Les nouvelles normes dans la prise en charge de la sécheresse

Les nouvelles normes dans la prise en charge
de la sécheresse oculaire
PARSARAH MACIVER, O.D., FAAO, MICHELLE STEENBAKKERS-WOOLLEY, O.D., FAAO
ET C. LISA PROKOPICH, O.D., M.SC.
Bien que les symptômes associés au groupe d’affections oculaires appelé « sécheresse oculaire » - ou syn-
drome de l’œil sec (SOS) – soient fréquents, ils sont toujours des plus difficiles à gérer. L’opinion qui pré-
vaut sur le SOS est que peu de moyens thérapeutiques ont un impact significatif sur le SOS et que sa prise
en charge globale en tant qu’affection chronique est inadéquate. Lidentification et le traitement des
patients atteints de SOS non seulement réduiront le nombre de patients dont la qualité de vie est altérée
en raison des symptômes débilitants associés à cette affection, mais permettront également aux
optométristes d’optimiser leur prise en charge thérapeutique. Dans le présent numéro dOptométrie
Conférences scientifiques, nous examinons les modifications récentes relatives à la classification, à l’éval-
uation et au diagnostic du SOS. Nous décrivons également les nouveaux instruments de prise en charge
du SOS qui permettent aux optométristes de traiter plus efficacement cette maladie chronique.
Pourquoi traiter le syndrome de l’œil sec (SOS)?
Les données démographiques seules indiquent que plus de 35 % de la population sont touchés par le
SOS1. Son importance pour les patients et son impact sur la qualité de vie (QDV) sont incontestables, tout
comme sa relation avec d’autres affections Systémiques chroniques (p. ex. le syndrome de Sjögren). Étant
donné que les optométristes disposent de toute une gamme d’options thérapeutiques (i.e. correction réfrac-
tive, agents topiques et oraux et traitement de l’occlusion lacrymale) pour prendre en charge tous les aspects
du SOS et font judicieusement appel à d’autres médecins, ils sont les mieux placés pour gérer cette affection.
Dans la plupart des provinces, les optométristes font face aux limites thérapeutiques de la loi pour certains
aspects de la prise en charge contemporaine du SOS. Cependant, cette difficulté peut être surmontée avec
une collaboration et une communication interprofessionnelles appropriées. Pour prendre en charge efficace-
ment les patients atteints du SOS, il est important de connaître l’éclairage nouveau apporté récemment sur la
physiopathologie de la maladie. Ces nouvelles données physiopathologiques ont eu un impact sur les caté-
gories cliniques du SOS et l’approche thérapeutique vise désormais le traitement de ses causes sous-jacentes.
L’unité fonctionnelle lacrymale (UFL) et la nouvelle définition du SOS
LUFL comprend les glandes lacrymales principales et accessoires, la surface oculaire (conjonctive,
cornée et orifices des glandes de Meibomius) et les interconnexions nerveuses qui transmettent des informa-
tions sensorielles provenant du nerf trijumeau et permettent la stimulation des glandes lacrymales princi-
pales et accessoires par les neurones crétomoteurs efférents2,3. La fonction de l’UFL est de guler les
principales composantes du film lacrymal pour préserver l’intégrité de la surface oculaire. Les cellules calici-
formes et les cellules épithéliales de la conjonctive contribuent à l’UFL, offrant une protection à la surface
oculaire grâce à leur capacité à sécréter de la mucine et à produire et à libérer des agents antibactériens et des
immunoglobulines. Les lésions à l’une ou l’autre des composantes de l’UFL peuvent altérer la voie réflexe et
déstabiliser le film lacrymal, entraînant une atteinte de la surface oculaire1,3.
En 1995, le National Eye Institute a établi une définition globale du SOS et a identifié les lésions de la sur-
face oculaire comme étant le principal élément contribuant aux symptômes d’inconfort qu’elles génèrent.
Cette compréhension a fait consensus pendant plus d’une décennie jusqu’à ce qu’il devienne évident que des
facteurs sous-jacents clés additionnels – l’hyperosmolarité et l’inflammation – contribuent aux signes et aux
symptômes du SOS et devaient être inclus dans la définition4.
Redéfinition de la sécheresse oculaire
En 2007, l’atelier sur la cheresse oculaire (Dry Eye Workshop DEWS) a redéfini le SOS comme étant une
« pathologie multifactorielle affectant le système lacrymal et la surface oculaire qui entraîne des symptômes
d’inconfort, des troubles visuels et une instabilité du film lacrymal avec risque de sion de la surface oculaire. Il
s’accompagne d’une osmolarité accrue du film lacrymal et d’une inflammation de la surface oculaire2». Cette
Volume 1, numéro 2 2013
Disponible sur Internet www.optometrieconferences.ca
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Neurophysiologie et imagerie
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de lUniversité de Montréal et de lÉcole dOptométrie et des Sciences de la Vision de lUniversité de Waterloo
École dOptométrie
définition excluait spécifiquement la distinction entre la sécheresse
oculaire aquo-déficiente (SOAD) et la cheresse oculaire par éva-
poration (SOE), bien que celles-ci figurent dans la classification
pathogénique du SOS2. Bien que la capacité d’identifier ces deux
composantes soit utile dans les décisions thérapeutiques, on con-
state dans la pratique clinique qu’elles sont fréquemment consid-
ées conjointement et il est donc difficile de distinguer la
contribution relative de chacune. De fait, l’une peut induire l’autre,
en raison de l’initiation de la cascade inflammatoire.
Le facteur : l’inflammation
La physiopathologie du SOS est complexe et multifactorielle.
Divers facteurs peuvent initier le cycle de la sécheresse oculaire en
ciblant l’un des composants de l’UFL. Un dysfonctionnement
lacrymal peut être dû au syndrome de Sjögren ou à d’autres affec-
tions systémiques touchant les glandes lacrymales (p. ex. la sarcoï-
dose), entraînant ainsi une SOAD. Il peut également être cau
par un dysfonctionnement des glandes de Meibomius (DGM), un
clignement inadéquat ou d’autres causes de SOE. Les caractéris-
tiques communes de toutes ces étiologies sont une instabilité du
film lacrymal et une hyperosmolarité2,5-7. Dans la SOAD, on note
une diminution progressive de la clairance lacrymale qui entraîne
une hyperosmolarité8,9. Dans la SOE, l’hyperosmolarité est causée
par une sécheresse et une exposition locale de la surface ocu-
laire2,5. Sur la base de récentes données, un marqueur inflamma-
toire intrinsèque – l’antigène des leucocytes humains (HLA)-DR
– a été identifiée autant chez les patients atteints du syndrome de
Sjögren que chez ceux n'en souffrant pas9-11.
Après l’activation de la cascade inflammatoire, l’apoptose des
cellules épithéliales de la surface oculaire, y compris les cellules
caliciformes, est initiée. La perte des cellules caliciformes et la
réduction associée de la mucine formant un gel, MUC5Ac, carac-
térisent toutes les formes de SOS5,7,13. Lapoptose des cellules
épithéliales de surface entrne une instabilité accrue du film
lacrymal, ce qui produit une augmentation de l’hyperosmolarité,
une progression de la cascade inflammatoire et une destruction
accrue de la surface oculaire1. Ce « mécanisme central » du SOS
est illustré à la Figure 1. Idéalement, la prise en charge du SOS
devrait être axée sur l’arrêt du cercle vicieux, permettant ainsi la
réduction de l’inflammation et la guérison de la surface oculaire5.
Qui présente un risque de SOS ?
De nombreux facteurs jouent un rôle dans le développement
du SOS. Les données démographiques indiquent que les femmes
ménopausées sont d'avantage atteintes de sécheresse oculaire que
les autres groupes2,12,13. Bien que l’avancement en âge et le sexe
féminin soient deux des facteurs de risque les plus significatifs de
velopper un SOS, la liste complète des facteurs prédisposants
est longue (Tableau 1)2,14-23.
Diagnostic du SOS lors d’un examen oculaire de routine
Idéalement, tous les patients devraient être évalués, afin de
déterminer s’ils présentent un risque de SOS lors de leur examen
oculaire annuel conformément au modèle de maladie chronique1.
Bien qu’il existe plusieurs examens pour faciliter le diagnostic,
aucun n’est considé comme suffisamment pcis et repro-
ductible pour constituer une norme indépendante ou de
référence. De plus, il n’existe pas de critères diagnostiques uni-
formes applicables à toute la gamme des maladies de l’œil sec13.
Cependant, les examens continuent d’avoir une valeur clinique
importante pour déterminer la présence et la rité du SOS
(Tableau 2). Cette séquence d’examens rallonge de façon minime
la durée totale de l’examen oculaire (Figure 2), mais peut fournir
des informations précieuses pour identifier les patients chez qui
une intervention thérapeutique est nécessaire.
Il existe de nombreux questionnaires de la sécheresse oculaire
pour aider à dépister les symptômes de cette affection. Ces ques-
tionnaires ont une valeur inestimable pour identifier, diagnosti-
quer et surveiller les symptômes des patients, et les optométristes
doivent choisir celui qui leur conviendra.
Lorsqu’on a identifié un SOS chez un patient, on devrait
inclure des examens diagnostiques dans l’examen oculaire de rou-
tine. En présence de symptômes, le diagnostic initial de sécheresse
oculaire est confirmé au moyen de la lampe à fente, avec une éva -
luation des marges palpébrales, de la qualité du film lacrymal, de
2
Figure 1 : Le mécanisme central du syndrome de l’œil
sec (SOS)
Instabilité du
film lacrymal
Inflammation
(inclut IL-1α,
IL-1β, FNT-α,
MPM-9)
Destruction
des cellules
caliciformes et
des cellules
épithéliales
de surface
Osmolarité
accrue
Apoptose
Adapté du rapport de l’atelier international sur la sécheresse oculaire de 2007 (DEWS)2
IL = interleukine; FNT = facteur de nécrose tumorale;
MPM = métalloprotéinases matricielles
Tableau 1 : Facteurs de risque de SOS
Conditions environnementales14
environnement faiblement humide incluant
climatisation, voyage en avion, vent fort ou autres
environnements artificiels
Port de lentilles de contact15-17
Disposition physiologique2,18-20
Faible taux de clignements, souvent associé à l’utilisation
prolongée d’un ordinateur, à la lecture et au fait de
regarder la télévision
Plus grande ouverture palpébrale
– Proptose
Maladies systémiques2,19-22
Toute maladie systémique qui entraîne un déséquilibre
hormonal, des maladies autoimmunes ou la destruction
des glandes lacrymales ou de Meibomius ; p. ex. la
sarcoïdose
Maladie de la thyroïde
Diabète mellitus
Maladies autoimmunes, p. ex polyarthrite rhumatoïde,
lupus érythémateux Systémique et fibromyalgie
Médicaments systémiques2
Antihistaminiques, bêta-bloquants systémiques, agents
antispasmodiques, diurétiques et antidépresseurs
Médicaments topiques16-19,23
Chlorure de benzalkonium
la hauteur du ménisque lacrymal et de la qualité de l’excrétion des
glandes de Meibomius à la lumière blanche13.
Lorsqu’on a identifié des signes et des symptômes de sécher-
esse oculaire, un nombre minimum d’examens diagnostiques doit
être ajouté au bilan oculaire de routine annuel. Le test du fil rouge
de phénol évaluant le volume lacrymal est rentable et ne prend
que 15 à 30 secondes pour chaque œil. C’est un moyen facile et
efficace d’identifier les patients atteints de SOAD, comme entité
isolée ou comme comorbidité avec un DGM28-30. Le tableau cli -
nique typique du DGM « le trait rose sur la paupière » (Figure 3)
consiste en des marges palpébrales hyperémiques et télangiec-
tasiques, une encoche apparaissant de façon précoce, un déplace-
ment postérieur de l’orifice des glandes de Meibomius et des
crétions glandulaires épaisses ayant une turbidité augmentée,
voire un aspect pâteux. Les étapes suivantes incluent l’évaluation
de linstabili du film lacrymal et des lésions de la surface
cornéenne et conjonctivale, au moyen du test de coloration à la
3
Tableau 2 : Examens cliniques utilisés couramment pour le diagnostic et la surveillance du SOS
Examen SOAD/SOE Valeur Clinique Valeurs « normales »
Questionnaire
sur les
symptômes
McMonnies,24 DEQ,25 OSDI,26
CDEQ27
SOAD/SOE La sévérité des symptômes évaluée
lors de la visite du patient peut être
comparée à la période initiale
pendant le traitement
Diffèrent pour chaque
test
Quantité de
larmes Le test du fil rouge de phénol28-30 SOAD L’index de sécrétion lacrymale 12 mm en 15
secondes
Test de Schirmer sans
anesthésie12,19
SOAD L’index de sécrétion lacrymale est
utile pour le diagnostic du syndrome
de Sjögren
5 mm en 5 minutes
Hauteur du ménisque lacrymal
(estimer la hauteur avec le rayon
de hauteur variable sur la lampe à
fente)14
SOAD Sécrétion aqueuse 0.25 mm, valeur
estimée cliniquement
comme étant normale,
excessive ou réduite
Lésions de
la surface
oculaire31,32
Colorant de fluorescéine sodique
(FS) (avec filtre barrière Wratten
n° 12), vert de Lissamine (VL),
rose Bengale (RB)
SOAD/SOE La FS colore/s’infiltre dans les espaces
intercellulaires
Le VL et le RB colorent les cellules qui
présentent des lésions membranaires
Évaluer selon la
densité/la localisation
Schéma : diffus avec
plaques coalescentes
(Figure 4)
DGM Evaluation de la marge palpébrale
(caractéristiques cliniques)33-35
SOE Déplacement postérieur des orifices
de la glande, entaille palpébrale,
atrophie de la GM, télangiectasie
Évaluer selon la
sévérité : légère,
modérée, sévère
Expression de la GM20,33,35 SOE Nombre de glandes exprimables,
qualité des sécrétions
Voir les Figures 5 et 6
Qualité du film
lacrymal
Biomicroscopie – lampe à fente
(incluant le reflet spéculaire)14
SOAD/SOE Rechercher des débris, une
saponification (Figure 3), sécrétions
huileuses
Évaluer selon les
observations
Osmolarité du
film lacrymal
Commercially available system SOAD/SOE « Norme de référence » proposée
pour le diagnostic
316 mOsm/L
Stabilité du film
lacrymal
Temps de rupture du film lacrymal
(instillation de fluorescéine)18
SOE Bonne sensibilité (83 %) et spécificité
(85 %) du test réalisable de façon
rapide et précise
< 10 secondes
SPAD = sécheresse oculaire aquo-déficiente; SOE = sécheresse oculaire par évaporation; DEQ = Dry Eye Questionnaire (Questionnaire de la sécheresse oculaire); OSDI = Ocular Surface Disease Index
(Index de la maladie de la surface oculaire); CDEQ = Canadian Dry Eye Questionnaire (Questionnaire « Évaluation canadienne de l’œil sec »); DGM = Dysfonctionnement de la glande de Meibomius
Figure 2 : Évaluation de la séquence et du temps d’une
évaluation initiale de lacheresse oculaire (4-5 minutes)
Figure 3 : DGM. Notez le « trait rose sur la paupière » des
marges palpébrales hyperémiques et télangiectasiques,
encoche pcoce, déplacement postérieur des orifices des
glandes de Meibomius, et expression glandulaire produisant
une substance épaisse ayant un aspect pâte dentifrice.
Questionnaire
Évaluation
des paupières
et de la
surface
oculaire à la
lampe à fente
(1,5 min)
Fil rouge de
phénol
(15 s par œil,
répété une
fois)
(1 min)
Temps de
rupture du
film lacrymal
(30 sec)
Expression
des glandes
de
Meibomius
(1-2 min)
fluorescéine et du filtre-barrière jaune (Wratten 12). Idéale-
ment, les lésions de la surface conjonctivale sont évaluées avec la
coloration au rose Bengale ou au vert de Lissamine. Cependant, la
coloration de la conjonctive peut être effectuée au moyen de la
fluorescéine seule et elle est un point de départ raisonnable13,31,32.
Le schéma de la coloration indique la sévérité et le type de SOS.
La coloration corenne est souvent centrale dans la SOAD,
inférieure le long de la marge palpébrale dans la SOE, et sa densité
devient coalescente à mesure que l’inflammation progresse13,32.
La mesure de l’osmolarité du film lacrymal a été identifiée
par le DEWS13 comme le test potentiellement le plus important
pour diagnostiquer le SOS. L’évaluation d’un paramètre qui est
directement impliqué dans le mécanisme de la sécheresse oculaire
a une valeur considérable.
Expression des GM. Selon le DEWS13 et l’atelier international
sur le DGM33, le DGM est la principale cause du SOS dans le
monde. Cette découverte a modifié le paradigme utili pour
diagnostiquer le SOS qui est fondé désormais sur l’évaluation de
la facilité et de la qualité de l’expression des sécrétions des glandes
de Meibomius chez tous les patients atteints de sécheresse ocu-
laire34-36. Toutes les glandes doivent être exprimées par une pres-
sion digitale pendant 10 à 15 secondes sur le bord palpébral
inférieur divisé en secteurs nasal, central et temporal. Une évalua-
tion de la qualité des sécrétions meibomiennes doit être effectuée.
Il semble que l’évaluation de l’expression des glandes dans les
secteurs nasal et central est plus utile sur le plan clinique, étant
donné que les dommages aux glandes dans le secteur nasal
causent un plus grand nombre de symptômes de DGM. La Figure
5 illustre l’expression des glandes chez un patient symptomatique
présentant un DGM non manifeste. La Figure 6 illustre la saponi-
fication du film lacrymal notée après l’expression des GM.
Pour faciliter l’expression manuelle des glandes, les patients
doivent utiliser des compresses chaudes (voir ci-dessous) ou un
expresseur des crétions des GM. Ce dernier instrument s’est
aré efficace pour exprimer les glandes chroniquement
touchées32.
Prise en charge : conventionnelle vs contemporaine
Lévaluation et la prise en charge du patient ayant ru un
diagnostic de SOS devraient débuter par une évaluation de la
sévérité (Tableau 3)13,14,37-39. Les objectifs du traitement devraient
être d’assurer l’amélioration des symptômes du patient et l’élimi-
4
Tableau 3 : Sévérité de la sécheresse oculaire : un guide de référence clinique
Degré de sévérité 1 2 3 4
Gêne, sévérité et
fréquence
Légère et/ou épisodique,
survenant lors d’un
stress environnemental
Modérée, épisodique
ou chronique ou
aucun stress
Sévère, fréquente ou
constante
Survient sans stress
Sévère et incapacitante
ou constante
Symptômes visuels Aucun ou épisodique,
légère fatigue
Gênants et/ou
épisodiques limitant
les activités
Gênants, chroniques
et/ou constants, limitant
les activités
Gênants, chroniques
et/ou constants, limitant
les activités
Injection conjonctivale Aucun à léger Aucune à légère +/– +/++
Coloration conjonctivale Aucune à légère Variable Modérée à marquée Marquée
Coloration cornéenne
(sévérité, localisation)
Aucune à légère Variable Centrale ou
périphérique marquée
(DGM)
Érosions ponctuées
sévères
Signes au niveau de la
cornée/du film lacrymal
Aucune à légère Légers débris, ménisque
lacrymal réduit
Kératite filamentaire,
agglutination du mucus,
débris lacrymaux accrus
Kératite filamentaire,
agglutination du mucus,
débris lacrymaux accrus,
ulcération
DGM Expression et qualité des
sécrétions modifées de
façon minimale
(meibum : trouble)
Expression et qualité des
sécrétions légèrement
modifiées (meibum :
trouble avec particules)
Expression et qualité des
sécrétions modérément
modifiées (meibum :
épaissi, ayant un aspect
pâte dentifrice)
Expression et qualité des
sécrétions sévèrement
modifiées
Peut inclure : trichiasis,
kératinisation,
symblépharon
Temps de rupture du film
lacrymal
Variable 10 secondes 5 secondes Immédiat
Score de Schirmer
(mm/5 min)
Variable 10 mm 5 mm 2 mm
Test du fil rouge de phénol Variable 15 mm 10 mm 5 mm
Adapté de Behrens A et al39, et International Workshop on Meibomian Gland Dysfunction33
Figure 4 : Kératite ponctuée superficielle qui coalesce chez
un patient atteint du syndrome de Sjögren. La coalescence
est un signe caractéristique indiquant qu’une inflammation
sévère est présente sur la surface oculaire.
nation des risque de perte de vision14,40. Les professionnels de la
santé oculaire doivent savoir que les diverses lignes directrices
sont des recommandations et que chaque patient présente des
signes, des symptômes et des circonstances uniques. Il n’y a pas de
recettes thérapeutiques toutes faites. Par conséquent, on devrait
s’efforcer de déterminer l’étiologie de la sécheresse oculaire et de
cibler les causes sous-jacentes de la maladie, de l’inflammation et
de l’hyperosmolarité lacrymale.
Prise en charge de premier recours
Le traitement de premier recours typique est l’administration
dagents lubrifiants des collyres et gels oculaires, souvent
appes à tort « larmes artificielles » - et l’hygnerale des
paupières pour améliorer la santé des paupières et des glandes de
Meibomius14. La lubrification et l’hygiène des paupières doivent
être considérées comme un traitement minimum de base pour
tous les patients présentant un SOS.
Hygiène des paupières
Lhygiène des paupières comprend lapplication de com-
presses chaudes, le massage et le nettoyage des paupières. L’appli-
cation d’une compresse chaude (40 °C) pendant 5 minutes a
augmenté l’épaisseur de la couche lipidique du film lacrymal dans
une proportion pouvant atteindre 80 %41. L’application de com-
presses combinée à un massage ferme des paupières peut être un
moyen efficace pour exprimer le meibum. Cependant, les com-
presses peuvent chauffer uniquement le versant antérieur des
glandes et peuvent ne pas atteindre le versant postérieur
pathologiquement atteint.
Agents lubrifiants
Les agents lubrifiants imitent habituellement la composition
naturelle des larmes, contenant des composants lipidiques, aque-
uses et muciniques10. Diverses préparations réduisent les symp-
tômes et offrent des avantages objectifs, tels que l’augmentation
de l’épaisseur de la couche lipidique et du volume des larmes42-47.
Cependant, ces agents éliminent rarement les symptômes14,40.
Selon le DEWS14, l’agent lubrifiant idéal contiendrait du potas-
sium, du bicarbonate et d’autres électrolytes. Il ne contiendrait
pas d’agents de conservation, aurait un pH neutre à légèrement
alcalin et comprendrait un système polymérique pour prolonger
le temps de tention. Latelier international sur le DGM35 a
indiqué que les agents lubrifiants ayant une viscosité plus élevée
sont associés à une meilleure prise en charge du DGM que les pré-
parations à plus faible viscosité, et que les compléments lipidiques
ont montré dans des études cliniques qu’ils améliorent les signes
et les symptômes du DGM, possiblement grâce à l’amélioration
de la stabilité du film lacrymal.
Compléments d’acides gras Ω-3
Les compléments d’acides gras Ω-3 doivent également être
prescrits au stade initial du SOS, en particulier en présence d’un
DGM, en raison de son impact sur la couche lipidique10. Les
acides gras Ω-3 et Ω-6 contrôlent l’inflammation dans le SOS48-50.
Lutilisation d’acides gras Ω-3 dans la cheresse oculaire et le
DGM est importante à trois égards. Elle permet le rétablissement
de la couche lipidique, diminue l’inflammation et l’apoptose et
augmente la sécrétion lacrymale48,51. Les acides gras Ω-3, incluant
l’acide eicosapentaénoïque (EPA), l’acide docosahexaénoïque et
l’acide α-linolénique, interviennent dans la production de fac-
teurs anti-inflammatoires, alors que les acides gras Ω-6
(i.e. l’acide γ-linolénique et l’acide arachidonique) produisent des
facteurs pro-inflammatoires51. Par conséquent, le maintien d’un
équilibre entre les deux acides gras est essentiel pour obtenir un
état inflammatoire global optimal. La supplémentation alimen-
taire en acides gras Ω-3 est recommandée, étant donné qu’ils font
souvent défaut dans l’alimentation, alors que la supplémentation
en acides gras Ω-6 est moins importante51.
Prise en charge de base
En outre de cibler les symptômes de sécheresse oculaire, l’op-
totriste devrait également utiliser des stragies de prise en
charge de base appropriées ciblant les causes sous-jacentes du
SOS. Les stragies spécifiques de prise en charge de base sont
énurées au Tableau 4. Latelier international sur le DGM a
identifié un groupe de patients distincts daps léchelle de
rité. Ce groupe de patients a été signé comme souffrant
d’un DGM en sus d’une affection co-existante, étant donné qu’ils
sont atteints de DGM associée à un autre type d’affection de la
surface oculaire, incluant la blépharite antérieure40. Ce groupe de
patients nécessite généralement la prescription dès le départ d’un
traitement plus agressif.
Il y a une décennie, les médicaments de la famille des
stéroïdes étaient prescrits avec une certaine appréhension dans les
cas de SOS, en particulier chez les patients dont la cornée était
atteinte. La notion que les stéroïdes topiques entraînent un retard
dans la guérison de la plaie épithéliale avec d’autres effets indésir-
ables associés prédominait sur les effets bénéfiques potentiels de
ces agents, ainsi que d’autres médicaments dans la catégorie des
5
Figure 6 : Saponification au niveau du film lacrymal qui est
généré en présence de sécrétions anormales des glandes de
Meibomius
Figure 5 : Expression des glandes de Meibomius chez un
patient symptomatique atteint de DGM non manifeste.
Notez les sécrétions épaisses de meibum ayant une turbidité
accrue (aspectteux).
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