Le Cid Compagnie Sandrine Anglade Revue de Presse Théâtre du Blog,, Le Cid de Corneille, mise en scène de Sandrine Anglade Véronique Hotte (journaliste à La Terrase) / 23/01/2013 L’Est Républicain,, Le Cid Revisité avec brio Coline Ballay / 31/01/2013 Blog La Vie des Livres,, Le Cid de Pierre Corneille à la Comédie de Picardie Alexandra Oury / 10/02/2013 L’Aisne nouvelle,, Le vers cornélien sous un angle nouveau 01/03/2013 Courrier Picard, Ce Cid que l’on ne hait point Tony Poulain / 27/02/2013 Le Bien Public,, Le Cid et ses batailles dépoussiérés Guillaume Malvoisin / 20/0/2013 BSCNews,, Interview de Sandrine Anglade : L’Alexandrin au diapason de la batterie Par Julie Cadilhac / Novembre 2013 Mettre en scène Le Cid : Des rythmes de la batterie à l’éclat de la langue de Corneille : le pari réussi de Sandrine Anglade(extraits) Par Hélène de Saint Aubert, Ancienne de l’ENS, professeur en CPGE littéraire à Nîmes Les Traverses du Temps, Par Marcel Quillévéré Emission du 27 février 2013 Interview de Sandrine Anglade Pour écouter l’émission : http://www.francemusique.fr/emission/les-traverses http://www.francemusique.fr/emission/les traverses-du-temps/2012ete/guillaume-cornut-pour-la-reouverture reouverture-du-bal-negre-rue-blomet-paris-du-06 06-aout-2013-08 Théâtre du blog Posté dans 23 janvier, 2013 dans critique. Le Cid de Corneille , mise en scène de Sandrine Anglade. Un plateau nu; dans les hauteurs des cintres, sont accrochés des fanions rouges en bouquets – les couleurs de l’Espagne et de la suprématie d’un royaume fier. En dessous, trois grands mâts sans nulle voilure, des drisses suspendues, tournent sur eux-mêmes, ouvrant l’espace ou bien l’enserrant dans un jeu de tourniquet, frôlant le sol du port maritime. Le quai est couvert de copeaux sombres, de lanières coupées de cuir brun, tapis préparatoire inquiétant pour guerriers. À l’intérieur de ce volume singulier, à la fois intense et léger, résonnent les rythmes âcres et vigoureux du jazzman et batteur Nicolas Larmignat. Sa musique est à l’écoute des tensions de la tragi-comédie cornélienne : attente, suspense, angoisse, pressentiment malheureux des drames à venir. La pièce traite clairement de la question de la transmission et de l’héritage dans le passage des générations. Il y a ainsi, sage et raisonnable, le roi de Castille, Don Fernand (Gérard ©Alain Rauline Hardy) auquel l’Infante (Sterenn Guirriec), majestueuse, rend ses comptes filiaux de souveraine. Don Diègue (Jean-Paul Muel), fraise blanche au cou, grand serviteur du royaume : » Mon bras qui tant de fois a sauvé cet empire », est le père de Rodrigue (Damien Houssier), dont la destinée héroïque est en route, puisqu’il doit venger l’affront fait à son père par Don Gomez comte de Gormas (Laurent Montel) et père de Chimène (Géraldine Szajman), jeune fille dont Rodrigue est, par ailleurs et d’abord, l’amant. Don Gomez est un homme arrogant du royaume de Castille qui n’a pu obtenir le titre de précepteur du prince, dévolu à son rival plus âgé, Don Diègue qu’il a giflé. Ces portraits de sages dégagent une puissance incontestable : celle de l’expérience de la vie et du temps exploré. Pour les jeunes, c’est amour ou honneur mais les valeurs de l’honnête homme ont du mal à se conjuguer… C’est l’honneur que préfère Rodrigue ; Chimène, elle, pencherait pour l’amour. À moins que ce ne soit l’inverse… Dans cette œuvre mythique, il y a des scènes de violence baroque, des fresques et des peintures vivantes, offertes au public qui ne les avait jamais vues traités comme cela sur une scène. Comme le duel de Rodrigue et de Don Gomez, superbement chorégraphié par le maître d’armes Christophe Mie, et le récit du combat du jeune héros contre les Maures orchestré avec un soin précieux, sous une pluie de pétales rouges sang tombé des fureurs d’un ciel d’orage. L’alexandrin provocateur de vérité, est ici déroulé avec patience et rigueur, soutenu par la libre résonance de la batterie. Pierre-François Doireau, un gentilhomme castillan , narrateur joue sa partition avec flamme. Un travail raffiné à la manière de Sandrine Anglade, créé à la Maison de la Culture de Nevers et de la Nièvre. Véronique Hotte (Journaliste à La Terrasse) l ’ Es tRé publ i c a i n me r c r e di 3 1j a nv i e r2 0 1 3 La vie des livres - Alexandra Oury Dimanche 10 février 2013 avait lieu à Amiens la dernière du Cid de Pierre Corneille, créée à la Comédie de Picardie par Sandrine Anglade. Classique parmi les classiques, Le Cid est une tragi-comédie en cinq actes et en vers, représentée pour la première fois en 1637 dans une version que Corneille modifiera par la suite. Chimène et Rodrigue s'aiment et sont promis l'un à l'autre. Mais don Diègue, père de Rodrigue, est choisi par le roi pour devenir percepteur du prince. Don Gomez, comte de Gormas et père de Chimène, en éprouve une vive jalousie. Lors d'une altercation avec son vieux rival, il lui donne un soufflet auquel don Diègue, trop âgé, n'est pas en mesure de répondre. Humilié, il demande à son fils de venger son honneur blessé ("Rodrigue, as-tu du coeur ?"). Le dilemme est cornélien pour le jeune amoureux. Soit il accepte et perd l'amour de Chimène en combattant son père, soit il refuse la vengeance et laisse la honte s'abattre sur sa famille. Une honte qui le rendra indigne d'être aimé... Il fait le choix de l'honneur, et tue le comte en duel. Chimène, effondrée, fait taire ses sentiments pour Rodrigue et demande justice au roi. Le jeune homme, son devoir accompli, offre à Chimène de lui ôter la vie. Elle ne peut s'y résoudre... Pauvre Chimène, écartelée entre l'amour qui la dévore, et la fidélité à son père qui lui impose de rejeter - et faire châtier - son meurtrier ! Comment respecter nos parents, leur mémoire, leur volonté ? Quels sacrifices consentir pour eux ? Faut-il obéir au devoir quand l'amour est en jeu ? Rodrigue à don Diègue : "Mon bras pour vous venger, armé contre ma flamme, par ce coup glorieux m'a privé de mon âme. Ne me dites plus rien ; pour vous j'ai tout perdu : ce que je vous devais, je vous l'ai bien rendu." Le jeune homme n'a pas manqué de courage pour honorer son père. C'est grâce au même courage qu'il reconquiert Chimène. Après de nombreux rebondissements, l'amour triomphe enfin... et l'honneur reste sauf. Sandrine Anglade a pris le parti d'une mise en scène épurée qui sert finement le texte cornélien. Sur scène, une batterie rythme régulièrement les répliques, souligne ou renforce l'intensité de certains échanges. Elle accompagne les combats. Question décor, la sobriété est de mise. Des grilles mobiles au centre du plateau, quelques chaises sur lesquelles sont assis les comédiens qui ne sont plus en scène, une lumière très soignée. La diction de l'alexandrin et le jeu des acteurs sont impeccables. Sans ostentation, ils rendent palpables leurs déchirements intérieurs. Les émotions et les troubles sonnent juste. Le théâtre versifié de Corneille peut-il encore nous parler en 2013 ? Résolument, oui. THEATRE / Le vers cornélien sous un angle nouveau Publié le vendredi 01 mars 2013 à 14H00 SAINT-QUENTIN - « Le Cid de Corneille sous un angle inédit, où la richesse et la contemporanéité du texte sont mises en exergue », voilà ce que propose la compagnie Sandrine Anglade qui sera au Splendid de SaintSaint Quentin le 6 mars. Sandrine Anglade concentre concentre en effet l'histoire d'une des pièces les plus célèbres du répertoire classique pour faire entendre son intimité et le rythme incomparable du vers cornélien. Enfants promis en mariage, pères offensés, duels qui mènent à la mort et obéissance au Roi. Tout, chez Corneille, va mener Chimène et Rodrigue à s'aimer, se séparer et se retrouver. La metteure en scène resserre le propos de la pièce sur les notions de filiation et de transmission, comme pour donner à voir la déchirure des sentiments de plus près. Si les vers des tirades sont restés célèbres, Sandrine Anglade et ses comédiens nous les font entendre de telle manière qu'ils nous paraissent inouïs. Sur scène, le batteur Nicolas Larmignat accompagne les sentiments portés à incandescence, les déchirures toujours vives. La musique se fait l'écho de la catharsis des personnages et des spectateurs, réunis dans une proximité rare et une intimité sensible. Une nouvelle version à voir. PRATIQUE : Le Cid Mercredi 6 mars, 20 h 30. Le Splendid. Tarifs : 5 à 20 €. Rens. 03 23 62 36 77. L'Aisne Nouvelle (http://www.aisnenouvelle.fr/article/culturaisne/theatre-le-vers-cornelien-sous-un-anglenouveau) Ce Cid que l'on ne hait point PUBLIÉ LE 27/02/2013 Par TONY POULAIN N | THÉÂTRE | Joué en janvier à la comédie de Picardie, le Cid revient en mars à Saint-Quentin Quentin et avril à Abbeville. Attention : ça cogne. Écrire encore que le texte du Cid est sublime : on tremble à l'idée d'enfoncer une porte ouverte. Pourtant, Alors oui, ces cinq actes en alexandrins tiennent de la pure mélodie. Il n'est nul besoin de hanter les théâtres à longueur d'années pour y retrouver quelques-unes quelques des répliques les plus connues du répertoire français, de « Va, cours, vole et nous venge... » à « nous partîmes cinq cents ... » en passant par « ô rage, ô désespoir, ô vieillesse ennemie». Le Cid, c'est le dilemme de Rodrigue, qui aime Chimène mais tue le père de celle-ci, Don Gomès, afin de venger son propre géniteur, Don Diègue, offensé par Gomès. Il y est question de passion, d'honneur, de désespoir, de raison d'État aussi. On pleure, on frémit ; on sourit également, car Pierre Corneille a écrit une tragi-comédie, et non une tragédie, sur un sujet espagnol, et non antique. En 1637, cette audace lui valut bien des tourments. Percussions On imagine l'autre dilemme, quand un jeune metteur en scène, Sandrine Anglade, s'attaque à un tel monument. Jouer Le Cid en 2013 impose à sa compagnie d'aérer toute trace de naphtaline sans dénaturer un objet précieux, qui perdrait sa valeur à être ébréché. Elle choisit de concentrer le propos, en réduisant le nombre de personnages. Deux gouvernantes et deux gentilshommes passent à la trappe - il faut un peu de temps pour comprendre que l'Infante interprète deux voix - et un batteur s'invite sur scène, où reste assis chaque comédien entre deux interventions. Concentration, là encore. On a trop vu de gadgets inutiles encombrer des plateaux pour ne pas s'enthousiasmer de cette trouvaille : les percussions servent de révélateur aux sentiments exacerbés. On sort des deux heures de représentation un peu étourdi, presque KO. Ce Cid frappe au cœur. TONY POULAIN (http://www.courrier-picard.fr/loisirs-pratique/ce-cid-que-l-on-ne-hait-point-ia220b0n5719) THÉÂTRE. - LE CLASSIQUE DE CORNEILLE CORN INAUGURE LA NOUVELLE UVELLE SAISON DE L’ABC, À DIJON LE 8 OCTOBRE.Le OCTOBRE.Le Cid et ses batailles dépoussiérés le 20/09/2013 à 05:00 | Guillaume Malvoisin Sandrine Anglade revisite le Cid en profondeur. Alain Rauline Sandrine Anglade promet une relecture intime et batailleuse pour redonner du souffle à un texte trop souvent coincé sous les lourdeurs académiques. Trop facilement coincés dans les replis de velours pourpre et les cliquetis de bretteurs d’opérette, les vers que Corneille a ciselés pour Le Cid méritent d’être relus, revisités et peut-être refaçonnés. C’est un peu le travail auquel s’est engagée la Compagnie Sandrine Anglade avec cette version donnée début octobre au Théâtre des Feuillants. Pas vraiment de raison de se méfier de ce classique, porteur d’interrogations qui valent encore aujourd’hui comme celles de l’union de l’honneur et de l’amour, celle de la violence des conflits, qu’ils soient intérieurs ou armés sur un champ de bataille. Sandrine Anglade a pu montrer à Dijon, avec L’Oiseau Vert ou encore l’Amour des Trois Oranges , qu’elle tient à ces histoires de théâtre qui sous couvert d’aventures, de sortilèges et de récit colorés, nous propulsent au cœur des questions qui font de nous des hommes et des femmes. Avec Le Cid , le travail de la compagnie n’oublie pas la force du récit théâtral, mais descend sans doute un peu plus profondément dans l’intimité élégante. Le récit, d’abord. Empruntons le résumé du Cid aux notes laissées par la compagnie : « Don Diègue et le Comte Don Gomès ont décidé d’unir leurs enfants Rodrigue et Chimène, qui s’aiment. Mais le comte, jaloux de se voir préférer le vieux Don Diègue pour le poste de précepteur du prince, offense ce dernier en lui donnant un soufflet. Don Diègue, affaibli par l’âge, remet sa vengeance entre les mains de son fils Rodrigue qui, déchiré entre son amour et son devoir, finit par écouter la voix du sang et tue le père de Chimène en duel. Chimène tente de renier son amour pour demander au roi la tête de Rodrigue. L’attaque du royaume par les Maures donne à Rodrigue l’occasion de prouver sa valeur et d’obtenir le pardon du roi. Plus que jamais amoureuse de Rodrigue devenu un héros national, Chimène reste sur sa position et obtient du roi un duel entre don Sanche, qui l’aime aussi, et Rodrigue. » La suite de ce récit baroque est en scène, présentée avec la même économie de moyens que le reste. Le plateau est quasi vide pour permettre aux sentiments et aux corps de gagner en expressivité. Huit comédiens seulement portent cette fresque sur leurs épaules, laissant venir le spectateur au plus proche de la narration en scène. Anglade ne tente pas une version simpliste et réduite mais au contraire embarque le spectateur dans une complicité avec ce qui se joue en scène, joignant à la parole des comédiens un batteur. Le musicien peut alors en direct renforcer la puissance et la violence des combats et des luttes sentimentales, entraîner celui qui regarde dans un conte tragique haut en couleurs. Pratique Le Cid , mardi 8 octobre à 20 heures au Théâtre des Feuillants. Tarifs de 5,50 à 28 €. (http://www.bienpublic.com/grand-dijon/2013/09/20/le-cid-et-ses-batailles-depoussieres) Sandrine Anglade : l'alexandrin du Cid au diapason de la batterie – Par Julie Cadilhac - Bscnews.fr/ Crédit-photo: DR/ Metteur en scène pour le théâtre et pour l'opéra, Sandrine Anglade a choisi de monter une pièce épique du répertoire : Le Cid de Pierre Corneille. Elle a décidé de s'inspirer pour la mise en scène de la première version de 1637, de synthétiser les rôles en supprimant notamment les rôles féminins à l'exception de Chimène et de l'Infante, de choisir un décor qui exprime le mouvement et ,enfin, d'ajouter une batterie qui accompagne le rythme de l'alexandrin. Rencontre en mots sensibles et pertinents. Pour commencer, pourriez-vous nous parler de la direction suivie par votre compagnie, de ses enjeux esthétiques? Faire un théâtre à la fois musical et moderne, est-ce bien cela? Metteur en scène pour le théâtre et pour l’opéra, j’aime à traverser les frontières, à transgresser les genres. La ligne artistique de la compagnie s’est construite autour de ce besoin de faire se rencontrer des mondes. Ce que j’aime au théâtre ou à l’opéra, c’est inventer des objets, rêver à ce que le plateau offre comme possibilité de développer la poésie intrinsèque à l’œuvre elle-même. Nous aimons à revisiter le répertoire et l’ouvrir à l’écriture contemporaine du plateau. Vous avez monté essentiellement des textes classiques : est-ce une question de hasards ou un choix affirmé? Je n’ai pas monté que des textes classiques. J’ai travaillé sur des textes contemporains aussi : Pierre Michon, Jean-Daniel Magnin, et aussi avec Nathalie Fillion. Ce qui me guide c'est la qualité de la matière apportée par le texte, comment elle laisse des vides organiques pour l’organisation d’une nouvelle écriture qui est celle et exclusivement celle du plateau et de la rencontre avec le public. Je pense qu’un texte n’est jamais classique parce qu’il est toujours à inventer dans la contemporanéité de la représentation. Un regard de metteur en scène est un geste artistique, mais aussi une façon personnelle de dire le monde. Comment est venue l'idée d'un Cid accompagné par une batterie? L’alexandrin est une forme métrique qui impose une certaine ligne mélodie, un certain souffle et une articulation sonore du texte qui est musique. Y adjoindre une « musique de scène » n’avait pas de sens. La batterie rythme et sous-tend la mélodie de l’alexandrin, comme une pulsation interne tantôt insidieuse tantôt explosive. Comment avez-vous travaillé avec Nicolas Larmignat? Aviez-vous une idée précise de ce que vous cherchiez à créer comme atmosphère musicale ou vous avez travaillé ensemble au cours d'improvisations? Nous avons essentiellement procédé par improvisations, comme autant de dialogues entre l’acteur et la batterie, tentant d’éviter le pléonasme, cherchant des rencontres ou des sonorités disjointes. La batterie est aussi utilisée dans un sens plus « spectaculaire » notamment pour l’accompagnement de tous les combats. L'instrument peut être entêtant…est-il présent en continu dans la pièce? par touches? il préside simplement les duels? Il est présent de temps à autre. Il n’est pas entêtant car Nicolas n’utilise pas son instrument de façon volontariste et poussive. Le contact de l’instrumentiste avec sa batterie est sensuel. Elle est plus une nappe sonore, une vibration, un battement de cœur. Les moments d’explosion sont très « ciblés ». Il n’y a jamais de saturation à l’écoute. Vous avez travaillé également avec un maître d'armes…parce que l'illusion risque de disparaître lorsque le duel manque de crédibilité? On n’improvise pas des combats d’épée. Si l’on décide de les mettre en scène, il faut nécessairement faire appel à un spécialiste. Simplement parce que les coups portés sont de vrais coups. Si tout n’est pas calé précisément les acteurs sont en danger. Diriger des combats, c’est comme faire une chorégraphie. Seul un maître d’armes a ce savoir faire. Est-ce la première fois que vous vous "attaquiez" à Corneille en mise en scène? Qu'est-ce qui vous séduit tout particulièrement dans sa dramaturgie? J’avais un grand désir d’aborder la langue de Corneille. Elle est heurtée, archaïque, à l’opposé du lyrisme de Racine. Il y a de plus dans le Cid, un vrai élan de jeunesse, une fougue que j’aime profondément et qui est pour moi un plaisir de théâtre. L’énergie. Et puis, il y avait ce rôle de Chimène. Une femme au cœur du monde des hommes qui tente d’imposer en vain une autre lecture du monde : la république du sentiment contre la raison d’état, le code du devoir. Qui avez-vous choisi pour interpréter Rodrigue, Chimène et Don Diègue? Comment les imaginiez-vous? Et de quelles "qualités" devaient disposer les comédiens qui les interprèteraient? N’importe qui ne peut pas porter l’alexandrin cornélien. On doit être sensible et savoir dire la poésie de la langue, faire entendre la langue pour faire entendre un état, et non jouer ou se mettre dans un état. C’est une dimension de jeu très particulière. Il faut aussi avoir un registre de voix, être capable de travailler sur une certaine étendue vocale pour retranscrire toutes les facettes de cette musicalité de l’alexandrin. Damein Houssier qui joue Rodrigue est un acteur que j’affectionne particulièrement. Le projet repose beaucoup sur lui, Rodrigue inattendu. Enfin, travaillez-vous sur d'autres créations en ce moment? Après Corneille et son Cid, quelle pièce vous tenterait? Pour l’instant, je travaille sur un Cenerentola de Rossini, mais pour le théâtre, mon envie est travailler sur un texte contemporain pour les petits et les grands . L’histoire d’un Roi nomade : Le Roi sans terre de Marie-Sabine Roger. Une très belle fable que je souhaite porter au plateau avec un acteur et un musicien, où l’image vidéo et de la lumière jouerait un rôle importante. - See more at: http://www.bscnews.fr/201311203285/Cote-planches/sandrineanglade-l-alexandrin-du-cid-au-diapason-de-la-batterie.html#sthash.u2jCEXl2.dpuf METTRE EN SCENE Le Cid Des rythmes de la batterie à l’éclat de la langue de Corneille : le pari réussi de Sandrine Anglade Par Hélène de Saint Aubert Ancienne élève de l'ENS, Agr. Lettres, Doct. es Lettres Let. Sup. et Pr. Sup., Lycée Daudet, Nîmes Extraits Un Cid jubilant, glorieux, rythmé et conquérant, comme on aimerait en voir plus souvent : voilà ce que nous offre la mise en scène de Sandrine Anglade, dont le choix s’est porté sur la version la plus fougueuse de la pièce, celle de 1637. C’est à une résurrection de la langue de Corneille que nous convie l’alliance inattendue de la batterie et du verbe le plus emphatique du Grand Siècle : alliance audacieuse, mais non contre-nature, tant il est vrai que, de scène en scène, s’expriment toujours mieux le brio, le génial artifice et la puissance vitale hors-norme de la langue de Corneille. La batterie anime le texte, commente, double en contrepoint, prolonge, exemplifie, moque parfois, rend admirable le plus souvent ; bref, elle sert toujours une écriture qui, à force d’être bordée d’un écrin de silence et de son, triomphe de par sa propre puissance charnelle. Ce pari audacieux et réussi semble s’enraciner dans un constat implicite : le vers de Corneille est plus qu’aucun autre d’essence artificielle et opératique ; chercher le naturel serait l’erreur fatale, il convient donc de célébrer cette langue et de se hisser à la hauteur de ses rythmes endiablés. Aussi les acteurs s’enfoncent-ils pour la plupart dans la musicalité du texte, l’articulation, le phrasé de chaque vers, pour partager avec le public une expérience physique et rythmique : n’est-ce pas exactement ce que présuppose la partition du Cid ? […] Cet artificialisme se poursuit dans un choix plus contestable sur le fond, mais non moins fécond in fine : supprimer les personnages féminins — gouvernantes-confidentes —, hors Chimène et l’Infante, pour se recentrer sur ces deux figures opposées. Situé hors-jeu, assis au fond de la scène avec un micro, un acteur récite les répliques d’Elvire, sans que celle-ci soit physiquement présente : il y a bien un texte, mais sans impersonation. C’est assumer le fait que le confident, dans le théâtre du Grand Siècle, n’est pas tout à fait un personnage : tel un chœur, il se pose en écho, 2 réplique, conscience, surmoi ou miroir d’un débat intérieur, bref, en pure voix. Amplifiée et déformée par le micro, cette voix du chœur-confident possède paradoxalement une portée supérieure à celle que nous lui connaissons habituellement, parce qu’elle est ainsi rendue à sa fonction dramaturgique véritable. Admirablement dit et articulé, ce texte au micro participe ainsi à plein aux fastes langagiers décrits précédemment. […] Quand tous les personnages reprennent en chœur le récit de la lutte de Rodrigue avec les Maures et que le Cid invite le public à s’associer à la proclamation de la tirade, la jubilation s’empare du spectateur : on remercie le metteur en scène de mettre ainsi en valeur la nature chorale et collective de ce morceau de bravoure (« Nous partîmes cinq cents », « nous fait voir trente voiles », « Notre profond silence », « Nous nous levons alors, et tous en même temps », etc.). Et on lui sait gré d’avoir pressenti que le public se plaît peut-être davantage à réciter qu’à entendre ces vers très — trop — connus. On perçoit chez Sandrine Anglade le souci d’actualiser le texte sans jamais le trahir, de le faire passer charnellement auprès d’un public manifestement invité à en jouir, de le lui communiquer avec jubilation et de faire du théâtre cette fête collective qu’il est profondément. Tenter d’unir à ce point une salle dans la pratique collective d’une diction commune, pour le plaisir du texte et du sentiment victorieux qu’il véhicule, est sans doute pousser au plus loin l’expérience du théâtre. Pour reprendre des termes qui qualifient le héros cornélien, on peut donc dire de cette mise en scène qu’elle est foncièrement généreuse et qu’elle a du cœur — du courage, de l’audace. On notera enfin un vrai sens du rythme et de la tension dramatique — le combat entre don Gomès et Rodrigue dure, et entrecoupe plusieurs scènes — et la présence d’un décor mobile et polymorphe, qui découvre au fil de la pièce ses multiples potentialités : fixées à trois grands mats d’aluminium, des drisses mobiles strient l’espace — prison pour les amants séparés, armées pour Rodrigue dans son combat final, qui constitue l’un des clous du spectacle ; des lumières stroboscopiques se déchaînent au rythme de la batterie pendant que pleuvent des chiffons rouges agités par le vent, au plus près des postulats baroques de Corneille, quand il préfère, dans l’Argument d’Andromède, « satisfaire la vue par l’éclat et la diversité du spectacle », plutôt que « de toucher l’esprit par la force du raisonnement ». Ce pur moment de spectacle et de bruit est particulièrement saisissant. […] On l’aura compris, le Cid de Sandrine Anglade est une franche réussite : un vrai bonheur de spectateur, avec toute la gratitude qui s’ensuit. Hélène de Saint Aubert, octobre 2013