S
La nécessité d’un travail en interdisciplinarité
pour accueillir et accompagner
les personnes porteuses d’un handicap sensoriel ou moteur
dans leur projet de parentalité.
« ACCOMPAGNER
LA PARENTALITÉ »
Actes du colloque
mardi 3 février 2009
S
OMMAIRE
DE L’HISTOIRE AU CADRE LEGISLATIF 1
Modératrice : Delphine SIEGRIST - Journaliste - Association des Paralysés de France
« Graine de parentalité, naissance d’un groupe de travail » 1
Jean-Claude POIRIER - Directeur du risque professionnel, du handicap et de l'action sanitaire et sociale - CRAMIF
Histoire et sociologie : quelques éléments d’éclairage 3
Christine BON - Sociologue
Témoignage de parents 6
Questions de la salle 9
Regard sur la législation actuelle 13
Docteur Pascale GILBERT – Médecin - CNSA
Accueillir pour recueillir : de la rencontre au conseil 15
Franck BERTON - Assistant social - Service ESCAVIE-GUIDE - CRAMIF - Marie LADRET - Ergothérapeue - Service ESCAVIE-GUIDE -
CRAMIF
Questions de la salle 24
DU CARREFOUR DES PROBLEMATIQUES AUX EXPERIENCES NOVATRICES 29
Modérateur : Professeur Hervé FERNANDEZ – CHU Antoine Béclère – AP-
Parents et professionnels :de la communication au partage 31
Sophie SERREAU - Sage-femme - Hôpital de la Pitié Salpêtrière - AP-HP Françoise GALIFFET - Assistante Sociale - Hôpital
Pitié Salpêtrière - AP-HP - Stéphanie RAMEAU - Auxiliaire puéricultrice - Hôpital de la Pitié Salpêtrière - AP-HP - Julie
CROSSARD - Psychologue - PMI Epée de Bois - Isabelle DAVOST-SERIZAY - Puéricultrice - PMI Epée de Bois
Question de la salle 36
De cycle en rythme, accompagner la parentalité, un travail en réseau nécessaire 39
Béatrice IDIARD-CHAMOIS - Sage-femme - Institut Mutualiste Montsouris - Docteur Madeleine AZARIAN-NAZAC - Médecin
gynécologue-obstétricien - Institut Mutualiste Montsouris - Francine CAUMEL-DAUPHIN et Nathalie PICQUENARD - Sages
femmes - Secteur Libéral - Edith THOUEILLE - Puéricultrice - Institut de Puériculture et de Périnatalogie de Paris - Drina
CANDILIS-HUISMAN - Psychologue - Institut de Puériculture et de Périnatalogie de Paris
Question de la salle 47
Conclusion de la journée 49
Jean-Claude POIRIER
Remerciements 51
Glossaire 52
Accompagner la parentalité CRAMIF
Paris, le 3 février 2009 1
De l’histoire au cadre législatif
Modératrice : Delphine SIEGRIST
Journaliste, Association des Paralysés de France
« Graine de parentalité, naissance d’un groupe de travail »
Jean-Claude POIRIER
Directeur du risque professionnel, du handicap et de l’action sanitaire et sociale, CRAMIF
Je souhaite à tous et à toutes la bienvenue dans cette maison et vous présente les excuses de notre
directeur, Gérard Ropert, retenu par une réunion extraordinaire du Conseil d’Administration. Nous
choisissons nos thèmes d’études à partir d’un certain nombre de demandes, d’observations, de
retours d’expérience recueillis au travers de nos activités et de partenariats avec les associations de
handicapés et les professionnels du monde du handicap.
Cette année, nous avons retenu le thème de la parentalité qui est un sujet assez rarement évoqué
sans doute pour des raisons psychologiques et parce que les connaissances sont plus balbutiantes
que dans d’autres domaines les connaissances, les expériences, les réussites et les échecs sont
mieux connus, mieux perçus et mieux adaptées.
Le fait de donner la vie est en soi un projet de vie mais aussi une réponse complémentaire aux
enseignements et prescriptions de la loi du 11 février 2005 sur la compensation. Malgré le travail de
quelques professionnels qui ont fait le choix d’investir ce domaine, il reste encore beaucoup à
inventer et à proposer. L’arrivée d’un enfant est toujours un phénomène qui bouleverse la vie et
modifie les habitudes des familles. Il importe par conséquent de préparer, d’accompagner et de
suivre ces changements. Il est évident que lorsque l’un des parents, voire les deux parents
présentent un handicap, le couple se heurte à de nombreuses difficultés qui devront être surmontées
afin d’assurer au mieux un développement harmonieux de l’enfant et de préparer son insertion dans
la société et son avenir personnel.
Outre une approche sociologique et historique qui donnera la tonalité de cette journée et une
présentation de la législation actuelle par la Caisse Nationale de la Solidarité pour l’Autonomie,
nous entendrons au cours de cette journée les témoignages de professionnels qui depuis longtemps
œuvrent dans le champ de la parentalité et ont spontanément partagé leur connaissance, leur savoir-
faire et aussi sans doute les limites de leur action.
En ce qui concerne la CRAMIF, notre expérience et la prise en compte des difficultés liées à la
parentalité sont relativement différentes. Le service ESCAVIE s’est interrogé à ce sujet dès 2003, à
la suite du colloque « maternité et handicap moteur » organisé par la Mission Handicap de l’AP-HP.
Le but était d’intégrer à la réflexion un aspect pratique sur le quotidien des mamans et leur situation
de handicap en présentant les quelques aides techniques déjà existantes. Ce travail a permis
d’observer qu’une demande existait et qu’en tant que centre d’information et de conseil sur les
Accompagner la parentalité CRAMIF
Paris, le 3 février 2009 2
aides techniques nous pouvions apporter des éléments de réponses concrets et pratiques. Nous
avons étudié la possibilité d’intégrer cette question dans le travail quotidien d’ESCAVIE et
constatons que cette ambition est désormais une réalité.
Dès 2005, cette thématique s’est intégrée aux missions des services avec la création d’un espace
dédié au problème du soutien à la parentalité. Dans le même temps, nous avons mis en place une
documentation concernant le matériel de puériculture susceptible d’apporter des soutiens
appropriés. Cette même année a vu la réalisation d’un guide pratique pour les parents à mobilité
réduite qui fournit des indications et offre des possibilités de choix.
Dès 2007, nous avons intégré les questions d’ordre social à notre approche et notamment le
financement des aides techniques. Il ne s’agit pas simplement de proposer une offre de matériel
mais également de fournir des réponses sociales qui permettent l’accès à la compensation effective.
Une coopération interne entre le service des conseils sur les aides techniques et notre service social
est indispensable. C’est un travail en binôme qui se fait et qui permet une approche globale de la
situation des personnes et les réponses les plus appropriées.
L’offre a créé la demande et cette amélioration continue a entraîné une augmentation des demandes
et une collaboration accrue avec les services et le monde associatif déjà mobilisé sur le domaine de
la parentalité.
En 2008 est le groupe de travail « graine de parentalité » à l’initiative de l’organisation de ce
colloque que je remercie et félicite pour son engagement. Je remercie également les différents
intervenants de cette journée qui ont répondu favorablement à notre invitation. Je cède la parole à
Delphine Siegrist qui animera cette première partie de la journée que je vous souhaite fructueuse.
Dans un domaine aussi pointu et sensible que la parentalité, l’homme est conditionné par la limite
mais doit aussi essayer de la dépasser. Je crois que nous nous y efforçons pour le progrès réel et la
vie complète de la famille et notamment des enfants qui en découlent.
Delphine SIEGRIST
Cette matinée s’organisera en deux parties. Tout d’abord nous entendrons l’intervention de la
sociologue Christine Bon, puis le témoignage de parents en situation de handicap.
Accompagner la parentalité CRAMIF
Paris, le 3 février 2009 3
Histoire et sociologie : quelques éléments d’éclairage
Christine BON
Sociologue
Je suis ravie d’être avec vous aujourd’hui et de retrouver Delphine Siegrist que j’avais rencontrée
lorsque j’étais chargée d’enseignement vacataire au CNAM au sein de la chaire d’insertion sociale
des personnes handicapées. Mon cours s’intitulait « sexualité des personnes handicapées : de quoi je
me mêle ? ». J’ai le sentiment que nous avons franchi une étape en dix ans puisque nous abordons
désormais le thème de la parentalité.
Devenir parent constitue l’un des formidables défis de l’espèce humaine tant il nous est donné
d’être à même de mesurer la portée symbolique de cet acte au-delà de ses contingences typiquement
biologiques ou animales liées à la survie du genre humain.
En effet, dans les sociétés humaines la fonction de parentalité n’est pas seulement liée à la
reproduction pour la survie de l’espèce mais revêt de multiples dimensions philosophiques, sociales
et psychoaffectives. L’acte d’engendrer, d’enfanter, de mettre au monde la génération qui nous
survivra, est un acte fondateur de la poursuite de notre humanité et de notre façon d’être au monde.
Contrairement à l’immense majorité des espèces animales, le petit de l’homme est le plus
dépendant des générations qui le précèdent pour assurer sa survie, le protéger, le nourrir.
La dépendance est souvent considérée comme un avatar du handicap. Rappelons-nous que nous
sommes dépendants car nous sommes humains. Le handicap est le paradigme de la condition
humaine et de sa fragilité constitutionnelle.
Défi, enjeu, risque mais aussi formidable élan vers la vie dans la projection qu’implique la mise au
monde de la génération suivante, l’accès à la parentalité n’est pas un processus neutre ni facile
aujourd’hui et ce tout particulièrement pour les personnes désignées encore comme « à besoins
spécifiques » en dehors de nos frontières. En cela, devenir parent est une aventure culturelle. La
parentalité est un construit social.
1. Devenir parent : une aventure culturelle
L’histoire nous apprend que les sociétés peuvent à la fois être excluantes et intégrantes à l’égard des
personnes en situation de handicap, notamment en fonction du type de déficience dont elles sont
affectées. La stèle funéraire du nain Seneb, de son épouse et de sa famille qui se trouve au Musée
du Caire et qui date de la cinquième dynastie est la trace la plus ancienne de la parentalité d’une
personne atteinte de déficience physique. 4 500 ans nous séparent de cette image. Le couple a l’air
très uni et la joie de vivre de cette famille me paraît très émouvante. Les travaux récents de
l’INRAP, notamment en ce qui concerne les sépultures anciennes du paléolithique au Moyen Age
supérieur ne témoignent pas d’une stigmatisation centrée sur la déficience physique mais plutôt sur
l’appartenance sociale de l’individu enterrée. Un homme décédé il y a 1 400 ans et atteint de spina
bifida est enterré dans une sépulture qui correspond à son clan d’appartenance sociale. Il n’y a pas
trace de sépultures communes seraient enterrées les personnes porteuses de déficiences
physiques. Tirésias, l’oracle d’Œdipe, est considéré comme un demi-dieu car messager divin. A la
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