Accompagner la parentalité CRAMIF
Paris, le 3 février 2009 3
Histoire et sociologie : quelques éléments d’éclairage
Christine BON
Sociologue
Je suis ravie d’être avec vous aujourd’hui et de retrouver Delphine Siegrist que j’avais rencontrée
lorsque j’étais chargée d’enseignement vacataire au CNAM au sein de la chaire d’insertion sociale
des personnes handicapées. Mon cours s’intitulait « sexualité des personnes handicapées : de quoi je
me mêle ? ». J’ai le sentiment que nous avons franchi une étape en dix ans puisque nous abordons
désormais le thème de la parentalité.
Devenir parent constitue l’un des formidables défis de l’espèce humaine tant il nous est donné
d’être à même de mesurer la portée symbolique de cet acte au-delà de ses contingences typiquement
biologiques ou animales liées à la survie du genre humain.
En effet, dans les sociétés humaines la fonction de parentalité n’est pas seulement liée à la
reproduction pour la survie de l’espèce mais revêt de multiples dimensions philosophiques, sociales
et psychoaffectives. L’acte d’engendrer, d’enfanter, de mettre au monde la génération qui nous
survivra, est un acte fondateur de la poursuite de notre humanité et de notre façon d’être au monde.
Contrairement à l’immense majorité des espèces animales, le petit de l’homme est le plus
dépendant des générations qui le précèdent pour assurer sa survie, le protéger, le nourrir.
La dépendance est souvent considérée comme un avatar du handicap. Rappelons-nous que nous
sommes dépendants car nous sommes humains. Le handicap est le paradigme de la condition
humaine et de sa fragilité constitutionnelle.
Défi, enjeu, risque mais aussi formidable élan vers la vie dans la projection qu’implique la mise au
monde de la génération suivante, l’accès à la parentalité n’est pas un processus neutre ni facile
aujourd’hui et ce tout particulièrement pour les personnes désignées encore comme « à besoins
spécifiques » en dehors de nos frontières. En cela, devenir parent est une aventure culturelle. La
parentalité est un construit social.
1. Devenir parent : une aventure culturelle
L’histoire nous apprend que les sociétés peuvent à la fois être excluantes et intégrantes à l’égard des
personnes en situation de handicap, notamment en fonction du type de déficience dont elles sont
affectées. La stèle funéraire du nain Seneb, de son épouse et de sa famille qui se trouve au Musée
du Caire et qui date de la cinquième dynastie est la trace la plus ancienne de la parentalité d’une
personne atteinte de déficience physique. 4 500 ans nous séparent de cette image. Le couple a l’air
très uni et la joie de vivre de cette famille me paraît très émouvante. Les travaux récents de
l’INRAP, notamment en ce qui concerne les sépultures anciennes du paléolithique au Moyen Age
supérieur ne témoignent pas d’une stigmatisation centrée sur la déficience physique mais plutôt sur
l’appartenance sociale de l’individu enterrée. Un homme décédé il y a 1 400 ans et atteint de spina
bifida est enterré dans une sépulture qui correspond à son clan d’appartenance sociale. Il n’y a pas
trace de sépultures communes où seraient enterrées les personnes porteuses de déficiences
physiques. Tirésias, l’oracle d’Œdipe, est considéré comme un demi-dieu car messager divin. A la