Compte rendu
Commission des affaires sociales
Mission dévaluation et de contrôle
des lois de financement
de la sécurité sociale
Auditions, ouvertes à la presse, sur lhospitalisation à
domicile
(Mme Joëlle Huillier, rapporteure)
:
Mme Lise Rochaix, présidente de lAgence technique de
linformation sur lhospitalisation (ATIH), et
M. Housseyni Holla, directeur général .................................. 2
M. Jean Debeaupuis, directeur général de loffre de
soins (DGOS) au ministère des Affaires sociales, de la
santé et des droits des femmes, et Mme Isabelle Prade,
cheffe du bureau « Prises en charge post aigs,
pathologies chroniques et santé mentale » ............................ 9
Mercredi
3 vrier 2016
Séance de 16 heures 15
Compte rendu n° 05
SESSION ORDINAIRE 2015-2016
Présidence de
M. Pierre Morange,
coprésident
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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
MISSION DÉVALUATION ET DE CONTRÔLE
DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Mercredi 3 février 2016
La séance est ouverte à seize heures vingt-cinq.
(Présidence de M. Pierre Morange, coprésident de la mission)
La Mission dévaluation et de contrôle des lois de financement de la curité sociale
(MECSS) procède dabord à laudition, ouverte à la presse, de Mme Lise Rochaix, présidente
de lAgence technique de linformation sur lhospitalisation (ATIH), et de M. Housseyni
Holla, directeur général.
Mme Joëlle Huillier, rapporteure. LAgence technique de linformation sur
lhospitalisation joue un rôle extrêmement important, car cest delle que nous tenons toutes
les statistiques sur lhospitalisation à domicile.
Malgré les circulaires de la Caisse nationale dassurance maladie (CNAM) et du
ministère des affaires sociales, lhospitalisation à domicile, qui permet de soigner certains
patients de manière innovante, avec davantage de confort, naugmente pas son activité de
façon significative. Nous aimerions savoir pourquoi. Elle représente environ 1 % de
l’ensemble des hospitalisations, alors que son coût global est supérieur à ce pourcentage.
Quel type de patient est concerné par lHAD ? Peut-on connaître, grâce au résumé de
sortie standardisé (RSS) et au programme de médicalisation des systèmes dinformation
(PMSI), le coût de lhospitalisation à domicile par type de pathologie ?
Enfin, quels freins peuvent, selon vous, sopposer au développement de lHAD ?
M. le coprésident Pierre Morange. Lors de la précédente audition,
M. Antoine Durrleman, président de la sixième chambre de la Cour des comptes, a souligné le
caractère très « rustique » des études microéconomiques. On aurait pu attendre une évaluation
plus affinée de lincidence budgétaire liée au développement de lHAD : en 2013, la part de
lHAD dans lactivité hospitalière avoisinait 0,6 % ; lobjectif de doublement ne semble pas
en vue d’être atteint. Cependant, nous aimerions savoir ce que lon attendait du
développement de lHAD sur le plan financier, notamment au titre de létude dimpact.
Mme Lise Rochaix, présidente de lAgence technique de linformation sur
lhospitalisation (ATIH). Nous voici demblée dans le vif du sujet : je veux parler du
caractère « rustique » des études et de lespoir de rationalisation, qui est un objectif que nous
partageons.
Récemment nommée présidente du conseil dadministration de lATIH, jai
beaucoup travaillé avec le directeur général, Housseyni Holla : aussi sommes-nous convenus
de nous répartir les questions qui vous intéressent. M. Holla vous communiquera tous les
éléments dinformation que vous jugerez utiles. Pour ma part, jévoquerai les perspectives et
les enjeux détudes économiques affinées qui permettraient de situer lHAD dans un
continuum entre, dun côté, lhospitalisation complète, et, de lautre, les services de soins
infirmiers à domicile (SSIAD) et le retour à domicile.
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M. Housseyni Holla, directeur général de lATIH. Comme pour lensemble du
secteur sanitaire, lATIH a pour mission de collecter, de mettre à disposition, danalyser et de
restituer les données concernant lhospitalisation à domicile. Elle est également chargée, sous
la responsabilité du ministère de la santé, et notamment de la direction générale de loffre de
soins (DGOS), de la gestion technique de la campagne tarifaire. Elle réalise enfin des études
de coûts pour lensemble du secteur sanitaire, y compris pour lHAD. Dans ce cadre, elle
collecte les données dactivité mensuelles des établissements dHAD au travers du dispositif
du PMSI et réalise une étude de coûts annuelle depuis 2009. Ces données sont restituées grâce
à un outil que nous appelons « ScanSanté ». Il existe en effet une famille doutils de
restitution des données de santé : Scope Santé pour la Haute autorité de santé (HAS),
ScanSanté pour lATIH, et Score-Santé pour les observatoires régionaux de la santé (ORS).
En ce qui concerne le financement, lATIH a entrepris de mettre en place une
classification médico-économique fondée sur lanalyse des données dactivité et des données
de coûts. Ce travail est techniquement assez long et complexe et nécessite des allers-retours
avec les professionnels. Il se fait en lien avec les experts des structures dHAD.
Jen viens aux données figurant dans le PMSI. Dès lors quune personne est
hospitalisée, que ce soit en HAD ou dans dautres structures, une collecte dinformation est
réalisée et centralisée par lATIH.
Sagissant de lHAD, les principales données recueillies lors de la prise en charge
concernent lidentification de la structure, la durée du séjour, lâge et le sexe du patient, son
lieu dhabitation, les diagnostics qui ont été formulés, sa dépendance éventuelle, les actes
effectués lors de son séjour, sa consommation de médicaments onéreux inscrits ou non sur la
liste dite « en sus ». Ce dernier dispositif a été mis en place par les acteurs pour tenir compte
de la difficulté de financer certains médicaments dans les structures d’HAD. Compte tenu de
lincidence de ces données sur le financement des établissements dHAD, lexhaustivité de
ces données est très satisfaisante. Toutefois, on peut se demander si, en termes dexhaustivité
médicale, les diagnostics sont codés de manière satisfaisante. Il y a une difficulté, car les
dispositifs tarifaires ne sappuient pas clairement sur les diagnostics. Ce nest pas une
information à laquelle les établissements prêtent une grande attention, puisquils ne rentrent
pas directement dans le dispositif de financement.
Jen viens aux études de coûts. Le nombre détablissements dans léchantillon est en
hausse constante, puisquil est passé de treize établissements en 2010 à vingt-deux en 2014,
ce qui représente, en termes de journées dhospitalisation, une proportion de 22 %. Ce taux
paraît élevé au regard dautres structures lon n’observe qu’un taux de 10 à 12 %. LHAD
compte très peu de structures 310 environ , ce qui implique une forte concentration. La
fondation Santé Service, à Puteaux, qui figure dans notre échantillon, représente à elle seule
47 % des données. Il y a trois grandes structures d’HAD : Santé Service, lHAD de
lAssistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), et Soins et Santé, à Lyon. Les autres
structures sont moins importantes.
Outre le taux de sondage important qui est lié à Santé Service, nous avons
suffisamment de structures d’HAD dans létude des coûts. Létude des coûts est restituée tous
les ans sur le site de lATIH. Elle indique le coût global de la journée dhospitalisation, en
distinguant, par catégorie de prise en charge, le coût des intervenants médecins, infirmiers,
masseurs, aides-soignants , les charges au domicile du patient médicaments, matériel
médical , les coûts de la coordination médicale, de la continuides soins, de la logistique
médicale et de la gestion de lHAD.
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Grâce à une étroite collaboration entre les fédérations notamment la Fédération
nationale des établissements dhospitalisation à domicile (FNEHAD) , lHAD est le seul
secteur où il y ait un benchmarking des établissements participant aux études de coûts.
Ceux-ci sont donc capables de se situer les uns par rapport aux autres, alors que, dans la
plupart des cas, un établissement se situe par rapport à une référence nationale.
En matière détudes de coûts, les données recueillies sont donc suffisantes.
Mme la rapporteure. Pourquoi, dans ce cas, la réforme de la tarification prend-elle
autant de temps ?
M. Housseyni Holla. Nous publierons dans quelques semaines les chiffres
spécifiques à lHAD. Pour linstant, nous ne disposons que de quelques chiffres clés.
LHAD compte 309 établissements : 106 000 patients sont pris en charge chaque
année, dont 7 000 enfants de moins de dix-huit ans et 24 000 adultes de quatre-vingts ans et
plus. Il y a 4,4 millions de journées dhospitalisation, avec une durée moyenne de 27,5 jours.
On note que 70 % des prises en charge en HAD font suite à une hospitalisation
conventionnelle et 33 % dentre elles sont suivies dune hospitalisation conventionnelle. On
déplore environ 10 % de décès.
Les prises en charge qui entraînent le plus de journées sont les pansements
complexes et les soins spécifiques, les soins palliatifs et les soins de nursing. Cela représente
presque 60 % des prises en charge.
Pour répondre à certaines interrogations du rapport de la Cour des comptes, je
précise que seuls 5 000 de ces 106 000 patients relèvent détablissements dhébergement pour
personnes âgées dépendantes (EHPAD), et à peine 300 patients relèvent des autres catégories
détablissements médicosociaux.
Les dépenses dassurance maladie de lHAD sélèvaient à 944 millions deuros
en 2014, en progression de 3 % par rapport à 2013.
Sur les onze premiers mois de 2015, les établissements qui étaient antérieurement
sous dotation globale ont connu une évolution de 7,5 %. En ce qui concerne les cliniques,
pour lesquelles linformation ne porte que sur neuf mois, la progression est de 2,2 %. Cette
évolution est significativement supérieure à celle que nous avons observée en 2014. Certes, ce
que lon observe sur ces onze mois ou neuf mois nest pas totalement prédictif de ce que lon
observe sur lannée, mais lévolution sera sensiblement supérieure à celle de 2014.
En ce qui concerne le dispositif tarifaire, je lai dit, nos missions sont techniques :
nous appuyons la DGOS dans le cadre de la tarification et travaillons avec lensemble des
fédérations sur le pilotage de la DGOS. Tous les acteurs saccordent à reconnaître que le
dispositif actuel de financement est obsolète : il repose sur des données anciennes elles
datent de 2002 et 2003, avant même linstauration de la tarification à lactivité et sur un
dispositif de croisement des prises en charge de la dépendance assez peu lisible, ce qui fait
que nos moyens daction sont peu maîtrisés.
Nous devons donc changer de modèle. Pour ce faire, il faut mettre en place une
classification médico-économique. À partir des informations que je vous ai données tout à
lheure sur le PMSI et des données de coûts, nous allons créer des catégories de patients selon
la nature de la prise en charge, la pathologie et la dépendance. À partir de millions de séjours,
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nous allons essayer de constituer 50, 100, voire 500 groupes. Ce travail technique complexe
nécessite des échanges constants avec les fédérations. Un comité de pilotage a été mis en
place sous légide de la DGOS : il comprend notamment les représentants politiques des
fédérations. De notre côté, nous avons créé un comité technique siègent des experts des
fédérations et au sein duquel nos travaux exploratoires sont débattus jusquà ce que nous nous
accordions sur une classification. Nous avons pratiqué ainsi pour les soins de suite et de
réadaptation (SSR) : nous avons travaillé deux ou trois ans avec les fédérations pour
constituer une classification, mais, lorsque les pouvoirs publics ont décidé de mettre en place
un dispositif de financement fondé sur des outils techniques, on nous a opposé que ceux-ci
navaient pas atteint la maturité, que les expériences et les analyses étaient insuffisantes.
Nous risquons de rencontrer le même type de difficulté pour lHAD. Aussi
prévoyons-nous de travailler sur la classification en 2015-2016, avant de lexpérimenter et de
lévaluer en 2017. Le calendrier que nous avons fixé avec la DGOS vise à une mise en place
progressive du nouveau modèle de financement à partir de 2019. Nous ne pouvons cependant
pas attendre 2019 pour agir sur le dispositif, sur lorganisation, sur la fluidité du parcours des
patients, sur lincitation à prescrire de lHAD auprès des acteurs. Il faudra actionner dautres
leviers pendant cette période.
M. le coprésident Pierre Morange. Il ressort de votre exposé liminaire que vous
avez constitué des cohortes suffisamment volumineuses, en termes de masses
démographiques dégagées et de diversité des bassins géographiques, pour que lon puisse se
livrer à une interprétation statistique. Il sagit de comparer la période ante, pendant laquelle il
ny avait pas dhospitalisation à domicile, et la période pendant laquelle lhospitalisation à
domicile concerne une fraction x ou y de la population. Avez-vous estimé, fût-ce de manière
sommaire, lincidence financière de lHAD ? Constatez-vous une réduction du coût de la prise
en charge depuis lintroduction de lHAD ? La sixième chambre de la Cour des comptes
indique que des études ont été effectuées, notamment, en matière de chimiothérapie ou de
SSR. Il doit donc être possible de réaliser des estimations. A-t-on observé une quelconque
diminution des dépenses liées à la prise en charge dun patient ? Disposez-vous
dinformations permettant de clarifier le sujet ? Il est frustrant de se dire que nous naurons les
résultats quà partir de 2019.
Lobjectif du Gouvernement, qui vise à faire passer la part de lHAD de 0,6 % à
1,2 % de lactivité hospitalière, est tout à fait compréhensible. Mais, si aucune étude dimpact
ne nous permet de subodorer une amélioration de la prestation de soins fournie et si, de
surcroît, nous ne pouvons pas évaluer lavantage financier qui en découlerait, cela donne un
peu le vertige quant à la prise de décision politique en matière sanitaire.
Mme Lise Rochaix. Je suis extrêmement sensible à largument selon lequel il faut
fonder la décision politique sur des preuves. La question na pas été posée de cette façon à
lATIH, mais, si la mission souhaite que ce travail soit mené dans des délais plus courts tout
en répondant aux exigences scientifiques qui permettraient à luniversitaire que je suis de
demander au conseil dadministration den valider les résultats, je pense quil pourra en partie
être réalisé. Nous aurons des résultats sappliquant à une population finie pour un certain
nombre dindications, elles-mêmes précisées par la Haute Autorité de santé. Toutefois, si
nous devons faire des extrapolations vers des populations plus larges, il sagira probablement
de patients plus âgés, pour lesquels les besoins daccompagnement seront plus importants.
Par ailleurs, comme lindique le rapport de la Cour des comptes, nous avons
aujourdhui le plus grand mal à positionner clairement lHAD par rapport aux SSIAD et à
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