Note D2DPE n° 28 Impact macroéconomique de l`action régionale

Note D2DPE n° 28
Impact macroéconomique de l’action
régionale en matière d’emploi en
Nord – Pas de Calais.
Novembre 2009
Les notes de la D2DPE n°28 novembre 2009
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Résumé
Cette note s’appuie sur les travaux réalisés par Sébastien Charles (Led – Paris 8), Laurent Cordonnier
(Clersé – Lille 1), Thomas Dallery (Clersé – Lille 1), et Jordan Melmiès (Clersé – Lille1) dans le cadre
du rapport d’étude « Impact macroéconomique de l’action régionale en matière d’emploi » réalisé
pour le conseil régional Nord Pas de Calais. Le rapport qui résume une somme importante de
travail permet de tirer plusieurs conclusions sur le fonctionnement de l’économie régionale.
Tout d’abord, la maquette de comptabilité régionale construite pour calculer le multiplicateur
Keynésien et présentée dans le premier chapitre de cette note nous apporte plusieurs enseignements
sur les spécificités de l’économie régionale.
Ainsi, le Nord – Pas de Calais a une économie très ouverte : les importations et les exportations
représentent chacune près de 68% de la production locale de richesse mesurée par le Produit
Intérieur Brut (PIB). Cette ouverture correspondant pour une large part à des échanges avec
l’étranger, l’économie régionale est en partie soumise à des évolutions de marchés mondiaux qui
dépassent le champ d’action du Conseil Régional. La région est en particulier soumise à des
évolutions de taux de change alors que l’institution régionale n’a aucun levier d’action sur le cours de
la monnaie.
L’économie régionale se caractérise également par un poids plus important de la consommation des
ménages (60,0% du PIB contre 55,4% du PIB à l’échelle nationale). A l’inverse, les dépenses
d’investissement sont moins nombreuses en région (16,5%) qu’à l’échelle nationale (20,6%). Dernière
composante de cette comptabilité régionale, la part des dépenses publiques dans le PIB est
comparable au poids national (23,5% contre 23,4%). La dépense publique globale calculée ici apparaît
toutefois inférieure à la moyenne nationale si on la rapporte au nombre d’habitants.
Ensuite, le deuxième chapitre résume le calcul du multiplicateur Keynésien à l’échelle régionale et
les enseignements que l’on peut en tirer. La valeur du multiplicateur permet de conclure que la
Région peut avoir un rôle macroéconomique. Ainsi, une dépense d’1 milliard d’euros financée par
l’emprunt permet de créer ou de maintenir près de 22 000 emplois l’année de la dépense. Une
dépense publique financée par l’emprunt apparaît efficace quelle que soit l’évolution de la productivité
apparente du travail ou la conjoncture économique. La Région a également un effet positif sur
l’emploi lorsqu’elle effectue une dépense par l’impôt.
Enfin, les travaux menés par le Clersé permettent de conclure à l’existence d’une autonomie
régionale dans la croissance et dans la création d’emplois. Le troisième chapitre résume ainsi les
résultats des différentes expérimentations menées par le Clersé pour appréhender l’autonomie
régionale. Ainsi la croissance régionale ne semble pas totalement s’expliquer par la croissance
nationale ou la croissance des principaux partenaires du Nord – Pas de Calais même si elle est en
grande partie liée à ces croissances, ce qui traduit l’imbrication de l’économie régionale dans une
économie mondialisée. L’évolution de l’emploi ne s’explique quant à elle que partiellement par
l’évolution de l’emploi national et par la structure d’activité régionale. Une part de cette évolution
reste spécifique à la région et correspond à un effet régional.
Cet effet régional est analysé de façon plus approfondie dans le quatrième chapitre. Si le Nord – Pas
de Calais était pénalisé par une structure de l’emploi défavorable en 1993, la région a en partie
comblé cette lacune par un dynamisme propre jusqu’en 2000. L’effet régional sur l’emploi a par
contre été négatif entre 2000 et 2007, limitant ainsi la création d’emplois dans le Nord – Pas de Calais.
En analysant cet effet régional par grand secteur d’activité, le Nord – Pas de Calais a eu un
dynamisme propre important dans l’industrie automobile et dans la plupart des activités de service.
L’effet régional a par contre été négatif dans l’ensemble de l’industrie, la construction, le commerce
et dans les secteurs « recherche et développement » et « activité associative ».
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Si le rapport apporte de nombreux enseignements, il soulève également des questionnements
présentés dans le cinquième chapitre de cette note. Les réponses à ces questionnements peuvent
passer par un approfondissement de l’observation ou encore par des choix en matière d’action
publique.
La première question porte sur l’opportunité d’avoir recours à une politique de dépense financée par
l’emprunt. En effet, si celle-ci permet à court terme de créer des emplois, elle implique une limitation
des potentiels financiers de développement les années suivantes liée aux remboursements de la
dette. Un recours à l’emprunt doit donc être justifié par un objectif précis comme limiter les
répercussions des chocs économiques pour les habitants de la Région (SRDE) ou encore réaliser des
investissements permettant d’accroître la compétitivité future du territoire.
La deuxième question porte sur la conciliation entre l’approche macroéconomique du développement
régional et les objectifs du développement durable. En effet, les résultats présentés ici s’appuient sur
la notion de richesse telle que définie dans le PIB. Les limites du PIB ont été de nombreuses fois
mises en évidence et on conduit la Région à se doter d’un dispositif de production d’indicateurs
alternatifs au PIB (projet « indicateurs 21 »). Pour aller plus loin, il semble nécessaire de rapprocher
la vision macroéconomique des objectifs du développement durable par une prise en compte du
développement social et de la soutenabilité d’un point de vue environnemental. Si la comptabilité
nationale permet déjà de répondre partiellement à la question sociale, l’absence de comptabilité
régionale pénalise les régions qui disposent pourtant d’une compétence économique. Il est également
important d’intégrer l’échelon régional dans les travaux engagés suite à la Commission Stiglitz qu’il
s’agisse de la prise en de compte la soutenabilité environnementale dans la valeur ajoutée, de la
mesure du bien-être dans toutes ses dimensions ou encore de la mesure des inégalités.
Enfin, la troisième question que peut susciter le rapport est la façon dont on peut tirer partie de
l’autonomie du Nord – Pas de Calais en matière de création d’emplois. Sur ce point, il semble tout
d’abord nécessaire de mieux cerner cette autonomie régionale en confrontant l’approche proposée ici
aux notions d’économie présentielle ou résidentielle développées par Laurent Davezies puis par
l’Insee. Ensuite, le manque de dynamisme propre du Nord – Pas de Calais doit également être
rapproché du manque d’attractivité résidentielle pénalisant la région dans son potentiel de
développement en particulier dans le domaine de l’économie résidentielle. Enfin, l’existence d’un
dynamisme régional propre y compris dans des secteurs non résidentiels montre qu’un territoire peut
avoir un dynamisme plus fort que les autres y compris dans des secteurs mondialisés. Cette
meilleure compétitivité peut ainsi passer par le « quatrième facteur » proposé par la mission
d’enquête sur les finalités de l’intervention publique dans le domaine de l’Économie.
Dossier suivi par Stéphane Humbert, Service « Observation Régionale et Analyse Spatiale », Direction
du Développement Durable, de la Prospective et de l’Évaluation.
Mail : s.humbert@nordpasdecalais.fr
Téléphone : 03 28 82 70 35
Consultable sur www.sigale.nordpasdecalais.fr
Sommaire
Introduction..............................................................................................................................................4
1 – Une première ébauche de comptabilité régionale............................................................................5
2 – Quel Impact de l’action publique sur l’emploi mesuré par le multiplicateur Keynésien ?..............9
3 – Existe-t-il une autonomie régionale du point de vue macroéconomique ?....................................12
4 - Quelles sont les spécificités du Nord – Pas de Calais en matière d’évolution de l’emploi ?.........16
5 – Principaux enseignements et questionnements soulevés. ............................................................19
6 – Références bibliographiques...........................................................................................................22
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Introduction
Le Conseil Régional a engagé en 2009 1,2 milliard d’euros de dépenses de fonctionnement et 0,7
milliard d’euros de dépenses d’investissement dans léconomie du Nord Pas de Calais pour la mise
en place de ses politiques. Au-delà de l’objectif premier des différentes politiques, ces dépenses d’un
agent public ont des conséquences sur l’emploi régional. Ainsi, une évaluation mené sur l’ANRU
permet d’estimer que ce programme induit la création ou la sauvegarde de plus de 6 000 emplois par
an sur la période 2005 – 2013. Une institution publique peut également peser sur l’économie régionale
et sur l’emploi par une politique d’emprunt telle que celle mise en place par la Région Nord – Pas de
Calais. Il était jusqu’à présent difficile d’estimer les effets des politiques économiques de la Région
sur l’emploi régional.
Pour répondre à cette question, un travail approfondi a été réalisé par Sébastien Charles (Led – Paris
8), Laurent Cordonnier (Clersé – Lille 1), Thomas Dallery (Clersé – Lille 1), et Jordan Melmiès (Clersé
– Lille1) dans le cadre du rapport d’étude « Impact macroéconomique de l’action régionale en matière
d’emploi » pour le compte de la D2DPE de la Région Nord – Pas de Calais. Cette note présente les
principaux résultats de ce rapport.
Si la question de l’impact de la dépense publique est légitime, elle n’est pertinente que sous
l’hypothèse de l’existence d’une part d’autonomie régionale. Or, la région est ouverte au monde et une
partie de la conjoncture régionale dépend d’un contexte international dépassant les capacités d’action
du Conseil Régional. Pour juger de la pertinence du calcul de l’impact macroéconomique des
dépenses de la région, il était donc nécessaire de mesurer l’autonomie régionale. Cette estimation de
l’autonomie régionale a en outre permis de mesurer les performances régionales dans la création
d’emploi comparativement aux autres régions.
La mesure de l’impact macroéconomique des dépenses publiques suppose également d’un point de
vue technique de disposer d’une base de comptabilité régionale. Une telle comptabilité n’étant pas
directement disponible sur le site de l’Insee, le Clersé a réalisé une première ébauche de l’équilibre
macro-économique de la région. Outre la mesure de l’impact macroéconomique, cette maquette
permet de mettre en évidence les spécificités de la structure de la comptabilité du Nord – Pas de
Calais.
Au final, le rapport réalisé par le Clersé nous permet d’aborder quatre grandes thématiques utiles
pour la problématique du développement du Nord – Pas de Calais.
La présentation de la maquette de comptabilité régionale permet en premier lieu de mettre en
évidence des spécificités régionales dans la structure du PIB ayant des impacts sur l’économie
régionale comme le poids de la consommation des ménages ou l’ouverture de la région vers
l’extérieur.
Ensuite, l’étude permet de répondre à la question centrale posée par le Conseil Régional : l’institution
dispose-t-elle, à travers sa politique fiscale et ses dépenses budgétaires, d’un impact significatif sur
les dynamiques macroéconomiques qui déterminent le niveau de l’emploi sur le territoire et quel est
le niveau de cet impact ?
En troisième lieu, l’étude propose différentes approches pour mesurer une autonomie de la région en
matière de création d’emplois ou de création de richesse.
Dans le dernier temps, l’étude permet de mesurer les performances de la région Nord – Pas de Calais
en termes d’emploi relativement aux performances des autres régions, une fois pris en compte le
poids de ses structures économiques.
L’ensemble de ces travaux ont permis de tirer des enseignements importants mais posent également
des questions qui mériteraient d’être approfondies. La dernière partie de la note reprend ces
éléments et ébauche des pistes de prolongement des travaux menés.
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1 – Une première ébauche de comptabilité régionale.
Le système statistique Français ne permet pas un suivi d’une comptabilité régionale au même titre
que le suivi de la comptabilité nationale. Seules les données d’évolution du Produit Intérieur Brut
(PIB) et les échanges entre la région et l’étranger sont facilement disponibles via les données
diffusées par l’Insee. Les autres données ne sont pas directement disponibles et ont nécessité un
important travail de reconstitution et d’estimation à partir d’autres données disponibles1.
Même si de nombreux travaux engagés par la Région Nord – Pas de Calais montrent que le PIB n’est
pas le seul indicateur à prendre en compte dans le développement durable du territoire2, la
connaissance de cette comptabilité est malgré tout essentielle pour toute approche du
développement d’un point de vue macroéconomique. Le tableau des ressources - emplois présenté ici
est ainsi essentiel pour la mesure de l’impact de l’action publique. Le calcul de l’impact
macroéconomique d’une dépense publique s’appuie en effet sur la structure de cette comptabilité.
Au-delà de cette étude, la connaissance de cette comptabilité permet par exemple de mesurer le
poids des administrations dans les dépenses et dans les investissements ou encore le poids des
exportations y compris vers les autres régions françaises.
L’équilibre ressources – emplois de la région Nord – Pas de Calais.
Les travaux réalisés par le Clersé dans le cadre de l’étude ont permis d’aboutir à une première
maquette de la comptabilité de la région Nord – Pas de Calais pour l’année 2006.
Tableau : Estimation de la comptabilité du Nord – Pas de Calais en 2006 et comparaison avec la
France.
France Nord-Pas de Calais
Mds  % du PIB Mds  % du PIB
PIB 1806.4 100.0 91.0 100.0
Importations internationales 506.6 28.0 37.8 41.5
Importations de France 24.0 26.4
Total des ressources 2313.0 128.0 152.8 167.9
Consommation des ménages 1001.9 55.4 54.6 60.0
Investissement dont APU 373.2 20.6 15.0 16.5
Dépenses des APU 422.3 23.4 21.4 23.5
Dépenses ISBLSM 24.2 1.4 n.d. n.d.
Variation des stocks 8.4 0.5 n.d. n.d.
Exportations internationales 483.0 26.7 37.8 41.5
Exportations vers la France 24.0 26.4
Total des emplois 2313.0 128.0 152.8 167.9
APU : Administrations Publiques ; ISBLM : Institution sans but lucratif au service des ménages.
n.d. : non disponibles.
Source : Insee– Estimations Clersé
1 Voir encadré méthodologique.
2 Voir note D2DPE N°27 – le projet « indicateurs 21 » en Nord – Pas de Calais.
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