages
montrent que, dans 97 pour cent des cas, l’émigration à
Cabricán est entreprise dans le but de réduire la variabilité de
la consommation et des revenus familiaux liés aux cultures
pluviales. Seuls 25 pour cent des ménages disent avoir fait
l’expérience de la migration, ce qui est peut-être une sousestimation due à la crainte d’avouer qu’un membre du
ménage vit à l’étranger. Les migrants sont à 77 pour cent
de sexe masculin, 80 pour cent d’entre eux sont mariés
ou en union consensuelle. Outre le caractère patriarcal de
la société guatémaltèque, la langue présente un obstacle
supplémentaire pour les femmes de Cabricán, dont beaucoup
ne parlent que le dialecte mam.
Photo credit : © 2011 Andrea Milan/UNU-EHS
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Vu l’isolement économique relatif de Cabricán à l’échelle
Lorsqu’on a demandé aux personnes interrogées si les
nationale, les possibilités de migration (tant saisonnière à
changements de pluviométrie avaient un impact sur la
l’intérieur du Guatemala qu’à plus long terme aux États-
production de vivres, 68 pour cent ont répondu « oui,
Unis) se font rares : 70 pour cent des ménages disent aspirer
beaucoup » et 29 pour cent « oui, mais seulement un peu
à une migration non saisonnière à destination des États-Unis
». Dans les quatre villages, les participants aux groupes de
(New York, le New Jersey, la Virginie ou Los Angeles), où les
recherche ont exprimé de graves inquiétudes quant à l’avenir
villageois ont établi des réseaux au fil des années. Or, cette
de leur famille et de leur communauté. Les préoccupations
démarche est devenue beaucoup plus difficile depuis dix ans
des ménages concernent la viabilité à long terme de leurs
pour les raisons suivantes : renforcement des contrôles à la
systèmes agricoles et de l’accès aux aliments. Selon eux,
frontière américaine ; baisse de la demande de main d’œuvre
rares sont les possibilités de diversification des ressources
immigrée aux États-Unis ; coût élevé (de 45 000 à 60 000
(comme le tissage, où les revenus baissent aussi, vu l’excès
quetzales, soit environ 6 000 dollars US) ; conditions de
de main d’œuvre). Les facteurs de stress climatiques,
voyage plus dangereuses à travers le Mexique.
l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance et les
La migration interne vers des centres urbains comme
obstacles à la migration ne laissent aux paysans locaux
Quetzaltenango ou Ciudad de Guatemala a moins la faveur
que peu d’alternatives viables pour diversifier leurs revenus
des ménages. Par le passé, la migration saisonnière interne
et affranchir leur famille de la pauvreté, que ce soit par
était chose courante, tant vers la côte sud que vers l’intérieur
l’adaptation sur place ou par la migration.
des terres, mais le marché du travail s’y est fortement
contracté suite au passage à des cultures requérant une main
d’œuvre moins nombreuse (canne à sucre au lieu de coton).
De plus, les producteurs des cultures d’exportation engagent
désormais la main d’œuvre agricole locale à plein temps.
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Moyenne des précipitations
Pluviales (%)
Irriguées (%)
Terres agricoles (%)
Variabilité Pluviométrique/
Fréquence des sécheresses
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Illustration 10 : Site de
recherche en Tanzanie
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4.8 Tanzanie : la migration est une stratégie d’ajustement tant pour les petits
exploitants agricoles que pour les éleveurs qui luttent pour leur sécurité alimentaire
dans le même district36
En Tanzanie, les recherches pour le projet ont été menées dans trois villages du
district de Same: Bangalala, Ruvu Mferijini et Vudee. Ils sont situés dans la région
du Kilimandjaro, zone semi-aride du bassin de la rivière Pangani, dans le nord-est
du pays. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations
moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de
migration du site de recherche, consultez l’Illustration 10 ci-dessous.) Étant donné
la forte dépendance envers l’agriculture et le peu d’opportunités d’emplois non
agricoles dans le district, des précipitations insuffisantes ou malvenues se traduisent
souvent par la perte des récoltes, l’insécurité alimentaire et la migration des ménages
pauvres qui n’ont que peu ou pas accès à de bonnes terres et à l’irrigation.
Au cours des 60 dernières années, la moyenne annuelle totale des précipitations,
caractérisées par un régime bimodal avec de « longues » pluies (masika) de mars
à mai et de « courtes » pluies (vuli) de septembre à décembre, a été de 560 mm/
an en moyenne. Les recherches effectuées pour le projet mettent en évidence la
perception généralisée que le régime des précipitations a énormément changé dans
le district de Same au cours des 20 dernières années. Les changements perçus sont les
suivants : (1) fréquence accrue de périodes sèches prolongées pendant la saison des
pluies ; (2) arrivée plus tardive et arrêt plus précoce des pluies ; (3) fréquence accrue
des violentes tempêtes. En plus des changements relatifs aux dates et à la répartition
des deux saisons des pluies annuelles, les habitants citent des températures plus
élevées et des vents plus violents comme facteurs d’aggravation des pénuries d’eau
locales dues au climat. L’analyse des données sur la pluviosité locale au cours des
30 dernières années confirme la perception locale d’une modification négative de
la pluviosité, avec notamment : une diminution des pluies pendant la saison longue
(masika) et des précipitations annuelles totales ; une réduction du nombre de jours
de pluie par an (qui sont passés de 90 à 71) ; un arrêt précoce de la saison des pluies,
et donc des saisons végétatives plus courtes.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Les données fournissent aussi des exemples spectaculaires
de revenus en dehors des travaux des champs. Quant à
du caractère imprévisible des précipitations, comprenant
l’agriculture locale, elle dépend largement de la pluviométrie,
plusieurs cas présentant des niveaux annuels très bas,
soit directement, soit par le biais de systèmes d’irrigation
suivis d’années marquées par une pluviosité abondante.
locaux (dont des retenues d’eau traditionnelles appelées
Ces données confirment les perceptions locales au sujet de
ndiva). Les propriétés foncières sur la zone ont une taille
la nature changeante et extrêmement imprévisible de la
moyenne 1,54 hectares (ce qui est considéré comme une
pluviométrie sur le site de recherche, où le calendrier et la
surface très modeste) et nourrissent chacune une famille de
répartition/l’intensité des précipitations peuvent entraîner la
six personnes. Dans les trois villages où les recherches ont été
perte des récoltes, même les années où le total annuel est «
effectuées, les participants aux groupes de discussion disent
normal ».
utiliser les stratégies d’ajustement à court terme ci-dessous
pour compenser les pénuries alimentaires : (1) changements
L’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance est un
dans la consommation alimentaire du ménage (diminution du
problème très répandu dans le district de Same. Elle est
nombre de repas quotidiens, voire jeûne pendant la journée,
particulièrement présente pendant les mois de septembre
élimination des aliments les plus chers comme le poisson,
à janvier. À Bangalala, le village où était basée l’équipe
repas plus légers ; (2) changements d’activité économique
de recherche, les groupes de discussion ont révélé que
(travail occasionnel au sein de la communauté, abattage
seulement 5 pour cent des ménages sont considérés comme
des arbres, ramassage du bois, fabrication de charbon de
« aisés » et capables de servir trois repas par jour à tous les
bois, réduction des zones cultivées) ; (3) vente de biens (en
membres de la famille. Le groupe intermédiaire quant à
général du cheptel, presque jamais de terres) (4) chercher
lui (65 pour cent des ménages) ne peut pas se permettre
de l’aide chez d’autres (assistance publique, aide des ONG,
plus de deux repas quotidiens, et les 30 pour cent les plus
emprunts auprès d’amis ou de la famille).
pauvres arrivent à peine à un repas nutritif par jour. Même
si les trois villages reflètent la grande diversité des conditions
Vu l’absence dramatique d’emplois alternatifs non agricoles,
agro-climatiques dans les zones montagneuses et les plaines
la migration est une stratégie très importante de gestion des
du bassin de la rivière Pangani, leurs habitants ont ceci de
risques pour les ménages de ces villages, où le nombre de
commun qu’ils dépendent largement de l’agriculture et de
migrants économiques dépassent celui des individus ayant
l’élevage pour leur subsistance. D’après les données fournies
émigré pour parfaire leur éducation (à raison de deux contre
par l’enquête auprès des ménages et les séances de recherche
un). Bien que la majorité des émigrés soit jeune et de sexe
participative, les trois principales activités économiques
masculin, les femmes représentent un tiers du total à présent.
(agriculture, élevage et travail occasionnel) sont toutes
Même si une légère majorité des premiers déplacements
fortement tributaires des ressources naturelles de la région,
(53,4 pour cent) est saisonnière (moins de six mois) avec
et il n’y a pour ainsi dire aucune diversification des sources
retour assuré, les schémas diffèrent d’un village à l’autre.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Il n’y a qu’à Ruvu Mferijini, qui comprend une importante
ont répondu à l’enquête auprès des ménages disent que la
population masaï, que les migrants saisonniers sont nettement
variabilité pluviométrique a un effet négatif « important »
majoritaires (66,3 %). Dans les villages étudiés, la migration
sur la production alimentaire. Les résultats de cette enquête
est essentiellement interne. Très peu d’habitants traversent
mettent en lumière la forte relation entre des régimes
les frontières (pour se rendre au Kenya) et ce sont en majorité
climatiques changeants et imprévisibles et la décision
des pasteurs masaï. La plupart semblent se rendre dans
d’émigrer. Les trois principaux facteurs affectant les décisions
d’autres zones rurales où les conditions météorologiques
des ménages en matière de migration sont les suivants : (1)
sont plus favorables et où ils peuvent pratiquer des activités
fréquence accrue des sécheresses ; (2) périodes de sécheresse
qui leur sont familières, comme l’agriculture ou l’élevage,
plus longues ; (3) pénurie d’eau. Les participants aux groupes
ou travailler comme journaliers. Les séances de recherche
de discussion se disaient préoccupés par la dégradation de
participative ont révélé que beaucoup se rendent dans la
l’environnement local, qu’ils attribuent aux sécheresses
région du Kilimandjaro et les zones voisines du nord-est de
récentes, au manque de respect des lois contre l’abattage
la Tanzanie. Les résultats de l’enquête auprès des ménages
des arbres et autres pratiques destructrices dans les bassins
montrent cependant que la destination la plus courante est
hydrographiques cruciaux et à la croissance de la population.
la capitale Dar es-Salaam (32 pour cent des migrants), où
Les groupes de discussions avec les jeunes, lesquels jouissent,
ils cherchent du travail sur les marchés/dans le commerce
dans l’ensemble, d’une plus grande liberté de mouvement,
de détail, dans le bâtiment ou d’autres services. L’émigration
montrent que ces derniers n’envisagent guère l’agriculture
dans le district de Same suit donc deux schémas distincts:
pour leur avenir et sont plus enclins à chercher fortune dans
rural-rural et rural-urbain.
les zones urbaines, en dépit des difficultés qu’y rencontrent
les migrants n’ayant que peu d’éducation et de ressources
Vu les conditions qui règnent dans le district de Same, les
financières.
modifications de la pluviométrie se traduisent par des
impacts directs sur la sécurité alimentaire. La sécheresse
apparaît comme la plus grande menace qui pèse sur la
subsistance des ménages. Plus de 80 pour cent de ceux qui
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Crédit photo : © 2007 Brendan Bannon/CARE
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5- Analyse des décisions des ménages en matière
de migration à l’heure actuelle : caractéristiques des
ménages et sensibilité à la variabilité pluviométrique et
à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
Dans la présente section, nous donnons un aperçu des
les ménages interrogés est de 67,3 pour cent. Le pourcentage
principales caractéristiques au niveau des individus et des
médian de ménages ayant connu des périodes de pénurie
ménages. Nous nous appuyons pour cela sur les données
alimentaire au cours de l’année écoulée est quant à lui de
primaires réunies lors des enquêtes auprès des ménages. À
52,7% Les ménages de Tanzanie, du Bangladesh et du Pérou
partir de là, nous analysons les conclusions des huit études
ont été les plus réactifs face à l’insécurité alimentaire au
de cas afin de montrer les relations actuelles entre les moyens
cours de l’année écoulée, mais comme le montre l’analyse
de subsistance tributaires de la pluviométrie et la sécurité
ci-dessous, l’aptitude à gérer cette insécurité par le biais
alimentaire, ainsi que les circonstances dans lesquelles les
d’options comme la migration varie de manière considérable
ménages ont aujourd’hui recours à la migration pour gérer
parmi ces trois pays.
les risques d’impact sur la consommation et les revenus
familiaux. Nous avons ainsi obtenu quatre profils distincts.
Le tableau 3 constitue une synthèse de l’enquête auprès
des ménages menée dans chacun des huit pays. La dernière
5.1 Caractéristiques des ménages dans les districts ciblés
colonne fait entres autre apparaitre le nombre total de
Chaque
propres
». L’étude a permis d’interroger, pour chaque site, de 136
caractéristiques, mais les valeurs médianes fournissent un
à 206 ménages représentant au moins 10 pour cent de la
aperçu des caractéristiques des populations vivant dans les
population locale (du district) dans six des huit cas. En tout,
zones d’investigation. Le ménage médian a 5,6 personnes à
les chercheurs de « Rainfalls » ont interrogé 1 310 ménages
charge. Le chef de famille et ceux qui sont à sa charge ont
auxquels viennent s’ajouter plus de 2 000 participants
respectivement 4,7 et 5,9 années de scolarisation. La taille
individuels dans les groupes de discussion ou les entretiens
moyenne des ménages qui ont participé à l’enquête est la
auprès d’experts. Sur la totalité des ménages interrogés, la
plus importante au Ghana, au Guatemala et en Inde. En se
valeur médiane de ceux dirigés par des femmes est de 13,3
basant sur la norme internationale qui est de 1,25 à 2 dollars
pour cent.
site
de
recherche
possède
ses
ménages interrogés sur les sites de recherche « Rainfalls
US par jour suivant les pays, le taux de pauvreté médian pour
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Cabricán
Guatemala
Same
Tanzania
Nadowli
Ghana
Kurigram
Bangladesh
Dong Thap
Vietnam
Chhattisgarh
India
Huancayo
Peru
Lamphun
Thailand
Tableau 3 : Ménages interrogés sur les sites de recherche des huit cas d’étude
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L’accès à des terres de qualité suffisante pour satisfaire à la
consommation alimentaire des ménages et leur procurer les
*Définition du rapport de dépendance : rapport entre les
membres du ménage ne faisant généralement pas partie
de la population active (personnes à charge : 0-14 ans et >
64 ans) et ceux qui en font généralement partie (membres
productifs : 15-64 ans). On s’en sert pour mesurer la
charge pesant sur les membres productifs du ménage.
revenus dont ils ont besoin constitue une problématique
** Ayant peur de terres : la définition varie par pays :
Thaïlande < = 10 Rai ou 1,6 ha ; Pérou 0,1 - 5 ha ; Inde
< = 1 acre ; Viet Nam 0,1 - 1 ha ; Ghana 0,1 - 1 ha ;
Bangladesh 0,1 - 0,7 ha ; Tanzanie 0,01 à 1,75 acres ;
Guatemala < 0,44 ha.
site en lien avec leurs décisions en matière de mobilité (voir plus
*** Exploitation moyenne : la définition varie par pays :
Thaïlande 10,01 à 20 Rai ; Inde 1,01 - 2 acres ; Ghana < 5
ha ; Tanzanie 1,76 à 4 acres ; Guatemala > 0.44 et < 1 ha
**** Exploitation plus grande que la moyenne : la
définition varie par pays : Inde > = 2 acres ; Ghana > 5,01
ha ; Tanzanie > = 4,01 acres ; Guatemala > 1 ha
importante dans les zones de recherche. L’absence ou
l’insuffisance de terres se constatent dans les valeurs médianes de
15,5 et 37,7 pour cent respectivement des ménages interrogés,
lesquels présentent des caractéristiques distinctes sur chaque
bas). La propriété foncière moyenne pour les ménages, tous sites
confondus, est de 1,5 ha de terres productives (à l’exclusion des
pâturages pour le bétail). L’absence ou l’insuffisance de terres
parmi les ménages échantillonnés étaient importantes sur un
certain nombre de sites de recherche : Bangladesh (84 % des
ménages échantillonnés), Pérou (82,6 %), Guatemala (67,9 %),
Inde (60,5 %), et Viet Nam (57 %). Le manque de terres était
plus modéré en Thaïlande (47 %), en Tanzanie (31,5 %), et au
Ghana (9,8 %), où, par contre, la qualité du sol est un facteur
important. Dans ce dernier pays, d’ailleurs, la rareté des terres
n’est pas un facteur déterminant, dans la mesure où les droits
fonciers sont détenus par la communauté et les agriculteurs ont
facilement accès aux terres d’autres membres de la communauté.
Le rapport de dépendance moyen des ménages est le plus élevé
sur le site de recherche tanzanien (1,29), suivi par le Guatemala
(1,10). Cela veut dire qu’en Tanzanie, il y a, en moyenne, 1,29
membre inactif (à charge) pour tout membre actif d’un ménage.
À l’opposé, les deux extrêmes sont le Viet Nam (0,49) et la
Thaïlande (0,46). Ainsi, sur le site de recherche thaïlandais, il
y a, en moyenne, 0,46 membre inactif (à charge) pour tout
membre actif d’un ménage. Le tableau 4 synthétise l’expérience
migratoire des ménages échantillonnés dans chacune des études
de cas37.
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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_ 96
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Cabricán
Guatemala
Same
Tanzania
Nadowli
Ghana
Kurigram
Bangladesh
Dong Thap
Vietnam
Chhattisgarh
India
Huancayo
Peru
Lamphun
Thailand
Table 4 : Migration experience in the households sampled
Juin 2013
*La migration saisonnière est définie comme une migration annuelle
récurrente pour des périodes de moins de six mois par an. ** La migration temporaire est définie comme un départ du foyer
d’origine pour six mois par an au moins pour une destination au sein
du pays ou à l’étranger à des fins de travail, d’étude ou de réunification
familiale, à une distance telle que la personne concernée est obligée de
s’y installer et d’y passer ses nuits.
*** « Migration actuelle » signifie qu’une personne est absente en ce
moment pour des raisons de migration.
**** La migration de retour est définie comme le retour d’un membre
du ménage qui a émigré à une époque antérieure et n’a pas migré à
nouveau depuis plus d’un an.
Juin 2013
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5.2 La migration : adaptation ou échec de l’adaptation ?
les profils voisins. Ils ne sont donc pas exclusifs et servent
Quatre profils de migration liée à la pluviométrie
simplement de points de départ pour des recherches plus
approfondies où l’on affinera les variables explicatives clés.
Les huit études de cas « Rainfalls » permettent de mieux
comprendre comment les ménages ont recours à la
La migration comme facteur d’amélioration de la résilience
migration pour gérer les risques ou survivre face à des
(migration efficace)
régimes pluviométriques changeants qui minent la sécurité
Pour ces ménages, la migration se présente, dans tous les
alimentaire/des moyens de subsistance. L’étude « Rainfalls
cas d’étude, comme une stratégie utilisée, parmi beaucoup
» a mis en lumière le fait que les ménages « satisfaits », qui
d’autres, pour gérer les risques ou assurer leur subsistance. Ils
disposent d’actifs variés et de diverses options en matière
répondent au profil suivant : bas revenu ou pauvreté, mais
d’adaptation, de diversification des revenus ou de gestion
avec un accès suffisant à divers moyens de subsistance et avec
des risques (à travers des réseaux sociaux, des programmes
des atouts (sociaux, politiques, financiers) qui les rendent
communautaires ou gouvernementaux ou par l’éducation)
moins sensibles aux facteurs de stress climatiques. Dans ces
ont recours à la migration pour renforcer leur résilience.
foyers, les enfants bénéficient en général d’une scolarité de
Pour les ménages « vulnérables », dont l’accès à de telles
3 à 5 ans plus longue que celle de leurs parents, les migrants
options est minime (peu ou pas d’opportunités de diversifier
ont 20 ans environ, sont célibataires, aspirent à de meilleures
leurs sources de revenus, pas de terres, peu d’instruction), la
opportunités de vie et sont en mesure d’envoyer de l’argent à
migration est une stratégie de survie dans un contexte global
leur famille. Pour eux, la migration est avant tout une option
de stratégies d’ajustement dommageables à long terme
accessible qui leur permet d’améliorer la sécurité alimentaire
qui les laissent voire les piègent en marge d’une existence
et la résilience de toute la famille, y compris ceux qui sont
décente.
restés au pays. Deuxièmement, c’est un choix actif, positif,
leur permettant de saisir une opportunité qui profitera à
L’étude « Rainfalls » synthétisée dans le présent rapport
tous. Les transferts d’argent des migrants permettent ainsi
destiné aux décideurs dresse quatre profils différents pour
à ces ménages d’investir dans l’éducation, dans la santé et
les ménages qui ont recours à la migration comme réponse
dans des biens qui améliorent leur aisance et diminuent leur
à la variabilité pluviométrique et aux facteurs de stress liés
exposition aux facteurs de stress climatiques.
à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance. Ces
profils, décrits ci-dessous, sont présents sur les huit sites de
Pour les deux groupes suivants, l’effet des migrations sur les
recherche parmi les ménages luttant contre les facteurs de
ménages confrontés à ces facteurs dépend du degré de «
stress climatiques, mais dans certains pays, on constate la
réussite » des membres émigrés, qui doivent se procurer de
présence de blocs, constitués de ménages caractérisés par des
la nourriture ou obtenir les ressources nécessaires pour en
schémas dominants. Ces profils englobent un large éventail
obtenir.
de cas, dont certains ont d’ailleurs des points communs avec
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Juin 2013
La migration comme stratégie de survie, mais non de
plus durables, sont disponibles ou accessibles sur place. Elle
prospérité
est souvent saisonnière ou temporaire, permettant de se
Pour ce groupe, la migration permet d’éviter les pires
procurer immédiatement de la nourriture ou des ressources
conséquences de la variabilité pluviométrique et de
donnant accès aux vivres. C’est donc une mesure à court
l’insécurité alimentaire, mais étant donné que la diversification
terme, qui offre une solution temporaire à la variabilité
des revenus est quasi inexistante et que les possibilités
pluviométrique et à ses effets (mauvaises récoltes, baisse des
d’adaptation sur place sont rares, les seules options dont ils
revenus ménagers), mais elle n’a pas un effet radical et ne
disposent permettent à peine aux individus « de s’en sortir
permet pas aux ménages d’échapper au cycle de la pauvreté.
». Ces familles ne possèdent en général que peu de terres,
et même si elles ont accès à des stratégies de diversification
La migration comme stratégie d’ajustement utilisée en
des revenus, les options qui s’offrent à elles sont insuffisantes
dernier recours
pour assurer la sécurité alimentaire du ménage. Les migrants
Le profil suivant comprend les ménages pour qui la migration
sont en général des chefs de famille, d’environ 45 ans. Les
est une stratégie d’adaptation dommageable à long terme
enfants ont le même niveau d’éducation (à quatre mois près
(c’est-à-dire qu’elle aggrave leur vulnérabilité ou les
en moyenne) et les mêmes compétences que leurs parents.
empêche d’échapper à la pauvreté). Ils s’apparentent à ceux
Les familles n’ont guère accès à des organismes sociaux et
du groupe précédent : pauvres, peu ou pas de terres, peu
elles ont moins accès que le groupe précédent à d’autres
ou pas d’options en matière de diversification des revenus
formes de diversification des revenus ou à des mesures
en dehors de l’agriculture et de l’élevage. Les enfants ont
permettant de surmonter les facteurs de stress climatiques
le même niveau d’éducation que leurs parents (bas). Les
qui menacent leur sécurité alimentaire et leurs moyens de
migrants issus de ces ménages rivalisent entre eux afin de
subsistance.
trouver des emplois non qualifiés dans le secteur agricole (et
parfois dans des zones urbaines). Leur profil, d’après l’étude
Bien qu’elle reste un tant soit peu accessible, car ils ont les
« Rainfalls », est le suivant : chef de famille, la quarantaine,
moyens d’y recourir, la migration est un choix plus risqué
marié avec personnes à charge. Eux aussi ne font « que
pour ces ménages que pour leurs homologues « satisfaits ».
s’en sortir » et ils n’ont pas accès à ou sont incapables de
Les membres de ce groupe peuvent facilement passer de «
saisir des opportunités d’adaptation ou de diversification
satisfaits » à « vulnérables » si la stratégie échoue ou si les
des revenus in situ. Les mesures les plus courantes pour
facteurs de stress liés à la pluviométrie s’accentuent jusqu’à
surmonter les facteurs de stress liés à la pluviosité influant
devenir insurmontables. La migration perpétue alors le cycle
sur les moyens de subsistance et la disponibilité des aliments
de l’endettement (elle représente un investissement) et de
sont les suivantes : réduire la consommation alimentaire et
la faim chronique (si la migration s’avère être un échec). Elle
la qualité des aliments, vendre des biens, ou demander de
ne constitue sans doute pas le meilleur des choix si d’autres,
l’aide à d’autres villageois. D’après les groupes de discussion,
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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comme ces ménages ne jouissent déjà que d’une mobilité
Impossibilité de migration, difficultés et survie dans les
limitée, des villages entiers risquent de se trouver confrontés
lieux d’origine
à des problèmes semblables et ne seront plus en mesure de
Le dernier profil comprend les ménages décrit comme des
s’entraider si le besoin s’en fait sentir (covariance des risques).
« populations piégées » : ils ne disposent d’aucun atout
susceptible d’appuyer le processus de migration, voire même
Pour ces ménages, la migration peut être saisonnière (moins
de les aider à surmonter l’insécurité alimentaire, ni aucun
de six mois), temporaire (plus de six mois) ou permanente,
choix en matière de migration. Ils ne possèdent souvent
avec pour destination les zones les plus proches offrant les
que peu ou pas de terres et vivent dans des régions où le
meilleures opportunités en matière de subsistance. Lorsque,
dénuement est extrême. Les caractéristiques de ces ménages
pendant les périodes de pénurie alimentaire, ces migrants
(ou des individus qui les composent) sont les suivantes :
quittent leur village à la recherche de nourriture ou de
ménages dirigés par une femme, qui assume de multiples
ressources pour s’en procurer, ceux qu’ils laissent derrière
charges car elle doit s’occuper des terres agricoles, mais
eux voient leur vulnérabilité s’accroître face à une série de
aussi des jeunes enfants et des personnes âgées ; ménages
facteurs de stress aussi bien environnementaux que sociaux.
où, souvent, le principal soutien de la famille a déjà quitté
La migration est un pis-aller pour éviter les pires conséquences
le foyer à la recherche d’autres moyens de subsistance ;
de l’insécurité alimentaire, mais elle oblige également les
ménages où il y a peu de travailleurs valides par rapport aux
ménages à prendre des mesures qui les appauvrissent encore
personnes à charge comme les enfants, les personnes âgées
plus , comme le recours au crédit pour payer les dépenses
ou handicapées.
qu’elle entraîne. En outre, le déclenchement répété de chocs
et de facteurs de stress environnementaux (de même que
Ces familles sont confrontées à des déficits aigus en matière
l’émigration répétée) érode les moyens de subsistance de
de production et de consommation alimentaires en cas
ces populations, leur sécurité alimentaire et leur patrimoine
de variations pluviométriques, et déclarent disposer de
au point de rendre la migration impossible. On retrouve
ressources alimentaires insuffisantes à plusieurs reprises
ce schéma pour un petit nombre de foyers sur tous les
dans l’année. Elles n’ont que peu ou pas d’options en
sites étudiés, mais il est plus présent dans les pays qui ont
matière de diversification et n’en ont que très peu en
à surmonter des obstacles plus importants en matière de
matière de migration. Pour les ménages ou les populations
pauvreté, d’insécurité alimentaire et de diversification des
piégés, le déclenchement répété de chocs et de facteurs de
moyens de subsistance dans les secteurs vulnérables au
stress environnementaux ne fait qu’éroder davantage leur
climat.
patrimoine et accroître leur insécurité alimentaire/des moyens
de subsistance. Au Guatemala, des communautés reculées,
dépourvues des conditions permettant d’assurer leur sécurité
alimentaire, se trouvent dans une situation où les possibilités
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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sont limitées : grande vulnérabilité face aux précipitations,
peu de possibilités de diversifier localement les risques ou les
moyens de subsistance, solutions migratoires trop onéreuses
(vers une grande ville ou un autre pays), trop risquées, où à
destination de lieux porteurs des mêmes difficultés.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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6- Migration dans le contexte des variabilités
pluviométriques et de l’insécurité alimentaire/des
moyens de subsistance futures
Pour saisir à quel point la pluviométrie pourrait influencer la
individus et unités potentiellement hétérogènes (agents)
mobilité humaine à l’avenir, il est important de répertorier
capables de prendre des décisions de manière autonome,
l’ensemble des répercussions que des scénarios probables
souvent avec des objectifs précis, et qui peuvent être aptes
pourraient avoir sur les flux migratoires. En enquêtant sur
à apprendre, à s’adapter et à modifier leur comportement
les effets de la variabilité pluviométrique sur des facteurs tels
en fonction des changements qu’ils perçoivent au sein de
que la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance au
leur environnement. Le comportement des agents et leurs
niveau des ménages et des communautés, on comprendra
interactions sont souvent dictés par des règles définies par
mieux comment celle-ci influence les décisions individuelles
l’utilisateur et paramétrées à partir de connaissances ou
des migrants. En se fondant sur les données obtenues sur
de données existantes. Si l’on définit le modèle à partir de
les sites de recherche, où les changements pluviométriques
données disponibles et qu’on évalue sa capacité à reproduire
peuvent contribuer à accroître l’insécurité alimentaire/des
un phénomène réel, il peut servir soit comme outil prédictif
moyens de subsistance, notre processus de simulation et
soit comme un moyen d’obtenir des indications inaccessibles
d’analyse tourné vers l’avenir permet de mieux comprendre
autrement.
dans quelles circonstances la variabilité pluviométrique peut
influencer fortement la migration.
Les sections suivantes décrivent le cadre conceptuel du
modèle « Rainfalls » ainsi que les résultats obtenus lors d’une
6.1 Modélisation axée sur les agents (MAA)
première modélisation effectuée dans le district de Same, en
Tanzanie. La description du cadre conceptuel et des résultats
La modélisation axée sur les agents est une technique
du modèle tanzanien présente les conclusions préliminaires
informatique de simulation sociale qui permet à l’utilisateur
de la modélisation axée sur les agents entreprise par le projet
de modéliser le comportement d’entités décisionnelles
« Rainfalls ». On trouvera des informations supplémentaires
individuelles (individus et/ou ménages, par exemple) et
sur le développement et le paramétrage du modèle dans
la façon dont ils agissent l’un envers l’autre et en relation
l’annexe technique. Les résultats d’investigations plus
avec l’environnement. Ce type de modélisation permet de
approfondies de ce type de modélisation et de la façon
combiner différents niveaux d’analyse afin de comprendre le
dont il a été appliqué aux autres cas d’étude seront publiés
comportement général du phénomène qui nous intéresse. Le
ultérieurement.
modèle axé sur les agents (MAA) est constitué de nombreux
_ 102
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Crédit photo : © 2012 Lars Johansson
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6.2 Le modèle de migration axé sur les agents de « Rainfalls »
L’évaluation de la vulnérabilité du ménage, au centre du
cadre conceptuel, est influencée par les effets de tout
Le modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls
changement externe intervenant dans la variabilité et la
» (MMBAR) a été conçu pour représenter le degré de
moyenne pluviométriques locales sur une large gamme de
vulnérabilité des ménages aux changements provoqués
facteurs structurels/institutionnels touchant à la sécurité
par la variabilité pluviométrique en termes de sécurité
alimentaire/des moyens de subsistance, y compris l’état
alimentaire/des moyens de subsistance, ainsi que l’impact
général du marché régional du travail et de la production
de ces changements sur la migration des membres de
alimentaire. Elle dépend également de certains attributs et
la famille. Le fonctionnement informatique du MMAAR
caractéristiques propres au ménage, notamment les revenus,
repose sur un cadre conceptuel (Illustration 11) conçu pour
le patrimoine et la taille de la famille. Que le ménage se
représenter les relations complexes entre les facteurs qui, à
perçoive comme vulnérable (avec un besoin imminent de
de multiples niveaux, contribuent à l’insécurité alimentaire/
modifier sa situation) ou satisfait (ses stratégies d’adaptation
des moyens de subsistance des ménages et à la migration.
s’avérant suffisantes), il entreprend un processus décisionnel
Dans le cadre-même, des encadrés indiquent les éléments
au regard de la migration. Toute décision concernant la
inclus dans le modèle à l’un ou l’autre des niveaux d’analyse
migration dépend de facteurs individuels comme l’âge, le sexe
(externe, structurel/institutionnel, ménage et individu), et les
et l’état civil aussi bien que de facteurs propres au ménage
flèches indiquent la direction principale de l’influence d’un
comme le nombre de membres économiquement actifs et les
élément sur un autre. Les termes en caractères gras mettent
biens fonciers, avec pour résultat une forme de migration qui
en évidence les composantes principales de l’évaluation de
sera soit vulnérable soit satisfaite. La première indique une
la vulnérabilité et les processus décisionnels en matière de
migration davantage poussée par le besoin et la deuxième
migration qui ont été modélisés. Les termes qui ne sont pas
davantage inspirée par la recherche d’opportunités. Comme
en gras désignent les facteurs secondaires dont on considère
dans le monde réel, le comportement d’un agent influence
qu’ils contribuent à ces processus.
les actions ultérieures des autres par le biais d’interactions
et d’effets de retour tels que l’impact de la migration sur le
.
réseau social, les revenus du ménage et le marché du travail
local.
_ 104
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Illustration 11 : Cadre conceptuel du modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls »
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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6.3 Scénarios d’anticipation et analyse : modélisation du cas
Tanzanie sont censés représenter le degré approximatif de
du district de Same, Tanzanie
changement climatique prévu pour le pays. En reproduisant
le taux de changement à l’horizon 2100 estimé par
Bien qu’il ait été créé pour les huit sites d’étude « Rainfalls »,
Paavola (2003) , le scénario 1 représente une tendance à la
le cadre conceptuel ci-dessus a d’abord été développé et testé
sécheresse, les précipitations moyennes annuelles diminuant
sur le site de recherche tanzanien. Dans ce MAA de simulation,
de 5 pour cent maximum d’ici 2040 et la variabilité autour
les ménages et les individus sont tous représentés comme
de cette moyenne augmentant de 5 pour cent maximum
des agents en situation d’interaction mutuelle (ménage-
la même année. Inversement, le scénario 2 présente une
ménage ou individu-individu) ou avec leur environnement.
tendance à l’humidité, la moyenne des pluies annuelles et la
Les caractéristiques des agents, qu’il s’agisse de ménages ou
variabilité autour de cette moyenne augmentant toutes deux
d’individus, découlent directement des données de l’enquête
de 5 pour cent maximum d’ici 2040. En reproduisant le taux
auprès des ménages recueillies dans les trois villages étudiés.
de changement à l’horizon 2100 prévu par Agrawal et al.
Les règles concernant les actions et interactions qui régissent
(2003) , le scénario 3 présente une tendance à une humidité
le comportement des agents soumis à différents degrés de
extrême, la moyenne des pluies annuelles et la variabilité
variabilité pluviométrique ont aussi été établies après analyse
autour de cette moyenne augmentant toutes deux de 22,5
d’une large gamme de données d’enquête sur les moyens
pour cent maximum d’ici 2040. Inversement, le quatrième et
de subsistance, la sécurité alimentaire et la migration. En se
dernier scénario représente une tendance à une sécheresse
basant sur ces données, les évaluations de la vulnérabilité et
extrême, les précipitations moyennes annuelles diminuant de
les décisions migratoires simulées sont censées refléter celles
22,5 pour cent maximum d’ici 2040 et la variabilité autour
qui ont été observées sur le terrain.
de cette moyenne augmentant de 22,5 pour cent maximum
la même année.
Les scénarios des précipitations futures utilisées comme
stimulus du changement et modélisées lors du travail de
simulation en Tanzanie sont fournis par la méthode de
simulation de Monte Carlo. Celle-ci reproduit le caractère
PDM (« Probability-Distributed Model » e.g. basé sur la
distribution des probabilités) stochastique de la variation
des précipitations futures autour d’une tendance à plus
long terme. Les flux de migrants modélisés pour différents
scénarios d’anticipation de la pluviométrie permettent
également de comprendre l’influence des précipitations
sur la migration. Les scénarios de précipitations testés en
_ 106
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Résultats pour la Tanzanie : migration de 2014 à 2040 selon
les scénarios de précipitation suivants : augmentation de
la sécheresse/de l’humidité, très forte augmentation de la
sécheresse/de l’humidité
En se servant du cadre conceptuel décrit ci-dessus, le
MMAAR Tanzanie indique le nombre de migrants issus de
ménages satisfaits ou vulnérables des villages faisant l’objet
de l’étude. Chacun des ménages évalue sa vulnérabilité face
aux impacts des changements de pluviométrie mois par
mois. Les changements saisonniers comme les saisons des
pluies vuli et masika influent sur les revenus, la production
alimentaire et par conséquent la vulnérabilité des ménages
tout au long de l’année. Qu’il soit satisfait ou vulnérable,
chaque ménage peut citer la migration d’un ou plusieurs
de ses membres comme stratégie de subsistance viable.
L’illustration 12 montre le taux de différence normalisé de
la migration modélisée pour les ménages vulnérables. Les
flux de migrants, normalisés par rapport au nombre d’agents
émigrants selon un scénario de précipitations « moyennes »
(sans changement de variabilité ni de moyenne), constituent
la moyenne des ensembles constitués de cinq membres. Ils
apparaissent comme des moyennes mobiles, étalées sur cinq
ans pour mieux faire ressortir les tendances.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Taux de différence normalisé de la migration vulnérable
Moyenne du scénario 1
(sécheresse) = 0,26
Moyenne du scénario 2
(humidité) = 0,27
Moyenne du scénario 3
(humidité extrême) = -0,16
Moyenne du scénario 4
(sécheresse extrême) = 0,50
Illustration 12 : différence normalisée sur une moyenne mobile de cinq ans dans le taux de migration vulnérable selon le
modèle MMAAR. Les barres d’erreur indiquent la marge d’erreur modélisée avec des ensembles de cinq membres.
Pendant presque toute la période de simulation, le taux
plus faibles que le scénario « normal » par rapport auquel
normalisé de migration modélisée chez les ménages
s’effectue la normalisation des résultats de la simulation. Les
vulnérables est généralement le plus élevé dans le scénario
scénarios 1 (sécheresse) et 2 (humidité) présentent des taux
4 (sécheresse extrême). D’après ce scénario, le taux annuel
similaires de changement positif dans la migration vulnérable
moyen normalisé de la migration vulnérable est de 0,5
normalisée au cours de la période de simulation, avec une
(soit une augmentation de 50 % par rapport aux agents
moyenne de 0,26 et 0,27 respectivement.
modélisés sous des conditions « normales »). Par contraste,
le scénario 3 (humidité extrême) produit généralement les
Ces résultats correspondent à ce que l’on pourrait
taux de migration vulnérable les plus bas. Avec un taux
logiquement attendre de ce type de contexte semi-aride
annuel moyen de -0,16, il est également le seul scénario à
(précipitations annuelles moyennes à long terme de 560
produire systématiquement des taux de migration vulnérable
mm/an à peine) caractéristique du site de recherche
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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tanzanien. Dans un tel environnement, un scénario de
Bien que les barres d’erreur sur l’illustration 12 indiquent des
sécheresse extrême devrait entraîner une vulnérabilité accrue
variations dans les résultats de la simulation pour les migrants
des ménages et par conséquent une augmentation nette
vulnérables, la nature des rapports entre les différents
des formes de migration vulnérables. Pour la même raison,
scénarios ne s’en trouve pas modifiée même aux extrêmes
on pourrait également s’attendre à un niveau modérément
de chaque marge. En dépit de sa valeur considérable pour
élevé de migration vulnérable sous un scénario de sécheresse.
cette étude, le nombre de migrants vulnérables modélisés
Inversement, la prospérité relative que pourrait produire un
dans chacun des scénarios testés dépend à la fois du fait
scénario d’extrême humidité pourrait s’expliquer par une
que les ménages sont considérés comme vulnérables et de la
vulnérabilité moindre de la plupart des ménages pendant les
tendance de leurs membres à émigrer. C’est pourquoi il est
périodes où l’eau est plus abondante. Le niveau modérément
important de prendre aussi en compte le nombre de migrants
élevé de migration vulnérable sous un scénario d’humidité
satisfaits modélisés dans les quatre scénarios en question
contredit cette attente. Une explication possible tiendrait
(Illustration 13).
à l’interaction entre le désir de migration du ménage et sa
capacité réelle à migrer. La faible humidité constatée dans le
scénario 2 peut produire une augmentation du nombre de
ménages qui seront en mesure d’investir dans la migration
sans pour autant améliorer leur situation au point de ne plus
être considérés comme vulnérables. Ou alors, l’augmentation
annuelle moyenne de 5 pour cent des précipitations à
l’horizon 2040 dans le scénario à humidité modérée est
peut-être, dans le contexte semi-aride et marginalisé du
site de recherche tanzanien, tout simplement insuffisante
pour atténuer la vulnérabilité des ménages pauvres et
leur permettre de multiplier les options pour assurer leur
subsistance in situ et ainsi parer à l’avancée de la migration
vulnérable.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Taux de différence normalisé de la migration satisfaite
Moyenne du scénario 1
(sécheresse) = -0,05
Moyenne du scénario 2
(humidité) = 0,05
Moyenne du scénario 3
(humidité extrême) = 0,03
Moyenne du scénario 4
(sécheresse extrême) = -0,02
Illustration 13 : différence normalisée sur une moyenne mobile de cinq ans dans le taux de migration satisfaite selon le modèle
MMAAR. Les barres d’erreur indiquent la marge d’erreur modélisée avec des ensembles de cinq membres.
Les résultats de la modélisation pour la migration satisfaite
avec un taux annuel moyen normalisé égal mais inverse de
(Illustration 13) montrent une sensibilité bien moindre aux
-0,05. Entre ces deux limites relatives, les scénarios 3 et 4
modifications de la pluviométrie que pour la migration
(humidité extrême et sécheresse extrême) révèlent des
vulnérable. Pendant la quasi-totalité de la période de
tendances globales encore plus fines, bien qu’elles présentent
simulation, le scénario 2 (humidité) produit le taux le plus
les mêmes signes que leurs équivalents modérés. Or, si le
élevé de migration modélisée chez les ménages satisfaits.
scénario « humidité extrême » révèle un taux positif plus
Ceci dit, le taux annuel moyen normalisé de migration
modéré que celui de l’humidité (moyenne annuelle de 0,03),
satisfaite est de 0,05, soit seulement 5 pour cent de plus
celui de l’extrême sécheresse révèle un taux négatif plus
que pour le scénario « normal ». De même, pour la majeure
modéré que celui de la sécheresse (moyenne annuelle de
partie de la période de simulation, le scénario 1 (sécheresse)
-0,02). Les barres d’erreur qui apparaissent sur les résultats
produit le taux le plus bas de migration satisfaite normalisée
de la simulation de la migration satisfaite n’indiquent qu’une
_ 110
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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très légère déviation de la moyenne pour la marge d’erreur
vulnérable en cas d’extrême humidité. Les changements dans
complète simulée avec des ensembles de cinq membres.
les régimes pluviométriques peuvent avoir un impact sur la
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance à l’avenir, et
Il est à noter qu’alors que les deux scénarios « humides »
pourraient accroître la vulnérabilité de nombreux ménages
produisent systématiquement un changement positif pour
dans le monde. Les différents scénarios climatiques ayant un
la migration satisfaite, les deux scénarios de sécheresse
effet manifeste sur les formes vulnérables de migration, la
produisent quant à eux un résultat négatif une fois normalisés
modélisation axée sur les agents présentée ici illustre le rôle
par rapport à la migration satisfaite modélisée selon un
que pourrait, à l’avenir, jouer la migration dans la gestion des
scénario « normal ». Ces résultats s’expliquent par le fait
facteurs de stress climatiques.
qu’en toute probabilité, les ménages seront plus aptes à
investir dans des types de migration satisfaite ou tournée vers
la recherche d’opportunités pendant la période de relative
abondance qu’apporte une pluviosité accrue. Inversement,
leurs capacités seront réduites dans les périodes d’austérité
imposées par une baisse des précipitations. Ceci dit, étant
donné la faible ampleur des changements intervenus
dans les formes satisfaites de migration et reproduits
dans l’illustration 13, il paraît irréaliste d’entreprendre une
comparaison approfondie des relations précises entre les
différents scénarios.
Pour résumer, les résultats de la modélisation axée sur les
agents pour le district de Same en Tanzanie indiquent une
faible sensibilité à la variabilité pluviométrique des formes
satisfaites de migration. D’après la simulation, les légères
augmentations de la migration satisfaite semblent résulter
d’une pluviosité accrue, alors que les légères baisses sont
attribuées à des précipitations moins importantes. En
revanche, les formes vulnérables de migration sont bien plus
sensibles aux différents scénarios de variations des pluies
: selon la modélisation, la migration la plus vulnérable se
produit suivant un scénario de sécheresse extrême, et la moins
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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7- Conclusions
Il est essentiel de comprendre la façon dont les ménages
des variables climatiques et des autres variables (dont la
gèrent aujourd’hui les effets des modifications des régimes
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance) et leur poids
pluviométriques sur leur sécurité alimentaire et leurs moyens
sur les choix migratoires, il sera plus facile de structurer les
de subsistance, afin de garantir des plans d’adaptation,
investissements d’adaptation, afin de s’assurer que quelles
des politiques de développement et plus globalement une
que soient les stratégies auxquelles les ménages ont recours
transition vers un monde plus résilient qui tiennent compte
(y compris la migration) celles-ci contribuent à améliorer leur
des changements climatiques. Partout dans le monde, les
résilience face aux changements climatiques.
communautés vulnérables subissent déjà les effets des
phénomènes météorologiques extrêmes et du changement
Les résultats de la modélisation des précipitations en Tanzanie
climatique à évolution lente, et constatent des changements
montrent clairement que la variabilité pluviométrique
dans les précipitations et dans les périodes végétatives ainsi
et la vulnérabilité des ménages face à ces changements
qu’une augmentation des événements climatiques extrêmes
influencent les décisions relatives à la migration. Les ménages
. Le changement climatique menace la productivité agricole,
qui disposent d’options plus variées ou plus avantageuses
aggrave l’insécurité alimentaire et met en péril les moyens
en matière d’adaptation semblent moins sensibles aux
de subsistance et la survie des populations pauvres, et en
changements pluviométriques et moins prompts à migrer,
particulier des petits exploitants agricoles, des éleveurs
poussés par le besoin, dans des conditions défavorables.
et des paysans sans terre dans les pays les moins avancés.
Dans les prochaines décennies, la façon dont les ménages
Cela en poussera certains à aller chercher des moyens de
concernés géreront les changements en matière de sécurité
subsistance ailleurs et en piègera d’autres dans la pauvreté. Le
alimentaire/des moyens de subsistance conditionnera les
changement climatique affecte de plus en plus l’habitabilité
schémas de répartition de la population dans les régions du
même de certaines zones, forçant les habitants à partir.
monde hautement vulnérables aux changements climatiques.
Celles-ci comprennent les zones montagneuses, les deltas
L’étude « Rainfalls » montre que la question qui se pose,
à forte densité de population, et les zones arides ou semi-
en ce qui concerne les interactions entre les changements
arides où les cultures pluviales et l’élevage subissent déjà des
climatiques planétaires (et locaux) et la migration humaine,
pressions. La plupart des ménages tenteront de gérer ces
n’est pas de savoir si les facteurs environnementaux sont les
risques en essayant de diversifier leurs sources de revenus
seuls responsables de la mobilité, mais comment ces facteurs
dans leur lieu d’origine et en faisant appel à la migration
se conjuguent pour déterminer les choix migratoires. Si l’on
saisonnière ou temporaire.
arrive à appréhender de façon plus nuancée l’interaction
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Des
mesures
d’adaptation
efficaces
garantissant
particulièrement la promotion d’une agriculture durable
et d’une diversification des moyens de subsistance ruraux
permettront d’éviter des mouvements de populations massifs
et non planifiés. Cependant, les pays et communautés plus
pauvres ne sont pas en mesure d’entreprendre une adaptation
à grande échelle. Aussi les sociétés touchées par les variations
des régimes pluviométriques (pluies insuffisantes ou trop
abondantes à certaines époques de l’année, sécheresse ou
humidité accrue à long terme) risquent de voir se détériorer
leur bien-être, leurs moyens de subsistance et leur sécurité
alimentaire, en une spirale descendante au bout de laquelle
les réseaux sociaux subiront un stress excessif et où, pour ceux
qui seront obligés de partir comme pour ceux qui resteront
sur place, les tensions et la violence se feront plus fortes.
La mobilité humaine liée aux changements pluviométriques
et à l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance est
une question que l’on ne peut traiter efficacement que si on
l’envisage comme un processus mondial et non comme une
série de crises locales. L’aide et la protection des populations
vulnérables est une lourde responsabilité que ne peuvent
porter seuls les États et communautés concernés. Tous les
pays doivent contribuer à minimiser la pression exercée
sur les populations vulnérables et leur fournir des options
en matière d’adaptation, notamment des déplacements de
population dans la dignité et en toute sécurité si cela devient
inévitable.
Photo credit : © 2011 Christina Rademacher-Schulz/UNU-EHS
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Photo credit : © 2012 Lars Johansson
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Juin 2013
8- Réflexions pour les décideurs et les praticiens :
permettre des choix informés à l’échelle mondial,
national et local.
L’étude « Rainfalls » s’est donnée pour objet les relations
durement obtenues en termes de bien-être des populations
entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire/des
et obligera les États à répondre aux besoins accrus d’un
moyens de subsistance et mobilité humaine. Elle étudie aussi
nombre croissant de citoyens marginalisés et sans doute
les circonstances dans lesquelles les ménages ont recours à
mobiles. S’ils comprennent les circonstances et les facteurs
la migration comme stratégie de gestion des risques face à
qui déterminent les choix migratoires des ménages (aux
la variabilité des précipitations et à l’insécurité alimentaire.
niveaux national, local et familial), les décideurs seront plus
L’étude montre que pour certains ménages, la migration est
aptes à créer des environnements favorables qui permettront
un moyen avéré d’améliorer leur résilience. Pour d’autres, la
aux populations de s’adapter au changement climatique
migration s’avère un pis-aller qui perpétue le cycle négatif de
et d’envisager la migration comme une stratégie destinée
pauvreté et de pénurie alimentaire ou pire encore, érode leur
à améliorer leur résilience, et non comme une tactique de
résilience face aux facteurs de stress climatiques actuels ou
survie dommageable à long terme. .
futurs. Pour d’autres encore, et pour certaines populations
particulièrement vulnérables, la migration n’est une option
Les considérations qui suivent, tant sur les politiques
réaliste ni pour améliorer la résilience ni pour éviter les
d’orientation que sur la pratique, sont une synthèse des
conséquences les plus pénibles de l’insécurité alimentaire.
réflexions que l’on trouvera dans les huit rapports nationaux
des études de cas. Les impacts des changements climatiques
Ces constatations ont des répercussions sur les politiques
sont locaux, mais les orientations mondiales en matière
d’orientation qui visent à aider les populations à s’adapter,
de changement climatique, de sécurité alimentaire et de
voire à prospérer lorsqu’elles sont confrontées, entre
développement durable influencent les choix politiques
autres, à des facteurs de stress climatiques : si l’on ne
nationaux et l’accès aux aides. Il y a des défis pour lesquels
formule pas de nouvelles approches pour offrir davantage
une action planétaire s’impose. Pour d’autres, des mesures
de possibilités de subsistance et de gestion des risques aux
aux niveaux national et local sont indispensables pour aider les
ménages se situant à la frontière entre développement et
communautés et ménages vulnérables. Les recommandations
pauvreté, ceux-ci ne feront qu’accumuler davantage de
ci-dessous énumèrent une série de mesures qui, dans leur
retard dans leur quête d’adaptation et de développement
ensemble, peuvent permettre aux populations pauvres de
durable, avec pour résultat probable une migration dans
prendre des décisions informées sur la migration, l’adaptation
des circonstances défavorables. Cela annulera les avancées
et la sécurité alimentaire, afin d’améliorer leur résilience.
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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8.1 Décideurs mondiaux
Adopter une approche équitable pour réduire les émissions
de gaz à effets de serre conformément aux recommandations
A l’attention des Parties à la Convention-cadre des Nations
des scientifiques pour que la température mondiale
Unies sur les changements climatiques
n’augmente pas de plus de 2 °C, voire de 1,5 °C.
L’étude « Rainfalls » apporte la preuve que certaines
Les parties doivent fixer ensemble leur pic d’émissions d’ici
communautés sont déjà aux prises avec les effets d’une
2015 et s’accorder afin de réduire les émissions mondiales
pluviométrie changeante. Plus les pouvoirs publics retarderont
d’au moins 80 pour cent par rapport aux niveaux de 1990
leur action face au changement climatique et repousseront
d’ici 2050. Elles doivent aussi se mettre d’accord sur un
l’adoption
et
processus permettant d’augmenter les niveaux de réduction
d’adaptation, plus les impacts seront graves et les coûts
des émissions si de nouvelles études scientifiques en
élevés, tant en termes humains que financiers.
démontrent la nécessité, pour être certaines d’atteindre les
de
mesures
ambitieuses
d’atténuation
objectifs mondiaux en matière de température et empêcher
À ce jour, les effets des émissions sont déjà considérables.
que les changements climatiques ne s’emballent. Comme
Selon des estimations récentes, les tendances actuelles en
l’explique l’Article 2, l’objectif ultime de la convention (éviter
matière d’émissions associées aux promesses de réduction
les perturbations climatiques dangereuses) est le point
pourraient entraîner un réchauffement de 3,5 à 6° C . Même
d’ancrage pour répondre aux besoins des communautés
après avoir pris des mesures d’atténuation et fait des choix
vulnérables et éviter les pertes et dommages.
d’adaptation, les pays, communautés et ménages vulnérables
seront sans doute dépassés par les changements climatiques.
Certains verront leurs moyens de subsistance et leur sécurité
alimentaire se détériorer inexorablement, accompagné
de pertes et d’une atteinte à leur bien-être qui dépassera,
Augmenter les promesses de fonds et convenir de
mécanismes innovants pour garantir un financement de
l’adaptation dans les pays en développement suffisant,
durable, prévisible, nouveau et supplémentaire
dans l’ensemble, tout ce que l’on a connu . Les parties à
Les parties doivent veiller à ce que le Fonds vert pour le climat
la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements
encourage la transparence, les approches participatives
climatiques doivent prendre des mesures urgentes dans trois
et la responsabilisation afin que les fonds et programmes
secteurs (atténuation, adaptation [notamment financière]
répondent aux besoins des plus vulnérables. L’adaptation
et pertes et dommages) afin de s’attaquer aux causes du
demande un financement robuste. Plus les efforts consentis
changement climatique et de l’impact disproportionné qu’il
pour permettre aux communautés vulnérables de s’adapter
exerce sur les populations les plus vulnérables et les moins
aux impacts du changement climatique seront importants (par
responsables de ces changements. Il est nécessaire que les
le biais d’un financement adéquat favorables aux populations
parties s’engagent à :
démunies), plus celles-ci seront en mesure de prendre des
_ 116
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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décisions informées afin d’améliorer leur résilience dans le
facteurs de stress climatiques, notamment en recourant à
contexte des changements climatiques. Les pays développés
la migration, les choix qui s’offrent à elles dépendront des
se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars US par
initiatives que prendront les pouvoirs publics en matière
an jusqu’en 2020 destinés aux dépenses climatiques. Mais
de planification. De son côté, le Comité d’adaptation
la somme reste insuffisante et les promesses de fonds ne se
peut jouer un rôle crucial en donnant aux gouvernements
sont pas encore traduites par des accords sur des sources de
nationaux les moyens d’accéder aux informations et
financement permettant de répondre à ces engagements. En
ressources dont ils ont besoin, ainsi qu’un appui technique
même temps, la voie de l’atténuation adoptée « par défaut »
et humain pour que des initiatives efficaces en faveur des
lors des négociations climatiques signifie que les impacts du
plus démunis atteignent ces communautés vulnérables.
changement climatique dépasseront sans doute les limites de
Le plan de travail triennal de ce comité doit inclure une
l’adaptation. Des mesures supplémentaires spécifiques seront
cartographie des organes internationaux, nationaux et
donc nécessaires pour compenser les pertes et dommages,
régionaux en charge de l’adaptation et des ressources
en plus de ce que prévoit l’agenda de l’adaptation.
relatives à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
et à la mobilité humaine. Il doit identifier des moyens
Créé en 2010, le Cadre d’adaptation de Cancún de la
concrets afin de faciliter la coordination entre ces différents
CCNUCC a permis de créer une structure mondiale pour
organes, pour ainsi répondre aux problèmes émergents et
traiter de l’adaptation . Certaines parties de ce cadre sont
combler les lacunes en matière de capacités, de ressources
déjà fonctionnelles, comme le comité d’adaptation et le
et d’information dans ces domaines. La cartographie et la
Programme de travail sur les pertes et dommages. D’autres
coordination émanant du comité d’adaptation devraient
deviendront opérationnelles au cours des prochaines années
inclure les activités relatives à la mobilité humaine du HCR, de
et devront produire des organismes et mécanismes d’appui
l’OMI et d’autres organisations, ainsi que des projets comme
efficaces pour les pays en développement, afin de permettre
l’initiative Nansen qui s’occupent de types particuliers de
à ces derniers de répondre aux besoins des populations
mobilité (migration, déplacement, relocalisation planifiée).
vulnérables.
Le Comité doit aussi formuler des principes de base pour que
la migration s’effectue dans la dignité et en toute sécurité.
Faciliter la coordination mondiale et régionale pour
Lors de l’examen des capacités des centres régionaux,
permettre aux pays en développement d’avoir accès à
le Comité devrait tenir compte de leur contribution en
l’aide et de définir et mettre en place leurs Plans Nationaux
faveur de la coopération régionale en matière d’adaptation
d’Adaptation (PNA)
transfrontalière, avec ses défis et ses opportunités.
Alors que les communautés locales qui connaissent des
difficultés pour se nourrir et subsister entreprennent de
s’adapter aux perturbations pluviométriques et autres
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Évaluer et réparer les pertes et dommages de façon à aider
politiques et principes, par exemple pour que les mesures
les populations vulnérables
relatives aux pertes et dommages (y compris la migration
Les initiatives mondiales en matière de pertes et dommages
doivent aider les gouvernements nationaux à prendre en
compte les besoins des populations les plus vulnérables,
dont celles n’ayant pas accès aux possibilités d’adaptation
ou de migration ou qui pourraient être forcées de quitter
une région devenue hostile. La CCNUCC doit contribuer à
faciliter l’évaluation systématique des pertes et dommages
réels ou potentiels, en particulier les pertes non économiques
ou difficilement quantifiables et l’érosion des moyens de
subsistance, de la sécurité alimentaire et du bien-être.
Un mécanisme pour les pertes et dommages devrait
appuyer l’évaluation et la surveillance des perturbations
pluviométriques afin de signaler à la Conférence des parties
tout changement critique en matière de sécurité alimentaire/
des moyens de subsistance, de mobilité humaine ou de
viabilité à long terme des paysages. Il devrait également
appuyer des mesures de protection sociale et économique et
et la réinstallation) soient transparentes et participatives, et
qu’elles respectent les droits des populations concernées.
Afin d’encourager les initiatives mondiales ou nationales qui
abordent l’intensification de la mobilité humaine dans sa
globalité, la Convention doit aussi coordonner ses activités
avec les organismes dont le mandat couvre la gestion de
la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et de la
mobilité humaine. Enfin, la Conférence des parties doit
aussi prendre acte de la nécessité d’envisager des approches
relatives auà la réinsertion, à la restitution et à une série de
questions opérationnelles comme les dispositions financières
ou les dédommagements en faveur des communautés
touchées.
A l’attention des décideurs politiques spécialisés dans
la sécurité alimentaire et nutritionnelle mondiale et le
développement durable
des assurances à prix raisonnable ou autres outils de gestion
Les dernières années ont démontré combien il était difficile de
des risques ou de transfert, afin de permettre aux populations
relever le défi de la faim dans le monde : près d’un milliard de
pauvres confrontées à une incertitude climatique croissante
personnes continuent de souffrir d’une insécurité alimentaire
de parer aux risques ou de les transférer.
chronique. Le témoignage des communautés qui ont participé
à l’étude « Rainfalls » démontre de surcroît les liens étroits
Il est également nécessaire d’évaluer les capacités des
entre changement climatique, sécurité alimentaire, pauvreté,
gouvernements nationaux et régionaux à gérer les pertes et
gestion des ressources naturelles et mobilité humaine. Ces
dommages, ainsi que les besoins connexes des communautés
questions ne peuvent se traiter de façon isolée. Alors que les
vulnérables. La Convention a un rôle à jouer là où les capacités
éléments qui les lient aux impacts des actions humaines sur
nationales ne suffisent pas : elle peut faciliter les échanges
les ressources naturelles se font plus évidents, les décideurs
d’expériences entre régions et encourager des approches
et praticiens doivent prendre conscience qu’une approche
systématiques pour remédier aux pertes et dommages. Ces
globale du développement durable est impérative.
approches pourraient inclure une coordination des normes,
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Renforcer l’appel à la lutte contre la crise climatique et
Formuler des objectifs à la suite des Objectifs du Millénaire
intégrer le changement climatique et les considérations
pour le développement afin d’appuyer le droit de tous à un
relatives à l’égalité des sexes dans les initiatives mondiales
développement durable
en faveur de la sécurité alimentaire et nutritionnelle
Alors que la date butoir de 2015 approche pour les Objectifs
Il est très important que les décideurs mondiaux en matière
du Millénaire pour le développement, les dirigeants doivent
de sécurité alimentaire et nutritionnelle, dont le Comité
élaborer et convenir d’une nouvelle série « d’Objectifs pour
de la sécurité alimentaire mondiale et l’initiative Renforcer
un développement durable » qui traitent des rapports entre
la nutrition, prennent conscience de la menace que le
pauvreté, environnement, changement climatique et mobilité
changement climatique fait peser sur leurs objectifs communs
humaine. Les dirigeants doivent reconnaître l’existence des
et l’expriment haut et fort. Ces décideurs doivent incorporer
facteurs de changement environnemental et leur impact sur
les effets du changement climatique dans les politiques
la pauvreté et la sécurité alimentaire. Ces objectifs doivent
alimentaires et nutritionnelles et dans leur pratique, en
exiger la contribution active de l’ensemble de la communauté
tenant compte du fait que ces impacts diffèrent pour les
internationale : chaque pays devra s’employer à réduire
hommes et les femmes. Ils devraient aussi réitérer l’appel à
le nombre de ces facteurs et garantir le droit de tous à un
l’action mondiale pour confronter la crise climatique afin de
développement durable.
démontrer l’importance du leadership et renforcer la volonté
politique en faveur de mesures énergiques.
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8.2 Gouvernements et partenaires d’exécution
chercher à améliorer leur collaboration afin de favoriser
l’efficacité et l’efficience et de relever des défis multisectoriels
Le Cadre d’adaptation de Cancún a représenté un grand
de plus en plus complexes.
pas en avant pour les initiatives mondiales en matière
d’adaptation, en établissant des processus pour appuyer
Appuyer, promouvoir et mettre en œuvre des plans
l’action nationale et prodiguer des conseils sur les principes
nationaux et locaux participatifs et couvrant l’ensemble des
d’adaptation, l’assistance et les mesures à prendre (dont la
secteurs affectés
migration). Il fait aussi référence à de nombreuses questions
connexes (migration, vulnérabilité et sécurité alimentaire)
qui demandent une approche holistique. Dans le sillage
des progrès effectués à l’échelle mondiale, il est temps de
s’intéresser aux niveaux national et local pour permettre
aux populations pauvres et vulnérables de s’adapter aux
changements climatiques et de faire des choix qui peuvent
renforcer leur résilience (dont la migration).
Les plans, les politiques et les pratiques des gouvernements
des pays en développement, auront des implications non
négligeables, aux niveaux national et local, sur l’aptitude
des populations pauvres et vulnérables à s’adapter et à gérer
les impacts et la variabilité climatiques. Les gouvernements
des pays développés et les agences humanitaires peuvent
appuyer ces efforts et promouvoir des principes et approches
en matière d’adaptation qui tiennent compte des besoins
des populations les plus vulnérables. En tant que partenaires
d’exécution des gouvernements nationaux et des collectivités
locales, les ONG humanitaires ou axées sur le développement
ou l’écologie, les institutions multilatérales et les agences
des Nations Unies ont la responsabilité de veiller à ce que
leur pratique reflète ces principes et intègre les impacts
et vulnérabilités climatiques projetés afin d’améliorer les
capacités d’adaptation des communautés et des populations
pauvres et vulnérables. Ces acteurs doivent également
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Les gouvernements devraient anticiper les questions de
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance ou de
mobilité humaine liée aux facteurs de stress climatiques
et préparer des plans en conséquence. Pour cela, il faut
que les processus gouvernementaux de planification aux
niveaux national et local prennent en compte tous les
secteurs concernés. Les plans doivent également incorporer
les projections climatiques, inclure des analyses et proposer
des politiques améliorées qui permettent de multiplier ou
limiter les options en matière d’adaptation, avec notamment
des politiques régissant le travail, les biens fonciers et les
ressources naturelles, le déplacement et l’accès aux services
d’appui à la migration et à la réinstallation. La planification
et la mise en œuvre doivent encourager la participation et
respecter les droits des populations vulnérables, y compris les
migrants, les membres de leur famille ou les personnes qui
se voient dans l’obligation de migrer. Elles doivent respecter
les principes internationaux et les instruments relatifs aux
droits de l’homme. Une bonne planification et une mise en
œuvre efficaces exigent la participation des pouvoirs publics
à tous les niveaux, ainsi que celle de certains ministères,
lesquels doivent avoir les capacités et ressources nécessaires
pour s’impliquer dans ces processus. C’est pourquoi il est
nécessaire d’identifier et de combler les lacunes en matière
de capacités.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Appuyer et collaborer avec les initiatives visant à aborder les
Appuyer et encourager la résilience des moyens de
défis et opportunités transfrontaliers relatifs à l’adaptation
subsistance et la sécurité alimentaire
et à la mobilité humaine
Les mesures visant à améliorer les moyens de subsistance et
Certains des impacts locaux des changements climatiques
la sécurité alimentaire et à multiplier les options d’adaptation
résultent d’activités ou d’événements qui se sont produits loin
des petits exploitants, des pêcheurs, des éleveurs et pasteurs
en amont ou qui peuvent être soit exacerbés soit atténués
ainsi que des ménages sans terres comprennent entre autres
par des mesures visant à gérer les risques ou les ressources
: la promotion d’une diversification durable des moyens
au sein d’un écosystème ou bassin hydrologique commun.
de subsistance ; une agriculture durable et résiliente aux
De même, les impacts des perturbations climatiques,
changements climatiques ; l’amélioration des pratiques
qu’elles soient rapides ou progressives, peuvent provoquer
agricoles et de l’accès à des aliments nutritifs diversifiés.
des déplacements transfrontaliers ou rendre des zones
La
gestion
entières inhabitables, obligeant la population à s’installer
et
la
ailleurs. Avec l’augmentation des impacts climatiques, voire
bassins hydrographiques (notamment pour l’irrigation,
de la mobilité humaine, les nations doivent coopérer au
l’assainissement
niveau régional pour répertorier les défis transfrontaliers
écosystèmes dont dépendent les moyens de subsistance.
et les opportunités à effet de levier. Comme exemples de
L’accès aux données climatiques locales, aux marchés, à la
collaboration, citons l’échange d’informations sur les impacts
microfinance, à la micro-assurance et à l’assurance indexée,
projetés du changement climatique, l’étude des effets
ainsi qu’à la protection sociale et à des programmes sociaux
transfrontaliers potentiels d’activités telles que les barrages
renforce les capacités des ménages démunis à résister aux
hydroélectriques ou l’irrigation améliorée, la publication des
chocs. Des programmes d’éducation et de formation peuvent
stratégies climatiques et un dialogue régulier sur les défis et
offrir de nouvelles possibilités en matière de revenus, tant
opportunités communs.
pour les migrants que pour les non migrants.
Les impacts localisés de phénomènes climatiques extrêmes,
Sur le site de recherche du Ghana, 85 pour cent des
comme les inondations de 2011 qu’on a pu observer
habitants du district tirent leur subsistance de l’agriculture
au centre de la Thaïlande et dans le delta du Mékong au
et de l’élevage. Or, les paysans n’ont pas accès à
Viet Nam pendant les recherches de terrain pour le projet,
l’irrigation et leurs cultures sont entièrement tributaires
peuvent résulter tant des conditions météorologiques que
des précipitations. Les communautés étudiées en Thaïlande
de l’activité humaine loin en amont.
témoignent d’une plus grande résilience, avec un meilleur
communautaire
gestion
intégrée
et
des
des
l’hygiène)
ressources
ressources
peuvent
naturelles
en
eau/des
protéger
les
accès aux marchés, à l’infrastructure et au crédit, ainsi qu’à
des sources de revenus diversifiées, à la production agricole
et à des programmes publics de protection sociale
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Renforcer et étendre les actions de réduction des risques
Au Viet Nam, les recherches ont été menées lors de graves
de catastrophe notamment en les liant au développement
inondations, les plus sévères depuis dix ans. Si le niveau de
à long terme
la mer montait d’un mètre dans une province située plus au
Conformément au Cadre d’action de Hyogo, des systèmes
d’alerte précoce et autres mesures de réduction des
risques de catastrophe, y compris celles qui tirent parti des
capacités et des connaissances locales, doivent être intégrés
à la programmation du développement pour permettre la
préparation et la survie des ménages démunis. La riposte
aux catastrophes doit prendre en compte et multiplier les
stratégies de développement durables à long terme, les
actifs et les services déjà en place notamment l’aide à la
sud, cela réduirait les capacités de décharge du Mékong,
inonderait de larges bandes de terre et augmenterait peutêtre la fréquence et l’intensité des inondations en amont.
Au cours des 13 dernières années, le Guatemala a été
sévèrement touché par quatre phénomènes pluviométriques
extrêmes associés à des ouragans ou des tempêtes
tropicales : Mitch (1998), Stan (2005), Agatha (2010) et la
dépression tropicale 12-E (2011). Ceux-ci ont entraîné des
précipitations inhabituelles et causé d’importants dégâts.
subsistance, l’éducation et les services de santé. De telles
initiatives peuvent minimiser l’impact des catastrophes sur les
populations déplacées, améliorer leur résilience et diminuer
leur vulnérabilité. Pour cela, il faut renforcer la collaboration
entre les gouvernements nationaux ou les collectivités locales,
le système des Nations Unies et les acteurs humanitaires et
du développement, afin de mieux coordonner les efforts
et d’optimiser les apports financiers. Ces parties prenantes
devraient aussi élaborer et tester des plans de contingence
pour répertorier les solutions, les défis à relever et les lacunes
à combler. Les initiatives visant à renforcer la résilience et les
capacités d’adaptation doivent prendre forme avant qu’une
catastrophe ne se produise, afin de protéger la vie et les biens
des populations pauvres et leur permettre de s’affranchir
définitivement de la pauvreté.
Intégrer les considérations relatives à l’égalité des sexes
Lorsque la migration sépare les ménages, non seulement ce
sont les femmes, demeurées sur place, qui doivent désormais
assumer toute la charge de travail, mais les inégalités en
matière de pouvoir décisionnel et d’accès aux ressources
telles que les intrants et la technologie vulnérabilisent celles
chargées des travaux agricoles. L’intégration de l’égalité des
genres demande que l’on étudie les impacts sur les hommes
et les femmes, les garçons et les filles en tant que groupes
sociaux distincts, afin que les mesures prises n’excluent ni
ne nuisent à aucun d’entre eux. Elle implique un dialogue
avec divers groupes sociaux pour examiner et promouvoir
la sensibilisation aux rôles masculins et féminins, aux
dynamiques de pouvoir et aux inégalités afin que ces groupes
comprennent comment ceux-ci appuient ou limitent les
capacités d’adaptation de la population. Cela peut d’ailleurs
favoriser l’implication des femmes comme des hommes,
briser les barrières qui empêchent la participation équitable
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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aux processus décisionnels au sein de la communauté ou
des impacts locaux et améliorer l’efficacité des programmes
du ménage et garantir que les membres des deux sexes
gouvernementaux.
bénéficient de manière équitable des initiatives en matière
d’adaptation.
Pour les populations déjà démunies et vulnérables, le
changement climatique implique un nouvel ensemble
Au Bangladesh, les femmes dont les maris émigrent
se chargent des travaux agricoles en plus de leurs
tâches ménagères. Les filles et les jeunes femmes sont
souvent victimes de harcèlement sexuel au sein de leur
communauté. Par crainte du rejet social que cela entraîne,
les pères qui migrent marient souvent leurs filles très tôt,
ce qui les expose à des conséquences néfastes pour la
santé et interrompt leur scolarisation.
substantiel de défis dynamiques. Fondamentalement, dans
les secteurs de la sécurité alimentaire, de l’environnement
et plus largement du développement durable, la crise
climatique exige des solutions nouvelles de la part de la
communauté internationale et des autorités nationales ou
locales tant dans les pays développés qu’en développement.
Destinées aux parties prenantes à de nombreux niveaux,
les actions préconisées constituent un ensemble de mesures
qui se renforcent mutuellement. Exécutées ensembles,
elles permettront peut-être aux ménages et communautés
Donner la priorité aux populations vulnérables et faire en
vulnérables d’accéder à des options de migration et
sorte qu’elles prennent part aux processus engagés
d’adaptation qui amélioreront leur résilience. Les populations
La priorité doit être donnée aux besoins des populations
les plus vulnérables, comme celles pour qui la migration
constitue une stratégie d’ajustement dommageable à long
terme ou qui sont incapables d’émigrer. Les évaluations
de vulnérabilité qui prennent en compte les dynamiques
socioéconomiques, politiques et environnementales peuvent
localiser ces populations et déterminer les causes sousjacentes de leur vulnérabilité. En outre, leur participation
démunies font partie intégrante des solutions à long terme.
Il est nécessaire de leur procurer des moyens et des outils,
tels que des informations, des ressources et des options
de subsistance, qui tiennent compte des perturbations
pluviométriques. Cependant, l’avènement de solutions
durables ne repose pas seulement sur les populations et les
communautés locales : nous devons tous collaborer en vue
de changements positifs.
pleine et entière à tous les stades du processus permettra
d’une part de déterminer leurs besoins et d’y remédier, et
d’autre part de valoriser les savoirs locaux ou autochtones et
de les intégrer aux stratégies d’adaptation. La participation
et le renforcement des capacités à l’échelle communautaire
peuvent améliorer le capital social au sein des collectivités,
permettre de mieux faire comprendre la nature des besoins et
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 123
9- Annexe technique
9.1 Modélisation axée sur les agents
Comme le montre le cadre conceptuel (Illustration 11) qui
changement vécu par les agents modélisés à chaque pas de
a servi de base au modèle de migration axé sur les agents «
temps. Cependant, les fonctions relatives à la population
Rainfalls » (MMAAR) en Tanzanie, les effets sur la migration
qui modifient le nombre et les caractéristiques des agents
que provoquent les changements dans la variabilité et la
provoqueront aussi des changements tant parmi les agents
moyenne des précipitations au sein des trois communautés
eux-mêmes (personnes individuelles et ménages) que
reprises dans le modèle se traduisent par un changement de
chez d’autres individus, au travers d’interactions sociales
statut des ménages en termes de vulnérabilité. La présente
modélisées. Chacune de ces trois principales formes de
annexe technique fournit des informations supplémentaires
modification simulée (impact des précipitations, dynamique
sur la façon dont la pluviométrie affecte les processus des
de la population et interaction sociale) influeront donc sur
ménages et des communautés et influence, par conséquent,
les conditions dans lesquelles un agent-ménage entreprend
la migration des agents au sein du modèle.
d’évaluer sa vulnérabilité. Le résultat de cette évaluation
pèse alors sur la décision que prendra le ménage d’envoyer
En Tanzanie, le modèle de simulation a été appliqué avec
ou de retenir les migrants potentiels. les mêmes fonctions
un pas de temps d’un mois, au cours duquel un générateur
interdépendantes sont utilisées aumois de simulation suivant
d’événements appelle une série de fonctions interdépendantes.
(t+1)
Ces dernières contrôlent le fonctionnement interne du
modèle, de façon à ce que les relations entre les éléments
puissent se résoudre numériquement sous les conditions
indiquées au temps
. Les résultats de ces fonctions au
temps influencent les conditions sous lesquelles les mêmes
fonctions se produisent au temps en modifiant légèrement
les situations tant des agents que de leurs environnements
physiques et sociaux.
Le scénario des précipitations et l’impact des changements
apportés à ce scénario sur les fonctions au niveau des
ménages et des individus constituent le principal type de
_ 124
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Impact des précipitations :
Précipitations et production alimentaire :
L’impact des précipitations se traduit au niveau structurel
Chaque mois, l’état général de la production alimentaire (F)
par l’influence saisonnière qu’elles exercent sur le marché du
est évalué comme une fonction (x) des deux saisons des
travail et les systèmes de production alimentaire.
pluies décrites plus haut : Vuli (V) et Masika (M). Il peut
être bas, moyen ou bon. Étant donné la relation non-linéaire
Interprétation saisonnière des précipitations :
entre précipitations et production alimentaire, le fait qu’un
La pluviométrie mensuelle dans le district de Same en
scénario de précipitations à un temps t aboutisse ou non à
Tanzanie est évaluée mensuellement. Elle est classée selon
une catégorie particulière de production alimentaire dépend
les catégories suivantes : extrêmement sec, sec, moyen,
du taux de réponses des ménages à l’enquête Q412a
humide et extrêmement humide en utilisant des seuils définis
(mois où le ménage a tendance à ne pas pouvoir cultiver
par quintiles. Ces classements mensuels (r)* prennent une
suffisamment pour se nourrir).
signification saisonnière au travers de leur interprétation dans
F = x(V, M)
les scénarios Vuli (V), Masika (M) et trimestriels (R) Selon le
mois de simulation à t , les valeurs , V, M et R représentent
le scénario de précipitations recherché.
V = (r(oct)+r(nov)+r(dec)+r(jan))/4
Dynamiques des populations :
Les fonctions naissance, mariage et décès du modèle sont
M = (r(feb)+r(mar)+r(apr)+r(may))/4
annuelles. Les taux de naissance définis à partir des variantes
R = (r(t1)+r(t-1)+r(t-2))/3
moyennes des données du rapport World Population
Prospects des Nations Unies permettent de simuler la
Précipitations et marché du travail :
naissance des agents et de les assigner de façon aléatoire à des
Chaque mois, le marché du travail structurel de la région est
ménages existants. Les agents célibataires âgés de 18 ans ou
simulé comme une fonction (f) du scénario de précipitations
plus ont 10 pour cent de chances de se marier chaque année.
de trois mois (R). C’est pourquoi le scénario des trois derniers
Le mariage ne représente aucun lien entre les ménages et ne
mois a une influence sur le marché du travail structurel (L),
dépend pas du fait qu’il y ait ou non un(e) partenaire éligible.
qui peut être moins opportun, moyen ou plus opportun.
Dans le modèle, le décès se produit en fonction des taux de
Étant donné la relation non-linéaire entre les précipitations
décès définis à partir des variantes moyennes des données
et le bon comportement du marché du travail, le fait qu’un
du rapport World Population Prospects des Nations Unies.
scénario de précipitations aboutisse ou non à une catégorie
particulière dudit marché dépend du taux de réponses des
Interaction sociale :
ménages à l’enquête Q412b (mois où le ménage n’a en
Le modèle offre deux possibilités d’interaction entre les
général pas assez d’argent pour se nourrir).
agents ; compétition sur le marché du travail agricole et
L = f (R)
Juin 2013
communication entre migrants.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 125
Compétition sur le marché du travail agricole :
Les agents-ménages sont situés dans l’un des trois
environnements représentant les villages. Les ménages qui
se sont définis comme offrant des opportunités d’emploi à
d’autres lors de l’enquête auprès des ménages gardent la
même capacité d’emploi dans chaque simulation. De même,
ceux qui se sont définis comme offrant de la main d’œuvre
le font tout au long de la simulation. (Le même ménage
peut offrir à la fois des opportunités d’emploi et de la main
d’œuvre.)
Évaluation de la vulnérabilité du ménage :
Suite à l’impact d’un changement dans le régime des
précipitations sur le marché du travail structurel et sur les
niveaux de production alimentaire, chaque agent-ménage
entreprend une évaluation de sa vulnérabilité où le degré
de sécurité alimentaire/des moyens de subsistance qu’il
expérience à t joue un rôle. Le degré de vulnérabilité de
chaque ménage, ou note de vulnérabilité (v), dépend donc
de ses revenus (I) et de sa production alimentaire (E), ainsi
que de la taille du ménage (H).
v = I/H+E/H
Le taux d’opportunités d’emploi (o) offertes mensuellement
par les ménages éligibles à leur village est une fonction (h) du
scénario de précipitations (R) qui touche la région. Le travail
est ensuite divisé entre les travailleurs disponibles sur base
pseudo-compétitive (b), où le nombre de journées de travail
(w) octroyé à un individu n’est pas nécessairement celui qu’il
recevrait si celles-ci étaient également réparties entre tous.
Revenus :
Dans la simulation, les revenus du ménage sont donc une
fonction (i) du rendement des récoltes (c), du rendement
du cheptel (l), des travaux agricoles (w) et des transferts
d’argent par les migrants (s).
I = i(c, l, w, s)
Seuls les ménages qui ont noté lors de l’enquête que leur
o = h(R)
w = b(o)
utilisation des récoltes/du cheptel contribuait à leurs revenus,
sont aptes à tirer un tel bénéfice de leurs terres/bétail. Les
revenus des récoltes sont une fonction (j) de la superficie
cultivée par un ménage (D) et du niveau de production
Communication entre migrants :
alimentaire structurelle (F), qui dépend lui-même de la
Dans le modèle, les agents-individus sont placés dans
qualité des saisons des pluies Vuli et Masika.
un réseau social comprenant dix de leurs pairs, avec qui
ils partagent des informations sur chacune des activités
c = j(D, F)
migratoires qu’ils entreprennent. Les réseaux d’agents sont
Les revenus de l’élevage sont également affectés par le
structurés comme dans le monde réel, mais à moindre échelle.
scénario de précipitations de trois mois (R) et sont une
75 pour cent des connexions établies le sont avec des voisins.
fonction (k) de l’appartenance ethnique (e) et du degré
Non seulement les agents partagent leurs comportements
d’impact (k) que selon les ménages, les changements dans
migratoires avec leurs pairs, mais ils échangent aussi ces
les précipitations ont eu sur le rendement du cheptel.
informations avec tous les autres membres de leur ménage.
_ 126
l = k(R, e)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Les revenus des travaux agricoles (w) sont déterminés sur base de la
compétition pour ces emplois telle qu’elle est décrite plus haut. Les individus
qui appartiennent à un ménage mais sont en train de migrer à t contribuent
aussi chaque mois aux revenus du ménage en effectuant des transferts
d’argent (s). Dans le format actuel du modèle, la valeur relative des
composantes du revenu et leur maximum et minimum mensuels potentiels
figurent dans le tableau 5 ci-dessous.
Équivalents des composantes :
Valeur relative :
Revenu mensuel max. :
Revenu mensuel min. :
Rendement des cultures par acre de terre (y)
6
0,5
0-0,05
Note du cheptel (l) :
1 x Vache
1
0,25
0-0,05
1 x Âne
0,5
0,125
0-0,025
1 x Boeuf
0,5
0,125
0-0,025
1 x Cochon
0,5
0,125
0-0,25
1 x Chèvre
0,25
0,063
0-0,0125
1 x Poule
0,1
0,025
0-0,05
Travail d’une personne/jour (w)
0,25
5
0-0,25
Transferts d’argent d’un migrant (s)
1
1
1
Tableau 5 : Valeur relative des composantes du revenu
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 127
Production alimentaire :
processus d’épreuve de sensibilité. En activant le modèle
Pour que la sécurité des moyens de subsistance soit envisagée
tanzanien sans y inclure de processus migratoire de la part
sous l’angle de la sécurité alimentaire et des revenus, la
des membres du ménage (et donc aucune contribution aux
production alimentaire (E) est une fonction (q) du rendement
revenus du ménage par le biais de transferts d’argent) mais
des cultures (c) et de celui du cheptel (l)
avec un classement constant au niveau « moyen » tant
pour le marché structurel du travail que pour la production
E = q(c, l)
alimentaire structurelle, un seuil de vulnérabilité de T=0.04
conduit à un état d’équilibre du classement de la vulnérabilité
Vu
cette
double
approche
(revenus
et
production
des ménages pendant toute la période de simulation. Toute
alimentaire), différents types de ménage peuvent être classés
déviation de T=0.04 entraîne un changement graduel du
comme « vulnérables » pour différentes raisons. Un ménage
contenu et des catégories vulnérables au fil du temps.
à très bas revenu peut ne pas devenir vulnérable étant donné
le niveau de production alimentaire dont il a besoin pour
Processus décisionnel concernant la migration :
subsister. Par contraste, un ménage ayant une production
Vulnérables ou non, les ménages prennent des décisions
alimentaire très faible ne sera pas vulnérable s’il bénéficie de
en matière de migration qui, même si elles passent par
revenus relativement plus élevés. Les fonctions Rendement
l’agent-ménage, dépendent largement des attributs des
des cultures et du cheptel pour la production alimentaire
individus. Que le ménage soit vulnérable ou satisfait, ses
fonctionnent de la même manière que celles qui paraissent
membres individuels développent tous une propension (P)
contribuer aux revenus mais elles dépendent du fait que les
à la migration qui est conditionnée par leur attitude envers
ménages ont cité la production agricole/l’élevage comme
celle-ci (A) et leurs normes subjectives (S).
servant à l’alimentation du ménage et non à la vente.
P = A+0.5S
Seuil de vulnérabilité :
En comparant leur note de vulnérabilité (v) à un seuil de
L’attitude d’un individu (A) envers la migration est une
vulnérabilité (T), les ménages peuvent être considérés
fonction (u) de la catégorie foncière de son ménage (d), de
comme vulnérables aux perturbations pluviométriques et
son âge (a), de son sexe (g) et de son état civil (m).
conscients d’un besoin imminent de rectifier leur situation.
Les ménages qui ont une note de vulnérabilité suffisante pour
A = u(d, a, g, m)
les empêcher de devenir vulnérables sont considérés comme
satisfaits et aptes à poursuivre leurs stratégies d’adaptation.
Le seuil de vulnérabilité (T) est fixé à 0,04 suite à un
_ 128
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
On déduit l’attitude d’un individu envers la migration de
Vulnérabilité :
l’analyse des attributs de ceux qui, dans l’enquête auprès des
◆ Un acre de terre produit le même rendement, quel que soit
ménages, sont notés comme ayant émigré. Si l’attitude d’un
le lieu.
individu est supérieure à 0, sa norme subjective est dérivée
◆ Les opportunités de travail agricole dans un village seront
du nombre de migrants actuels appartenant à la famille de
saisies par ceux qui vivent déjà dans ce village. On n’introduit
l’agent (B) et au réseau des pairs (n) en rapport avec la taille
donc pas d’effet d’attraction pour les migrants dans les lieux
du ménage (H) et du réseau de pairs (N).
étudiés.
B n
S= —+—
H N
◆ Les revenus du ménage ne reçoivent aucun supplément
provenant d’activités non agricoles (dans ce modèle
La propension à la migration de chaque individu est
préliminaire).
rapportée au ménage et classée de la plus forte à la plus
◆ Les récoltes et non le cheptel constituent la principale
faible. Les ménages évaluent alors leur capacité à investir
source de revenus du ménage et de production alimentaire.
dans la migration, leur maîtrise comportementale perçue (C),
◆ Les terres agricoles représentent donc un flux d’actifs alors
dérivée comme une fonction (y) de leurs revenus (I), de leur
que les animaux d’élevage représentent un stock (sauf, dans
patrimoine (G), du nombre de migrants du ménage qui sont
une certaine mesure, pour la population masaï).
déjà partis (B) et du coût de la migration (Q).
Les revenus excédentaires détenus à la fin d’un mois civil
C = y (I, G, B, Q)
Le coût de la migration (Q) est fixé à 1 (pour une comparaison
directe avec les sources de revenus potentielles relatives
produisent une augmentation marginale des biens du
ménage.
du tableau 5 ci-dessus). Par contre, le coût des formes
Migration :
vulnérables de migration est fixé à 50 pour cent (0.5Q) du
◆ Le coût de la migration est le même pour tous les ménages,
coût normal de la migration (0,5).
même si les types de migration diffèrent, selon qu’elle est
Hypothèses clés/demography:
◆ Le décès peut toucher n’importe quel agent à n’importe
quel point du temps modélisé, quel que soit son âge.
◆ Aucun nouveau ménage n’apparaît. Le mariage est une
fonction statistique et ne représente pas une union entre
satisfaite ou vulnérable.
◆ Toutes les migrations modélisées sont des migrations de
travail.
◆ Toutes les migrations sont réussies et produisent un bénéfice
standard pour le ménage.
◆ Les capacités d’un ménage à investir dans la migration et
deux ménages.
◆ Les agents deviennent économiquement actifs et éligibles
pour le mariage à l’âge de 18 ans.
sa volonté d’y parvenir diminuent en fonction du nombre de
migrants.
◆ La propension à la migration d’un individu est la même dans
des conditions avec impact (vulnérable) et sans (satisfaite).
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 129
9.2 Cartographie et références
Données sur la pauvreté
variabilité
Azzarri, C., Wood, S., Hyman, G., Barona, E., Bacou, M. et
pluviométrique) produites pour ce rapport ont été créées
Guo, Z. 2012. Sub-national Poverty Map for Sub-Saharan
à partir d’ensembles de données provenant de diverses
Africa at 2005 International Poverty Lines (r12.04). http://
sources, et référencés ci-dessous. Lorsque l’une de ces séries
harvestchoice.org/. (Ghana, Tanzanie) [Carte infranationale
n’a servi que pour certains pays, ceux-ci sont indiqués entre
de la pauvreté pour l’Afrique subsaharienne]
Les
cartes
(et
autres
graphiques
sur
la
parenthèses à la fin de la citation.
Centre pour un réseau international d’information sur les
Ces cartes sont le fruit du travail de Tricia Chai-Onn et Dara
sciences de la Terre (CIESIN)/Université Columbia. 2005.
Mendeloff (membres de GIS) et d’Al Pinto (cartographe),
Poverty Mapping Project: Small Area Estimates of Poverty
sous la supervision d’Alex de Sherbinin, du Centre pour un
and Inequality. Palisades, NY: NASA Socioeconomic Data
réseau international d’information sur les sciences de la Terre
and Applications Center (SEDAC). http://sedac.ciesin.
(CIESIN), qui dépend de l’Institut de la Terre de l’Université
columbia.edu/data/set/povmap-small-area-estimates-
Columbia. Le travail de cartographie a été entièrement
poverty-inequality. (Guatemala, Viet Nam) [Cartographie de
effectué à l’aide du logiciel ArcGIS v10 puis a été converti
la pauvreté : estimations sur la pauvreté et l’inégalité]
en images dans Adobe Illustrator pour la production finale.
L’analyse des données climatiques pour les diagrammes
Centre pour un réseau international d’information sur les
situés dans le coin inférieur droit de chaque carte est l’œuvre
sciences de la Terre (CIESIN). 2011. Global Infant Mortality
de Michael Bell et John Del Corral, de l’Institut international
Grid, 2008. Palisades, NY: CIESIN, Institut de la Terre de
de recherche pour le climat et la société (IRI), qui fait partie,
l’Université Columbia. [Cette série de données, mise à
lui aussi, de l’Institut de la Terre de l’Université Columbia. Ils
jour en 2008, est issue de la série de données publiques
ont puisé dans la collection de données climatologiques de
suivante : Centre pour un réseau international d’information
l’IRI pour produire la série de données sur les tendances et
sur les sciences de la Terre (CIESIN)/Université Columbia.
variations en se basant sur le maillage des différentes zones
2005. Poverty Mapping Project: Global Subnational Infant
étudiées.
Mortality Rates. Palisades, NY: NASA Socioeconomic Data
and Applications Center (SEDAC).
http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/set/povmap-globalsubnational-infant-mortality-rates.]
(Bangladesh,
Inde,
Pérou, Thaïlande) [Cartographie de la pauvreté : Taux de
mortalité infantile infranationaux]
_ 130
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Zones urbaines
Ocean Basemap. 2012. GEBCO, NOAA, CHS, OSU, UNH,
CSUMB, National Geographic, DeLorme, NAVTEQ, et ESRI.
Centre pour un réseau international d’information sur les
sciences de la Terre (CIESIN)/Université Columbia, Institut
International de Recherche sur les Politiques Alimentaires
(IFPRI),
Banque
mondiale
et
Centre
international
d’agriculture tropicale (CIAT). 2011. Global Rural-Urban
Mapping Project, Version 1 (GRUMPv1): Urban Extents Grid.
Palisades, NY: NASA Socioeconomic Data and Applications
Center
(SEDAC).
http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/
set/grump-v1-urban-extents. [Cartographie mondial ruraleurbaine]
Précipitations moyennes (carton en médaillon)
New, M., Lister, D., Hulme, M. et Makin, I. 2002: A highresolution data set of surface climate over global land areas.
Climate Research 21:1-25. Données disponibles sur http://
www.cru.uea.ac.uk/cru/data/hrg/tmc/. [Série de données
haute résolution sur le climat des zones terrestres]
Terres agricoles (carton en médaillon)
Fond cartographique
Fischer, G., Nachtergaele, F., Prieler, S., van Velthuizen,
DeLorme Publishing Company, Inc., 2010, Roads.sdc: un
sous-ensemble de DeLorme World Base Map (DWBM).
2010, DeLorme Publishing Company, Inc., Yarmouth, Maine,
États-Unis.
H.T., Verelst, L. et Wiberg, D. 2008. Global Agro-ecological
Zones Assessment for Agriculture (GAEZ 2008). Laxenburg,
Autriche et Rome, Italie : IIASA et FAO. [Évaluation des
zones agro-écologiques pour l’agriculture]
Lehner, B., Reidy Liermann, C., Revenga, C., Vörösmarty, C.,
Variabilité
pluviométrique/fréquence
Fekete, B., Crouzet, P., Doll, P., Endejan, M., Frenken, K.,
(carton en médaillon)
des
sécheresses
Magome, J., Nilsson, C., Robertson, J.C., Rodel, R., Sindorf,
N., Wisser, D. 2011. Global Reservoir and Dam Database,
Variabilité pluviométrique/fréquence des sécheresses (carton
Version 1 (GRanDv1): Reservoirs, Revision 01. Données
en médaillon)
fournies par le NASA Socioeconomic Data and Applications
Ce carton représente le coefficient de variation des
Center
précipitations
(SEDAC).
http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/
multiplié
par
l’indice
de
précipitations
collection/grand-v1. [Base de données mondiale sur les
standardisé (SPI) sur six mois. Le SPI représente le nombre
barrages et réservoirs]
d’écarts-type de la valeur observée par rapport à la
moyenne à long terme pour une variable normalement
National Geographic Basemap. 2012. National Geographic,
distribuée de façon aléatoire. Comme les précipitations
ESRI, DeLorme, NAVTEQ, PNUE-WCMC, USGS, NASA,
ne sont pas normalement distribuées, on procède d’abord
ESA, METI, NRCAN, GEBCO, NOAA, IPC.
à un ajustement pour transformer les valeurs ajustées des
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 131
précipitations en une distribution statistique normale. Les
climatologiques (CPC) : CPC Unified Precipitation gauge
données proviennent du site suivant :
based global data set, v1p0. [Analyse des précipitations
mondiales]
PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement).
Ces données sont produites à une résolution de 0,5° lat/
2010. Global Risk Data Platform: Drought Coefficient of
lon. À télécharger sur : http://iridl.ldeo.columbia.edu/
Variation. Disponible à l’adresse suivante : http://preview.
SOURCES/.NOAA/.NCEP/.CPC/.UNIFIED_PRCP/.GAUGE_
grid.unep.ch/?preview=home&lang=fr (Consulté en juillet
BASED/.GLOBAL/.v1p0/. (Pérou uniquement)
2010)
National Oceanographic and Atmospheric Administration
Précipitations pendant la saison des pluies : déviation par
rapport à la moyenne (graphique)
Toutes
les
données
proviennent
(NOAA), Centres nationaux pour la prévision environnementale
(NCEP), Centre de prévisions climatologiques (CPC) : CPC
Merged Analysis of Precipitation (CMAP): Analyses of global
de
l’informathèque
de l’IRI. On trouvera ci-dessous les séries utilisées. Le
document complet sur les sources originales des données
est téléchargeable sur le lien « dataset documentation »
precipitation using gauge observations, satellite estimates,
and numerical model predictions. [Analyse des précipitations
mondiales]
Ces données sont produites à une résolution de 2,5° lat./
disponible pour chacune des URL reprises ci-dessous.
lon. et téléchargeables sur http://iridl.ldeo.columbia.edu/
Il est à noter que ces sources originales représentent des
monthly/. (Ghana, Guatemala, Tanzanie)
données mondiales de réanalyse maillées et basées sur les
données des stations météorologiques disponibles (pour
CPC Unified) et sur des données satellitaires et des modèles
numériques (pour CMAP et Aphrodite), la couverture des
données observées étant souvent peu fournie. Cela signifie
que les résultats de l’analyse de la variabilité et des tendances
pluviométriques seront différents de ceux obtenus par les
stations météorologiques locales et repris dans les rapports
des études nationales.
SOURCES/.NOAA/.NCEP/.CPC/.Merged_Analysis/.
Research Institute for Humanity and Nature (RIHN), Institut
de recherche météorologique de l’Agence japonaise de
météorologie : RIHN aphrodite Asian precipitation from
APHRODITE V1003R1.
Ces données sont produites à une résolution de 0.5° lat./
lon. et téléchargeables sur http://iridl.ldeo.columbia.edu/
SOURCES/.RIHN/.aphrodite/.V1003R1/. (Bangladesh, Inde,
Thaïlande et Viet Nam)
National Oceanographic and Atmospheric Administration
(NOAA),
Centres
environnementale
_ 132
nationaux
(NCEP),
pour
Centre
la
de
prévision
prévisions
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 133
10- Notes
1
La sécurité alimentaire peut être définie comme une «
6
3.5° C : d’après le Climate Action Tracker http://
situation […] où toutes les personnes, en tout temps, ont
climateactiontracker.org/news/116/Durban-Agreements-
économiquement, socialement et physiquement accès à une
a-step-towards-a-global-agreement-but-risk-of-exceeding-
alimentation suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs
3C-warming-remains-scientists.html ; 6° C d’après l’AIE.
besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour
7
leur permettre de mener une vie active et saine ». FAO,
« migrants climatiques » dans un rapport du Programme
L'état de l’insécurité alimentaire dans le monde 2001, Rome
des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). D’autres
: FAO, 2002.
auteurs et institutions, comme l’Organisation internationale
2
Tubiello, F. N., et G. Fischer. 2007. Reducing climate
El-Hinnawy, E. (1985) a proposé la première définition de
pour les migrations (OIM), ont affiné et complété sa
change impacts on agriculture: Global and regional effects of
définition en 2007.
mitigation, 2000-2080. Technological Forecasting and Social
8
Change 74 : 1030-56
environnementale actuelle et future : Myers, N. (2005)
Le document suivant tente de chiffrer la migration
Jennings, S. and J. Magrath. What happened to the
Environmental Refugees: An Emergent Security Issue. 13e
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Forum économique, Prague, 23-27 mai. Christian Aid (2007)
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Royaume-Uni, juillet 2009.
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3
4
Changement environnemental et scénarios de migrations
internationale pour les migrations (2007), Faits et chiffres
forcées (EACH-FOR), projet de recherche financé par la
:
Commission européenne dans le 6e programme-cadre (FP6),
internationale pour les migrations, Genève, http://www.iom.
Estimations
et
tendances
mondiales.
Organisation
(2007-2009), (contrat n° : 044468) Disponible à l’adresse
int/cms/jahia/Jahia/global-estimates-and-trends/lang/fr
suivante : http://www.each-for.eu/
9
Jäger et al. (2009) ont synthétisé les résultats du projet «
GIEC, 2012 : Gestion des risques de catastrophes et de
Changement environnemental et scénarios de migrations
phénomènes extrêmes pour les besoins de l’adaptation au
forcées (EACH-FOR) » (EACH-FOR, www.each-for.eu),
changement climatique. Rapport des Groupes de travail I
première enquête mondiale de ce genre, qui s’appuie
et II du GIEC. [Field, C.B., V. Barros, T.F. Stocker, D. Qin,
sur un travail de terrain pour explorer les changements
D.J. Dokken, K.L. Ebi, M.D. Mastrandrea, K.J. Mach, G.-
environnementaux et la migration dans 23 études de cas.
K. Plattner, S.K. Allen, M. Tignor, et P.M. Midgley (eds.)].
Warner et al. (2009) (« In Search of Shelter ») ont fait
Version anglaise : Cambridge University Press, Cambridge,
connaître les résultats d’EACH-FOR aux décideurs politiques,
5
Royaume-Uni, et New York, NY, États-Unis, 582 p. Résumé
en particulier dans le cadre du processus CCNUCC.
en français à l’intention des décideurs : https://docs.google.
10
com/file/d/0B1gFp6Ioo3akZWloNDdVZGkzeDg/edit?pli=1
Genève, Organisation internationale pour les migrations
_ 134
Hugo (2008) Migration, development and environment.
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Institute
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Voir Black et al. (2008) « Demographics and climate
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change and forced migration scenarios project synthesis
transatlantique sur le changement climatique et la migration
report. Deliverable D.3.4 for the European Commission,
du Fonds Marshall pour l’Allemagne. Collinson S. (2010)
11
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
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Developing adequate humanitarian responses. Document
transformation of agriculture. Document d’analyse n° 201.
d’information pour l’équipe d’étude transatlantique sur le
Février 2011.
changement climatique et la migration du Fonds Marshall
14
pour l’Allemagne. Gemenne (2010) « La migration, une
patterns and shorelines will contribute to mass migrations on
stratégie d’adaptation possible ? Synthèse », IDDRI, Science
a scale never before seen. Scientific American, janvier 2011.
Po, Paris. Thomas et Rendón (2010) « Confronting climate
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displacement: Learning from Pakistan’s floods°». Refugees
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International, Washington. Warnecke, A., Tanzler, D., Vollmer,
Senegal and Mali. Document de travail n°1. Francfort-sur-
R.(2010) Climate change, migration, and conflict: Receiving
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communities under pressure. Document d’information pour
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Voir aussi : de Sherbinin et al. (2011) Shifts in rainfall
Leighton et al. (2011) Policy and institutional mechanisms
Project Report. Londres : Government Office for Science.
to address the needs of climate-related migrants. Résultats
15
de l’académie d’été 2010 sur la vulnérabilité sociale.
instruments de recherche « Rainfalls » dans : Rademacher-
Document de recherche. UNU-EHS. Scheffran et al. (2011)
Schulz, C., Afifi. T. Warner, K., Roseneld, T., Milan, A., Etzold,
Migration as a contribution to resilience and innovation in
B., Sakdapolrak, P. (2012). Rainfall variability, food security
climate adaptation: Social networks and co-development in
and human mobility: An approach for generating empirical
On trouvera une description des méthodes de terrain et des
Northwest Africa. Applied Geography (2011), doi:10.1016/j.
evidence. InterSecTions n° 10. Bonn : UNU-EHS.
apgeog.2011.10.002. McAdam et Saul (2010) An Insecure
16
Climate for Human Security? Climate-Induced Displacement
d’approches novatrices dans des études comme : Groenewold
and International Law. Sydney Centre, Document de travail
et Bilsborrow (2008) Design of samples for international
4. Bronen (2011) Forced Migration of Alaskan Indigenous
migration surveys: Methodological considerations and
Communities due to Climate Change, in Afifi et Jäger (eds.)
lessons learned from a multi-country study in Africa and
Environment, Forced Migration and Social Vulnerability p
Europe. I: Bonifazi et al. (2008): Migration in Europe.
87-98, Springer, Heidelberg. Cohen (2008) Listening to the
IMISCOE. Amsterdam University Press. Kniveton et al. (2008)
voices of the displaced: Lessons Learned. Brookings-Bern
Predictive modeling. Forced Migration Review, Special Issue:
Project on Internal Displacement. Ferris et Ferro-Ribeiro
Climate Change and Displacement, 31, Oxford. de Haas
(2012). Protecting people in cities: the disturbing case of
(2010) The Internal Dynamics of Migration Processes: A
Haiti. Disasters (Overseas Development Institute et Blackwell
Theoretical Inquiry. Journal of Ethnic and Migration Studies
Publishing). CNUCED. 2011. Assuring food security in
36(10): 1587 – 1617. Piguet (2010) Linking climate change,
developing countries under the challenges of climate
environmental degradation, and migration: a methodological
change: Key trade and development issues of a fundamental
overview. Climate change (Wiley Interdisciplinary Reviews)
_ 136
Les méthodes de recherche « Rainfalls » se sont inspirées
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
1, issue 4, 517-524. Piguet et al. (2011) Migration and
élevé, moyen ou bas, le seuil se situant aux points suivants :
climate change. Cambridge University Press. Cambridge.
revenu annuel par habitant (bas = moins de 1 000 dollars US,
Pour une réflexion sur la migration en tant que stratégie de
moyen = > 1 000 dollars US et < 3 000 dollars US, élevé =
gestion des risques : Stark et Zakharenko (2012a) Differential
> 3 000 dollars US) ; indice du développement humain (bas,
Migration Prospects, Skill Formation, and Welfare. Review of
moyen, élevé et très élevé en suivant la définition du PNUD)
International Economics, Vol. 20. Stark et Janubek (2012b).
et nutrition (retard de croissance modéré et aigu de > 40 % =
Migration networks as a response to financial constraints:
bas, > 20 % < 40 % = modéré, et < 20 % = élevé).
Onset and endogenous dynamics. Journal of Development
20
Economics, 2012.
certain nombre d’indicateurs qui permettent de se faire
Les huit pays sélectionnés ont aussi été classés selon un
Pour une documentation complète sur les instruments
une idée des changements survenus aux plans économique
de recherche, voir le protocole de recherche « Rainfalls »
et démographique. Les trois variables suivantes ont été
(Rademacher et al. (2012))
sélectionnées en raison de leur pertinence pour les recherches
17
Ce qui distingue un échantillon aléatoire d’un échantillon
du projet « Rainfalls » : (1) Croissance annuelle moyenne
aléatoire stratifié, c’est que le deuxième permet d’inclure des
du PIB, 2007-2011 (Source : Rapport sur le développement
sous-populations clés.
dans le monde 2012, Banque mondiale) ; (2) Contribution de
18
Pour classer les pays de recherche, il faut avant tout
l’agriculture au PIB (Source : Rapport sur le développement
leur attribuer une place en termes de développement
dans le monde, Banque mondiale) et (3) Taux annuel de
socioéconomique. À cette fin, et conformément au fait
croissance de la population, 2011 (Source : Rapport sur
que le projet s’intéressait tout particulièrement à la sécurité
le développement dans le monde, Banque mondiale).
alimentaire, on a eu recours à trois indicateurs largement
Pour chacune de ces variables, les pays ont été classés en
diffusés : (1) Produit national brut par habitant (Source :
utilisant les seuils suivants : Croissance économique (élevée =
Rapport sur le développement dans le monde 2012 : Égalité
croissance annuelle de > 6 %, faible = croissance annuelle de
des genres et développement, 2011, Banque internationale
< 4 %) ; Perspectives d’emploi non agricole (élevées = < 20
pour
développement/Banque
% de la valeur ajoutée en agriculture, faibles = > 20 % de la
mondiale, Washington, DC ; (2) Indice du développement
valeur ajoutée en agriculture) ; et Progrès dans la gestion de
humain (Source : Rapport sur le développement humain
la croissance de la population (élevé = croissance annuelle de
2011, Durabilité et équité : un meilleur avenir pour tous, ©
< 1 %, modéré = croissance annuelle de > 1 % <20%, faible
19
la
reconstruction
et
le
2011, Programme des Nations Unies pour le développement)
= croissance annuelle de > 2 %).
; et (3) Pourcentage des enfants de moins de cinq ans
21
souffrant d’un retard de croissance modéré à aigu (Source : La
de : Promburom, Panomsak ; Sakdapolrak, Patrick (2012).
situation des enfants dans le monde 2012 : les enfants dans
Projet « Là où tombe la pluie ». Étude de cas : Thaïlande.
un monde urbain, Fonds des Nations Unies pour l’enfance
Résultats de la province de Lamphun, Thaïlande. Rapport
(UNICEF), février 2012.) Les catégories étaient les suivantes :
n° 7. Bonn : Institut de l’Université des Nations Unies pour
Juin 2013
Les informations reprises dans cette section sont tirées
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 137
l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS).
22
Piguet et al. (2011) Migration and climate change.
Cambridge University Press. Cambridge.
Nations Unies pour l’environnement et la sécurité humaine
(UNU-EHS).
29
Les informations reprises dans cette section sont tirées de
PNUD 2010 : Human security today and tomorrow. Thai
: Rademacher-Schulz, Christina, et Edward Salifu Mahama
human development report 2009. Bangkok : Programmes
(2012). Projet « Là où tombe la pluie ». Étude de cas : Ghana.
des Nations Unies pour le développement.
Résultats du district de Nadowli, Haut Ghana occidental,
23
Les informations reprises dans cette section sont tirées
Ghana. Rapport n° 3. Bonn : Institut de l’Université des
de : Ho, Raúl ; Milan, Andrea (2012). Projet « Là où tombe
Nations Unies pour l’environnement et la sécurité humaine
24
la pluie ». Étude de cas : Pérou. Résultats de la province
(UNU-EHS).
de Huancayo, Pérou. Rapport n° 5. Bonn : Institut de
30
l’Université des Nations Unies pour l’environnement et la
définie comme un déplacement de moins de six mois, alors
sécurité humaine (UNU-EHS).
que la migration temporaire dure six mois à deux ans. Tout
25
MINAM (Peruvian Ministry of Environment). Segunda
Dans le présent ouvrage, la migration saisonnière est
déplacement de plus de deux ans est considéré comme une
Comunicación Nacional del Perú a la Convencion Marco de
migration permanente.
las Naciones Unidas sobre Cambio Climático. Lima, Peru :
31
MINAM, 2010.
agricultural planning in West Africa, Mitteilungen/Institut für
26
Les informations reprises dans cette section sont tirées de
Laux 2009. Statistical modeling of precipitation for
Wasserbau, Université de Stuttgart, Heft 179, ISSN 0343-
: Khoa, Nguyen Viet ; Thao, Nguyen Cong ; van der Geest,
1150, 198 pages.
Kees (2012). Projet « Là où tombe la pluie ». Étude de cas
32
: Viet Nam. Résultats de la commune de Hung Thanh dans
« l’éducation » ont donné comme raisons de leur migration
Les migrants ne se déplaçant ni pour le « travail » ni pour
le delta du Mékong, Viet Nam. Rapport n° 8. Bonn : Institut
le « mariage » (5 %) et « autres » (2 %).
de l’Université des Nations Unies pour l’environnement et la
33
sécurité humaine (UNU-EHS).
recherches de terrain effectuées par Sergio Rolando Ruano
27
Les informations reprises dans cette section sont tirées de
Les informations reprises dans cette section sont tirées de
et Andrea Milan dans le district de Cabricán, au Guatemala.
MS (1999) « El Niño and Health°». Équipe spéciale sur le
: Murali, J. ; Afifi, T. (2012). Projet « Là où tombe la pluie ».
34
Étude de cas : Inde. Résultats de Janjgir-Champa, Inde.
changement climatique et la santé. Genève, Suisse. ; SNET
Rapport n° 4. Bonn : Institut de l’Université des Nations Unies
(2010) « El Niño y la Oscilaciòn del Sur°». Ministerio de
pour l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS).
Medio Ambiente y Recursos Naturales –MARN-. El Salvador.
Les informations reprises dans cette section sont tirées de :
Voir aussi: OMS (2000), « El Niño et ses répercussions sur la
Ahsan, Uddin Ahmed ; Hassan, Selim Reza ; Etzold, Benjamin
santé », Aide-mémoire n° 192, https://apps.who.int/inf-fs/
28
; Neelormi, Sharmind (2012). Projet « Là où tombe la pluie ».
fr/am192.html
Étude de cas : Bangladesh. Résultats du district de Kurigram,
35
Bangladesh. Rapport n° 2. Bonn : Institut de l’Université des
Water Balances in Guatemala°», American Geophysical
_ 138
Pedreros et al (2010) « The Effect of El Niño on Agricultural
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Union, Réunion convoquée à l’automne 2010.
Plattner, S.K. Allen, M. Tignor, et P.M. Midgley (eds.)].
Les informations reprises dans cette section sont tirées de :
Cambridge University Press, Cambridge, Royaume-Uni, et
Liwenga, Emma T. ; Kwezi, Lukas ; Afifi, Tamer (2012). Projet
New York, NY, États-Unis, 582 p. Résumé à l’intention des
« Là où tombe la pluie ». Étude de cas : Tanzanie. Résultats
décideurs : © 2012, Groupe d’experts intergouvernemental
du district de Same, Tanzanie. Rapport n° 6. Bonn : Institut
sur l’évolution du climat, https://www.ipcc-wg1.unibe.ch/
36
de l’Université des Nations Unies pour l’environnement et la
srex/downloads/SREX_SPM_French.pdf
sécurité humaine (UNU-EHS).
41
3,5°C d’après le Climate Action Tracker http://
ILes répondants à l’enquête auprès des ménages ne
climateactiontracker.org/news/116/Durban-Agreements-
donnaient pas toujours une réponse précise. Dans de tels cas,
a-step-towards-a-global-agreement-but-risk-of-exceeding-
37
l’enquêteur ne réitérait pas la question. Il arrivait aussi que les
3C-warming-remains-scientists.html ; 6 °C d’après l’AIE.
personnes interrogées donnent deux réponses là où il n’en
42
fallait qu’une. C’est pourquoi, dans des cas exceptionnels,
the global scale°». Institut Walker pour la recherche sur le
il arrive qu’en additionnant les pourcentages de ce tableau
système climatique. Université de Reading et équipe du
(surtout pour la Thaïlande, le Pérou et l’Inde), on arrive à
projet QUEST-GSI, 2009. Article présenté à la conférence
Voir par exemple Arnell, N. « Beyond 4° C: Impacts across
une somme totale légèrement supérieure ou légèrement
internationale « 4° C and beyond°», Oxford, septembre
inférieure à 100 pour cent.
2009.
38
Paavola, J. 2003 Vulnerability to Climate Change in
43
Le cadre d’adaptation de Cancún comprend des dispositions
Tanzania: Sources, Substance and Solutions. Article présenté
sur un ensemble d’approches en matière de gestion des
lors de l’atelier inaugural de l’initiative sur la vulnérabilité en
risques (paragraphe 14), ainsi que des conseils sur une série
Afrique australe (SAVI), Maputo, Mozambique, 19-21 juin
de questions de mobilité humaine liées aux changements
2003.
climatiques (paragraphe 14(f)). La sécurité alimentaire et des
39
Agrawala, S., Moehner, A., Hemp, A., van Aalst, M.,
moyens de subsistance est mentionnée dans les notes en bas
Hitz, S., Smith, J., Meena, H., Mwakifwamba, S.M., Hyera,
de page.
T. et Mwaipopo, O.U., (2003), Development and Climate
44
Change in Tanzania: Focus on Kilimanjaro, Organisation
l ’ O N U : h t t p : / / w w w. u n . o r g / a p p s / n e w s / s t o r y
de coopération et de développement économiques, Paris :
asp?NewsID=42298&Cr=refugee&Cr1=climate.
France.
Liens vers le site de la conférence Nansen 2011 : http://
40
GIEC, 201 : Gestion des risques de catastrophes et de
Initiative
Nansen : Communiqué
de
presse
de
www.nansenconference.no/ et le rapport de la conférence :
phénomènes extrêmes pour les besoins de l’adaptation au
http://www.unhcr.org/4ea969729.pdf
changement climatique. Rapport des groupes de travail I et
45
II du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution
la migration dans le contexte de l’adaptation aux impacts du
du climat [Field, C.B., V. Barros, T.F. Stocker, D. Qin, D.J.
changement climatique.
1/CP.16, paragraphes 11-35 ; le paragraphe 14(f) aborde
Dokken, K.L. Ebi, M.D. Mastrandrea, K.J. Mach, G.-K.
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 139
À propos du projet Where
The Rain Falls
Le projet de recherche « Where The Rain Falls : Changement
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
et migration » est un partenariat entre CARE International
et l’Institut pour l’Environnement et la Sécurité Humaine de
l’Université des Nations Unies (UNU-EHS). Il bénéficie de
l’appui financier du Fonds pour la recherche du Groupe AXA
et de la Fondation John D. et Catherine T. MacArthur. Son
ambition est de permettre aux universitaires, praticiens et
décideurs de mieux comprendre comment la variabilité des
précipitations affecte la sécurité alimentaire et des moyens de
_ 140
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
subsistance et pèse sur les décisions des ménages en matière de
3) collaborer avec les communautés pour identifier des
mobilité/migration au sein des populations particulièrement
moyens de gérer la variabilité pluviométrique, la sécurité
exposées aux impacts du changement climatique. L’étude
alimentaire et des moyens de subsistance et la migration.
se focalise sur les variations pluviométriques tant perçues
que mesurées (p. ex. longues périodes sèches ou humides,
Le projet explore les trois questions suivantes (qui ont un
sécheresses ou inondations, précipitations erratiques) et le
rapport direct avec les trois objectifs de recherche cités ci-
décalage des saisons. Les variations pluviométriques influent
dessus) :
sur le rendement des cultures et l’élevage du cheptel, ce
qui peut avoir une incidence sur la production alimentaire
1) Dans quelles circonstances les ménages envisagent-ils la
locale, la disponibilité alimentaire et les prix et provoquer
migration comme stratégie de gestion des risques en réponse
une insécurité et des pénuries alimentaires. En général, les
à une variabilité pluviométrique accrue et à l’insécurité
habitants adoptent diverses stratégies pour surmonter le
alimentaire ?
stress et les variabilités associés à la sécurité alimentaire et des
2) Quels sont les scénarios où la variabilité pluviométrique
moyens de subsistance. Nous avons essayé de comprendre
et la sécurité alimentaire seront susceptibles d’influencer
pourquoi
fortement la mobilité humaine dans certaines régions du
certaines
populations
réagissent
de
façon
différente aux difficultés que causent l’instabilité des régimes
monde au cours des 20 ou 30 années à venir ?
climatiques et l’insécurité alimentaire. Nous avons cherché à
3) Dans le contexte du changement climatique, quel
savoir dans quelle mesure les modifications météorologiques
ensemble de politiques garantira au mieux le caractère
pèsent sur les décisions en matière de migration, laquelle
volontaire de la mobilité humaine, c’est-à-dire son choix
est l’un des mécanismes auxquels ont fréquemment recours
parmi d’autres mesures de gestion des risques liés aux
ceux qui éprouvent ce type de pénibilité.
changements climatiques, plutôt que de la perpétuer comme
une stratégie de survie, adoptée après épuisement de toutes
Le projet s’est fixé trois objectifs :
les autres possibilités ? Le projet explore ces alternatives dans
1) comprendre les interactions actuelles entre variabilité
certaines régions du monde particulièrement affectées.
pluviométrique, sécurité alimentaire et des moyens de
subsistance et migrations ;
Vous pouvez consulter les études de cas, la modélisation et
2) comprendre les interactions potentielles de ces facteurs au
obtenir des renseignements supplémentaires sur nos sites
cours des décennies à venir, lorsque l’impact des changements
web : www.wheretherainfalls.org, www.ehs.unu.edu, www.
climatiques commencera à se faire plus fortement sentir ;
carefrance.org et www.careclimatechange.org .
Juin 2013
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
_ 141
Imprint
UN Campus, Hermann-Ehlers-Str. 10, 53113 Bonn,
leur source. La notice suivante figurera de façon visible sur
Tel.: + 49-228-815-0200, Fax : + 49-228-815-0299
toute reproduction : « Where The Rain Falls : Changement
e-mail : [email protected]
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
et migration » © 2012 CARE France. Reproduction autorisée.
Copyright : © UNU-EHS & CARE France 2012 and 2013
Le rapport et des images haute résolution sont disponibles à
Design : Souple/HOP!
l’adresse suivante : www.wheretherainfalls.com
Translation : WordLink
Impression : Sopedi
ISBN : 978-3-944535-04-3
Print run : 1500
e-ISBN : 978-3-944535-05-0
Les opinions exprimées dans le présent rapport sont celles
Impression respectueuse de l’environnement
de leurs auteurs et ne représentent pas nécessairement celles
de l’Université des Nations Unies, de CARE International, de
l’Université Columbia ou du projet « Where the Rain Falls
Warner, K., Afifi, T., Henry, K., Rawe, T., Smith, C., de
» (Where The Rain Falls). Questions et commentaires sont
Sherbinin, A. (2012). Where The Rain Falls : Changement
les bienvenus. Prière de les adresser aux auteurs principaux
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
par l’intermédiaire de Koko Warner ([email protected].
et migration. Analyse et conclusion de la phase de recherche
edu) ou Kevin Henry ([email protected]). Les requêtes
du projet « Where the Rain Falls ». Bonn : UNU et CARE
des médias sont à adresser à Kimberly Bennett (bennett@
carefrance.org).
L’Université des Nations Unies et CARE donnent permission
à toutes les organisations à but non lucratif de reproduire le
présent ouvrage, en tout ou en partie, à condition de citer
_ 142
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Juin 2013
Le projet « Where the Rain Falls » (Là Où Tombe La Pluie) évalue l’impact des
variations de la pluviosité sur les sociétés, grâce à une compréhension plus détaillée
des liens entre variation pluviométrique, sécurité alimentaire, moyens de subsistance
et migration dans huit pays d’étude :
Bangladesh : Kurigram, division de Rangpur
Ghana : district de Nadowli, région du Haut Ghana Occidental
Guatemala : municipalité de Cabricán, département de Quetzaltenango
Inde : district de anjgir-Champa, Etat de Chhattisgarh
Pérou : district de Huancayo, région de Junín
Tanzanie : district de Same, région du Kilimanjaro
Thaïlande : district de Thung Hua Chang, nord de la Thailande
Viet Nam : province de Dong Thap
Le changement climatique entraîne déjà des évènements climatiques extrèmes,
comme des sécheresses et des innondations, donnant lieu à des situations
d’insécurité alimentaire et déplacements de populations. Les résultats de cette étude
permettront de guider les politiques en termes de changement climatique et leur
mise en œuvre, en prenant en compte des aspects pratiques importants, et ainsi,
lutter contre la pauvreté en protégeant les populations les plus vulnérables.
L’ensemble des résultats et des enseignements tirés du projet – un protocole
de recherche, un rapport d’étude de cas ainsi qu’un rapport de synthèse à
destination des responsables politiques – sont disponibles à l’adresse suivante :
www.wheretherainfalls.org.
Un projet de :
Soutenu par :
Copyright © CARE France et UNU-EHS.
Juin 2013
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