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militaire que les Italiens ». Les résistants ont-ils donc été, au temps de l’héroïsme et de la
trahison, des voleurs et des pleutres, opposés aux héroïques pantouflards, qui attendirent de la
bonne volonté d’Hitler et de la servilité du gouvernement de Vichy le salut du pays ? Non !
Non ! La Résistance a été autre chose que cette caricature, et ce livre a pour but de montrer ce
qu’elle a été véritablement. Pour rendre à la Résistance son vrai visage, il faut la replacer dans
le cadre de l’occupation ennemie, où elle fut généreuse, désintéressée et glorieuse, à cette
époque -déjà lointaine, hélas !- où des Français de toutes les classes sociales rivalisaient
d’héroïsme, et où il n’y avait pas entre eux concurrence, mais émulation.
L’histoire de la Résistance doit-elle être une plaidoirie ? Certes non. Mais que d’obstacles à
surmonter pour rester objectif et impartial ! Il faut vaincre l’excessive modestie de certains
résistants, qui ont définitivement tourné la page de leur vie et, oubliant un passé glorieux,
mais périmé, portent tous leurs efforts sur le présent, pour préparer un avenir meilleur ; il faut
par contre se méfier des exagérations des prétentieux, qui ont composé après coup un
personnage de légende et, craignant que l’histoire ne ratifie pas tous les mérites qu’ils
s’attribuent, cachent prudemment les documents qu’ils détiennent, de peur que leur version
personnelle ne résiste pas à la critique. La vérité est entre les deux extrêmes, combien difficile
à démêler !
Enfin, les passions politiques et sociales viennent encore accroître la confusion, les uns
attribuant injustement à leur parti ou à leurs amis le monopole de la Résistance ou la majorité
truquée des fusillés, les autres, trompés par des préjugés de classe sociale, prétendant que les
ouvriers seuls ont délivré le Pays, ou que seule la bourgeoisie a vraiment combattu
efficacement, alors qu’en réalité toutes familles spirituelles de la nation -intellectuels et
manuels, paysans ou ouvriers, riches et pauvres, partisans de droite ou de gauche, tous unis
contre l’ennemi commun- ont aidé les Alliés à libérer la France.
Pour décrire objectivement la Résistance, faut-il donc cacher ses fautes ? Avec le recul du
temps, il est facile de critiquer ; mais, dans le feu de l’action, pouvait-on avoir toujours
raison ? Non. Toute œuvre humaine est imparfaite, surtout dans les circonstances
exceptionnelles de la guerre et de l’occupation ; il y eut certes des erreurs de tactique, des
imprudences mortelles, ou des faiblesses ; et il n’y a que ceux qui sont restés pendant la
guerre au coin du feu qui puissent s’en étonner. Le bilan de la Résistance est cependant assez
riche, cette page d’histoire de France assez glorieuse, pour qu’on reconnaisse loyalement ses
faiblesses. L’auteur a essayé de démêler la trame des événements, sans passion, ni parti pris,
afin de montrer la Résistance telle qu’elle a été, héroïque malgré ses faiblesses, désintéressée
et profondément humaine. Le plus bel hommage qu’on puisse lui rendre est de la décrire telle
qu’elle a été, sans dissimuler les ombres de ce tableau, sans effacer les rides de cette figure.
Négligeant la préface de la Résistance de 1940-1941, parce qu’elle était surtout individuelle et
inorganisée, et la résistance politique qui sort du cadre de cet ouvrage, l’auteur a limité le
sujet traité aux deux vagues de résistance armée, qui se sont succédées de 1942 à 1944 : la
première née à la fin de 1942, après le débarquement allié en Afrique du Nord, et qui fut
douloureusement décimée de juin à décembre 1943 et même en janvier 1944, et la seconde,
qui devint l’armée des F.F.I., montée de toutes pièces dans le courant de 1944 pour prendre
une part décisive à la Libération, en secondant les Armées alliées débarquées sur le sol
français.
Cependant, cet ouvrage n’est pas complet ; car certains mouvements de résistance, repliés sur
eux-mêmes, restent hermétiquement fermés aux enquêteurs étrangers, afin de pouvoir en toute
liberté écrire leur histoire dans l’esprit qui les anime. L’auteur, qui pourtant les a sollicités,
n’a pas cherché à forcer cette consigne du silence, et s’excuse auprès des lecteurs des lacunes
qui peuvent en résulter. De leur côté, les combattants regretteront de ne pas trouver la liste
complète des parachutages, l’énumération de tous les sabotages et de tous les coups de main
exécutés contre les convois de l’Armée allemande en retraite, l’histoire de chacun des petits