
services et déclenchant une crise économique globale qui, d’après certains analystes,
pourrait encore conduire à une répétition de celle de 1929. Nous nous référons aux
scandaleuses bulles spéculatives liées aux TIC, et plus concrètement à leur plus noble
partie, la seule à garantir une réciprocité émetteur/récepteur : la téléphonie de la famille
UMTS
en Europe, et l’Internet aux Etats-Unis, dont les usagers auront à supporter les
conséquences économiques sur de longues années encore.
Ces deux abcès du libéralisme économique en matière de télécommunications furent
d’une telle ampleur que, même en pleine redondance de biens et de services, leurs
victimes conserveront le droit de poser un certain nombre de questions aux bâtisseurs,
exploitants et régulateurs de réseaux, aux Cours des comptes, pouvoirs judiciaires et
fiscaux, et finalement aux autorités anti-monopole et de contrôle boursier (dont la
sévérité a souvent paru laxiste et biaisée). Nous allons retracer les faits saillants de la
grande spéculation frauduleuse, et poser quelques-unes des questions qui sont restées en
suspens.
Les économistes libéraux aiment répéter que le marché libre et autorégulé est
parfaitement vertueux, expression suprême des “ harmonies économiques ”, énoncées
au XIXe siècle, sauf… quand il fait “ tilt ” en raison d’une surchauffe ou qu’il manifeste
un syndrome de priapisme spéculatif. La crise prolongée liée aux TIC commença avant
2000. Elle éclata dans le compartiment high-tech de l’information-communication,
astucieusement promu “ nouvelle économie ” et “ e-business ” pour gonfler plus
rapidement la bulle spéculative. Cette crise n’est pas close et continue de déranger
l’ancienne économie, qui se portait raisonnablement bien. Elle éclata, rappelons-le, bien
avant le 11 septembre 2001. Rien de très nouveau, disent les historiens qui nous
évoquent les bulbes des tulipes du XVIIIe siècle en Hollande, la bulle des chemins de
fer de 1840-1846, celle de l’électrification universelle en 1920 ou la grande crise de
1929. A deux différences près : dans ces plus modestes époques, l’immense majorité de
l’humanité naissait et mourait sans savoir ce qu’était la Bourse (au moment du krach de
1929, seuls 1 % des Américains possédaient des actions, contre plus de 50 %
aujourd’hui) ; la fraude, jadis occasionnelle, a été cette fois-ci une composante
structurelle de la spéculation, au moins dans le cas américain.
En 1998-2000, l’auri sacra fames que théorisait Max Weber, l’exécrable faim
d’argent que suscitèrent les nouvelles technologies de l’information et de la
communication, dépassa toute commune mesure, et ne fut stoppée que par des pertes
colossales, les plus grandes de l’histoire de l’économie mondiale. La déception qui
s’ensuivit s’accompagna de maintes promesses non satisfaites : la télévision de haute
définition, la TVHD sur écran cinérama
, la banalisation et la quasi-gratuité de la
téléphonie pour tout le monde, Internet sur les mobiles (qui n’en est aujourd’hui qu’à
ses débuts), le commerce électronique en croissance exponentielle, une vraie
multimédialité, une véritable interactivité… Cette “ exécrable faim d’argent ” fut d’une
grandeur capable de produire, d’après Le Monde du 2 décembre 2002, “ une dérive des
règles, des pratiques, des hommes et des institutions qui assurent la crédibilité et le
fonctionnement du capitalisme américain. Le système érigé en modèle, adopté sur toute
la planète après l’effondrement du communisme, est corrompu. ”
Le XXIe siècle a commencé et le tableau est d’une toute autre couleur. La téléphonie
a crû, le mobile dépassant la communication câblée, mais – au moins dans le Tiers-
monde – ce ne fut presque que pour saturer les îlots de concentration des grands
consommateurs, laissant les bidonvilles et les zones rurales dans la même situation qu’il
. Universal Mobile Telecommunications System.
. Début 2005, on reporte à 2010 la fin de l’analogique, et on dénombre seulement 11 % de décodeurs
HD au Japon et en Corée du Sud, 6 % aux États-Unis/Canada et presque rien en Europe.