Cependant, de nos jours et depuis au moins un siècle et demi, la monnaie fiduciaire a été
complétée par une autre forme de monnaie, appelée scripturale. (Cette dénomination
s’explique par le fait que la monnaie en question résulte d’un simple jeu d’écritures tenues par
les banques commerciales.) On la qualifie également de monnaie de crédit, pour des raisons
que l’on va à présent expliciter.
Les banques commerciales créent en effet de la monnaie en octroyant des crédits. Pour
bien le comprendre, considérons une économie simplifiée qui comporte une banque centrale
(par exemple, la Banque Nationale de Belgique, la Banque de France, la Banque Centrale
européenne, etc.) disposant du privilège de l’émission des billets et des pièces, et d’une seule
banque commerciale, pour la commodité notée X, ainsi qu’un secteur non bancaire constitué
de particuliers et d’entreprises.
Supposons alors qu’un particulier, du nom de Dupond, dispose de 10.000 euros. qu’il
décide, après mûre réflexion, d’en déposer la totalité à la banque X. Supposons aussi que cette
dernière conserve 10% de tous ses dépôts sous forme de réserves pour honorer d’éventuelles
demandes de remboursement. (Le taux de 10% est appelé coefficient de réserve.)Par
conséquent, notre banque peut donc, en bonne logique, prêter 9.000 euros à un certain
particulier – appelons-le Ducon. Ce dernier décide illico de déposer ces 9.000 euros sur le
compte à vue dont il dispose à la banque X. Celle-ci en conserve le dixième comme réserve
destinée à faire face à tout remboursement et accorde un prêt à un de ses clients, nommé
Durand, pour un montant de 8.100 euros. Notre Durand, client de X, redépose immédiatement
la somme dans sa chère banque, qui va à nouveau en conserver un dixième et prêter le solde à
un particulier ou une entreprise. Ce dernier ou cette dernière décide ensuite de déposer ce
montant à un guichet de X qui le prête à raison de 90% à un de ses autres clients, etc., etc.
Au total, le dépôt initial effectué par Dupond auprès de la banque X (soit 10.000 euros)
s’est accru par vagues successives :
10.000 9.000 8.900 100.000.+++="
En d’autres mots, la somme de 10.000 euros est devenue, au terme du processus, 100.000
euros, ce qui signifie qu’elle a été multipliée par 10. (On trouve le nombre de 100.000
simplement en appliquant la formule suivante : le montant final des dépôts – 100.000 euros –
est égal au produit du dépôt initial – 10.000 euros – par l’inverse du coefficient de réserve, i.e.
) Le nombre 10 est dit être le multiplicateur des dépôts.
1/ 0,1 10.=
On peut décrire ce processus de multiplication sous un angle légèrement différent. En
effet, la banque X a au départ octroyé un prêt de 9.000 euros à son client Ducon, qui a déposé
cette somme chez son banquier X. Ce dernier octroie un nouveau prêt à Durand pour un
montant de 8.100 euros, montant qui après avoir été déposé servira à accorder un nouveau
prêt de 7.290 euros et ainsi de suite. Le crédit initial de 9.000 euros devient ainsi :
9.000 8.100 7.290 90.000.+++="
Au total, la somme de 9.000 a été multipliée par 10, qui représente ainsi le multiplicateur des
crédits. (Comme auparavant cette valeur de 10 est égale à l’inverse du coefficient de réserve,
i.e. 1/ ) 0,1.
Cet exemple, quoique très simplifié, suffit cependant à montrer comment les banques
commerciales créent de la monnaie de crédit, de la monnaie scripturale. Un tel phénomène
est possible, parce que les banques en question ne conservent qu’une fraction de leurs dépôts
sous forme de billets – c’est leur encaisse, dit-on – et prête le solde à leurs clients, particuliers
ou entreprises.
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