DOSSIER PEDAGOGIQUE
Un Faust
Jean Louvet
Distribution
Mise en scène : Lorent Wanson
Avec
Edwige Baily : Marguerite
Christian Crahay : Faust
Anne-Marie Loop : Baucis
Jean-Marie Pétiniot : phisto
Guy Pion : Philémon, Dieu
Netka : le chien
Scénographie : Daniel Lesage
Costumes : Daniel Lesage et Françoise Van Thienen
Lumières : Laurent Kaye
Avec des variations sur « People united » de Frédéric Rzewski interprétées par
Fabian Florini
Assistant à la mise en scène : Rémi Pons
Une production de l!Atelier Théâtre Jean Vilar et du manège.mons/Centre Dramatique.
Dates : du 11 au 16 novembre 2008
Lieu : Théâtre Jean Vilar
Durée du spectacle : +/- 1h40 sans entracte
Réservations : 0800/25.325
Contact écoles :
Adrienne Gérard - 010/47.07.11 - 0473/936.976 - [email protected]
Sources bibliographiques du dossier :
Dossier pédagogique du manège.mons/Centre Dramatique, 2008.
Jean Louvet - Théâtre 2
, éditions Luc Pire, Collection Archives du futur, 2008.
Lecture de Jacques Dubois
, dans
Un Faust
, Jean Louvet, éditions Labor.
www.ac-strasbourg.fr
www.sites.univ-lyon2.fr
www.humanite.fr
www.musicianguide.com
www.answers.com
2
I. Jean Louvet et l!Atelier Théâtre Jean Vilar, un compagnonnage
de plus de 30 ans
Biographie
C!est notre grand et véritable auteur de théâtre en Wallonie. La biographie de Jean Louvet
tient un peu de la légende : l!enfant doué qui doit à tout prix échapper à sa condition sociale,
l!aristocrate qui lui ouvre sa bibliothèque, l!université… et le fils de mineur devient professeur
de français.
Il s!établit alors à La Louvière, région industrielle mais aussi patrie du surréalisme. A l!heure
des grands mouvements sociaux des années soixante, Jean Louvet a déjà écrit un roman.
Militant de gauche, il collabore à un groupe de réflexion avec lequel il fonde le Théâtre
Prolétarien (aujourd!hui Studio-Théâtre de La Louvière). Leurs maîtres à penser sont Brecht
et Piscator. A la demande du groupe, il écrit une pièce sur les grèves qui ont ébranlé le pays.
Ce premier texte,
Le Train du bon Dieu
, égratigne les grandes illusions politiques qui ont
galvanisé la classe ouvrière.
En 1970, les Editions du Seuil acceptent le manuscrit de
A bientôt Monsieur Lang
. Marc
Liebens monte la pièce deux ans plus tard au Théâtre du Parvis, offrant ainsi à Jean Louvet
la reconnaissance du monde théâtral professionnel. Sa première pièce
Le Train du bon Dieu
,
publiée par Armand Delcampe, sera présentée au Festival d!Avignon en 1975 à l!invitation
de Lucien et Micheline Attoun (Théâtre Ouvert).
Le théâtre de Jean Louvet s!élargit : rôle de l!intellectuel, amnésie culturelle, aliénation
marchande. Joué en France, aux Pays-Bas, en Belgique et traduit en américain puis en
italien, il écrit les dialogues de deux films
L!Ombre rouge
(Jean-Louis Comolli) et
Hiver 60
(Thierry Michel) et adapte
Saved
d!Edward Bond pour le Centre Dramatique Hainuyer.
Après avoir animé un séminaire sur l!écriture théâtrale à l!Université de Liège, il a également
occupé la Chaire de Poétique à Louvain-la-Neuve et y a publié un essai,
Le Fil de l!histoire
,
il analyse les étapes de son trajet social et théâtral. Ses pièces les plus récentes traitent
de l!exclusion sociale, de l!extrême droite, de la crise de la représentation.
Jean Louvet a obtenu plusieurs distinctions, dont le prix de la SACD en 1984 (Service belge),
le Prix Charles Plisnier accorpar la Province du Hainaut, et le Prix triennal de la littérature
dramatique. Il a également reçu le Prix du Wallon de l!année 2002. Son œuvre complète est
en cours d!édition, le deuxième volume est paru en mars 2008.
Le contexte d!écriture de
Un Faust
La période durant laquelle Jean Louvet écrit
Un Faust
est un moment charnière : entre la fin
de l!idéologie et du combat travailliste d!après-guerre et le début de la mondialisation.
L!auteur est sensible aux effets sur les mentalités et les comportements.
Dans
Un Faust
, le rapport à l!échec des grèves est clairement établi. Les mentalités
évoluent : on ne se mobilise plus pour des idéologies qui n!apportent finalement rien qui en
vaille la peine ; on profite de tout ce que l!on peut avoir maintenant, sans plus réfléchir en
tant que collectivité porteuse de valeurs. Car que gagne-t-on, finalement, à se battre sinon
cette impression d!inutilité et de vide quand on regarde en arrière ?
3
Jean Louvet est considéré comme un intellectuel engagé. Dans ses diverses œuvres, il tente
de mettre en avant les contradictions sociales de sa région, qui s!étendent tout de même au-
delà de la Belgique. On note dans son écriture une vision désenchantée du prolétariat et de
son avenir tout en gardant un œil très critique sur les modes de représentation de cette
classe ouvrière. Il parvient à transmettre au spectateur cette même distance intelligente.
Dans son propos, il s!interroge sur les aliénations de la société face à la dissolution des
idéologies de la Gauche. Quelles sont les conséquences de l!industrialisation ? De quelle
manière les gens vivent-ils entre eux aujourd!hui ? Quelles conséquences peuvent avoir
l!individualisme et la recherche du pouvoir sur le monde ouvrier ?
Je m!intéresse à ce que je connais, c!est-à-dire les intellectuels, la politique, le pouvoir,
le désir. La figure de l!intellectuel est quelque chose que j!interroge et ça peut aller d!
Un
Faust
à
Hamlet
, en passant par des personnages fictifs, des atterris, des perdus se
posant des questions. C!est donc par rapport à cette figure de l!intellectuel que le Faust
m!intéressait. Et puis,
Un Faust
, c!est aussi une pièce sur la perte, sur les désillusions
de la Gauche. C!est
Un Faust
qui n!a plus de monde cohérent, qui n!a plus de projet,
qui n!a plus de rêve.
(Jean Louvet, Théâtre II, Luc Pire, AML Editions)
Jean Louvet écrit
Un Faust
en 1985. C!est une commande faite à Jean Louvet par
L!Ensemble Théâtral Mobile, avec lequel l!auteur a déjà collaboré trois fois.
Après lecture de nombreux ouvrages sur ce personnage au théâtre et dans la littérature,
Jean Louvet se concentre sur le
Faust
de Goethe. En effet, le personnage de Goethe s!ancre
aussi dans les débuts d!une ère industrielle.
Par contre
,
le Faust de Jean Louvet s!éloigne de celui de Goethe : il ne se pose plus la
question de quitter sa petite condition pour aller vers le « grand monde » mais de quitter la
réussite pour se recentrer sur sa vie personnelle et mettre en doute ses valeurs.
Il m!a semblé qu!aujourd!hui le chemin devait être inverse. Mon Faust vient de la
politique, du public, de l!histoire et retourne à la solitude. Il rencontre Marguerite qui est
le produit d!une société repliée sur le corps, l!égo, le narcissisme, mais qui est en
me temps le produit logique de la société à laquelle il a participé.
Marc Liebens met en scène le spectacle à Bruxelles en 1985 avec sur scène Marcel Delval,
Patrick Descamps, Jo Deseure, René Hainaux et Carmela Locantore.
Extrait de Lecture de Jacques Dubois, Professeur à l!Université de Liège
(éditions Labor)
Cette pièce présente une variation actualisée sur le grand mythe faustien.
Par rapport à
Conversation en Wallonie
, avec
Un Faust
, on ne change pas véritablement de
problématique, en dépit des apparences.
Au fond, la pièce de 1986 reprend Jonathan Busiaux là ou
Conversation
l!a laissé. Certes, la
figure de l!intellectuel s!est amplifiée : nous avons affaire à un homme de réflexion et de
recherche qui s!est engagé dans son temps et dans la défense des opprimés. Mais la
question de départ n!a pas changé : comment et pourquoi s!engager aux côtés des dominés,
quand on appartient, quoi qu!on fasse, au camp des dominants ?
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En fait, Faust est un être écartelé, qui ne sait plus à quel sein se vouer celui maternel et
prolétarien de Baucis ou celui juvénile et amoureux de Marguerite. Son sarroi est à l!image
d!un monde déboussolé.
Et puis, il y a le duo conjugal Philémon-Baucis ; prolétaires vieillis, ils sont aujourd!hui des
retraités frileux, alertés par tous les dangers d!un monde dur. Ils parviennent tout de même à
réveiller chez le héros l!angoisse de ses « responsabilités » envers les « misérables ».
La transformation la plus sensible est celle qui affecte Méphisto. Envoyé diabolique du divin,
célébrant d!une apocalypse postmoderne, prophète d!une fin de l!humain, ce personnage
équivoque flamboie en images saisissantes empruntées à l!actualité la plus techno.
Emissaire d!un dieu qui a perdu toute notion de ce que sont et font les hommes, il se définit
dans un triste entre-deux, qui a des connotations de gang minable et de secte satanique.
Louvet ne cesse pas de mettre en évidence l!ambiguïté du personnage, dont répond
aujourd!hui toute une alité incertaine de comportements sociaux et sexuels, aux confins de
la perversion.
A force d!entretenir les équivoques, Méphisto ne sait plus où il en est.
Seule Marguerite finit pas s!engager sans réserve dans la passion et dans le don.
Il y a chez la Marguerite de Louvet une primitivité très belle, qui s!exprime d!abord en gestes
indécents, puis en élans de sensualité poétique dès que la jeune femme a sublil!amour.
Elle seule est prête à aller jusqu!au bout, au milieu de la terreur du monde.
On ne s!étonnera pas de voir baigner
Conversation en Wallonie
comme
Un Faust
dans la
lueur crépusculaire d!un climat de désenchantement. Le temps des grands élans a pris fin.
En fin de compte, chez Louvet, tout tourne autour d!une seule question, notre question à
tous : qu!est-ce qui veut que les meilleures, les plus justes « causes » soient incapables de
rendre grâce à ce qui fait la royauté de l!être l!enfance, l!amour, la fraternité simple des
hommes et des femmes ?
Et puis, il y a la présence des corps. Il va émerger dans le
Faust
pour se faire très sensuel
avec une impudeur parfois glorieuse, toujours assumée. C!est tantôt l!exigence provocante
du sexe et c!est tantôt le discours amoureux dans son intensité.
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II. Lorent Wanson, metteur en scène
Plus de 20 ans après la mise en scène de
Un Faust
par Marc Liebens, metteur en scène
belge majeur en Communauté française, Armand Delcampe, directeur de l!Atelier Théâtre
Jean Vilar de Louvain-la-Neuve, propose à Lorent Wanson de monter le texte de Jean
Louvet.
Lorent Wanson, parcours
Diplômé de l!INSAS, Lorent Wanson assure gulièrement depuis 15 ans des mises en
scène, principalement au Théâtre National de la Communauté française Wallonie/Bruxelles
et au manège.mons.
Ses spectacles interrogent principalement sur le rapport entre l!individu et la société, la
liberté et la solidarité, la réalité et l!utopie. Il est par ailleurs chargé de cours d!Art dramatique
au Conservatoire Royal de Liège et interprète ses chansons en s!accompagnant à
l!accordéon.
Il reçoit le Prix Tenue de Ville du meilleur spectacle en 1996 pour
Un Ennemi du peuple
d!Ibsen.
Son aventure avec le Centre Dramatique le manège.mons débute en 1998 avec la création
de
Sainte Jeanne des abattoirs
de Bertolt Brecht.
Les Ambassadeurs de l!ombre
est nomi
comme meilleur spectacle au Prix Océ des Arts de la Scène 2001 et aux Prix du Théâtre
2001.
En attendant Godot
(coproduction du manège.mons et du Théâtre National, créé à
Mons en 2000) reçoit le Prix du Théâtre 2001 de la meilleure mise en scène. Lorent Wanson
crée encore à Mons l!opéra tango de Piazzolla
Maria de Buenos Aires
dans le cadre du
Festival Via 2005.
On le retrouve en tant que comédien dans
La Mouette
d!Anton Tchekhov, mise en scène de
Jacques Delcuvellerie. En février 2006, il inaugure le Théâtre Le Manège à Mons avec le
superbe
Minetti
de Thomas Bernhard, Théâtre dans lequel il revient quelques mois plus tard
avec
L!Ami des Lois
de Georges Courteline.
En 2007, il crée
Africare
, spectacle belgo-congolais actuellement en tournée internationale
(Paris, Belgique, République Démocratique du Congo, Avignon, Santiago du Chili,…), une
aventure qui crée l!euphorie partout il passe et qui remporte auprès de chaque public un
succès incroyable. Lorent Wanson prépare cette saison trois créations :
Un Faust
de Jean
Louvet,
Yaacobi et Leidental
de Hanoch Levin et
La Meilleure Volonté du monde
, un texte
dont il est l!auteur et qu!il mettra en scène au Théâtre Le Public en fin de saison.
Le mot du metteur en scène
Plus qu!une adaptation du célèbre personnage,
Un Faust
est une trouée dans la mémoire
collective de l!histoire politique et sociale de la Wallonie. Comme dans la plupart de ses
œuvres, Jean Louvet cherche à inscrire une histoire intime, singulière dans une Wallonie en
besoin de mythologie. Une identité qui se trouve dans le combat social, le sang et la houille.
20 ans après l!écriture de cette pièce sensuelle et problématique, les processus de
déculturation, d!uniformisation, de destruction écologique et morale, n!ont cessé de creuser
le fossé entre l!homme et son environnement tant humain que social.
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