DIRECTION DES AFFAIRES CULTURELLES 2012 DAC 794 Appositions de plaques commémoratives relatives à la reconnaissance et la dénonciation des «zoos humains» qui se sont tenus à Paris à l’époque coloniale. PROJET DE DELIBERATION EXPOSE DES MOTIFS L’année 1931 voit l’ouverture d’une des plus grandes manifestations jamais organisées dans la capitale : l’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer. Ouverte le 6 mai 1931, elle ferme le 16 novembre de la même année. Cette exposition est la dernière des grandes manifestations organisées à Paris entre la fin du 19ème et le milieu du 20ème siècle. Les Français sont invités par voie d’affiche à venir « faire le tour du monde en un jour ». A l’exception notable de la Grande-Bretagne, toutes les puissances coloniales sont présentes. Plus de 33 millions de tickets ont été vendus et 8 millions de visiteurs distincts ont été enregistrés. L’Exposition coloniale est le prétexte, pour de nombreux provinciaux, de venir visiter la capitale. De nombreuses reproductions des habitats et symboles des pays colonisés sont aménagés dans 110 hectares du Bois de Vincennes, dont la plus remarquable est celle du temple d’Angkor Vat. La quasi-totalité des grands pavillons a aujourd’hui disparu. Seul le bâtiment du musée permanent des Colonies, devenu le musée des Arts africains et océaniens (MAAO) dans les années 1960, puis, en octobre 2007, la Cité nationale de l’Histoire de l’Immigration, a été conçu pour survivre à cette manifestation, ainsi que les ex-pavillons du Togo et du Cameroun (devenu un temple bouddhique)… et le zoo. La maison de Washington a été transportée à Vaucresson et l’Eglise des missions a été reconstruite à Epinay-sur-Seine en 1932. Cette exposition a également laissé des traces dans l’urbanisme parisien. La ligne de métro n° 8 est prolongée jusqu’à la Porte Dorée. L’avenue Daumesnil et le boulevard Carnot sont élargis. Cette exposition est emblématique de ce que le colonialisme représentait alors pour les consciences françaises. Le maréchal Lyautey, commissaire général de l’Exposition coloniale, voulait exalter l’Empire et affirmer la « mission civilisatrice et bienfaitrice » de la France sur ses colonies. En dépit de son opposition à toute « exhibition humaine », une centaine de Kanaks, présentés comme les « derniers sauvages polygames et cannibales », seront exhibés en même temps que l’exposition au Bois de Boulogne, pendant plusieurs mois, et une partie de ceux-ci viendront ponctuellement « distraire » les visiteurs de Vincennes. L’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer souleva quelques marques d’opposition. Un tract appelant à ne pas visiter l’Exposition coloniale fut réalisé par les Surréalistes (André Breton, Paul Eluard, Louis Aragon, René Char, Benjamin Peret, Georges Sadoul, Pierre Unik, André Thirion, René Crevel, Maxime Alexandre, Yves Tanguy et Georges Malkine). Une « contre-exposition coloniale » sous le titre « La vérité sur les Colonies » est organisée par la Ligue contre l’impérialisme et l’oppression coloniale, c’est-à-dire essentiellement la CGTU et le Parti communiste, dans le 19ème arrondissement sur l’actuelle place du Colonel Fabien. Elle ne recevra qu’un peu plus de 5.000 visiteurs. Lors de sa séance des 19 et 20 mars 2012, le Conseil de Paris a émis le vœu que des plaques, rappelant ces épisodes indignes de l’histoire de la colonisation au regard des droits humains, soient apposées dans les lieux les plus emblématiques où se déroulèrent ces évènements. L’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer de 1931 a été un temps fort de l'histoire de Paris qui a marqué l'Est parisien, toute la capitale et la société française au cours de l'entre-deux-guerres. Un travail de mémoire doit permettre de mieux comprendre et d'analyser l'événement grâce en particulier aux travaux des historiens, à la suite de l'exposition-parcours dans le bois de Vincennes qu'avait organisée la Mairie du 12 ème arrondissement en 2006. En marquant les lieux de la capitale par l'apposition de plaques — en lien avec le passé colonial, esclavagiste et l'histoire de l'immigration —, il s'agit également d'inscrire ce passé historique dans les rues de Paris, sans dénaturer les faits, mais également sans complaisance. Il est donc proposé d’apposer trois plaques dont les intitulés seraient les suivants : ­ Porte Dorée (12ème). Texte de la plaque : Le 6 mai 1931, l’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer a ouvert ses portes après plus de mille jours de travaux. C’est la plus grande exposition coloniale que la France ait connue. Pendant plusieurs mois et sur plus de 110 hectares, des pavillons coloniaux français et étrangers, diverses reconstitutions ainsi que l’exhibition de plusieurs centaines de « figurants indigènes » ont invité le public à un « Tour du monde en un jour ». Cette immense propagande a contribué à légitimer la colonisation. Le 15 novembre 1931, l’exposition s’est achevée après que 33 millions de tickets d’entrées furent vendus. Le Palais de la Porte Dorée, qui a abrité le musée permanent des colonies, est aujourd’hui le principal vestige de cette période d’apogée de l’expansion coloniale. ­ Entrée du Jardin d’acclimatation (16ème). Texte de la plaque : En 1931, la Fédération française des anciens coloniaux, avec l’accord du gouverneur de la Nouvelle-Calédonie, a recruté une centaine de Kanaks en leur faisant croire qu’ils allaient représenter leur « île » à l’Exposition coloniale de Paris. Après avoir débarqué à Marseille le 31 mars 1931, ils furent conduits au Jardin d’Acclimatation, dans le Bois de Boulogne, où depuis 1877 des exhibitions ethnographiques avaient lieu régulièrement. Des milliers de visiteurs sont alors venus voir ceux que l’on présentait comme des « sauvages polygames et cannibales ». Ce n’est que le 11 novembre 1931 que les 104 Kanaks exhibés pourront enfin retourner chez eux. Ainsi prenait fin l’un des tout derniers « zoos humains », symbole d’une époque où l’autre avait été regardé comme un « animal » en Occident. - 3 avenue Mathurin Moreau (19ème). Texte de la plaque : Alors que l’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer ouvre ses portes en 1931 dans le bois de Vincennes, un Manifeste des intellectuels surréalistes, proches de la gauche communiste et anticolonialiste, intitulé « Ne visitez pas l’Exposition coloniale », dénonce les fastes coloniaux de Vincennes. Le 19 septembre 1931, avenue Mathurin Moreau, dans l’ancien pavillon des Soviets de l’exposition des Arts décoratifs de 1925, sera inaugurée une contre-exposition coloniale intitulée « La vérité sur les colonies », à l’initiative des Surréalistes, de militants de la CGTU et d’opposants au colonialisme. Le 2 décembre 1931, elle fermera ses portes. Je vous prie, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir en délibérer. Le Maire de Paris 2012 DAC 794 Appositions de plaques commémoratives relatives à la reconnaissance et la dénonciation des « zoos humains » qui se sont tenus à Paris à l’époque coloniale. Le Conseil de Paris siégeant en formation de Conseil Municipal Vu le code général des collectivités territoriales et notamment ses articles L 2511-1 et suivants ; Vu la délibération du 5 mars 1979 réglementant les hommages rendus par la Ville ; Vu le projet de délibération en date du par lequel M. le Maire de Paris soumet à son approbation l’apposition de plaques commémoratives relatives à la reconnaissance et la dénonciation des « zoos humains » qui se sont tenus à Paris à l’époque coloniale. Vu l'avis du Conseil du 12ème arrondissement en date du Vu l'avis du Conseil du 16ème arrondissement en date du Vu l'avis du Conseil du 19ème arrondissement en date du Sur le rapport présenté par Mme Catherine Vieu-Charier au nom de la 9e Commission et Madame Claudine Bouygues au nom de la 6ème commission, Délibère : Article 1 : Est approuvée la proposition de M. le Maire de Paris tendant à l’apposition de plaques commémoratives relatives à la reconnaissance et la dénonciation des « zoos humains » qui se sont tenus à Paris à l’époque coloniale. Article 2 : Les textes des plaques sont les suivants : Porte Dorée (12ème) Texte de la plaque : Le 6 mai 1931, l’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer a ouvert ses portes après plus de mille jours de travaux. C’est la plus grande exposition coloniale que la France ait connue. Pendant plusieurs mois et sur plus de 110 hectares, des pavillons coloniaux français et étrangers, diverses reconstitutions ainsi que l’exhibition de plusieurs centaines de « figurants indigènes » ont invité le public à un « Tour du monde en un jour ». Cette immense propagande a contribué à légitimer la colonisation. Le 15 novembre 1931, l’exposition s’est achevée après que 33 millions de tickets d’entrées furent vendus. Le Palais de la Porte Dorée, qui a abrité le musée permanent des colonies, est aujourd’hui le principal vestige de cette période d’apogée de l’expansion coloniale. A l’entrée du Jardin d’acclimatation (16ème). Texte de la plaque : En 1931, la Fédération française des anciens coloniaux, avec l’accord du gouverneur de la Nouvelle-Calédonie, a recruté une centaine de Kanaks en leur faisant croire qu’ils allaient représenter leur « île » à l’Exposition coloniale de Paris. Après avoir débarqué à Marseille le 31 mars 1931, ils furent conduits au Jardin d’Acclimatation, dans le Bois de Boulogne, où depuis 1877 des exhibitions ethnographiques avaient lieu régulièrement. Des milliers de visiteurs sont alors venus voir ceux que l’on présentait comme des « sauvages polygames et cannibales ». Ce n’est que le 11 novembre 1931 que les 104 Kanaks exhibés pourront enfin retourner chez eux. Ainsi prenait fin l’un des tous derniers « zoos humains », symbole d’une époque où l’autre avait été regardé comme un « animal » en Occident. 3 avenue Mathurin Moreau (19ème) Texte de la plaque : Alors que l’Exposition coloniale internationale et des pays d’Outre-Mer ouvre ses portes en 1931 dans le bois de Vincennes, un Manifeste des intellectuels surréalistes, proches de la gauche communiste et anticolonialiste, intitulé « Ne visitez pas l’Exposition coloniale », dénonce les fastes coloniaux de Vincennes. Le 19 septembre 1931, avenue Mathurin Moreau, dans l’ancien pavillon des Soviets de l’exposition des Arts décoratifs de 1925, sera inaugurée une contre-exposition coloniale intitulée « La vérité sur les colonies », à l’initiative des Surréalistes, de militants de la CGTU et d’opposants au colonialisme. Le 2 décembre 1931, elle fermera ses portes. Article 3 : La dépense correspondante, estimée à 24 250 euros sera imputée sur le budget d'investissement de la Ville de Paris, exercice 2012, rubrique 324, nature 2313, mission 40000-99-040, individualisation 12V00149 DAC.