ses compétences. Pour la France comme pour la RFA, la construction européenne doit aboutir à a
constitution d'une véritable puissance politique. Mais la nature de cette construction fait l'objet de
divergences.
La vision française, portée par le général De Gaulle, envisage une Europe forte dominée par la
France, basée sur des accords entre États et non sur des institutions supranationales. De septembre
1965 à janvier 1966, la France pratique la « politique de la chaise vide » en cessant de faire siéger
les représentants français à la Commission européenne (ce qui paralyse le fonctionnement de la
CEE, basé sur la règle de l'unanimité), afin d'empêcher un projet d'union politique qui octroierait plus
de pouvoir à la Commission et au Parlement et qui étendrait la pratique du vote majoritaire. La
France finit par obtenir satisfaction avec le compromis de Luxembourg, qui permet à un État
d'opposer son veto à toute décision communautaire menaçant ce qu'il considère comme ses intérêts
vitaux.
Mais la vision gaullienne d'une « Europe des patries » se heurte à la vision des autres pays, en
particulier la RFA, qui veulent une Europe plus fédérale. Tiraillée entre ces deux visions,
l'approfondissement de la construction européenne avance cahin-caha, sur la base de compromis
accordant des avantages aux États réticents en échange de leur soutien à la poursuite de cet
approfondissement. La France obtient une PAC particulièrement généreuse pour l'agriculture
française. Le Royaume-Uni obtient le « chèque britannique » en 1984 (réduction de la contribution
financière britannique au fonctionnement de la CEE).
Deux nouvelles institutions sont créées : un Conseil européen des chefs d’État et de
gouvernement qui fixe les grandes orientations et un Parlement Européen élu au suffrage
universel pour 5 ans à partir de 1979.
L’Acte Unique Européen (1986) renforce quant à lui l'approfondissement de la construction
économique. Le Marché commun déjà existant (pas de frontières douanières dans la CEE) est
complété par la création d'un marché unique (les marchandises, les hommes, les capitaux circulent
librement). Il remplace la règle du vote à l'unanimité par la règle du vote à la majorité dans de
nombreux cas, pour éviter les blocages.
Enfin, le traité de Maastricht (1992) donne naissance à l'Union Européenne, « union économique,
monétaire et politique », dont les compétences sont bien plus larges que celles de la CEE qu'elle
remplace : coopération judiciaire, création d'une union monétaire (futur euro), création d'une
citoyenneté européenne se superposant aux citoyennetés nationales,...
C) 1989-2012 : un chantier inachevé
1- l'élargissement se poursuit
La chute du bloc de l'Est en 1989-1991 a de nombreuses conséquences pour l'UE qui encourage la
transition des pays d'Europe de l’Est vers la démocratie libérale et l'économie de marché :
réunification de l'Allemagne qui augmente son poids politique et économique dans l'UE (1990),
adhésion de pays neutres pendant la Guerre froide (Autriche, Finlande, Suède, 1995), adhésion de la
majorité des pays d'Europe centrale et orientale entre 2004 et 2007.
Cet élargissement de l'Union Européenne oblige à une réflexion sur les institutions et leur
fonctionnement, car elles n'ont que peu changé depuis l'époque de l'Europe des Six et sont
inadaptées à un fonctionnement à 27 (unanimité plus difficile à trouver).
2- la maturation du projet politique
Après le traité de Maastricht, le projet politique européen piétine. Les traité d'Amsterdam (1997) et de
Nice (1999) tentent d'améliorer le fonctionnement de l'Europe mais ne réalisent que des ajustements
marginaux. Après le rejet du projet de constitution européenne lors des référendums français et
néerlandais, le traité de Lisbonne (2007) est le dernier traité révisant les institutions de l'Union
Européenne. Mais il ne met pas fin à leur complexité, au déficit démocratique qu'elles présentent, ni
aux risques de blocage.
Enfin, il faut remarquer que la construction du projet européen n'a pas réellement suscité de
sentiment d'adhésion au sein de la population européenne. Les élections au parlement européen
sont les élections où l'abstention est la plus forte. Au sein de la population européenne, le sentiment
d'appartenance nationale reste infiniment plus fort que le sentiment d'appartenance européen.