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Pulsations l Octobre 2007 l Hôpitaux universitaires de Genève
et des laboratoires. Toute analyse doit s’accompagner d’un conseil génétique et ne
-tion des données et la réutilisation des échantillons sont strictement contrôlées.
génétique humaine
analyses cytogénétiques ou
moléculaires, ils doivent do-
rénavant obtenir obligatoi-
rement une autorisation
fédérale. «Cette dernière se
base sur des critères d’assu-
rance qualité comprenant
notamment la formation du
personnel et l’accréditation»,
relève le Dr Morris.
Réutilisation
des échantillons
Enfin, les échantillons ne
peuvent être réutilisés
qu’aux fins auxquelles la
personne concernée a
consenti. «Conserver l’ADN
d’un patient peut être très
utile. Par exemple, une per-
sonne souffrant d’une ma-
ladie neurologique peu clai-
re meurt. Cinq ans plus tard,
sa fille souhaite connaître la
cause exacte du décès pour
savoir s’il existe un risque de
transmission héréditaire.
Dans ce cas, seul l’échan-
tillon conservé permet de ré-
pondre à sa question.»
Paola Mori
Une analyse génétique ne peut être effectuée qu’avec un consentement libre et éclairé, ce qui implique
une information appropriée avant le test.
Le Dr Siv Fokstuen, généticienne, collabore étroitement avec l’unité
de médecine fœtale en partenariat avec une équipe pluridisciplinaire.
J. Gregorio
J. Gregorio
Nombre de maladies met-
tant des gènes en cause, la
médecine génétique est une
discipline transversale qui
possède son propre FMH
depuis 1999. «Des consulta-
tions sont déjà implantées
dans plusieurs services des
HUG. La création du centre
de médecine génétique va
renforcer la collaboration
avec les différentes spéciali-
tés médicales», se réjouit le
Pr Stylianos Antonarakis.
Zoom sur quelques parte-
nariats déjà mis en place.
Avis diagnostique en pédiatrie
Les généticiens collabo-
rent ainsi étroitement avec
le département de l’enfant
et de l’adolescent. Médecin
adjoint au département de
médecine génétique et de
laboratoire, le Dr Armand
Bottani y tient une consul-
tation et intervient sur de-
mande pour donner un avis
diagnostique sur des situa-
tions relevant potentielle-
ment de la génétique. « Il
s’agit souvent de patholo-
gies rares nécessitant une
approche pluridisciplinaire.
Trouver le bon diagnostic
permet d’offrir une prise en
charge optimale basée sur
les dernières connaissances
du moment, d’anticiper les
complications potentielles et
d’informer les parents sur les
risques de récurrence du pro-
blème pour un futur enfant.»
Conseil génétique
pour les couples
Autre collaboration avec
l’unité de médecine fœtale
cette fois. Une consultation
de conseil génétique est
proposée aux couples ayant
des antécédents personnels
ou familiaux de maladie
héréditaire et désireux de
connaître le risque de ré-
currence et les possibilités
de diagnostic prénatal, ou
encore lorsqu’un risque
pour une atteinte génétique
a été découvert de façon
fortuite lors du suivi de la
grossesse. « Ce bilan pluri-
disciplinaire est primordial,
car de lui dépend en grande
partie la décision de pour-
suivre ou d’interrompre la
grossesse », souligne le Dr
Siv Fokstuen, médecin ad-
jointe au département de
médecine génétique et de
laboratoire.
Un partenariat a égale-
ment été noué avec la mé-
decine de reproduction où
une consultation génétique
est souvent suggérée lors
d’un bilan d’infertilité. Ob-
jectif? Aborder les analyses
possibles, leur intérêt et
leurs limites. « Un facteur
génétique est à l’origine de
10% des cas d’infertilité
masculine», souligne Ariane
Giacobino, cheffe de clini-
que scientifique au dépar-
tement de médecine géné-
tique et de laboratoire. «On
recherche d’éventuelles
variations du nombre ou de
la structure des chromoso-
mes, des changements spé-
cifiques du chromosome Y
ainsi que dans le gène CFRT
(appelé aussi gène de la mu-
coviscidose).»
Chez la femme, une mau-
vaise réponse à la stimula-
tion ovarienne peut avoir
pour origine un facteur gé-
nétique, notamment un
changement dans le gène
FMR1 (aussi appelé gène X-
Fragile).
Enfin, des liens étroits ont
été mis en place avec la neu-
rologie, la cardiologie, l’on-
cologie (lire article en page
6) et la psychiatrie. «Les de-
mandes les plus fréquentes
concernent des renseigne-
ments sur les risques de
transmission pour les appa-
rentés sains et les possibili-
tés d’avoir recours à un test
prédictif », précise le Dr
Fokstuen.
P.M.
Avec la création du centre de médecine génétique, les liens avec les différentes
spécialités médicales vont être renforcés.
Des experts en diagnostic
ECHOS-SCOOPS
Le conseil génétique
Il s’agit d’un acte médical qui informe les gens sur
la cause d’une affection, sur le risque de la déve-
lopper ou de la transmettre, sur la disponibilité, la
fiabilité et les limites des tests génétiques, sur les
moyens de prévention et de dépistage, ainsi que sur
l’existence d’associations de patients.
Etant donné qu’un diagnostic a souvent des consé-
quences pour les personnes apparentées, la consul-
tation de conseil génétique est considérée comme
une médecine de famille.
Rappelons que génétique ne veut pas forcément
dire héréditaire.
Le 14 juin dernier, les
revues scientifiques Na-
ture et Genome Research
ont publié les résultats de
la phase pilote de ENCO-
DE, acronyme pour «En-
cyclopédie des éléments
de l’ADN», un vaste pro-
jet international visant
à identifier tous les élé-
ments qui jouent un rôle
dans le génome humain.
Parmi les 80 institutions
participantes dans onze
pays, deux laboratoires
sont suisses, l’un à l’Uni-
versité de Genève, l’autre
à celle de Lausanne. Le
point avec le Pr Stylianos
Antonarakis, chef du ser-
vice de médecine géné-
tique aux HUG.
Qu’est-ce que le géno-
me?
C’est l’information gé-
nétique qui est écrite dans
les chromosomes, eux-
mêmes essentiellement
constitués du fameux aci-
de désoxyribonucléique
(ADN), une structure
constituée de briques élé-
mentaires appelées bases
ou nucléotides et repré-
sentés par des lettres de
quatre types (A,T,G,C).
Entre 1990 et 2003, un
immense projet a consis-
té à séquencer la totalité
du génome humain. Bi-
lan : notre ruban de pa-
trimoine génétique est
composé de 3 milliards
de lettres et contiendrait
environ 25000 gènes. Sé-
quences codantes per-
mettant la production de
protéines, ces derniers
ne représentent que 2%
de l’ADN. Le reste est re-
groupé sous l’appellation
d’«ADN poubelle», terme
impropre qui comprend
un ADN dont le rôle est
inconnu. Il y a encore une
autre portion de l’ADN,
soit 3% du total, appelée
«conservée non-codante».
Quel est le but d’EN-
CODE?
Identifier toutes les ré-
gions fonctionnelles du
génome. Initiée en 2005
et financée notamment
par le NIH (National Ins-
titute of Health) améri-
cain, la phase pilote vient
de s’achever.
En travaillant sur 1% de
notre génome, on a trou-
vé que 5% de cette por-
tion avait survécu à l’évo-
lution et se retrouvait de
façon similaire chez tous
les mammifères. ENCO-
DE a permis d’attribuer
une fonction à la grande
majorité de ces parties
du génome conservées à
travers le temps. Mais
surprise: dans les régions
qui ont changé au cours
de l’évolution mamma-
lienne, nous avons aussi
découvert des éléments
ayant un impact fonc-
tionnel sur l’organisme.
Autre révélation?
Les territoires des gènes
étaient sous-évalués. Plus
de 70% d’entre eux pos-
sèdent des portions, ap-
pelées «exons », restées
inconnues jusque là. De
plus, il arrive qu’un exon
se trouve dans le territoi-
re d’un autre gène. L’en-
semble s’apparente à un
réseau de gènes enche-
vêtrés. Contrairement à
ce que l’on pensait, le gé-
nome contient très peu
de séquences inutilisées.
A terme, ces éléments se-
ront utiles pour savoir où
rechercher les mutations
responsables de certai-
nes pathologies ou de la
prédisposition à celles-ci
et de trouver des théra-
pies ciblées.
Propos recueillis par
P.M.
J. Gregorio
Nom de projet:
ENCODE
«ENCODE nous livre une vision
nouvelle du fonctionnement de
la machinerie génétique», expli-
que le Pr Antonarakis.