KEUROGHLIAN Virginie Titre de l'ouvrage: Les grands auteurs de l'économie Auteurs: Gilles Jacoud, Éric Tournier Année d'édition: 1998 Chapitres: David Ricardo, Milton Friedman David Ricardo (1772 - 1823) I. L'homme dans son temps De la finance à léconomie politique Une entrée progressive dans l'économie politique Le succès de l'économiste II. La valeur La théorie de la valeur travail Le problème posé par l'incorporation du capital III. La répartition La rente Le salaire Le profit IV. Le commerce extérieur L'enjeu de l'échange international La théorie des avantages comparatifs V. Impôt, monnaie et influence des machines L'impôt La monnaie L'influence des machines VI. Postérité et influence La mise en oeuvre des propositions de Ricardo L'influence du théoricien de l'économie politique Milton Friedman (1912 - -) I. L'homme dans son temps Une brillante carrière universitaire Les influences méthodologiques Le contexte économique II. Le monétarisme Quelques leçons de l'histoire monétaire des Etats-Unis La demande de monnaie La théorie quantitative de la monnaie: la reformulation de Friedman L'inflation et la politique monétaire III. Le retour des libéraux La notion de revenu permanent La remise en cause du rôle de l'État Les systèmes monétaires internationaux IV. Les anticpations des agents et le taux de chômage naturel de l'économie Les causes du chômage durable La courbe de Phillips Le rejet de la courbe de Phillips Des anticipations adaptatives aux anticipations rationnelles VI. Postérité et influence DAVID RICARDO I. L'homme dans son temps De la finance à l'économie politique David Ricardo baigne dès son plus jeune âge dans le monde de la finance: son grand-père et son père sont stockbrokers (= agents de change), sa mère est issue d'une famille réputée dans le monde des affaires. Dès l’âge de 14 ans, son père commence à l’employer à la bourse de Londres où il lui confie rapidement d’importantes responsabilités. Cependant, son mariage avec une chrétienne marque une rupture avec sa famille d’origine juive. Ceci ne l’empêchera pourtant pas de devenir lui aussi un agent de change réputé et d’amasser une fortune supérieure à celle de son père, grâce à son sens des affaires. Ce n’est que tardivement qu’il découvre l’économie politique, lors d’un voyage à Bath en 1799 où il tombe par hasard sur La Richesse des Nations de Smith. Une entrée progressive dans l’économie politique Les importantes transactions que ses affaires l’amènent à réaliser avec la Banque d’Angleterre l’incitent à réfléchir que les questions monétaires. Dès 1809, Ricardo commence à publier des articles engagés et à acquérir une certaine notoriété. Ses prises de position (ex: débat autour du Billion Report, rapport sur « la cause du prix élevé des lingots d'or » ) vont lui permettre de rencontrer des intellectuels qui s’intéressent aux questions économiques, dont James Mill qui exercera une grande influence sur lui et qui lui permettra de rencontrer Jean-Baptiste Say en 1814. Le succès de l’économiste Dès 1813, les préoccupations de Ricardo ne se limitent plus au domaine monétaire et il commence à mettre ses réflexions par écrit. La capacité de Ricardo à analyser l'actualité et à proposer rapidement des solutions est souvent sollicitée (notamment par le Parlement). Dès 1815, Mill pousse Ricardo à rédiger une version plus développée de son Essai car il est convaincu qu'il peut contribuer au développement de l'économie politique. D'abord réticent, Ricardo finit par s'investir dans cette discipline. Son oeuvre maîtresse, Des principes de l'économie politique et de l'impôt, parait en avril 1817. II. La valeur (1er chapitres des Principes de l'économie politique et de l'impôt) La théorie de la valeur travail Les deux sources de la valeur d’échange d'une marchandise résident dans la rareté et dans la quantité de travail nécessaire pour l'obtenir. Ricardo ne retient que les marchandises reproductibles, il ne s'intéresse donc pas à la rareté (qui concerne peu de biens ex: objets d'art) mais seulement à la quantité de travail qui, elle, intervient dans tous les échanges. Ainsi, "la valeur d'une marchandise, c'est-à-dire la quantité de toute autre marchandise contre laquelle elle s'échange, dépend de la quantité relative de travail nécessaire pour sa production". Il ne faut pas confondre l'approche de Ricardo et celle de Smith: ce dernier mesure la valeur à partir de la valeur du travail « commandé » . Ainsi, si entre deux périodes la production d'un bien nécessite toujours la même quantité de travail alors que la rémunération du travailleur a doublé, la valeur du bien s'est accrue pour Smith, alors qu'elle reste stable pour Ricardo. Le problème posé par l'incorporation du capital Cependant, la production n'exige pas seulement du travail et il faut prendre en compte le capital (ex: la valeur du prix de la chasse dépend, en plus du temps passé à chasser, du temps nécessaire pour obtenir l'arme), ce qui remet en cause l'idée selon laquelle la valeur relative d'une marchandise dépend seulement de la quantité de travail nécessaire à sa production. Si la quantité de travail reste inchangée, la valeur relative de deux biens diffère en raison des quantités de capital fixe employées respectivement par chacun: selon Ricardo, la hausse de la valeur du travail -et par là même la baisse du taux de profit- entraîne donc une baisse de la valeur échangeable d'un bien. En d'autres termes, les marchandises exigeant beaucoup de capital fixe voient leur prix baisser par la hausse du prix du travail et par la baisse de la rémunération du capital (# Smith). III. La répartition La production est repartie en 3 classes: les propriétaires fonciers, les détenteurs du capital et les travailleurs. "Déterminer les lois qui règlent cette distribution est le principal problème de l'économie politique" selon Ricardo. La rente La rente est le revenu des propriétaires fonciers, elle ne doit pas être confondue avec le profit. La rente peut être qualifiée de différentielle dans la mesure où elle est déterminée par la différence entre la production obtenue sur chaque terre et la production obtenue sur la moins bonne terre pour la même quantité de travail et de capital. Autrement dit, la rente différentielle provient du rendement différent des terres. Si nous supposons donc différentes zones de rendements, les propriétaires de la zone la moins fertile ne recevront pas de rente différentielle. A l’inverse, les propriétaires des zones plus fertiles recevront une rente différentielle proportionnelle au rendement de leurs terres, les meilleures terres rapportant plus. Les salaires Le travail a un prix naturel et un prix de marché: le prix naturel du travail dépend du prix de la nourriture et des biens nécessaires à l’homme pour vivre (si leur prix augmente, le prix naturel du travail augmente également); le prix de marché dépend de l’offre et de la demande de travail. Le maintien du niveau de vie du salarié nécessite que le prix de marché du travail soit supérieur ou égal au prix naturel du travail. Le profit Le profit est le revenu du capitaliste et représente au niveau macro-économique ce qui reste une fois que salaires et rentes ont été payées. Il s’agit donc d’un «résidu » qui dépend essentiellement des salaires (une hausse des salaires entraîne une baisse du taux de profit, et inversement). IV. Le commerce extérieur L’enjeu de l’échange international La meilleure répartition du travail entre pays et leur spécialisation dans la production de certaines marchandises concourt au bien-être général (les consommateurs bénéficient de marchandises à moindre prix, les profits s’accroissent). Cependant, l’échange ne peut pas être fondé sur la théorie de Smith des avantages absolus car les pays n’ayant aucuns avantages absolus seraient à l’écart de l’échange. La théorie des avantages comparatifs Selon Ricardo, chaque pays a intérêt à se spécialiser dans la production pour laquelle il est le plus avantagé ou, s’il ne détient pas d’avantage absolu, le moins désavantagé. L’échange bénéficie à tous les pays et chaque pays participe à la rationalisation de la production à l’échelle internationale en échangeant une partie de sa production contre celle d’un autre pays. Dans l’exemple de l’Angleterre (travail de 100 hommes pour une unité de drap et de 120 hommes pour une unité de vin) et du Portugal (90 hommes pour une unité de drap et 80 hommes pour une unité de vin), le Portugal a un avantage comparatif dans la production de vin car le rapport des coûts, pour le vin, est plus important que pour le drap: 120/80 contre 100/90. V. Impôt, monnaie et influence des machines L’impôt Selon Ricardo, l’impôt est un sujet important auquel on porte peu d’attention. L’impôt peut porter sur le capital et il a pour effet, dans ce cas-là, de réduire la production future du pays, ce qui pose problème si en parallèle l’État et les ménages maintiennent leur demande. L’impôt peut aussi porter sur le revenu et il a pour effet de pénaliser la consommation et de freiner l’accumulation. L’impôt a donc des effets négatifs, « quelque soit sa forme, [il] n’offre qu’un choix entre plusieurs maux ». Le législateur doit donc veiller à ce que la charge soit équitablement répartie et entrave le moins possible la production, d’où la nécessité de bien connaître les effets de chaque impôt. La monnaie (cf. Billion Report) Ricardo est d'accord avec la théorie quantitative de la monnaie selon laquelle la source de la hausse des prix vient de la création monétaire. La solution à la hausse des prix serait alors la réduction de la quantité de monnaie en circulation. Il voit dans la convertibilité (or) un moyen de réguler l'émission de monnaie (# l'inconvertibilité entraîne une dépréciation de la monnaie-papier par rapport au lingot d'or). Il propose également de séparer les opérations d’émission de billets et de prêts. L’influence des machines Ricardo est d’abord convaincu que l’utilisation des machines dans la production bénéficie à chaque classe de la société (propriétaires fonciers, capitalistes et salariés): augmentation du volume de la production et des profits, baisse des prix (avec en parallèle un maintien des salaires). Cependant, il nuance ce propos en montrant que « la substitution des machines au travail humain nuit souvent aux intérêts de la classe des travailleurs ». Pour autant, il n’est pas opposé à la mécanisation -qui est inéluctable-, tant qu’elle va de pair avec le maintien de l’emploi des travailleurs. VI. Postérité et influence La mise en oeuvre des propositions de Ricardo C’est d’abord dans le domaine monétaire que Ricardo exerce une influence: loi du 24 mai 1819 qui organise le retour à la convertibilité, vote en 1844 de l’Act de Peel qui sépare la banque d’Angleterre en deux départements -le département de l’émission et le département bancaire-. Son influence est également nette dans l’ouverture des frontières: abaissement des droits de douane en 1841, abolition des corn laws en 1846 (qui montre que la baisse du prix du blé consécutive à l’ouverture des frontières peut être bénéfique à l’économie car stimulant la demande). L’influence du théoricien de l’économie politique Ricardo a d’abord inauguré une nouvelle méthode , la méthode hypothético-déductive, qui n’hésite pas à utiliser un cadre simplifié, des situations imaginaires (cf. théorie des avantages comparatifs avec l’Angleterre et le Portugal) pour résoudre des problèmes pratiques. De plus, il est sans cesse relu et sa théorie bénéficie de nouveaux élans, comme en témoigne le théorème HOS qui reprend la théorie des avantages comparatifs. MILTON FRIEDMAN I. L’homme dans son temps Une brillante carrière universitaire Grâce à ses très bons résultats scolaires, Milton Friedman -issu d'une famille pauvre d'immigrants juifs installée à Brooklyn- décroche une bourse à l'université de Chicago. En 1932, il termine ses études en obtenant un double-diplôme de mathématiques et d'économie, puis entreprend ses 1ers travaux de recherche. Il quitte le monde universitaire en 1935 pour intégrer les services du New Deal, chargé des statistiques sur la consommation; puis en 1937, il devient assistant de Simon Kuznets au National Bureau of Economic Research (NBER). Après la guerre, il devient professeur à l’université de Chicago, publie des articles sur l’influence de la monnaie et l’inflation, et apparaît comme le chef de file des libéraux, créant un courant de pensée que l’on nomme l’école de Chicago, contre l’économie keynésienne. Les influences méthodologiques Pour Friedman, l’économie doit être une science positive dont les résultats peuvent être confirmés (ou non infirmés) par les faits économiques réels: il y une volonté de confronter les modèles théoriques aux faits (cf. Karl Popper: « Le critère de la scientificité d’une théorie réside dans la possibilité de l’invalider, de la réfuter ou encore de la tester »). Les publications de Friedman reposent donc sur des observations empiriques. Le contexte économique Friedman est contemporain des « 30 Glorieuses », période de croissance exceptionnelle et de stabilité (peu de fluctuations cycliques) de l’économie. C’est l’âge d’or des politiques keynésiennes, marquées par l’intervention des États pour lutter contre l‘inflation et le chômage, que Friedman va critiquer. II. Le monétarisme Quelques leçons de l’histoire monétaire des États-unis En s’appuyant sur des données empiriques, il remarque qu’il existe une forte corrélation entre la quantité de monnaie en circulation dans l’économie américaine et le rythme de l’inflation (cf. théorie quantitative de la monnaie); ainsi, l’inflation est liée à la politique monétaire (ex: un bas niveau des taux d’intérêts alimente la création monétaire et le développement de l’inflation). Par ailleurs, les évolutions de la masse monétaire sont également corrélées avec le revenu nominal. La monnaie a donc des effets puissants sur les variables nominales de l’économie (une augmentation de masse monétaire entraîne une accélération des prix et des revenus) mais pas sur les variables réelles (demande, production, emploi). De plus, l’accélération de l’inflation représente un danger pour les échanges extérieurs dans la mesure où les prix intérieurs deviennent supérieurs aux prix mondiaux. Enfin, la masse monétaire a un caractère exogène, c’est-à-dire que les quantités de monnaie en circulation résultent non pas de la demande des agents mais des décisions des autorités monétaires -qui, si elles mènent des politiques inadaptées, sont responsables de la dégradation de la situation économique (cf. crise des années 30)-. La demande de monnaie Pour un agent économique, la monnaie (+ les actions, les obligations, les biens matériels, le capital humain) est un moyen de détenir de la richesse. Opérant des choix rationnels, la demande de monnaie d’un agent dépend donc du rendement comparé de la monnaie avec celui des autres actifs (actions, obligations, biens matériel et capital humain). La théorie quantitative de la monnaie: la reformulation de Friedman Une modification de la quantité de monnaie en circulation conduit les agents à modifier la structure de leur patrimoine entre les différentes catégories d'actifs: si la masse monétaire augmente trop, les agents économiques diminuent leur demande de monnaie en achetant à la place d'autres actifs (biens, obligations, actions) afin de conduire à la diminution de la masse monétaire et à la déflation , et inversement. A court terme, l'augmentation de la masse monétaire engendre une hausse de la production puisque les agents augmentent leur consommation (effet sur l'économie réelle); mais à long terme, elle n'affecte plus que l'inflation car les producteurs adoptent leurs prix à la nouvelle situation d'augmentation des dépenses des consommateurs (effet sur l'économie nominale). L'inflation et la politique monétaire La variation des taux d'inflation a des effets déséquilibrants et négatifs car elle conduit à une perte de pouvoir d'achat pour les agents ayant des revenus fixes (# indexation des revenus). Il est donc nécessaire de stabiliser le taux d'inflation de l'économie; pour cela, Friedman retient comme solution l'institution d'un dispositif réglementaire fixant l'évolution de la masse monétaire à l'intérieur d'une fourchette donnée. III. Le retour des libéraux La notion de revenu permanent Le revenu permanent est la moyenne pondérée des revenus futurs qu'un agent anticipe pour les périodes à venir. Selon Friedman, la consommation courante n'est pas déterminée par le revenu courant (thèse de Keynes) mais par le revenu permanent: lorsque les agents anticipent un avenir stable, ils éprouvent un moindre besoin de conserver une partie de leurs avoirs sous forme de monnaie et peuvent augmenter leur consommation, et inversement lorsqu'ils anticipent un futur instable. La remise en cause du rôle de l'État Pour que l'action de l'État ne soit ni déstabilisante ni inefficace, il doit créer l'environnement le plus stable possible pour les agents, en assurant une croissance régulière de la monnaie et une indexation généralisée des revenus. De plus, il doit faire respecter l'ordre et régner la loi, en exerçant un pouvoir "dispersé" (décentralisé) par un souci de préservation de la liberté. Il préconise aussi l'intervention de l'État dans la redistribution avec un impôt négatif pour les plus démunis. Les systèmes monétaires internationaux Il montre les avantages d'une monnaie unifiée (ex: étalon-or au niveau international car chaque monnaie nationale représente une quantité d'or): pas de déséquilibre de la balance de paiement (ex: le déficit, caractérisé par une sortie d'or, réduit la masse monétaire en circulation et l'inflation, ce qui améliore la compétitivité-prix des produits nationaux et résorbe le déficit initial). Un système de change flottants présente les mêmes avantages que la monnaie unifiée car toute tendance à l’excédent ou au déficit de la balance des paiements se traduit par une évolution du taux de change qui va corriger le déséquilibre (ex: un excédent entraîne une hausse de la demande pour la monnaie du pays et donc une amélioration de son taux de change qui rend les marchandises étrangères moins chères, d’où augmentation des importations et diminution des exportations, et donc disparition de l’excédent). De plus, le flottement des monnaies est le système le plus favorable aux échanges et permet une autorégulation sur le marché des changes. IV. Les anticipations des agents et le taux de chômage naturel de l'économie Les causes du chômage durable Outre le manque de flexibilité et l'existence de salaires minimums supérieurs au salaire d'équilibre (cf. analyse libérale), le principal facteur de persistance du chômage est l'accélération de l'inflation: la variation des prix entraîne une variation inverse du chômage. Si les prix augmentent, les producteurs l'interprètent comme une hausse de la demande qui nécessite une hausse de la production et donc des embauches, et inversement. Mais la contribution la plus importante sur le sujet est celle de Phillips. La courbe de Phillips Il fait apparaître une relation inverse entre le taux de chômage et le taux de variation des salaires nominaux: le taux de variation des salaires apparaît comme étant une fonction du taux de chômage. En 1959, Samuelson et Solow font une nouvelle lecture de cette courbe en la transformant en une relation entre l’inflation et le chômage: une augmentation de l‘inflation entraîne une baisse du chômage, et inversement. Se développe alors l’idée que la courbe de Philips peut être utilisée à des fins de politique économique pour choisir un certain niveau d’inflation au dépens du chômage, et inversement. Le rejet de la courbe de Phillips Friedman montre que l’analyse de Phillips n’est valable qu’à court terme et qu’à long terme, elle disparaît du fait des anticipations des agents. Les anticipations des agents sont adaptatives, c’est-à-dire qu’ils corrigent progressivement les erreurs d’anticipation qu’ils peuvent commettre: sur la longue période, lorsqu’ils se rendent compte que ce sont leurs salaires nominaux qui ont augmenté et non pas leurs salaires réels, ils corrigent à la hausse leur anticipation de l’inflation. Dès lors, leur offre de travail se réduit pour revenir à un niveau initial et ils revendiquent une augmentation de leur salaire réel. Le taux de chômage redevient ce qu’il était mais le taux d’inflation est devenu supérieur. La courbe de Phillips tend donc à être verticale sur le long terme: taux de chômage stable mais taux d’inflation qui augmente du fait des anticipations. Cette analyse du développement progressif du chômage et de l’inflation -la stagflation- permet à Friedman de mettre en évidence le concept du chômage naturel, taux de chômage minimal en dessous duquel une économie ne peut pas descendre -et qui peut s‘accompagner d‘une hausse de l‘inflation-. La courbe « verticale » de Phillips correspond à ce taux de chômage naturel. Des anticipations adaptatives aux anticipations rationnelles Selon Muth puis Lucas (prix Nobel en 1995), les agents n’utilisent pas seulement leurs erreurs passées -d’autant plus qu’ils ne peuvent pas se tromper indéfininement- (cf. anticipations adaptatives), mais aussi d’autres informations qu’ils ont à leur disposition pour former leurs anticipations. Ainsi, ils se trompent de moins en moins et leurs anticipations, à long terme, correspondent à la réalité: elles deviennent rationnelles. VI. Postérité et influence Friedman occupe une place majeure dans l’histoire de la pensée libérale car il est le représentant contemporain le plus important de ce courant de pensée. L’intérêt pour sa thèse s’est surtout manifesté dans la 2ème moitié du XXème siècle marqué par une tendance à la stagflation, accélération progressive de l’inflation et du chômage. A la fin des années 70, toutes les économies adoptent l’objectif prioritaire de la lutte contre l’inflation en menant des politiques de désinflation dues à l‘influence des idées de Friedman (ex: Royaume-Uni avec Thatcher). De même, son concept de chômage naturel reste couramment utilisé et son idée de l’impôt négatif peut sembler proche de la création d’un revenu minimum d’activité.