suisse et que je n’aime pas les choux
de Bruxelles, je n’ai pas besoin de
justifier mon choix. “J’aime ; j’aime
pas : un point c’est tout !” Et personne
ne peut m’obliger à aimer les choux
de Bruxelles ! A en manger peut-être,
mais à les aimer jamais !
L’amour selon Dieu
La spécificité de l’amour selon Dieu
est qu’il n’est pas premièrement le
fruit de mes désirs. Il naît d’une parole
extérieure à ma sphère personnelle.
C’est une ferme invitation, un comman -
dement : “Tu aimeras ton prochain
comme toi-même1”. Je n’ai donc pas
le choix. Si je veux connaître Dieu et
reconnaître mon prochain, je dois
aimer ! En disant que j’aime le choco-
lat, aimer n’exprime pas d’abord une
Jésus le Christ ne dit pas qu’aimer Dieu
et le prochain sont choses faciles – si
c’était le cas, cela ne ferait pas l’objet
d’un commandement ! Il dit qu’il n’y a
pas d’autres voies pour vivre ensemble
que de désirer le bien de l’autre.
La loi régissant les rapports humains
dans la Bible affirme quelque chose
de fondamental à propos de l’amour
du prochain. Aimer le prochain, c’est
aussi adresser des reproches3. Oser la
confrontation, non pour l’élimination
du prochain, mais afin que la relation
ne soit pas gangrénée d’hypocrisie, de
ressentiment et pour finir, de haine.
Loin de l’amour guimauve qui
recouvre d’un voile pudique tout ce qui
fait question, la loi d’amour, selon
Dieu, préconise conscience et vérité.
Aimer en vérité
Merveilleuse vérité qui ose dire que le
reproche rend proche. Que le reproche
rapproche. Il est rare cet usage de
l’amour entre les êtres, où, au nom de
l’idéal communautaire, on ne trouve
pas d’autre façon d’être ensemble que
la fusion affective ou l’excommunica-
préférence, aimer ne dit pas une com-
plicité, une adhésion naturelle, une
affinité. Aimer, selon Dieu c’est fonda-
mentalement une reconnaissance de
l’autre. Cet autre qui est à la fois
comme moi et différent de moi.
Comme moi, il attend et espère qu’on
le reconnaisse ; autre que moi, il ne
peut être reconnu et respecté que dans
sa singularité. Le verbe aimer m’en-
seigne que l’autre est un mystère que
je ne saurais percer sans l’abîmer ou le
dénaturer.
Loin de l’amour guimauve
Vous connaissez l’expression quelque
peu affligeante : “Nous n’avons pas
d’atomes crochus”. Expression qui
justifie un peu trop vite le fait de
relations indifférentes entre deux
personnes.
Le commandement s’inspirant de
Dieu dirait plutôt : “Mettez des crochets
à vos atomes ! Faites pour l’autre ce
que vous souhaiteriez qu’il fasse pour
vous2. Respectez la parole d’autrui,
accueillez sa différence, même et surtout
quand elle vous dérange”.
Le verbe aimer ?
Le problème avec le verbe aimer, c’est
qu’il est usé jusqu’à la corde. On ne
sait plus vraiment ce qu’il signifie. On
préfère s’en tenir à sa force d’invoca-
tion qu’aux implications réelles qu’il
sous-entend.
On peut aimer la musique baroque, le
football et même son prochain ;
l’opéra, le vin, le calcul mental, les
pâtes et pourquoi pas Dieu ! Aujour-
d’hui, on aime, on kiffe beaucoup de
choses. Dieu et le prochain se kiffent
au même titre qu’un film de Clint
Eastwood ou qu’une descente en ski
hors piste. Mais alors dites-moi si
kiffer n’est pas aimer, qu’est-ce
qu’aimer veut dire ?
Pardonnez-moi d’être aussi trivial,
mais en disant que j’aime le chocolat
Chacun pourrait créditer cette déclaration d’un témoignage
personnel. Quand l’amour prend les commandes d’une vie,
d’une décision, il se passe toujours quelque chose d’étonnant,
d’unique, d’éternel. A moins qu’il ne s’agisse pas vraiment
d’amour…