Forum Economie Sociale et Solidaire
Vendredi 22 octobre 2004
Première rencontre en vue de concertation sur l’économie sociale
solidaire en Haute-Normandie.
PROGRAMME
La Région à l’écoute des acteurs de l’économie sociale et solidaire
Par M. Claude TALEB, Vice-Psident chargé de l’Economie Sociale et Solidaire.
Présentation de l’économie sociale et solidaire
Par M. Laurent FRAISSE, économiste et chercheur au CRIDA.
Paroles d’acteurs en région : trois expériences
L’économie solidaire, levier de création d’activités en milieu rural.
Par M. Jacques FOLLET, Président des Défis Ruraux.
De nouvelles voies pour le développement touristique et local
Par M. Jean-François DUMONTIER, Directeur d’Ecaux-Solidaire.
Associés pour l’insertion par le maraîchage biologique
Par M. Philippe POULLARD, Directeur de Solidaires / Val-de-Reuil.
Débat avec la salle
Paroles d’acteurs en région : les outils
Les SCIC : de nouvelles coopératives pour l’économie sociale et solidaire.
Par Mme Véronique LANSARI, Animatrice du PREDESS Haute-Normandie.
Entreprendre contre l’exclusion : les entreprises d’insertion au cœur de léconomie.
Par M. Bruno SELLIER, Vice-Président de l’Union Régionale des Entreprises d’Insertion.
L’économie sociale : pour entreprendre autrement
Par M. Jean DECHEZ-LEPRETRE, Président de la Chambre Régionale de l’Economie
Sociale de Haute-Normandie, Conseiller économique et social.
Débat avec la salle
Synthèse des travaux
Par M. Laurent FRAISSE
Conclusion
Par Alain LE VERN, Président de la Région Haute-Normandie.
Intervention de M. Claude TALEB, Vice-Président chargé de l’Economie Sociale et Solidaire.
La Région à l’écoute des acteurs de l’économie sociale et solidaire
M. TALEB amorce son exposé en passant en revue les nombreuses définitions de l’économie
sociale et solidaire, et en exposant leurs limites :
a) L’économie sociale et solidaire regroupe l’ensemble des associations, mutuelles et
coopératives.
- Limite : cette définition ne définit que l’économie sociale.
b) L’économie sociale et solidaire ne s’apprécie pas selon les statuts des associations mais en
fonction des secteurs où elle intervient.
- Les limites de cette approche trouvent une illustration dans le plan Borloo, qui voudrait
cantonner l’économie sociale et solidaire aux seules activités d’insertion par l’économie.
c) L’économie sociale et solidaire se définit grâce à la notion de non-lucrativité et de non-
recherche du profit.
- Limite : certaines activités s’inscrivent dans une démarche d’économie solidaire tout en
générant des profits.
d) L’économie sociale et solidaire ne serait définie, ni par ses statuts, ni par ses secteurs
d’intervention, ni par l’absence de profit, mais par les projets pour la société qu’elle
illustre. L’économie solidaire regrouperait toutes les activités visant à démocratiser
l’économie.
M. TALEB souligne sa préférence pour cette définition bien que chacun des énoncés précédents
reflète une des facettes de l’économie solidaire. Il s’agit effectivement d’une économie aux
visages multiples, englobant l’ensemble des activités et des services aux personnes, ou au
territoire, qui contribue à récréer du lien social et à préserver l’environnement.
Les services de l’économie solidaire répondent souvent à des attentes très fortes des citoyens mais
l’offre n’est pas développée : elle est soit jugée hors compétences publiques, soit jugée non
solvable pour les secteurs privés concurrentiels conventionnels.
M. TALEB met cependant en garde sur les dérives possibles de l’économie solidaire. Cette
dernière ne doit pas être un auxiliaire de l’Etat social chargé d’intervenir là son administration
s’est révélée être incapable de soigner les maux de la société. L’autonomie des acteurs de
l’économie sociale et solidaire vis-à-vis des pouvoirs publics doit être préservée.
De même, il n’incombe pas à l’économie sociale et solidaire de jouer le rôle d’un laboratoire
chargé de faire émerger de nouveaux gisements d’activités et d’emplois qui, une fois solvabilisés,
seraient ensuite exploités par les entreprises du secteur. Un des enjeux de ce forum consiste à
donner aux acteurs de l’économie solidaire les moyens d’un développement pérenne, le challenge
à relever dans les années qui viennent.
Il précise également que l’économie solidaire ne doit pas être destinée à l’usage d’une élite
disposant des moyens d’acheter de nouveaux services ; elle doit concerner l’ensemble de la
population, et c’est dans cette perspective que s’inscrit l’action politique. Il convient de définir les
moyens d’accompagnement à développer pour garantir la pleine autonomie des acteurs de
l’économie sociale et solidaire, objet même de la concertation initiée aujourd’hui, dans un
contexte marqué par le désengagement de l’Etat.
Intervention de M. Laurent FRAISSE, économiste au CNRS CRIDA, le Centre de
Recherche et d’Information sur la Démocratie et l’Autonomie, spécialiste des questions
d’économie sociale et solidaire.
Présentation de l’économie sociale et solidaire
Si l’économie sociale et solidaire n’est pas une chose nouvelle en soi, son affichage dans les
politiques publiques est en revanche un phénomène plus récent. Cet affichage est apparu au milieu
du XIXème siècle, période qui voit notamment la constitution du mouvement ouvrier et la phase
d’industrialisation, et qui mêle expériences syndicales et initiatives économiques telles que les
coopératives ouvrières de production ou les sociétés de secours mutuel. Ces dernières tâchent de
répondre à la question sociale de l’époque : le paupérisme.
L’ensemble de ces initiatives constitue une forme de projet politique qui participe à la fois de la
conquête de droits politiques - la Révolution de 1848 pose la question du droit de vote tout en
esquissant les contours des droits sociaux économiques et, in fine, la question du risque de divorce
entre l’économie d’un côté et la démocratie de l’autre.
Ce n’est qu’au cours des trente dernières années que l’économie sociale et solidaire s’est à
nouveau affirmée en tant qu’entité dans l’espace public, à travers un double processus : au niveau
national, celui de la réunification des familles de l’économie sociale autour d’un certain nombre
de principes d’organisation, qui ont notamment permis un appui institutionnel avec la création au
début des années 80 de l’ADIES, et dans le même temps, la multiplication d’initiatives locales.
Aujourd’hui, l’économie sociale et solidaire couvre un large spectre d’activités et d’initiatives
allant des finances solidaires au commerce équitable, des services de proximité aux initiatives des
femmes dans les quartiers, des recycleries aux magasins biologiques, des systèmes d’échanges
locaux et même, des logiciels libres comme initiatives de coopération et de « don contre don » en
matière de nouvelles technologies de l’information.
La création du secrétariat d’Etat à l’Economie solidaire dans le précédent gouvernement (ndlr : le
gouvernement Jospin) a notamment contribué à donner une certaine visibilité à ces initiatives.
Depuis quelques années, l’affirmation de politiques territoriales d’économie solidaire,
revendiquant cette étiquette et non sous couvert d’autres politiques, marque un nouveau tournant
pour ce secteur. Toutefois, ces politiques nouvelles doivent s’inscrire dans le paysage et répondre
à un certain nombre d’enjeux.
1er enjeu : celui de la définition.
Faisant chorus avec M. TALEB, M. FRAISSE confirme qu’une approche par les statuts ne suffit
pas pour définir un projet territorial d’économie solidaire, et doit être articulée avec une approche
par l’utilité sociale. Selon lui, une des manières de surmonter la question de la définition est de faire
participer les acteurs pour définir en commun un projet de développement. L’identité collective, au-
de des différences et des définitions des uns et des autres, s’agrégera autour ce projet commun.
2ème enjeu : reconnaissance des acteurs et d’appui à la mise en réseau.
L’une des difficultés rencontrées par les élus est celle de l’identification de leurs potentiels
interlocuteurs, face à leur multiplicité. Un équilibre est à trouver entre le fait de s’appuyer sur les
acteurs collectifs et les regroupements existants, comme les CRESS, et sur les acteurs isolés ne se
participant pas aux réseaux sectoriels ou régionaux, qu’il convient alors d’aider afin qu’ils
rejoignent un réseau.
3ème enjeu : définition du champ de compétences d’une politique d’économie sociale et
solidaire et de son articulation par rapport aux politiques existantes.
Il est nécessaire de se livrer à un exercice de prise en compte et de dissociation par rapport à des
politiques structurantes dans les années 90 qui, pour certaines d’entre elles, ont montré des
limites : politiques d’insertion par l’activité économique, politiques d’appui à la création
d’entreprises et d’activités, politiques d’emplois aidés en milieu associatif, politiques de services
de proximité. Bien que des avancées se soient fait jour grâce à des dispositifs locaux et régionaux,
ces derniers ne se sont pas toujours révélés adaptés aux spécificités des initiatives de l’économie
sociale et solidaire, un travail de réflexion est donc à mener.
4ème enjeu : promotion et communication
La question de l’économie solidaire reste encore mal connue du grand public. Un travail de
communication doit être entrepris. Ce travail passe par le recensement quantitatif du secteur qui
établirait, en termes d’emplois et de nombre d’entreprises et d’activités, l’importance de
l’économie sociale et solidaire. Il passe également par la création de répertoires, de sites Internet,
d’initiatives, le financement des réseaux des structures d’appui existants. Les actions de
sensibilisation au travers de forums et de semaines de l’économie sociale et solidaire constituent
également des pistes à explorer.
5ème enjeu : articulation et coopération avec d’autres collectivités territoriales.
Plus les objectifs d’une politique d’économie sociale et solidaire seront partagés par des
communautés de communes, notamment à travers les Contrats de pays, plus l’action aura de la
force sur le territoire. Pour ce faire, il faut miser sur la circulation de l’information entre les
Régions et s’inspirer des expériences réussies conduites sur d’autres territoires.
6ème enjeu : régulation de l’économie plurielle
Avoir une politique d’économie solidaire propre implique à la fois de disposer d’une ligne
budgétaire propre et d’un service technique dédié, tout en se ménageant la possibilité de viser les
lignes de droit commun. Le mot d’ordre est d’éviter les cloisonnements dont l’économie solidaire et
sociale souffre par trop, et penser les choses de manière transversale.
7ème enjeu : participation et évaluation
Enjeu difficile dans la mesure l’enjeu de l’action publique en économie sociale et solidaire est
d’avoir une action en conformité avec les valeurs affichées et défendues de démocratie, de
participation, de solidarité, ce qui suppose de mettre en place un processus de concertation continue
et d’évaluation avec l’ensemble des acteurs. Or les politiques publiques participatives se heurtent
souvent à des difficultés.
Ier acte - Paroles d’acteurs en région : trois expériences
Celles-ci montrent la diversité de l’économie sociale et solidaire et sa contribution dans le
développement régional, ainsi que les difficultés auxquelles peuvent se heurter au quotidien ses
acteurs.
Témoignage de M. Jacques FOLLET, agriculteur de Seine-maritime et Président de
l’association rurale « les Défis Ruraux ».
L’économie solidaire, levier de création d’activités en milieu rural
Les Défis Ruraux visent à développer des actions en faveur du développement durable sous toutes
ses formes économiques, environnementales et sociales.
Actions économiques
Mise en place de filières courtes, c’est-à-dire de produits issus de l’agriculture régionale et
consommés sur ce territoire :
Pain normand : 130 boulangers réalisent du pain normand préparé à base de blé « local ».
Elaboration du label Porc des Chaumières, label de porc élevé sur paille.
Les Poulets de Gournet : actions de sauvegarde d’une race ancienne et menae.
Actions environnementales
Actions pour le maintien des surfaces en herbe en Haute-Normandie au sein de groupes
technico-économiques. Rôle de conseil et d’assistance pour inciter les agriculteurs à
utiliser l’herbe dans l’alimentation des animaux ;
Actions de promotion de l’énergie Bois déchiqueté. Par exemple, récupérer le bois de la
taille les haies permettrait de faire chauffer les chaudières collectives des communes.
Actions sociales
35 % des installations en milieu agricole ne bénéficiaient pas de la DJA, aide de
15 000 euros réservée aux agriculteurs de moins de 40 ans, cultivant des surfaces minimums
d’installation et obtenant des résultats économiques. Les Défis Ruraux ont donc œuvré à
mettre en place une aide en direction du public de la micro-entreprise d’agriculture. De
concert avec le Conseil régional, une aide baptisée « le coup de pouce » a vu le jour qui
permet de maintenir une dynamique en milieu rural et de développer des produits de qualité.
Les défis Ruraux mettent également à disposition des animateurs aidant les demandeurs à
formaliser leur projet, jusqu’à l’installation. Ce travail débouche annuellement sur
20 prises de contact donnant elles-mêmes lieu à 10 installations environ.
Les difficultés rencontrées pour un porteur de projet :
Problème du foncier : où s’installer pour quelqu’un cherchant une petite surface à cultiver ?
Problème financier : les porteurs de projets ont d’ordinaire de faibles moyens et les
banques accordent difficilement leur confiance à des projets atypiques.
Problème du manque de références techniques dans l’élaboration du projet qui
permettraient, entre autres, de rassurer les bailleurs de fonds.
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