matière d’information et de consentement, de la gynécologie
médicale.
La place de la gynécologie médicale est privilégiée dans ce
domaine pour trois raisons:
•
•la relation est assurée, car les patientes ne nous consultent
pas seulement pour un acte technique. La relation s’est établie
au fil des ans sur la base du dialogue et de la confiance;
•
•l’acte technique envisagé en accord avec la patiente sera dis-
cuté avec un confrère par l’intermédiaire d’un courrier, qui
inclura la copie de l’information donnée, tout en sachant que
ce dernier donnera, à son tour, une information similaire. La
patiente recevra donc une double information sur le même
sujet, par deux personnes différentes;
•
•l’information impose parfois la signature de la patiente,
comme dans le tritest de dépistage en début de grossesse.
Demeure toutefois le risque de l’incompréhension. Souvent, le
praticien pense avoir fait son travail objectivement, mais la
patiente ne l’a pas bien compris. Dans certains cas, deux expli-
cations, voire plus, sont nécessaires pour informer et, surtout,
pour être à peu près certain que l’essentiel, à défaut de la tota-
lité, a été compris.
Il existe parfois un fossé entre ce que la ou le gynécologue
pense avoir transmis et le vécu de la patiente. De la compré-
hension plus ou moins grande des explications du médecin par
la patiente naît l’incompréhension de cette dernière lors de la
survenue d’un résultat différent de celui escompté ou d’une
complication. Que dire aussi de l’incompréhension totale de la
famille qui, elle, n’a pas assisté à la consultation et ignore
l’information donnée?
C’est également dans ce sens que sont allés les propos de
Chantal Ramogida.
L’information doit être différente pour chaque pathologie.
Le consentement, bien souvent, est signé par la patiente sans
qu’elle analyse clairement ce qu’elle fait; elle pense ne pas
pouvoir faire autrement:
•
•le médecin le lui demande, donc elle le fait;
•
•elle n’ose pas demander de plus amples explications.
Le fossé est immense entre la patiente, désireuse que son pro-
blème soit résolu, et le médecin, qui tente de lui donner la
meilleure réponse.
L’intervention d’une philosophe était à ce niveau la bienvenue.
Anne Langlois a évoqué un autre aspect de l’information.
Informer est un devoir déontologique et téléologique, donc en
vue d’un objectif. Dans le cas présent, l’information doit per-
mettre d’obtenir un consentement libre et éclairé.
Étymologiquement, consentir, cum sentire, signifie sentir
ensemble, avoir une opinion ensemble.
L’information va permettre de:
•
•créer un univers commun de signification entre un patient et
un médecin en dehors duquel aucune prescription ne peut
avoir de réalité vécue pour la personne;
•
•créer une alliance thérapeutique ou, comme l’exprime la
Charte du malade hospitalisé, la participation à un choix;
•
•transformer le patient d’objet de soins en sujet de soins. Le
patient acceptera une prescription ou un traitement parce qu’il
en aura compris la nécessité.
L’information doit être réciproque, et le patient se doit de faire
confiance au médecin en l’informant complètement.
L’authenticité de la relation médecin-patient repose sur une
information claire et loyale qui permet, sur la base d’une
confiance réciproque, un consentement libre et éclairé à un
acte médical, mais aussi la liberté, pour le patient, d’exprimer
son refus et d’en discuter avec le médecin dans un dialogue
constructif et ouvert.
Gérard Lévy, représentant Mme Dominique Gillot, a essayé
d’exposer la pensée des autorités de tutelle:
“Au fil des ans, la société a évolué, la médecine non; de ce fait, la
pratique actuelle de la médecine n’est plus adaptée aux nouvelles
exigences de la société. Il est donc impératif qu’elle s’adapte.
Le tournant historique, en ce domaine, est l’affaire du sang
contaminé. La méfiance à l’égard du corps médical et la mon-
tée en puissance des associations de consommateurs ont fait
réfléchir la société et le corps médical. Maintenant, le nombre
de réunions comme celle-ci augmente et on y rencontre de
manière régulière les mêmes personnes. Cela exprime bien
qu’il existe une préoccupation, qui ne doit pas être dramati-
sante et qui doit faire réfléchir.
Dans un groupe social, l’ensemble des personnes qui compo-
sent ce groupe n’est pas parfait: c’est une vérité première.
Alors, première alerte, la multiplication des plaintes, qui a fait
prendre conscience au corps médical qu’il avait des devoirs.
J’ai toujours dit, et cela n’est pas agressif, que, pour un certain
nombre de médecins, la crainte du procès devenait la prothèse
de la conscience professionnelle. En fait, si tous les médecins
avaient une conscience professionnelle de qualité, ils ne redou-
teraient pas un procès.
L’arrêt Edrol est la prise de conscience par le corps médical
dans son ensemble qu’il doit y avoir une communication avec
les patients. Nombreux sont ceux qui ne le faisaient pas et que
cet arrêt interpelle.
Lors des multiples réunions des États généraux du cancer et de
la santé, les représentants des personnes malades, les malades
reviennent sur le manque de communication et d’information
de la part des médecins. Une prise de conscience en ce
domaine est indispensable. Les aléas dont on parlait précédem-
ment seront d’autant plus importants qu’on n’aura pas appris à
communiquer.
Communiquer est une véritable technique, qui ne s’improvise
pas. Il faut apprendre. Certains sont plus doués que d’autres.
À ce propos, abordons le plan gouvernemental de réformes,
dont l’apprentissage de la communication est un volet.
Notre devoir de formateur est de donner une bonne formation.
Ce n’est pas lorsque les mauvaises habitudes sont prises qu’il
faut les corriger; l’enseignement, c’est donner de bonnes habi-
tudes dès le départ. Il s’agit de donner une bonne formation
médicale et une bonne pratique de la communication.
Le deuxième point est la loi de modernisation du système de santé
et de la défense des droits des malades, qui comporte une série
de mesures qui ont d’emblée irrité beaucoup de médecins. La
communication de leur dossier aux personnes malades les inquié-
tait. Peu à peu, le corps médical s’est fait à l’idée que ce n’était
pas une arme, mais une façon de responsabiliser le patient.
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La Lettre du Gynécologue - n° 270 - mars 2002
GYNÉCOLOGIE ET SOCIÉTÉ