2EME JOURNEE DE RECHERCHE RELATIONS ENTRE INDUSTRIE ET GRANDE DISTRIBUTION ALIMENTAIRE JEUDI 2 AVRIL 2009, MONTPELLIER ACCOMPAGNEMENT DES PETITS PRODUCTEURS FRAIS PAR LA GRANDE DISTRIBUTION MAROCAINE : ASPECTS GENERAUX ET CADRE THEORIQUE Sabri RHITA Doctorante Université Montpellier 1 Equipe de Recherche sur la Firme et l’Industrie (ERFI) [email protected] Résumé Face à plusieurs problèmes d’ordre économique et organisationnel, l’organisation des approvisionnements des distributeurs, en produits frais, en mode filière a des répercussions positives sur les deux parties : distributeurs et petits producteurs. Le distributeur va pouvoir se protéger contre les défaillances que connaît le secteur en globalité, satisfaire les besoins de sa clientèle d’une manière adéquate et assurer ses sources d’approvisionnement. En contre partie, il offrira l’assistance nécessaire aux petits producteurs dépourvus des moyens indispensables pour pouvoir référencer leurs produits en grande distribution. Il reste à découvrir et à expliquer les aspects qui pourront naître derrière cette relation d’échange. Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier 1. Introduction : Aspects généraux Actuellement, on assiste à l’apparition de plusieurs programmes mondiaux qui visent l’intégration des petits agriculteurs dans les pays en voie de développement aux chaînes d’approvisionnement de la grande distribution moderne. Ce mouvement a pris son élan après l’évolution du commerce moderne au détriment du commerce traditionnel dans ces pays. L’expansion de ce phénomène oblige les petits producteurs à suivre les changements engendrés par ce dernier. Dans un souci d’intégrer les petits producteurs dans les chaînes d’approvisionnement des grands distributeurs, plusieurs lacunes à différents niveaux ont été décelées. Ces lacunes peuvent être d’ordre commercial ou institutionnel empêchant ainsi le référencement des produits des petits producteurs. Offrir des débouchés à ces derniers passera par relever les obstacles d’ordre infrastructurel et logistique, améliorer la connaissance des marchés par les petits producteurs et les moyens permettant de satisfaire ses exigences en favorisant des services d’appui et des ressources financières. La grande distribution reste la mieux placée pour offrir des débouchés importants et stables pour la production des petits producteurs. Par conséquent, elle interviendra à réaliser un équilibre socio-économique. Ceci ne peut avoir lieu que par le biais de l’exploration des opportunités que les petits producteurs agricoles peuvent exploitées dans le but d’améliorer les techniques de production, le pouvoir de négociation, et les revenus de ces derniers. D’un autre côté dans un environnement instable les distributeurs cherchent à sécuriser leurs approvisionnements, en optant pour des multiples accords avec leurs fournisseurs en vu de minimiser les risques de conflit qui peuvent avoir lieu. Ainsi, les deux parties peuvent en tirer profit d’une telle relation, car les distributeurs vont recevoir un bon produit, de la qualité voulue, au bon moment et au juste prix. Les petits producteurs, en plus de référencer leurs produits, ils recevront de l’aide pour améliorer leurs normes de production. Au Maroc par exemple, la libéralisation de l’économie marocaine qui date de 1984 a engendré la modernisation de l’appareil commercial par l’apparition de nouvelles formes de distribution au Maroc. Sauf qu’il fallait attendre l’année 1990 pour que la première chaîne de grande distribution fait son apparition. Le développement de la distribution moderne était incité par les nombreux changements socio-économiques qu’a connu le pays. On assiste à une évolution au niveau des préférences des consommateurs qui accompagne l’augmentation du pouvoir d’achat des marocains. La mise à niveau de l’économie et la signature des accords commerciaux avec l’Union européenne et les Etats-Unis constituent deux autres motifs initiant le changement. Certes, le développement de la grande distribution marocaine ne coïncide pas avec le développement de certaines filières qui peuvent l’intéresser comme la filière fruits et légumes frais. La filière fruits et légumes au Maroc souffre de nombreux problèmes d’ordre institutionnel et organisationnel. L’existence de marché informel et la désorganisation des producteurs de fruits et légumes ne facilite pas la tâche pour la grande distribution marocaine. Elle a souvent recourt à des systèmes d’approvisionnement traditionnels passant par des intermédiaires. Dans ce contexte Marjane Holding, un des acteurs de la grande distribution marocaine, développe le commerce de filière. Pour le distributeur, le commerce de filière consiste en le « développement des partenariats entre un ou plusieurs magasins et des groupements de 2 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier producteurs dont l’objectif essentiel est de se mettre d’accord sur un projet commun qui définit la zone de production du produit et certaines caractéristiques de ce dernier » (Lessassy, 1997). En optant pour la construction de filières d’approvisionnement, Marjane va permettre la restructuration de l’activité des agriculteurs et des éleveurs. En incitant les petits producteurs à se regrouper en coopératives ou en association, Marjane va pouvoir monter son projet de filière et faciliter la communication avec ces derniers. La construction de filière d’approvisionnement va permettre d’éliminer les intermédiaires et se procurer les produits frais au prix les plus bas ainsi la valorisation des produits à l’amont. Il permettra aussi l’accompagnement des petits producteurs agricoles et il contribuera au développement social et économique des agriculteurs et des éleveurs marocains. Toutefois le montage de filière garantira les bonnes pratiques de production, la traçabilité, la qualité et la sécurité alimentaire Donc pour ce faire, on a chargé une équipe au niveau de la direction des achats d’établir des relations directes avec les petits producteurs de produits frais dans un but de les accompagner pour pouvoir respecter les standards des cahiers de charge prescris par cette chaîne de distribution. Dans ce cadre, en ce qui concerne les fruits et les légumes frais, on a instauré une plate forme de centralisation des achats. A fin mars 2007, 90% des approvisionnements en fruits de la plate forme et 50% en légumes sont effectués auprès des producteurs et de stations de conditionnements. Ce qui a favorisé donc la diversification des gammes proposées, caractérisées par leurs qualités supérieures et leurs prix compétitifs. Dans la filière viandes rouges on a suivi la même démarche en nouant contact avec des éleveurs et associations d’éleveurs éparpillé sur le territoire marocain. Les caractéristiques des viandes choisies doivent répondre aux exigences de qualité et de santé ainsi qu’aux résultats ressortis par les tests élaborés en magasin définissant les caractéristiques désirées par les clients. Dans un but d’étudier les actions de la démarche d’accompagnement et son impact sur les deux parties de la dyade, il convient donc de se poser certaines questions concernant la manière de laquelle vont se construire les relations d’accompagnement et les aspects de la relation d’échange qui va naître par la suite de l’adoption de cette démarche. L’objectif de notre étude est de voir si l’accompagnement permettra d’induire une relation de coopération, s’il ya un risque qu’une relation asymétrique en faveur du distributeur soit instaurée, s’il ya une justice et une équité manifestée derrière ces relations, et d’expliquer le motif d’opter pour ce genre de relation en se demandant si la grande distribution cherche plutôt d’améliorer sa légitimité. Dans le cadre de notre thème de recherche, on peut mobiliser les différentes approches théoriques issus de différents disciplines (économie, sociologie, psychologie, marketing, stratégie..) qui ont nourrit les différentes analyses sur lesquelles on s’est basées pour traiter les relations entre distributeurs et fournisseurs. Dans la partie qui suit on présentera les théories concernées. 3 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier 2. Cadre théorique : 2.1 La théorie des coûts de transaction et son implication dans l’explication de l’efficacité du commerce de filière : A partir de la théorie des coûts de transaction qui s’inscrit dans la lignée des travaux de Ronald Coase (1937), Williamson a cherché à étudier les formes de transactions et de contrat qui peuvent exister, à expliquer les facteurs organisant les relations contractuelles et les transactions des individus marqués par leur rationalité limitée et plongé dans un environnement incertain. La thématique de la gouvernance et du choix de cette dernière a fait l’objet de son analyse puisqu’ il a étudié la capacité des diverses structures de gouvernance à encadrer les transactions des agents. Selon Williamson (1996), une structure de gouvernance est « la matrice institutionnelle dans laquelle l'ensemble d'une transaction est décidé » (Williamson 1996). L’hypothèse fondamentale pour laquelle il a opté vise à justifier le choix de l’agent de la structure de gouvernance (marché, hiérarchie et hybride) en prenant en considération les coûts de production et les coûts de transaction engendrés par chaque structure. Le processus contractuel issu de la transaction peu s’avérer complexe ou coûteux selon la qualité de l’engagement réunissant les contractants. Williamson a répartit la transaction en trois étapes : l’étape de la négociation qui prend fin une fois on arrive à un commun accord qui satisfait les intentions des parties, la rédaction du contrat où sont précisés les obligations de chacun des contractants et enfin la concrétisation des obligations définis dans le contrat. Cette dernière représente l’étape effective de la réalisation du contrat et engendre ce qu’on appelle les coûts de transactions. En résumé, on pourra avancer que les propos de l’approche transactionnelle stipulent que la performance des relations client-fournisseur est la conséquence économique de l’efficience des arrangements contractuels et organisationnels (les structures de gouvernance) en prenant en considération les conditions de l’échange (Donada et Nogatchewsky, 2005). Selon Filser (1992), le cadre théorique pourvu par la théorie des coûts de transaction est spécialement bien adapté à l’explication des différentes modes d’organisation de canaux de distribution (Filser, 1992). L’application des principes de la théorie des coûts de transaction à l’organisation du canal de distribution consiste en le fait de minimiser le coût de transaction au lieu du minimiser le coût de chaque fonction. La réalisation d’une transaction par un agent économique peu faire appel soit au partenaire, soit en intégrant la fonction. Donc l’agent peut faire le choix entre l’externalisation et l’intégration. Filser (1992), en appliquant la théorie des coûts de transaction à l’étude des canaux de distribution, distingue trois catégories de coûts de transactions Coûts de sauvegarde engendrés des activités de protection des actifs spécifiques dans la transaction ; Coûts d’adaptation liés aux ajustements nécessaires dans le processus d’échange en vue de s’adapter aux situations imprévisibles ; Coûts d’évaluation créés par la mise en place des procédures de contrôle destinées à évaluer la performance des agents. 4 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier Lessassy (2007) déclare que la création de filière est considérée comme une réponse à la situation de choix de structure d’organisation optimale qui se pose au distributeur. Car celui-ci en cherchant à réduire les coûts il devra choisir une organisation entre marché et hiérarchie ,donc, la création de filière s’avère la mieux adaptée. En grande distribution, la théorie des coûts de transaction favorise la compréhension de la logique de création des filières ( Figure n°1). Figure n°1 : Théorie des coûts de transaction et création de filière d’après Lessassy (2007) 1. La stratégie des acteurs Domination des distributeurs 3. Choix d’organisation du canal approche théorique Organisation verticale/ hiérarchique 2. Canal Source de Coûts à réduire Système simple Lieu de coopération Création de la filière La théorie des coûts de transactions, dans le cas de Marjane, explique les motifs économiques liés aux coûts supportés lors du passage par les intermédiaires, justifiant ainsi le passage au commerce de filière (Encadré 1) et de choisir l’option qui consiste en assister les petits producteurs disposant de faibles moyens logistiques et commerciales. Encadré n °1 : Objectifs du projet filières - Répondre à la double mission économique et sociale de Marjane ; Développer des relations plus directes avec l’amont agricole ; Travailler à l’optimisation des prix d’achat et par conséquent des prix de vente rendant les produits accessibles à une clientèle plus large ; Améliorer la qualité des produits liée à la transmission directe des exigences aux producteurs et avoir une réactivité plus grande face aux évolutions du marché. Réaliser une segmentation de l’offre permettant la mise en place de labels qualité ; Garantir l’origine et les modes de production pour la mise en œuvre des mesures de traçabilité et de sécurité alimentaire. Source : Document interne Marjane Holding 5 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier 2.3 La théorie néo-institutionnelle et son rôle comportements coopératifs adoptés : dans la justification des La théorie néo-institutionnelle vise essentiellement à étudier les relations entre organisations et l’influence de l’environnement social sur les entreprises cherchant a prouvé leur légitimité. En quête de cette dernière, les organisations s’ajustent à la société selon une rationalité collective. Suchman (1995) définit la légitimité par : « une perception généralisée ou une prétention que les actions d’une entité sont souhaitables, appropriées ou peuvent s’approprier dans un système socialement construit de normes, de valeurs, de croyances et de définitions ». Certaines recherches de DiMaggio et Powell (1983), de Meyer et Rowan (1977) ont bien démontré comment les institutions fonctionnaient sous la pression d’une conformité liée soit à des pressions culturelles exogènes, soit à des apprentissages par mimétisme qui visent : l’homogénéisation des structures et des pratiques des organisations. Cette homogénéisation ou cette tendance vers la conformité, élément central de la théorie néo-institutionnelle, est expliquée par le concept d’isomorphisme (Powell et DiMaggio, 1991). Messeghem (2004) définit ce dernier par la similitude de forme de deux organisations. L’approche néo-institutionnelle s’intéresse à étudier l’influence du contexte institutionnel sur l’adoption de pratiques ou d’architecture institutionnelle, cette adoption peut être contrainte ou choisie. Les entreprises optent pour ce que les institutions exigent d’elles afin d’accroître leur légitimité institutionnelle et leur pouvoir. Les recherches s’intéressant à l’étude des relations entre la grande distribution et ses fournisseurs ont montré que les distributeurs adoptent des comportements coopératifs lors d’un processus de quête de légitimité. Messeghem (2004) explique que la grande distribution engage des relations avec des entreprises de type PME dans un but d’améliorer son image vis-à vis des parties prenantes, en particulier les consommateurs et les pouvoirs publics. Dans le cas de Marjane Holding, sa direction générale montre parmi ses missions (Encadré n° 2) sa volonté de participer dans le développement économique et social du pays, il reste à définir si derrière ces relations d’accompagnement Marjane cherche à améliorer sa légitimité. Encadré n° 2 : Missions de Marjane holding : - - Faire accéder le plus grand nombre de ménages marocains aux produits de consommation courante en leur apportant des solutions économiques pour optimiser leur budget et en leur garantissant une meilleure qualité ; Densifier la présence de Marjane dans les zones fortement urbanisées à croissance rapide et à pouvoir d’achat plus limité ; Générer du progrès pour les fournisseurs locaux et en particulier les PME ; Promouvoir des relations fortes avec l’environnement institutionnel de Marjane. Source Marjane Holding 6 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier 2.3 La théorie de la justice: un outil de mesure de l’équité La théorie de la justice a intéressé plusieurs domaines dont la philosophie politique, l’économie et les sciences de gestion. En traitant les relations inter-organisationnelles, la théorie de la justice a été mobilisée pour identifier la manière avec laquelle une partie traite son partenaire de l’échange. La littérature s’intéressant à la justice organisationnelle ressort deux dimensions de la justice : - La justice distributive : elle fait référence au processus utilisé pour déterminer les résultats réellement réalisés. Elle désigne l’équité perçue des ressources ou des rétributions reçues. Appliquée aux relations d’échange, on parle de justice distributive lorsque la partie qui a plus pouvoir favorise la création de profit pour l’autre partie de l’échange et quand il s’agit de partage des bénéfices entre les deux parties (Kumar, 1996 ; Fearne et al, 2003 ,2005 ; Hertel et al , 2002). - La justice procédurale : elle désigne l’équité perçue des procédures utilisées lors de la prise de décision. Thibault et Walker (1975), présentent deux critères de justice procédurale, le premier renvoi au contrôle sur le processus de décision et le deuxième fait référence au contrôle sur la décision qui implique une capacité d’influence du résultat décisionnel. La justice procédurale selon Leventhal (1980) se manifeste lorsque les décisions prises : sont exemptes de biais, génèrent des allocations cohérentes s’appliquant d’une manière impersonnelle et intemporelle, sont basées sur des informations fiables, peuvent être revues et corrigées en tachant à ce qu’ils reflètent les intérêts des parties concernées par la décisions et en veillant à ce qu’ils correspondent aux standards éthiques et moraux acceptés. Kumar (1996), dans le cadre des relations inter-organisationnelles, propose certains principes à suivre pour instaurer une justice procédurale lorsqu’on s’engage dans une relation :1) La communication bilatérale des standards et des plans d’approvisionnements qui doivent être discutées et communiqués préalablement pour éviter que l’acheteur crée de l’embarras au fournisseur. 2) L’impartialité doit caractériser les relations reliant l’acheteur avec ses différents fournisseurs. 3) Un partenaire vulnérable peut jouir du droit de réfutabilité de toute décision lui créant un préjudice même si elle est prise par la partie qui dispose du pouvoir. 4) L’explication des décisions prises par la partie disposant du pouvoir à ses partenaires d’échange et qui concernent spécialement sa politique de distribution. 5) La familiarité avec les partenaires en ayant conscience des conditions de l’environnement dans lequel ils opèrent .6) La courtoisie qui consiste en un traitement respectueux de la part de la partie détenant le pouvoir vis-à-vis ses partenaires. La mobilisation de la théorie de la justice dans la compréhension des aspects qui régissent les relations entre fournisseur – distributeur s’avèrent d’une grande importance (Fearne et al, 2003), elle permet de cerner les bonnes pratiques entrepris par le distributeur et d’expliquer si celui-ci abuse de son pouvoir envers ses fournisseurs. Fearne et al (2003) signalent que les petits producteurs sont les premiers à profiter des bonnes pratiques des distributeurs dans la mesure où elles leurss favorisent un environnement commercial compétitif et en leurs donnant la confiance nécessaire pour pouvoir investir dans l’avenir. 7 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier Dans le cas de Marjane Holding, il va falloir expliquer si ces relations d’accompagnement garantissent l’équité envers les petits producteurs, si la justice distributive et procédurale sont manifestées et de ressortir les caractéristiques de la relation qui renvoient à ces dernières. 2.4 De l’interaction résulte des comportements coopératifs : Le courant interactionniste s’est intéressé dans de nombreux travaux à l’explication de certains attributs caractérisant le développement des relations entre fournisseur- distributeur. Ces travaux stipulent que la coopération prend de l’ampleur et devient renforcée lorsque la proximité avec l’autre partenaire se concrétise à travers des contacts fréquents (Gadde et Häkansson, 1993), et en optant pour la communication (Provença et Castro, 1998), puis quand la distance sociale et culturelle entre les partenaires est jugée faible (Ford, 1980 ; Perrin et Valla, 1982). L’adaptation est considérée comme étant un élément essentiel favorisant la coopération (Ford, 1980 ; Hallen et al, 1991). Ainsi que la confiance (Gadde et Häkansson, 1993 ; Roehrich, et Spencer, 2003) puisqu’elle permet d’établir les conditions nécessaires pour favoriser l’harmonie et la fluidité des relations (Gadde et Häkansson, 1993). La confiance et les normes relationnelles incitent les parties à s’engager et à ce que leur relation dure à long terme (Ford, 1980 ; Gadde et Häkansson, 1993). La communication favorise la continuité de la relation et son évolution positive. En traitant le concept de satisfaction, les spécialistes du courant démontrent que celleci devra être considérée comme le moteur de la dynamique relationnelle (Häkansson, 1982 ; Turnbull et Valla, 1986). Elle dépend de la qualité des relations dyadiques, que celles-ci soient en interne ou en externe (Tikkaner et al, 2000). Les résultats des recherches de ce courant démontrent l’influence négative du comportement opportuniste sur le développement des relations à long terme (Häkansson, 1982). La littérature sur la coopération inter-organisationnelle (verticale ou horizontale) présentent plusieurs développements justifiant l’interaction entre client et fournisseur (Dull et al , 1996 ; Larson et al , 1998 ; Jolly, 1993). Cette interaction permet la coordination des ressources complémentaires avec les entités environnantes ( Nielsen, 1987), elle permet aussi l’acquisition de nouvelles compétences (Le bas, 1993). Selon Anderson et Narus (1996) « en partageant les ressources et leurs capacités, les compagnies peuvent répondre aux besoins les plus extraordinaires de leurs clients (…). Il faut que les managers se représentent le canal de distribution comme un réseau de capacités encastrés dans une entreprise élargie. Il faut qu’ils réalisent également, qu’en partageant leurs ressources et leurs capacités dans de nouvelles situations à travers de nouvelles manières de faire, ils créeront des opportunités de profit non réalisables individuellement ». Tout au long du développement de la relation, on s’approprie une expérience commune dyadique et la diffusion réciproque de normes et de règles se réalise (Ford, 1980). Les chercheurs du courant interactionniste de l’IMP ont bien anticipée à mettre l’accent sur la « relation » comme étant une ressource nécessaire au développement de l’organisation (Häkansson, 1982, Freiling, 1997). Axelson et Häkansson ( 1984) affirment que la combinaison de ressources uniques conduit à la production de nouvelles compétences. 8 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier Han et al (1993) soulignent que le fournisseur est le plus concerné par certains des avantages de la relation à long terme desquels il peut en profiter: la relation à long terme apporte au fournisseur une plus grande stabilité au niveau des prix et des processus de production, elle contribue à l’amélioration de l’efficacité marketing puisqu’elle vise le maintien des clients au lieu de chercher à acquérir d’autres, et finalement, les coûts marketing sont réduits puisque le fournisseur cerne parfaitement au cours de la relation les besoins de son clients ce qui lui permet de les satisfaire le plus adéquatement possible. L’apprentissage lors des interactions apparaît ici de manière implicite. Häkansson et al (1999) déclarent que l’instauration, lors de l’interaction, d’interfaces verticales variées favorise l’apprentissage organisationnel au sein d’une dyade. Donc l’apprentissage est considéré comme l’un des avantages de l’interaction. Il reste à cerner le degré d’interaction générant l’apprentissage. Toutefois, certaines recherches ont prouvé que la plupart des apprentissages est « inconsciente », qu’il s’agit des interactions au sein de l’organisation (Nonaka, 1994 ; Nonaka et Takeuchi, 1997) ou entres les organisations (Ingham, 1994 ; Häkansson et al, 1999). La littérature en stratégie fait apparaître différents contextes plus ou moins favorable à l’apprentissage, dans le cas des relations verticales, l’apprentissage demeure réalisable tant que les échanges relationnels permettent d’avoir un effet sur le transfert des ressources et des compétences. Le courant interactionniste met en évidence l’avantage des relations dyadiques en matière d’apprentissage organisationnel et transferts des compétences nécessaires pour la mise à niveau des petits producteurs. 3. Conclusion : L’écrit suivant présente le cadre théorique à prendre en considération pour l’analyse des relations d’accompagnement et les aspects qui se cachent derrière cette relation d’échange. Nous envisageons de continuer nos recherches pour traiter de prêt ce phénomène qui s’appuie sur un cas réel de coopération entre la grande distribution et des petits producteurs au Maroc. Nous veillerons à couvrir les différentes parties constituant le canal de distribution, en passant d’abord par le distributeur, les associations intermédiaires puis à la fin par les petits producteurs pour examiner l’ensemble du déroulement de la relation d’échange. 9 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier Bibliographie: Anderson J. & J. Narus (1990), « A Model of Distributor Firm and Manufacturer Firm Working Partnerships », Journal of Marketing, Vol 48, p 62-74. Axelson B. et Häkansson H. (1984), « The Development Role of Purchasing in an Internationnaly Oriented Compagny », Research Developments in International Marketing, UMIST, p. 228-259. Balabanis G. (1998), « Antecedents of cooperation, Conflict and Relationshio Longevity in an Inetnational Trade Intermediary’s Supply Chain », Journal of Global Marketing, vol.12, n°2, p.25-46. Coase, R.H. (1937), « The Nature of the Firm », Economica. Cook K.S. et Emerson R.M. (1978), « Power, equity, commitment in exchange networks », American Sociological Review, Vol 43, n°5, p 721-738. Cova B. et Salle R. (2003), « Le marketing d’affaires – stratégies et méthodes pour vendre des projets et des solutions », Paris : Dunod. Cyert R.M. et March J.G. (1963), « A Behavorial Theory of the Firm », Prentice Hall: Englewood Cliffs. De Montmorillion, B. (1989), « croissance de l’entreprise », dans encyclopédie de gestion, Paris : Economica, p. 710-733. Desreumaux A. (1993), Stratégie, Paris : Dalloz. DiMaggio P. et W. Powel (1983), « The Iron Cage Revisited : Institutional Isomorphism and collective Rationality in Organizational Fields », American Sociological Review, Vol 48, Avril, p.147-160. Dull S., Mohn W. et Noren T. (1996), « Le partenariat : entre marketing et stratégie », l’Expansion Management Review, n°81, juin, p. 69-75. Dwyer F.R., P.H Schurr et S Oh (1987), « Developping Buyer – Seller Relationships », Journal of Marketing, Vol. 51, p. 11-27. Fearne A., Duffy R. et Hornibrook S. (2005), « Justice in UK supermarket buyer-supplier relationships: an empirical analysis », International Journal of Retail and Distribution Management, Vol. 33, p. 570-582. Fearne A., Duffy R. et Hornibrook S. (2003), « Measuring distributive and procedural justice: An exploratory investigation of the fairness of retailer-supplier relationships in the UK food industry », British Food Journal, Vol. 105, p. 682-694. Ford D. (1980), « The development of Buyer-Seller Relationships in Industrial Market », European Journal of Marketing, Vol 14, n° 5/6, p 339-354. Gadde L.E. et Håkansson H. (1993), « Professional purchasing », Londres: Routledge. Gherzouli K. (1997), « Les conditions de réussite de la coopération Euro-Maghrébine », Revue française de Gestion, juin-juillet- août, n°114, p 118-134. Han S-L, D.T. Wilson et S.P Dant (1993), « Buyer-Supllier Relationships Today », Indutsrial Marketing Management, Vol 22, n° 4, p. 331-338. Håkansson H. et Snehota I. (1995), « Developping relationships in business networks », Boston: International Thomson Press. Håkansson H. (1982), « International Marketing and Purchasing of Industrial Goods: An Interaction Approach », John Wiley and sons. Hertel, G., Aarts, H. And Zeelenberg, M. (2002), « What do you think is fair ? Effects of ingroup norms and outcome control on fairness judgements », European Journal of Social Psychology, Vol. 58, p. 327- 341. 10 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier Kumar, N. (1996), « The power of trust in manufacturer- retailer relationships », Harvard Business Review, Vol. 18, N°.4. Laage-Helman J. (1997), « Relationships Effects in Industrial Networks », in Interaction, Relationships and Networks in Business Markets, 13th IMP Conference, Lyon, 4-6 septembre, p.357-382. Larson R., Bengtsson L., Henrinksonn K. et Sparks J. (1998), « The Interorganisationnal learning Dilemma: Collective Knowledge Development in Strategic Alliances », Organizational Sciences, p.761-774. Le Bas C. (1993), « Economies et sociétés », Série W,n°1, n°5, mai, p.7-14. Leek, S., Turnbull P.W., Naudé P. et Ritter T. (2002), « Classifying relationships as successful and problematic: theoretical perspectives and managerial implications », 18éme Conférence annuelle IMP, Dijon, France. Lessassy L. (2008), « Pratiques des filières en grande distribution : une analyse par la théorie descoûts de transaction » ,Décisions Marketing. Levanthal, G. (1980), « What should be done with equity theory? New approaches to the study of fairness in social relationships » , in Gergen, K.G, Greenberg, M.S. and Willis, R.H (Eds) , Social exchange: advances in theory and researcher, New York, Plenum, pp.27-55. Manzano M. (2000), « Le développement de la coopération entre les institutions du canal de distribution : le cas de l’évolution de la relation entre les producteurs et les grands distributeurs français », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, CNAM, Paris. Messeghem K. (2004), « Les voies de la coopération entre PME et grande distribution », 7éme congrès International Francophone en Entrepreneuriat et PME, Montpellier, France. Meyer J.W et B. Rowan (1997), « Institutionalized Organizations: Formal Structure as Myth and Ceremony», American Journal of Sociology, Vol 83, n°2, p.340-363. Möller K. et Törrönen P. (2003), « Business supplier’s value creation potential. A capabilitybased analysis », Industrial Marketing Management, Vol 32, n°2, p.109-118. Morris, M.H., Brunyee, J. et Page, M. (1998), « Relationship Marketing in Practice: Myths and Realities », Industrial Marketing Management, Vol. 27, n°4, p. 359-371. Nielsen C.C. (1998), « An empirical Examination of the Role of ‘Closeness’ in Industrial buyer-Seller relationships », European Journal of Marketing, vol. 32, n °5/6, p. 441-463. Nogatchewsky G. Donada C. (2005), «Vingt ans de recherche marketing sur la performance des relations client – Fournisseurs » ; Recherche et Applications en Marketing, Vol 20, n°4, 10-15 Nonaka I. (1994), « A dynamic Theorie of Organizational Knowledge Creation », Organization Science, Vol 5, n°1, février, p. 14-37. Nonaka I. et Takeuchi H. (1995), « New York: The knowledge Creating Company ». Suchman M.C. (1995), «Managing legitimacy : strategic and institutional approaches », Academy of Management Review, Juillet, p. 571. Tikkanen H., Alajoutsijärvi K. et Tähtinen J. (2000), « The concept of satisfaction in industrial markets: a contextual perspective and a case study from the software industry », Industrial Marketing Management, Vol 29, n°4, p.373-386. Thibault, J., et Walker, L. (1975), « Procedural justice: a psychological analysis », Erlbaum, Hillsdale, NJ. Turnbull, Oliver N. et Wilkinson B. (1992), « Buyer-Supplier Relations In The Uk Automotive Industry : Strategic Implications Of The Japanese Manufacturing Model », Strategic Management Journal, Vol 13, p.163. Turnbull P.W. et Valla J.P. (1986), « Strategies For International industrial Marketing: The Management Of Customer Relationships In European Industrial Markets », Londres: Croom Helm. 11 Actes de la 2ème Journée ComIndus – 02 Avril 2009 - Isem-Montpellier Walter A., Ritter T. et Gemüden H.G. (2001), « Value creation in buyer-seller relationships », Industrial Marketing Management, Vol 30, n°4, p.365-377. Williamson, O.E (1996), « The mechanism of governance », Oxford University Press. 12