exposé que la multiplication des substances chimiques dans la fabrication des jouets nous obligeait à
revoir notre méthodologie pour évaluer les risques, afin de prendre en compte tous les facteurs : non
seulement la toxicité d’une substance, mais aussi les expositions multiples, la vulnérabilité particulière de
l’enfant, les inégalités sociales, les enjeux économiques – qui sont de taille sur le marché du jouet.
Une réglementation européenne à améliorer
Corinne Lepage, Vice Présidente de la Commission ENVI au Parlement européen, est intervenue durant
la seconde table ronde, au sujet de la réglementation européenne. Elle a affirmé que la Directive Jouets
contenait des lacunes, car le texte initial a subi de nombreux amendements qui n’allaient pas dans le bon
sens : « Le diable se cache dans les détails » a-t-elle noté en commentant les nombreuses exemptions
qui viennent fortement affaiblir l’officielle interdiction des substances CMR, ou encore la tolérance de
substances parfumantes, souvent allergisantes, sous réserve qu’elles soient déclarées…mais qui se
méfierait d’une poupée agréablement parfumée à la fraise ?
M. Kosinski de la DG SANCO (Commission Européenne) a présenté l’outil RAPEX, permettant aux Etats
Membres de notifier les produits non conformes aux normes européennes. Constat alarmant : les jouets
en forment la première catégorie, soit 476 articles notifiés en 20093.
La réglementation européenne REACH pourrait-elle alors nous aider à mieux protéger les enfants des
substances chimiques ? Pas si l’on en croit Christian Schaible, du Bureau Européen de l’Environnement :
une enquête menée par cette ONG en collaboration avec WECF et d’autres partenaires, révèle que 75%
des distributeurs ne respectent pas le « droit à savoir » du consommateur4. Comme il n’existe aucune
obligation d’étiquetage des composants pour les jouets, le consommateur n’a aucune chance d’être
correctement informé…
« Ici devrait vraiment s’appliquer le principe de précaution », a rappelé Corinne Lepage, « ce n’est pas un
principe d’obscurantisme, bien au contraire », considérant que des sociétés privées ne devraient pas
faire peser les risques inhérents à leurs technologies sur la société. ….Le véritable obscurantisme
consiste selon elle à ne pas conduire les recherches qui permettraient de lever le doute, sous prétexte
qu’elles sont trop coûteuses !
Le rôle des associations dans l’information des parents
Le consommateur peut toutefois consulter les tests réalisés par les associations de protection des
consommateurs, dont le rôle est justement de lancer l’alerte, comme l’a fait remarquer Thomas
Laurenceau, Rédacteur en chef de 60 Millions de consommateurs, qui avait révélé dans son enquête de
2009 la présence de phtalates, métaux lourds et/ou formaldéhyde dans 32 jouets sur 665. La Fédération
allemande du consommateur, représentée par Monika Buenning plaide, aux côtés de l’Agence
Allemande de l’Environnement (UBA) pour une révision immédiate de la Directive Jouets, notamment au
sujet des HAP- hydrocarbures aromatiques polycycliques, composés dérivés du pétrole, qui se retrouvent
dans les jouets à travers les assouplissants, les couleurs et les laques, et dont certains sont
cancérigènes comme le benzo-(α)pyrène. Le test publié ce mois-ci par le magazine allemand Stiftung
Warentest a révélé la présence d’HAP (entre 1 et 10 mg) dans la moitié des jouets testés.
Valoriser les bonnes pratiques et les labels exemplaires
Heureusement les fabricants et les distributeurs responsables existent dans le secteur du jouet, avec
quelques véritables démarches de développement durable et une dynamique économique créatrice
d’emplois. Le panel d’entreprises présentes sur la table ronde de l’après-midi, allant de la TPE au groupe
mondialisé permettait d’en témoigner : Bioviva, Papili, Happy to see you, Nature et Découvertes ou
encore Lego ont montré qu’il est possible d’exclure les substances chimiques préoccupantes pour la
fabrication d’un jouet, que l’on peut sélectionner des matières plus saines, ou encore mieux, éco-
concevoir un jeu, tout en voulant rester compétitif. Un exercice qui demande une véritable politique de
recherche avec des cahiers des charges complexes et une volonté constante d’amélioration, mais la
santé de nos enfants vaut bien cela !
La labellisation par un organisme tiers reste sûrement la meilleure manière d’encourager les bonnes
pratiques et de garantir la sécurité des jouets, ainsi que l’ont exposé Patricia Proia, de l’AFNOR et