Les bilans d’érosion sur des bassins fluviaux sélectionnés pour leur importance globale
ou leur caractéristiques particulières ont permis de mieux comprendre l'importance des
divers paramètres de contrôle de l'érosion (écoulement, température, tectonique,
lithologie…). Ainsi, la connaissance des relations entre flux d'altération des silicates,
température, relief et érosion physiques a significativement progressé, et nous
commençons désormais a posséder des lois quantitatives gouvernant les flux d'altération
chimique ou de consommation de CO2 par l'altération des roches. Ces lois permettent de
mieux comprendre les grands rétrocontrôles dont la surface de la Terre est le siège, en
particulier le lien entre climat et érosion. L'incorporation de ces lois dans les premiers
modèles couplant l'évolution séculaire de l'altération, de l'érosion, de la quantité de CO2
atmosphérique et du climat a permis de montrer l'extrême importance de l'altération sur
l'évolution du climat de la Terre. Par exemple, la connaissance de l'érosion des
formations basaltiques et son rôle en tant que puit du carbone atmosphérique est
maintenant bien quantifiée. La relation entre les flux d'altération et les flux d'érosion
physique, observée à différentes échelles et sur la plupart des grands bassins versants,
montre un véritable couplage entre processus physiques et chimiques encore largement
inexpliqué. Les bilans chimiques et isotopiques effectués en outre dans les bassins
versants permettent d'apporter des contraintes sur les modalités et les flux du transport
physique, comme par exemple, le transport des charges de fond de rivière. Enfin, sur les
bassins marqués par un fort transport sédimentaire, le flux de carbone organique
particulaire apparaît comparable à celui de l'alcalinité dissoute dérivée des roches
silicatées, soulignant ainsi un autre processus lié à l'érosion et agissant sur le cycle du
carbone.
Les bilans sédimentaires réalisés notamment dans les bassins sédimentaires dans et
autour de l’ensemble Himalaya–Tibet ont permis de reconstruire la dynamique de
l’érosion et de poser concrètement la question des influences respectives du climat et de
la tectonique. Sur l’ensemble Himalaya–Tibet, ces bilans montrent une diachronie
important entre la collision et l'initiation de la sédimentation. L’étude sédimentologique
et géochimique des archives sédimentaires, interprétées à la lumière de la connaissance
des systèmes actuels, a permis de reconstituer les principaux mécanismes d'érosion, les
sources et les conditions environnementales de l’altération.
La modélisation numérique et expérimentale, y inclus analogique, des processus
d’érosion et de transfert sédimentaire a bénéficié d’un programme important
d’investissement de l’INSU, notamment via le soutien à l’acquisition de moyens mi-
lourds. Au moins 3 équipes françaises (Rennes, Paris, Grenoble) ont développé des
laboratoires expérimentaux plutôt dédiés à une modélisation analogique des processus
érosifs et de transport sédimentaire. Plusieurs codes de calcul ont aussi été développés
(EROS à Rennes, CASCADE à Grenoble) qui complètent parfaitement le travail
expérimental et de terrain mené par les chercheurs. Bien que jeune et peu nombreuse,
cette communauté commence à avoir une place reconnue internationalement
La quantification des vitesses locales d’érosion – pour elles-mêmes ou comme proxy de
surrection tectonique – a été réalisée par plusieurs équipes en France (Paris, Orsay,
Grenoble, Marseille, Nancy) avec des méthodes différentes et complémentaires. La
principale méthode, qui consiste à utiliser des objets géomorphologiques continus
(terrasses fluviales et marine, cônes alluviaux …) comme des marqueurs passifs de la
déformation, a bénéficié depuis une quinzaine d’années de deux avancées techniques
majeures : à la fois de nouvelles méthodes de datations (14C en AMS, isotopes
cosmogéniques, OSL) des objets géomorphologiques, et des outils performants de mesure
de la déformation enregistrée par ces objets (MNT, théodolite et distance-mètre laser,
GPS cinématique). Alternativement, et bien que d’utilisation plus délicate, les marqueurs
dynamiques de la déformation (profils de diffusion au travers de bord de terrasses,
profils de rivière au travers d’une structure active ou d’une chaîne de montagne) offrent
un potentiel important notamment pour caractériser des vitesses de soulèvement relatives