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LycéeCamilleVernet-M.Liotard-MP,PC-Analysedetexte
Monchoixestsansdétour;cequimeguideaupremier chef, c'est le souci de l'autre et l'obligaFon de le
respecter. Mon interrogaFon porte sur les moyens à
déployerpouraHeindrecebut,ceHequêtequidonneà
mavieunsensmoral.L'humainsedéfinitparrapportau
non-humainparlapenséedesesenFrlibre.Decefait,
mêmesiladéfiniFonetl'authenFcitédelalibertésont
incertaines,lerespectdeceHeaspiraFonàlalibertéest
inséparable de toute réflexion morale. En d'autres
termes,l'unedescaractérisFquesd'Homosapiensestsa
capacité d'apprécier la qualité de son acFon, de s'en
senFr responsable puisqu'il a le senFment qu'elle résulte d'un choix libre. Si un décalage se produit entre
l'acFon et l'exigence de la liberté de l'autre, un senFment de honte ou de gêne doit naître chez un agent
moral.Enrevanche,uneacFonaccompliedansunsens
conforme à ce qui convient, c'est-à-dire à la valeur intrinsèque de l'altérité, induira chez cet agent une impressiondesaFsfacFon.
La noFon d'homme seul est une absurdité. C'est un
êtresocialsensibleàl'empreintementalelaisséeparses
contactsavecautrui.L'hommenepeutprofiterdespotenFalitéscogniFvesqueluiconfèrentsesgènesques'il
estintégréàunesociétéhumaineengendrantsaculture
propre.Sanslesautres,l'individunepeutpasdevenirle
sujet de sa propre vie. Affirmer que l'homme seul
n'existe pas implique que certaines valeurs sont intangiblesentantqu'elleslefondent.L'émergenced'unêtre
jouissantdesescapacitésmentales,capabledepenser
l'unicité de son être, de ses idées, de ses projets et de
sesactes,estpossibleàlacondiFonimpéraFvequ'une
relaFonintersubjecFvemutuellementhumanisantel'ait
permise.Encesens,ilestjustededirequelareconnaissance de la valeur de l'autre consFtue un fondement
ontologique de la personne, et donc de l'humanisme
dont je me réclame : « J'ai besoin de l'autre pour être
moi-même,etilabesoindemoipourêtrelui.»Lerespectdel'autreestunevaleurabsolue,etnonrelaFve.
Cen'estquedansl'économied'undialogueargumentéentredesindividusquenosdéterminantsbiologiques
nous donnent accès à nos capacités cogniFves. Sans
coédificaFon cogniFve, il n'y aurait pas d'humanité.
L'enfant sauvage, livré à lui-même, isolé, élevé par les
animaux, est incapable d'aHeindre les capacités mentales caractérisFques de l'espèce humaine. Il a un génomehumain,certes,maisiln'apasétéhumanisé.Pour
qu'un Homo généFquement humanisable soit humanisé, il lui faut interagir avec au moins un autre. Si je ne
peuxaccéderàlaplénitudedemescapacitéscogniFves
que dans ce dialogue avec cet autre qui m'est proche,
ne suis-je pas amené à lui conférer une valeur singulière?CeHeévidencedelavaleurconféréeàceluigrâce
auqueljesuishumainetmereconnaiscomme«moi»
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est sans doute la base ontologique de la morale altruiste. Dès lors, le choix qui me donne accès à une
connotaFon moralement posiFve ou négaFve de mes
acFonsprendunnouveautour.Toutcequicontribueà
manifester le souci et la considéraFon que j'ai pour un
êtresinguliersanslequeljeneseraispasmoi-mêmeme
semblera moralement posiFf. Ce qui lui nuit et compromeHra mon interacFon avec lui m'apparaîtra moralement négaFf. Le sens moral germe sur le terreau du
senFmentdelibertéauqueldonneaccèsl'évidenced'un
choix.
Qu'est-ce qui fait le cœur de l'homme ? La réponse
ne saurait se résumer à la biologie qui consFtue néanmoins la condiFon permissive de l'imprégnaFon et du
processus civilisaFonnel. Il n'existe pas de gènes de
l’«humanitude»!
Dansnotremonde,sionFentàsauvegarderuntant
soitpeulerespectdelavaleurhumaine,etladéfendre
soustouslesclimatsetdanstouteslescultures,encore
faut-il trouver un consensus sur la définiFon de
quelquesprincipeséthiquesdebasequ'onconsidérerait
comme potenFellement universels. C'est là où le bât
blesse.LaplupartdespenseursesFmentquelesvaleurs
éthiques changent d'un lieu à l'autre, d'une époque à
l'autre, d'une personne à l'autre, et se persuadent
qu'elles sont le fruit de construcFons intellectuelles,
relaFvesàunesociétédansuntempsdonné.Àl'excepFon de la morale religieuse, qui est liée à une révélaFon, la morale serait relaFve. Autrement dit elle ne
vaudraitquepouruneculture,unepériode,unesociété
à un moment donné. « Vérité en deçà des Pyrénées,
erreurau-delà»,avaitdéjàditPascal.Ilfaudraitrenoncer,aunomdurelaFvisme,àtrouverdesvaleursuniverselles.
Militant pour une morale sans transcendance, je
croisnécessairelaréférenceàdesrèglesmoralesàvocaFon universelle, qui seules ont été capables de faire
émergerl'hommedesonanimalité.Certes,lerapportà
l'autre n'est pas immuable. Il est divers et le tour qu'il
prend dépend de la culture, des circonstances, et des
époques.L'histoirenousmontrequecertainessociétés
ont accepté ou acceptent ce que nous rejetons aujourd'huiavechorreursurleplanéthique.Pourautant,
jem'opposeàceuxquiplaidentpourunrelaFvismedes
critères du Bien et du Mal. Il n'y aurait pas de valeurs
absolues. CeHe pseudo-évidence du relaFvisme moral
me semble dangereuse. Si la morale n'était qu'une
construcFon historique et sociale parFculière, ce que
l'onpensaithierdevraitêtreaujourd'huiincompréhensible,cequin'estpaslecas.
Axel Kahn, Un type bien ne fait pas ça : morale,
éthiqueeti9nérairepersonnel,Nil,2010.
www.monsieurliotard.fr
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