14 1ndices | l’agefi | juin 2009 gestion de fortune marchÉ Risque émetteur Sauve qui peut ! S’il est une leçon que les consommateurs de produits structurés ont retenu de la faillite de Lehman Brothers, c’est bien le risque que représente l’émetteur de ces produits. Aussi, les acteurs du marché s’organisent et essaient de proposer des solutions efficientes pour limiter ce risque. Pierre-Yves Breton Tradition Produits Structurés Desk Suisse Sept mois... Sept mois que la banque d’affaires américaine Lehman Brothers a rendu les armes, créant une fracture profonde sur la planète finance. La myriade d’engagements et de sousengagements entre la banque et ses concurrents et partenaires mondiaux a déstabilisé les financiers du monde entier créant le sentiment que plus rien ne serait jamais comme avant. L’industrie des notes structurées, alors en plein essor, n’a pas échappé au marasme ambiant. Aveuglés par le bull market des années 2000, beaucoup d’investisseurs ont oublié un risque inhérent à la construction même de ces montages innovants : le risque émetteur. En effet, un détenteur de note structurée est classé au même rang de remboursement qu’un créancier obligataire dans le cas de la faillite d’un émetteur. Ainsi, l’investisseur qui a voulu jouer la hausse du SMI avec un produit à capital garanti émis par Lehman Brothers, se soucie finalement moins de l’évolution des actions suisses que de l’avancement de la procédure de liquidation des actifs de la banque américaine. Ces sept mois auront plongé les principaux acteurs du marché dans une réflexion visant à limiter voire supprimer le risque émetteur. Plusieurs solutions peuvent ainsi être aujourd’hui envisagées. Dissocier structureur et émetteur La première solution envisagée n’est pas nouvelle et a longtemps été l’unique apanage des banques de faibles notations. Il s’agit en effet de dissocier la banque qui va structurer la note de celle qui va émettre le papier. Prenons pour exemple une banque X de faible rating (BBB à A). Pour répondre à la volonté de ses clients de ne pas s’exposer directement à ce risque émetteur, elle pourra faire émettre ce produit par une autre entité et aller ainsi chercher des noms corporates voire même quasi-étatique, et atteindre des ratings de tout premier plan AA+ voire AAA. Le montage sera effectué au sein de la banque X mais la partie obligataire de la note sera issue d’un « swap » entre la trésorerie de X et celle de l’entité Y, afin de créer un produit dont le risque de crédit correspondra à celui de Y. Special Purpose Vehicule Il s’agit, ici comme ailleurs de transfert de risque. Pour aller plus loin, on a pu voir ainsi certains acteurs proposer des véhicules d’émissions (SPV – Special Purpose Vehicule) de plus en plus perfectionnés conçus à partir des leçons retenues suite aux défaillances bancaires récentes. Contrairement à un produit structuré, la partie garantissant le capital ne sera pas matérialisée par un zéro-coupon émis par une unique banque, mais pourra être composé d’actifs sélectionnés par l’investisseur, par exemple des obligations à taux fixe: le collatéral. L’intérêt est double : éviter les émetteurs bancaires en choisissant des signatures non financières, potentiellement plus conservatrices mais aussi utiliser ces collatéraux obligataires pour améliorer le funding de la note et libérer ainsi plus de valeur à investir dans la stratégie optionnelle. Ici, l’émetteur du produit ne sera ni la banque qui structure, ni le collatéral mais le SPV lui-même. Celui-ci, en outre, est chargé LE MÉCANISME DE NANTISSEMENT SPV FLUX À L’ÉMISSION Service assuré par Scoach et l’ASPS C’est de ce même mécanisme de nantissement et de SPV que la Bourse Suisse des Produits Structurés (Scoach) s’est inspirée afin de répondre de façon plus institutionnalisée à cette demande de protection. L’Association Suisse des Produits Structurés (ASPS), composée des émetteurs les plus actifs, et Scoach ont en effet réagi rapidement pour éviter une désaffection plus pro- Ce mécanisme organisé de nantissement implique dès l’émission la mise en gage d’actifs liquides auprès d’une chambre de compensation dont le fonctionnement et l’administration sont confiés à un organisme externe. fonde notamment de la part des caisses de pension. Ce mécanisme organisé de nantissement implique dès l’émission la mise en gage d’actifs liquides auprès d’une chambre de compensation dont le fonctionnement et l’administration sont confiés à un organisme externe, afin d’éviter tout conflit d’intérêt. En cas de faillite de l’émetteur, ces actifs sont liquidés et constituent un coussin de remboursement confortable pour l’investisseur. FLUX À MATURITÉ ADMINISTRATEUR COLLATÉRAL BANQUE A Swap 100 100 + Payoff VÉHICULE AD-HOC 100 Notes 100 + Payoff BANQUE A 100 de gérer quotidiennement ces actifs mis en gage afin que cette garantie de recouvrer 100 % du capital à maturité soit toujours assurée, via, telle une chambre de compensation, des appels de marge. Notes INVESTISSEUR L’Administrateur liquide les actifs au bénéfice de l’investisseur en cas de défaut Le coût de la protection Une fois encore, l’industrie des produits structurés a su réagir promptement pour proposer des solutions efficientes et qui correspondent aux attentes du marché suisse. Mais ces montages ont un coût. L’investisseur devra arbitrer comme il en a l’habitude avec le sous-jacent et ses barrières, le fameux ratio risque/rendement. Est-il nécessaire de payer 1 % à 2 % supplémentaire un produit émis par un SPV ou via la Bourse suisse, alors qu’on peut investir dans un produit émis par une banque quasi-nationalisée et qui paiera largement le fait de lui prêter de l’argent ? La question est essentielle et montre la diversification de plus en plus grande qu’offre le marché suisse des produits structurés. PDF compression, OCR, web optimization using a watermarked evaluation copy of CVISION PDFCompressor