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L’aile la plus décidée est le Parti communiste. Totalement acquis au modèle
soviétique, il sait diriger et fidéliser de nombreux militants très actifs, tous
convaincus qu’ils réaliseront le "Grand Soir" de la Révolution, suivi de la "dictature
du prolétariat" qui instaurera la "justice sociale". Et tant pis pour la démocratie,
valeur bourgeoise, donc nocive.
La 2ème force du changement est le parti socialiste. Il partage le même niveau
de culture du "progrès social", et conserve par exemple son appellation : Section
Française de l’Internationale Ouvrière : S.F.I.O.. Mais il est beaucoup plus
modéré. Réformiste, il ne veut pas d’une révolution qui détruirait la démocratie. Il
veut des lois sociales importantes, qui changeraient fondamentalement les
conditions des pauvres.
La Gauche comprend aussi le Parti Radical qui est encore plus modéré. Lui aussi
compatit au sort des humbles, mais son combat fondamental est, depuis 3/4 de
siècle, la défense de la liberté individuelle. Il est donc très attaché à la démocratie
libérale et, pour cette raison, très éloigné du Parti communiste.
Donc le socialisme sépare Communistes et Socialistes des Radicaux. La
démocratie sépare Socialistes et Radicaux des Communistes. Et pourtant, depuis
deux ans, ces trois partis se sont rapprochés, jusqu’à s’allier pour les élections
législatives de mai 1936 (le candidat le mieux placé au 1er tour bénéficie, pour le
2ème tour du désistement de ses deux alliés).
Il a fallu deux raisons très fortes pour que l’union des trois partis se réalise. La
première est la grande crise économique des années 30, intense et longue. En
1936, il y a plus d’un million de chômeurs, dont la moitié en chômage total. Le
mal social angoisse tout le monde, et permet à la Gauche de convaincre une
majorité d’électeurs de constituer le "Front Populaire" qui permettra d’arracher
un peu de leur richesse aux "gros, aux "nantis", aux "200 familles" qui exploitent
le peuple.
2. Le danger du fascisme
La deuxième raison de l’alliance de la Gauche est la peur du fascisme, dont
l’agressivité est alors intense.
Depuis plus de dix ans, Mussolini multiplie parades militaires et discours
belliqueux envers la France. Depuis trois ans, Hitler a pris le pouvoir en
Allemagne, et il se montre encore plus menaçant et puissant que son compère
italien. Les démocraties ont peur de cet ennemi violent et incontrôlable. Staline lui
aussi comprend le danger nazi et ordonne à tous les Communistes de chercher,
partout, à constituer des "fronts" anti-nazis. Le Parti communiste Français obéit,
et cherche toutes les possibilités d’union. L’expression "Front Populaire" pour
baptiser l’alliance des trois partis de la Gauche apparaît en décembre 1935. En
juin 1936, Mussolini achève la conquête de l’Ethiopie, commencée un an plus tôt,