ma petite entreprise de soins » : une clinique infirmiere

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Fédère FERGA, Laurent PELAPRAT, Patrick TOUZET
« MA PETITE ENTREPRISE DE SOINS » : UNE CLINIQUE INFIRMIERE
INDIVIDUELLE ET GROUPALE
Présentation orale de 20 mn
1 INTRODUCTION
Notre propos va consister à vous présenter un soin psychiatrique qui utilise un
médiateur thérapeutique, le « bricolage », la restauration de domiciles. Cette clinique du
quotidien s’adresse à des malades atteints de troubles psychiques sévères, elle préserve la
singularité de chacun. Chaque patient à une place et un emploi du temps « sur mesure », tout
en considérant que chaque sujet est un être social, ce en quoi la dimension groupale de
l’activité doit soutenir le « vivre-ensemble ».
Nous allons pour commencer, décrire brvement le contexte dans lequel s’exerce
cette clinique.
Le Centre Hospitalier les Murets
Le Centre Hospitalier les Murets est un Etablissement Public de Santé qui couvre les
besoins en santé mentale des patients adultes du nord-est du Val de Marne, département d’Ile
de France, soit environ 326 000 habitants sur 14 communes.
Il comprend :
- 5 secteurs de psychiatrie générale
- 1 unité de soins de longue durée destinée aux patients psychiatriques vieillissants
- 1 centre d’addictologie
- 1 service de soins de suite et de réadaptation
- 1 institut de formation en soins infirmiers.
Le pôle 94G02
Le pôle 94G02 ou 2e secteur couvre les besoins en soins psychiatriques de 3 communes :
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- Bry sur Marne
- Nogent sur Marne
- Le Perreux sur Marne.
Soit une population de prés de 80 000 habitants.
Le dispositif du 2e secteur comprend :
- Une unité d’hospitalisation complète
-1 CMP au Perreux
- 1 CMP à Nogent avec 1 CATTP, 1 équipe de soins à domicile
- 1 hôpital de jour
- 1 foyer post-cure.
Le CATTP (Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel)
L’arrêté du 14 mars 1986 « relatif aux équipements et services de lutte contre les
maladies mentales, comportant ou non des possibilités d’hébergement », précise les missions
des différentes structures du dispositif de secteur. Pour le CATTP : Des centres d’accueil
thérapeutique à temps partiel visant à maintenir ou à favoriser une existence autonome par
des actions de soutien et de thérapeutique de groupe.
Présentation de l’activité « Arc en Ciel » :
Arc en Ciel est un atelier du pôle 94G02 qui s’inscrit dans le cadre des autres
propositions du CATTP. Deux infirmiers sont affectés à temps plein à cette activité, dont le
double objectif est l’aide à la réinsertion et le maintien au domicile de patients dont le mal-
être et l’isolement, conjugués à leur manque de moyens financiers ont contribué à mettre à
mal leur espace de vie. Pour mener à bien cette mission, le médiateur utilisé est la restauration
de logements. Cette activité s’adresse à toute personne en soins sur l’un des 5 secteurs du
Centre Hospitalier les Murets. En moyenne, une dizaine d’appartements par an sont remis en
état par le groupe. Il faut, pour bien comprendre distinguer les patients qui participent à
l’atelier et ceux qui bénéficient des prestations du groupe.
Historique : de la naissance de cette activité à sa forme actuelle.
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L’atelier thérapeutique « Arc en Ciel » est né en 1988, alors que dans le service, les
activités d’ergothérapie étaient essentiellement féminines. Une partie des hommes hospitalisés
au long cours souffraient de désœuvrement. Un soignant ayant exercé auparavant la
profession de peintre en bâtiment a eu l’idée de faire profiter de son expérience à ces patients.
Ainsi est né dans un pavillon désaffecté de l’hôpital, l’atelier d’ergothérapie « Plâtre et
Peinture ». Il permettait la manipulation de matériaux alors peu utilisés en ergothérapie (la
peinture, le plâtre, l’enduit, le papier peint…). Mettre entre les mains de personnes
hospitalisées des outils pouvant être dangereux, était à l’époque assez révolutionnaire !
Suite aux propos de patients, énonçant que ce n’était pas une activité « pour de vrai »,
le projet a évolué, jusqu’à aller au domicile de malades pour de vrais travaux. Arc en Ciel
prenait là une autre dimension, passant ainsi de l’occupationnel au thérapeutique et
permettant également aux patients de participer à un mouvement de solidarité.
L’évolution du « profil » des patients :
Lorsque l’activité a débuté, elle s’adressait à des hommes hospitalisés stabilisés,
chroniques et, chronicisés par l’institution. Il s’agissait de malades psychotiques dont la
symptomatologie était « discrète » et de patients alcooliques. Un quart de siècle plus tard, le
groupe est ouvert autant aux femmes qu’aux hommes et, ces derniers proviennent de toutes
les unités de soins du service. Si la symptomatologie doit permettre la possibilité d’être en
groupe, bon nombre de participants ont néanmoins des troubles productifs. Ces patients
présentent majoritairement des troubles psychotiques ou des troubles graves de la
personnalité.
La place de l’association « Vivre en ville » par rapport à l’institution hospitalière.
« Arc en Ciel », s’inscrit dans le dispositif du secteur, c’est un atelier du CATTP
mais, le fonctionnement spécifique de celui-ci a supposé un « montage » impliquant
l’association du secteur « Vivre en Ville », dont les objectifs sont de permettre aux patients
du secteur l’accès au logement et, de participer à la vie culturelle.
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Pour un chantier, il faut acheter les matériaux, même s’ils sont ensuite à la charge du
bénéficiaire. Il y a également le travail effectué par les membres du groupe. La valeur de ce
travail est symbolisée par un coût financier, même si ce dernier est sans commune mesure
avec les tarifs dune entreprise. Mais, donner une valeur financière c’est aussi inscrire ce soin
dans la «vraie vie » et non dans le seul microcosme hospitalier. L’association permet en effet
une souplesse et la manipulation d’argent nécessaire à cette activité thérapeutique, ce que
l’institution hospitalière ne permet pas.
La valeur du travail effectué et la place du séjour thérapeutique annuel.
Nous avons évoqué la valeur du travail mais, comment restituer à chacun le fruit de
son labeur puisque nous évoluons dans une structure de soins ? Nous ne pouvons donner à
chacun de la « monnaie sonnante et trébuchante » alors, après chaque chantier le groupe
partage un repas dans un restaurant et puis, chaque année est organisé unjour thérapeutique
d’une semaine, financé par Arc en Ciel. Après avoir partagé des efforts sur des chantiers, le
groupe va partager des loisirs et des activités. Il existe alors une dialectique travail, loisirs,
comme pour la plupart des individus.
En 2010, nous avons organisé un séjour extraordinaire en Guadeloupe pour lequel le
temps de préparation, et le montage financier nous ont demandé force et patience. Cette ane
là, les patients ont été impliqués activement dans l’organisation qui n’était plus la seule affaire
des soignants.
2 Présentation d’une vignette clinique : Me. F.
De son histoire, nous savons que Me F. est née en 1958, qu’elle est issue d’une fratrie de 7
enfants, que ses parents se sont séparés alors qu’elle avait 7 ans et, que son père était
alcoolique et violent. Sa mère aurait fini par le mettre dehors. Ce père se serait clochardisé.
Me F. n’aurait plus eu de contact avec lui.
Elle a été mariée, a 3 enfants, 2 filles et un garçon. Elle dira plus tard que son fils est un
enfant de la réconciliation à la sortie de prison de son mari et que sa fille cadette est un
accident suite à une ivresse de ce mari !
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Sa 1ère hospitalisation intervient en 1991, elle est alors âgée de 33 ans. Elle est hospitalisée
sous contrainte à la demande de son mari, suite à une T.S. Elle présente un état de tristesse
avec une anorexie grave, elle n’adhère pas aux soins.
Elle divorce en 1995, elle obtient la garde des enfants, mais rencontre des difficultés à
s’en occuper. Cela se traduit par une recrudescence des symptômes délirants et des
hospitalisations. Les tensions et conflits sont fréquents avec ses enfants. La fille ainée quitte le
domicile à sa majorité, les deux autres sont confiés rapidement à son ex mari. Les relations
avec le reste de sa famille se distendent puis s’arrêtent. Les hospitalisations se multiplient et
leur durée augmente allant jusqu’à une année.
En 1999, son ex mari se suicide, elle interrompt une hospitalisation pour s’occuper de ses
enfants âgées de 8 et 11 ans. Une prise en charge ambulatoire intensive est mise en place
(CMP, HAD et HDJ). Une curatelle est mise en place.
Son état psychique ne cesse de s’aggraver les années suivantes : hallucinations auditives,
apragmatisme, anorexie et tristesse. Elle ne parvient plus à trouver ou à conserver un emploi,
malgré de multiples tentatives… Une mesure d’expulsion est initiée. Elle sombre.
Un épisode illustre cette décompensation : un jour elle disparaît en laissant ses enfants au
bac à sable et ne réapparait que le lendemain.
Ses 2 enfants mineurs sont placés. Elle a peur de ne pas être capable de les reprendre.
Une Allocation Adulte Handicapé est instituée. A leur demande, ses 2 enfants reviennent
au domicile en 2005, et ce, malgré des relations de plus en plus conflictuelles, ponctuées de
fugues et de passages à l’actes fréquents de ces adolescents.
En mars 2007 au regard de l’état de son domicile est évoquée l’intervention du groupe
« Arc en Ciel ».
La prise en charge intensive se poursuit jusqu’en 2009, Arc en Ciel interviendra en juin de
cette année là, après des reports successifs.
1ère rencontre : Etat des lieux et devis
Nous rencontrons Me F à son domicile, invités et sollicités par son assistante sociale et
son curateur présents ce jour là. Me F transpire d’angoisse et a bien des difficultés à maintenir
son attention tant elle reste envahie par des préoccupations mélancoliques currentes : Le
financement de ces travaux et l’inutilité de ceux-ci du fait de son expulsion prochaine…
A notre arrivée nous découvrons un appartement dégradé, peu investi et peu entretenu.
C’est certainement le manque d’investissement de celui-ci qui reste le plus frappant. Ce lieu
de vie ou de survie semble être la projection dans le concret de l’éclatement et de la
souffrance familiale.
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