Editorial
Par le Général de corps d’armée Jean-Loup MOREAU,
Commandant la Force Logistique Terrestre
usqu’à la refondation de l’armée de terre à la fin des années 90, le soutien logistique
du corps blindé mécanisé était simple : celui-ci disposait d’une autonomie initiale
complète, dès le temps de paix, qu’il fallait, en cas d’engagement, recompléter après
quelques jours de combat. Le problème majeur était l’organisation et la conduite du
soutien santé face à des taux de pertes élevés. Tout cela est heureusement resté virtuel.
Après le changement géostratégique qui conduisit à la professionnalisation de l’armée
de terre, une telle logistique, distribuée dès le temps de paix, n’était ni rationnelle au
plan économique, ni nécessaire au plan militaire. L’armée de terre opta alors pour une
solution originale et novatrice qui combine la règle de l’unicité des ressources et
le regroupement des unités de soutien sous un commandement unique chargé de la
préparation opérationnelle, le commandement de la force logistique terrestre. Depuis,
deux réservoirs logistiques existent : l’un de ressources, l’autre de forces, dont le
dimensionnement, la modularité et la disponibilité autorisent les configurations les plus
diverses, imposées par les opérations à soutenir.
Une double séparation en découle: entre les unités de soutien et les unités de combat
d’une part, entre les unités de soutien et les ressources d’autre part. Une implication
plus forte des logisticiens dans les travaux préparatoires à l’engagement des forces
devient nécessaire pour réunir en ensembles opérationnels cohérents des moyens
qui reposent dorénavant dans des réservoirs distincts. L’intérêt du métier se trouve
du coup valorisé. La création d’une filière professionnelle et un cursus de formation
associé le confirment.
Le succès de la formule est tel et la contrainte économique si pesante qu’une nouvelle
phase de concentration des ressources dans des réservoirs spécialisés sous la
responsabilité d’opérateurs interarmées a démarré. Le financement des opérations,
l’infrastructure de défense, les transports opérationnels, la maîtrise d’ouvrage de la
maintenance s’organisent selon un mode centralisé, le plus souvent sous la responsa-
bilité de l’état-major des armées, reprenant le modèle éprouvé des directions centrales
du service de santé des armées et du service des essences des armées. La conduite
centralisée des opérations d’externalisation est un autre exemple de cette tendance de
regrouper sous la responsabilité de l’état-major des armées la maîtrise d’ouvrage,
voire davantage, du soutien logistique opérationnel.
J
Vers une véritable ingénierie
logistique militaire
Cahiers du CESAT n° 8
Juin 2007
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